Abstracts
Résumé
L’histoire culturelle symbolique de nos relations à la nature se lit à travers les conceptions sociales de la forêt québécoise. Notamment, elle se saisit par la problématique de ce que représente ce milieu dans notre culture et en décelant les conséquences sociales de ces représentations. Même si la nature ne peut se penser sans la culture, le clivage épistémologique entre les deux reste profondément ancré dans notre imaginaire, entraînant enjeux et tensions entre les acteurs sociaux. Ici, l’étude des perceptions du guide de chasse à l’île d’Anticosti amène à explorer cette division et les conséquences sociales qui en découlent. Cette analyse se fonde sur un corpus de récits d’expériences vécues à Anticosti écrits par des Nord-Américains de différentes époques. Ce corpus est complété par des enquêtes ethnographiques auprès des habitants d’Anticosti et des guides de chasse et de pêche. Différentes figures thématiques permettent de cerner comment ils participent de ce clivage nature/culture. Les discours présentent le guide tour à tour comme un homme naturel, un nouveau sauvage, un personnage pittoresque, un chasseur de gibiers peu prestigieux, un subalterne et un médiateur permettant aux touristes de retrouver leur authenticité. Ces thèmes soulèvent aussi les conséquences de ces représentations quant au statut du guide de chasse, qui occupe toujours une place secondaire. Ils mettent également en lumière le fait que la vision romantique de la forêt ne questionne pas la construction sociale d’une dualité entre la nature et la culture. Les mouvements de conservation de la nature ne remettent donc pas suffisamment en question la place secondaire accordée aux pratiques et aux expériences des guides et des autres habitants du territoire ; encore trop peu d’importance reste accordée aux savoirs locaux et aux différentes relations avec le milieu.
Abstract
The symbolic cultural history of our relationship to nature can be understood through examining social conceptions of the Québec forest, particularly by studying what the forest represents in our culture and identifying the social consequences of these ideas. Even though nature cannot be considered in isolation from culture, the epistemological separation between the two is deeply anchored in our imaginations, which leads to issues and tensions among the main organized forces in society. Here, perceptions of the Anticosti Island hunting guide provide a means of exploring this division and the resulting social consequences. This analysis is based on stories written by North Americans from different eras about their experiences on Anticosti Island. The stories are followed by ethnographic surveys done with Island residents and hunting and fishing guides. A variety of thematic categories reveal how they participate in this separation of nature and culture. The hunting and fishing guide is portrayed in turn as a natural man, a « new savage », a picturesque character, a game hunter of little prestige, a subordinate, and as a mediator who helps tourists rediscover their authenticity. These themes show how these portrayals affect the status of the hunting guide, whose role is always secondary. They also demonstrate that the romantic vision of the forest does not call into question the social construction of the duality between nature and culture. As a result, nature conservation movements do not adequately question the secondary role given to the practices and experiences of the territory’s guides and the other inhabitants ; too little attention is paid to local knowledge and the different ways in which people relate to the environment.