Article body
Chantal Maillé, politologue et directrice de l’Institut Simone de Beauvoir de l’Université Concordia, propose, dans cet ouvrage, d’analyser trente ans de débats constitutionnels au Québec à la lumière de la participation des femmes dans ceux-ci. Se refusant aux approches institutionnelles et féministes classiques, son analyse politique tend à intégrer une approche postmoderniste basée sur le postulat « du nomadisme des identités ». Les 37 Québécoises (dont 7 représentantes de groupes de femmes et 10 intellectuelles) qui constituent son échantillon, ont été interrogées à la fois sur leur perception et leur participation aux débats constitutionnels mais également sur leur construction identitaire. Son objectif est de montrer que les positions constitutionnelles « se construisent en relation avec les processus d’identification et d’appartenance ». Ces derniers ont permis des formes différentes d’engagement dans les débats constitutionnels, perçus comme des débats de spécialistes inscrits dans un processus institutionnel sclérosé. Les débats constitutionnels sont prétexte à un questionnement plus large sur le thème de la représentation politique qui, dans le système actuel implique des discriminations systématiques (femmes, origine ethnique, hommes pauvres, transgenres…). Il s’agit, selon l’auteure, de penser désormais un système capable d’inclure les groupes minoritaires, ethniques ou économiques et les personnes aux caractéristiques identitaires hors normes, ce qui induit le recours à des mesures radicales visant les structures politiques. Prenant exemple sur la parité en France qui a permis la reconnaissance d’une humanité sexuée, l’auteure souhaiterait néanmoins qu’elle s’ouvre aux autres identités que le seul genre (ce qui interroge sur l’utilisation du terme parité). Chantal Maillé aspire ainsi à une vision du social qui conjugue à la fois le genre et d’autres appartenances. L’ouvrage se veut original par son postulat théorique, se présentant dès lors comme une longue démonstration sur le nomadisme des identités plutôt qu’une réelle analyse des débats constitutionnels et de la place des femmes puisque l’auteure tend à dépasser le genre. Véritable plaidoyer pour une démocratie intégrant l’ensemble des groupes dits minoritaires, cet essai peut ouvrir un débat sur la pertinence stratégique d’inclure les femmes (groupe majoritaire) parmi les minorités.