Abstracts
Résumé
Le seigneur résidant, colonisateur et défricheur, a longtemps constitué une image d’Épinal de l’histoire de la Nouvelle-France. Si l’historiographie des dernières décennies a largement revisité la question seigneuriale, privilégiant l’étude des fiefs détenus par les ecclésiastiques au détriment des « familles seigneuriales », la présence des seigneurs sur leurs terres demeure une réalité méconnue. Première étape d’une étude portant sur la présence seigneuriale dans la vallée du Saint-Laurent, ce texte dresse l’état de cette présence, de l’implantation du système seigneurial, dans la décennie 1620, à son abolition, en 1854. Les « gentilshommes campagnards » constituent, dans la longue durée, une minorité parmi les seigneurs laurentiens, malgré une présence accrue au fil du temps et qui atteint son apogée (près de 40%) au milieu du xixe siècle. Au sein de ce sous-groupe seigneurial, largement composé de roturiers, parfois d’origine très modeste, plus rares encore sont les familles qui s’enracinent de manière durable et intergénérationnelle sur leur fief. Cette présence seigneuriale, pour être inhabituelle, ne représente pas moins un cadre d’interprétation permettant la compréhension de la diversité du monde rural et seigneurial laurentien.
Abstract
The seigneur who lived on, colonized and cleared the land constituted for a long time an « image d’Épinal » of the history of New France. While the historiography of the last decades has widely revisited the seigneurial regime and the seigneurs, privileging the study of religious seigneuries instead of « seigneurial families », the presence of the seigneurs on their lands remains an uncertain question. As the first part of a larger study regarding the seigneurial presence in the Saint-Lawrence Valley, this paper establishes the state of this presence from the beginning of the seigneurial system in the 1620s, until its abolition in 1854. The « gentilshommes campagnards » were, over the centuries, a minority among Laurentian seigneurs, even if their presence increased over the course of time, reaching its highest point (nearly 40%) in the middle of the 19th Century. Within this seigneurial subgroup, which was largely made up of commoners who were sometimes of very modest origin, rarer still were the families that established themselves in a lasting and multigenerational way on their fiefs. This seigneurial presence, although unusual, represents nonetheless an interpretive framework for understanding the diversity of seigneurial and rural Laurentian society.