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Renée Joyal, professeure en sciences juridiques à l’Université du Québec à Montréal, nous propose ici d’aborder l’histoire de l’enfance au Québec sous un angle particulièrement intéressant, à savoir les mesures législatives et autres mises en place par l’État depuis la fondation de Québec. Cet ouvrage de référence est construit selon un découpage chronologique qui comprend cinq périodes, chacune correspondant à l’un des cinq chapitres qui forment ce livre : 1608-1868, 1869-1920, 1921-1943, 1944-1970, 1971-1989. Il est intéressant de constater que les balises chronologiques ne correspondent pas aux grands événements que l’on a l’habitude de retenir lorsqu’on traite de l’histoire nationale québécoise. Les transformations que connaît l’enfance, comme sujet sociétal, sont souvent diffuses et les interventions législatives dans ce domaine se modulent progressivement, sans être liées aux ruptures politiques causées par un changement de régime ou de parti politique ni par les grands conflits qui ont marqué le Québec, le Canada ou le monde. Bien sûr, ces marqueurs de l’histoire ne sont pas neutres, et c’est pour cette raison que Renée Joyal nous propose, au début de chacun des chapitres, une mise en contexte qui permet alors de situer les interventions de l’État à l’intérieur de ces grands événements politiques, économiques et sociaux qui ont marqué le Québec depuis près de 400 ans. Le texte est également parsemé de plusieurs encadrés où l’on retrouve des passages d’un texte de loi, un extrait d’un rapport d’une commission ou encore d’un ouvrage scientifique. Cela vient compléter la présentation des différentes lois tout en rendant la lecture d’un ouvrage de ce genre beaucoup plus agréable.
Bien que l’ouvrage couvre quatre siècles d’interventions étatiques, ce n’est qu’un peu avant le milieu du xixe siècle que l’enfance deviendra un secteur d’intervention des pouvoirs publics, et ce, dans trois domaines qui resteront, jusqu’à nos jours, les principaux champs d’intervention de l’État auprès des enfants : la famille (dès 1824 une loi tente de freiner le vagabondage des enfants), l’éducation (une loi en 1841 crée un système d’écoles publiques) et la santé (actes concernant la vaccination en 1861). Les interventions publiques en matière de protection des plus jeunes s’intensifient par la suite et les débats entre la présentation d’un projet de loi et son adoption (ou son retrait) témoignent bien des enjeux cruciaux entourant l’enfance au Québec. L’ouvrage de Renée Joyal l’illustre parfaitement.
Bien sur, il aurait été intéressant de situer ces interventions du législateur québécois à l’intérieur d’un contexte géopolitique plus large. L’auteure fait quelquefois référence aux États-Unis, à l’Angleterre et à la France, mais de façon extrêmement succincte. Il est évidemment impossible de tout couvrir dans un seul ouvrage de ce genre, et on ne peut que souhaiter que Renée Joyal se prête à cet exercice comparatif sous peu. D’ici à ce que ce complément nous soit offert, on peut affirmer qu’il s’agit ici d’un ouvrage de référence incontournable pour quiconque — chercheur, étudiant, juriste, travailleur social, journaliste ou autre — s’intéresse à l’enfance au Québec. L’ouvrage comprend à la fin un index des lois citées et une table des matières bien détaillée, ce qui en fait un ouvrage de référence extrêmement riche et très facile à consulter.