Comptes rendus

GAUTHIER, Chantal, Femmes sans frontières. L’histoire des Soeurs Missionnaires de l’Immaculée-Conception, 1902-2007 (Montréal, Carte blanche, 2008), 498 p.[Record]

  • Dominique Laperle

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  • Dominique Laperle
    Pensionnat du Saint-Nom-de-Marie, Université du Québec à Montréal

L’historiographie des communautés religieuses connaît une certaine effervescence depuis quelques années. On retrouve de belles réussites comme le livre de Lucia Ferretti sur les Dominicaines de la Trinité (2002), la trilogie de Guy Laperrière sur les congrégations françaises venues au Québec (1996, 1999, 2005) et l’excellent ouvrage collectif dirigé par Dominique Deslandres, John A. Dickinson et Ollivier Hubert sur les Sulpiciens (2007). Le nouvel opus qui s’ajoute aujourd’hui porte sur la congrégation des Soeurs Missionnaires de l’Immaculée-Conception (MIC), afin de « témoigner du vécu missionnaire de la communauté et faire partager l’héritage spirituel de la fondatrice, Délia Tétreault » (p. 11). L’auteure ne s’en cache pas, l’oeuvre est une commande et elle doit viser « une histoire consensuelle où les contenus factuels prendront les dessus sur l’analyse » (p. 12). Cette mise au point est d’autant nécessaire qu’elle évite ainsi une déception au lecteur universitaire, qui pouvait s’attendre à un renouvellement du regard historiographique, car ne l’oublions pas, il s’agit de la première communauté féminine québécoise fondée explicitement pour les missions. L’ouvrage, abondamment illustré (plus de 300 photos), suit une approche thématique et se divise en 9 chapitres, mais on pourrait aussi bien dire qu’il comprend en fait 2 grandes sections. La première, regroupant les cinq premiers chapitres, porte sur la naissance, le développement et les caractéristiques de la communauté et de ses membres. La deuxième section se divise en quatre parties et se concentre davantage sur les différentes oeuvres missionnaires. Le volume comprend aussi de nombreux encadrés explicatifs, des tableaux statistiques et des annexes portant sur les lieux de formation et d’action des MIC. À la lecture des trois premiers chapitres, il appert que la fondatrice a longuement hésité entre une école de formation apostolique en une communauté missionnaire. Si elle choisit finalement la dernière voie, elle doit tout de même faire face à différents problèmes dont celui du recrutement. Cette question est particulièrement intéressante. Au début du xxe siècle, la multiplication des communautés religieuses, la variété de leurs orientations spirituelles et de leurs champs d’apostolat provoquent une concurrence évidente. Les postulantes ont l’embarras du choix ! Avec leurs pensionnats, les communautés enseignantes ont même une longueur d’avance. Pour recruter, Délia et les MIC utilisent les retraites fermées mais surtout les nouveaux moyens de communication de masse (kiosques d’exposition, « lanterne magique », diapositives, films, la revue Le Précurseur, etc.), se rendent dans les écoles ainsi que les paroisses et font la promotion de leurs oeuvres. Il y a là, me semble-t-il, une investigation à pousser plus avant, particulièrement sur les moyens utilisés, le contenu iconographique et sur les formes proprement dites du message propagandiste, mais l’auteure n’en souffle mot. Les quatrième et cinquième chapitres consistent en une grande enquête prosopographique sur les MIC. Madame Gauthier y analyse, avec force tableaux et statistiques, le recrutement décennal canadien et étranger, le taux de persévérance et compare la situation des MIC avec d’autres instituts religieux. Les MIC semblent avoir remporté le pari d’attirer les filles intéressées aux missions étrangères vers leur communauté. De plus, la montée et le maintien du recrutement international assurent, depuis 1960, le renouvellement et la survie, à moyen terme du moins, de la congrégation. Ces deux chapitres brossent un portrait intéressant mais anecdotique des religieuses. Les chapitres qui suivent portent sur les oeuvres des MIC. Le sixième traite spécifiquement de l’éducation, le septième, de la santé et le huitième, des oeuvres sociales. Autant l’enseignement a souvent été le prisme privilégié afin de s’installer dans les pays de mission et diffuser le message chrétien auprès des enfants, autant la santé et les oeuvres sociales ont permis …