Comptes rendus

GWYN, Julian, Ashore and Afloat. The British Navy and the Halifax Naval Yard Before 1820 (Ottawa, University of Toronto Press, 2004), 366 p.[Record]

  • Roch Legault

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  • Roch Legault
    Département d’histoire
    Collège militaire royal du Canada

Julian Gwyn est un historien d’expérience qui a déjà écrit beaucoup sur la flotte, ses chefs et les marins britanniques en rapport avec l’Amérique du Nord. C’est ainsi que Ashore and Afloat est un travail achevé, d’une facture quasi irréprochable, qui découle d’une longue entreprise intellectuelle. Les dernières recherches de Gwyn ont donné lieu à deux livres en fait. Le premier Frigates and Foremasts. The North American Squadron in Nova Scotia Waters (1745-1815) a été publié en 2003 par UBC Press. Le second, plus substantiel, est le livre que nous recensons. La première parution livrait les conclusions de l’étude de la flotte britannique de l’Atlantique ; la seconde, celles sur la base de la flotte située à Halifax, plus particulièrement son chantier naval. L’histoire des installations navales d’Halifax paraît marquée au coin de la fragilité et ponctuée par les malheurs et les bonheurs de la politique militaire britannique. Simple chantier de carénage, c’est-à-dire une station navale où la flotte britannique de l’Atlantique peut être réparée et approvisionnée, plutôt que chantier de construction de navires, ses origines remontent à 1757-1758 alors que la Royal Navy prépare l’assaut de l’Amérique française. Le chantier tombe en désuétude à la fin de la guerre de Sept Ans et de 1763 à 1768, il n’est plus guère qu’un entrepôt. L’instabilité politique des colonies américaines et la guerre de la révolution qui suit donnent à Halifax et à son chantier de carénage une seconde vie. La perte du port de New York oblige les Britanniques à trouver rapidement une solution de rechange. La situation ne favorise toutefois pas pleinement Halifax alors que l’Amirauté préfère investir davantage aux Bermudes, estimant la situation géographique de la petite ville de la Nouvelle-Écosse trop périphérique aux intérêts militaires vitaux de la métropole. La situation tendue entre la Grande-Bretagne et les États-Unis d’Amérique sauve de l’oubli une fois de plus le chantier. À partir de 1807, mais surtout durant la guerre de 1812, il croule sous la tâche. On rapporte ainsi au mois d’août 1809 la présence de pas moins de 28 navires de guerre à Halifax qui ont besoin de s’arrêter plusieurs jours, voire plusieurs semaines, bien que le chantier de carénage ne puisse accueillir que deux navires à la fois (p. 132). Il n’y a plus rien de prévu pour le chantier après la longue paix qui s’installe en 1815 et il périclite jusqu’à ce qu’en janvier 1820, les dix-neuf derniers ouvriers soient remerciés. Halifax, dont le chantier de carénage avait pu se targuer d’être le site industriel le plus important de l’Amérique du Nord britannique, avec tout près de trois cents ouvriers dans ses meilleures années, devient un simple entrepôt. Le livre divisé en trois parties décrit d’abord l’évolution des lieux physiques, les constructions et les réparations des bâtiments, à coup de savants détails. La pertinence de procéder ainsi d’entrée de jeu n’est pas sans risque de décourager plusieurs lecteurs. Toutefois, il vaut la peine de continuer à suivre Gwyn dans Ashore and Afloat car ses propos, au fil des pages, se rapprochent toujours plus d’une histoire totale. L’auteur présente dans la seconde partie les hommes du chantier et c’est à ce moment que le livre commence à « s’animer ». On dépeint les officiers de la marine et les employeurs surtout, mais également les ouvriers ainsi que les relations de travail dans ce milieu de vie très difficile où abondent l’ivrognerie, les abus et le trafic d’influence. Par ailleurs, cette partie nous apprend que les ordres permanents qui géraient les relations de travail sur le chantier étaient devenus tellement nombreux et compliqués qu’ils étaient ignorés tout simplement …