Abstracts
Résumé
La tourbière à palses de Blanc-Sablon s’est formée dans une cuvette lacustre isolée par un cordon morainique lors de l’émersion des terres au niveau de 60-70 m. D’une dizaine de mètres de profondeur au début, le lac s’est vite transformé en une lagune lorsqu’il s’est vidangé il y a 10 200 ans environ (vers 9 ka 14C BP) suite à l’incision du cordon morainique par recul de tête de la rivière Blanc-Sablon ou par son ancêtre. Il a d’abord été colonisé par une végétation aquatique. La tourbe a commencé à se former en milieu minérotrophe vers 9400 ans BP (8,4 ka 14C BP) pour atteindre finalement une épaisseur totale d’environ 3 m. La tourbière est composée de deux unités principales de tourbe de sphaignes de milieu ombrotrophe séparées par une couche de tourbe de couleur foncée et bien décomposée de milieu minérotrophe. D’après la coupe étudiée, l’accrétion verticale du tapis tourbeux a pu atteindre jusqu’à 2-3 mm par année, s’établissant à 0,53 mm/an en moyenne entre 9400 et 4400 ans avant l’actuel (8,4 et 4 ka 14C BP), date d’un feu. La partie supérieure de la couche de sphaignes au-dessus de l’horizon de feu a été datée à environ 500 ans BP, alors que la couche de lichens à la surface a donné un âge au 14C de 40 ± 60 BP seulement. Cependant, dans deux autres coupes situées vers le centre de la tourbière, l’âge de la partie superficielle du tapis tourbeux sur une épaisseur de 50 à 60 cm va de moderne à 2330 ans cal. BP (2280 ± 60 14C BP). L’accrétion réduite pourrait résulter de l’instauration de la palse, asséchant localement le milieu. Le taux moyen d’accrétion verticale pour l’ensemble du tapis tourbeux au droit de la coupe a été d’environ 0,32 mm/an. Le pergélisol s’est vraisemblablement installé dans la tourbière durant la période du Petit Âge glaciaire.
Abstract
The palsa peat bog in the Blanc-Sablon area was formed in a lacustrine basin isolated by a moraine ridge at the head of the Blanc-Sablon River valley when the isostatic land recovery reached the 60-70 m level. At the beginning, the depth of the lake was about 10 m ; however, the lake was soon drained almost entirely about 10 200 years ago (around 9 ka 14C BP) when the Blanc-Sablon River cut back the moraine ridge. The floor of the resulting shallow lagoon was then progressively covered by an aquatic plant species carpet. Peat began to grow and accumulate about 9400 yr BP (8,4 ka 14C BP), and finally the peat reached about 3 m in thickness. At the section studied, the peat carpet is made of two main layers of sphagnum separated by a layer of fen peat. At this site, the vertical accretion of the peat could have reached 2-3 mm per year, the average being 0.53 mm/yr between 9400 and 4400 yr BP (8,4 to 4 ka 14C BP), until a fire occurred. Radiocarbon age at the surface of the thick sphagnum layer overlying the fire event is about 500 years BP whereas the thin and dry lichen layer at the surface date back only 40 ± 60 14C yr BP. However, in two sites located in the peat bog center, the peat layers under the lichens have been dated from modern to 2330 cal yr BP (2280 ± 60 14C yr BP). Consequently the apparent slow down in peat accumulation after the fire shown at the studied section is likely due to the local build-up of the palsa. The mean vertical accretion rate for the 3 m thick peat carpet is about 0.32 mm/yr. Permafrost probably occurred into the peat bog about 500 years ago, during the Little Ice Age.
Article body
Introduction
La tourbière à palses de Blanc-Sablon demeure le site le plus méridional de cette nature au Québec (fig. 1). Les palses y constituent des formes de terrain reliques présentement en dégradation (Dionne, 1984). La tourbière a commencé à se former à l’Holocène inférieur et l’accumulation de la tourbe s’est poursuivie jusqu’à nos jours. Vingt-trois (23) dates au radiocarbone ont été obtenues à partir de la paroi escarpée d’une palse crevée ainsi que dans deux profils courts localisés dans la partie centrale de la tourbière. Avec la stratigraphie, ces données chronologiques relativement nombreuses ont permis de déterminer les principales étapes de la formation puis le rythme du développement vertical de la tourbière.
Pour évaluer correctement les taux d’accrétion de la tourbe et les situer adéquatement dans le cadre paléogéographique régional, l’usage d’une chronologie étalonnée en années sidérales s’est imposé.
Situation géographique et contexte géomorphologique
La tourbière à palses de Blanc-Sablon (fig. 2) est située à la tête de la vallée de la rivière de Blanc-Sablon, à environ 8 km du village de Blanc-Sablon, sur la Côte nord du détroit de Belle-Isle ; elle est localisée à environ 6 km du littoral de la baie de Brador, à l’ouest, et à environ 2,3 km au sud-est de l’escarpement du Bouclier laurentidien délimité par la faille de Brador (57° 10’ O, 51° 30’ N) (fig. 3).
