Ce beau volume, le 15e de la série des histoires régionales du Québec, patronnée par l’Institut québécois de recherche sur la culture, est l’aboutissement d’un projet de recherche qui a débuté en 1997. Cette synthèse est donc le fruit d’un long et patient travail de recension de la documentation consacrée aux Îles. Le principal mérite de cette équipe de recherche est d’avoir consulté et utilisé les documents parlementaires, les recensements décennaux, les registres de l’état civil, etc. Ainsi leur synthèse offre de « nouvelles interprétations de l’histoire économique et sociale de l’archipel » (p. 15). Un premier chapitre au titre évocateur, « Entre terre et mer », situe ces Îles dans le golfe Saint-Laurent. Quoique le plateau madeleinien traverse le « sud-ouest du golfe pour relier la Gaspésie à l’île du Cap-Breton » (p. 22), les descriptions et les cartes de ce chapitre montrent qu’il est illusoire de lier les Îles à la Gaspésie. En vertu de leur proximité avec la Grand’Terre, les Îles sont comme une sorte d’appendice des actuelles provinces maritimes du Canada ; une même genèse géologique les apparente. L’archipel madelinot, c’est un chapelet d’îles liées entre elles par des lagunes et des dunes. Le chapitre 2, intitulé « Premiers exploitants et peuplement pionnier », poursuit la description des voyages d’exploration menés tant par les Français que les Anglais. Au xviie siècle, les explorateurs, circulant dans les parages de cet « archipel surtout constitué d’îles ramifiées, c’est-à-dire réunies par des dunes de sable » (p. 65), les désignent sous le nom de « Ramea » ou Ramées. Cette expression d’Isles Ramées va perdurer jusque dans les années 1663-1664, alors qu’un marchand de Honfleur, François Doublet, vient s’installer à Havre-Aubert pour y faire l’exploitation des pêches. On lui doit l’extension du toponyme « Madeleine » (p. 72) à l’ensemble de l’archipel. Cette appellation est consacrée par la carte de Robert de Vaugondy qui, en 1755, le désigne sous le nom d’« Iles de la Madelaine [sic] » (p. 74). À cette époque, ce territoire était déjà annexé à Terre-Neuve et à l’Acadie depuis que le Traité d’Utrecht en avait fait une possession anglaise, en 1713. Par la Proclamation Royale de 1763, les Îles passent sous la juridiction exclusive de Terre-Neuve avant que l’Acte de Québec, en 1774, vienne les y soustraire pour les rattacher définitivement à la province de Québec. En 1760, leur exploitation est confiée à Richard Gridley. Puis, en 1798, l’amiral Isaac Coffin en devient propriétaire à perpétuité. Ce ne sont pas les premiers exploitants, ni Coffin, qui vont favoriser l’implantation d’une population stable. Le peuplement pionnier est imputable à un événement singulier, soit l’arrivée, en 1792, d’un contingent « d’environ 250 personnes d’ascendance acadienne en provenance de Miquelon » (p. 85). Or cette population vit de façon précaire dans un système de dépendance économique à l’endroit des négociants. Sans doute est-ce pour y échapper que les pêcheurs madelinots accueillent bien les Américains avec qui ils établissent un système de troc que désavouent les autorités civiles. Cette situation va se poursuivre durant la période 1830-1870 que le chapitre 3 intitule « Une région du Québec accrochée aux maritimes ». Cette périodisation ne correspond à aucun événement particulier. Sans qu’ils le disent, les auteurs établissent cette séquence temporelle parce qu’ils disposent des recensements décennaux de 1831 à 1871 et les utilisent à bon escient. Ils sont ainsi en mesure de mieux quantifier la population des Îles qui passe alors de 1057 à 3172 habitants et de mieux qualifier les activités agricoles (figures 3.2 et 3.3) La principale activité de l’archipel demeure toujours la …
FORTIN, Jean-Charles et Paul LAROCQUE, Histoire des Îles-de-la-Madeleine (Québec, Les Éditions de l’IQRC, coll. « Les régions du Québec », no 15, 2003), 403 p.[Record]
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Georges Massé
Département des sciences humaines
Université du Québec à Trois-Rivières