Dans le secteur amont, la vallée est orientée NE-SO alors que dans les secteurs central et aval, elle a une orientation NNO-SSE. La tourbière occupe une dépression d’environ 2,5 km2 entourée de collines rocheuses formées de roches sédimentaires appartenant aux formations de Brador et de Forteau d’âge Cambrien (Bostock et al., 1983). Elle se trouve du côté est d’une colline tabulaire (mésa) dont le sommet culmine à environ 140 m, alors que la dépression n’est qu’à une altitude de 60 m. Cette dernière est fermée du côté SO par une crête morainique, d’une dizaine de mètres de hauteur, qui est raccrochée au versant est de la mésa.
Après la déglaciation de la région de Blanc-Sablon et le recul du front de l’inlandsis à la bordure du Bouclier laurentidien entre 15 600 et 14 800 ans étalonnés BP (13 et 12,6 ka 14C BP ; Grant, 1992), la région de Blanc-Sablon a été submergée par les eaux de la Mer de Goldthwait jusqu’à une altitude maximale de 150 m (Dionne, 1977 ; Grant, 1992). La cuvette à la tête de la vallée de la rivière de Blanc-Sablon a alors été partiellement comblée de sédiments fins de milieu relativement profond (limon argileux et sable fin). Lors du relèvement isostatique des terres, la crête morainique située du côté sud de la dépression a alors isolé un lac peu profond (8-10 m environ) quand le niveau marin relatif a atteint la cote de 65-70 m, ce qui est survenu entre 11 500 et 10 700 ans cal. BP (10 et 9,5 ka 14C BP) selon les courbes de Bigras et Dubois (1987) et de Grant (1992). Le lac s’est vidangé par la suite quand, par recul de tête, la rivière de Blanc-Sablon a entaillé le cordon morainique. L’abaissement du niveau des eaux dans le lac a alors permis à la végétation aquatique d’envahir la dépression entre 10 200 et 9500 ans cal. BP (9 et 8,5 ka 14C BP). La tourbe s’est alors installée et a progressivement comblé la dépression ; son épaisseur a atteint au moins 3 m par endroits.
Rappelons que la température annuelle moyenne pour la région de Blanc-Sablon (période 1960-1990) est de 0,6 °C ; celles des mois le plus froid et le plus chaud, respectivement de ‑11,8 et 12,1 °C (Dionne, 1984). À la même époque, au droit de la tourbière à palses, la température moyenne annuelle de l’air était voisine de 0 °C ; mais elle a légèrement augmenté au cours de la dernière décennie (Frydecki et Dionne, 1997). Bien que l’épaisseur du pergélisol dans l’ensemble de la tourbière varie d’un endroit à l’autre, au droit des plus grosses palses, elle atteint généralement entre 3 et 8 m (Dionne et Séguin, 1992 ; Séguin et Dionne, 1992 ; Séguin et al., 1993). Ce site se trouve au sud de la limite du pergélisol discontinu au Québec (Allard et Séguin 1987 ; Canada, 1995).
Le tableau I indique les espèces composant le tapis végétal actuel de la tourbière à palses de Blanc-Sablon.
Coupe dans une palse crevée
Lors de levés géophysiques en 1989 (Dionne et Séguin, 1992 ; Séguin et Dionne, 1992), une grosse palse crevée en bordure de la tourbière et à proximité de celle qui a été forée en 1990 pour l’installation d’un câble à thermistors, présentait une grande et profonde dépression thermokarstique centrale (fig. 4). À l’aide d’une pelle, une des parois escarpée a alors été nettoyée et rafraîchie du sommet jusqu’à la base, c’est-à-dire le niveau de l’eau au fond de la cuvette. Des échantillons ont été prélevés à différents niveaux de la paroi nettoyée, alors que le niveau inférieur a été échantillonné à l’aide d’une tarière pédologique.
La figure 5 illustre les grandes unités composant le tapis tourbeux. À la base, on trouve des sédiments lacustres très riches en débris organiques végétaux comprenant surtout des espèces aquatiques (unité 1). L’épaisseur de ce dépôt n’est pas connue mais excède 30 cm. Juste au-dessus, il y a une couche d’une quinzaine de centimètres de tourbe de couleur brun foncé, relativement bien décomposée, de milieu minérotrophe (unité 2). Cette couche est recouverte par une épaisse (120 cm) couche de sphaignes de type ombrotrophe, brun pâle à jaunâtre, spongieuse et peu décomposée (unité 3). La couche sus-jacente (unité 4), de 50 cm d’épaisseur, est constituée d’une tourbe de carex, sphaignes et éricacées de type minérotrophe, de couleur brun foncé à noir, bien décomposée. Au centre de l’unité, il y avait un horizon contenant beaucoup de racines d’arbustes. Cette unité est à son tour recouverte par une couche de sphaignes (unité 5) de type ombrotrophe de 75 cm d’épaisseur, de couleur brun clair à jaunâtre, peu décomposée et spongieuse. L’unité 5 est coiffée d’une mince (3 cm) couche noire (unité 6) contenant beaucoup de charbons de bois et des fragments de Picea sp. Il s’agit vraisemblablement d’un feu.
Au-dessus, l’unité 7, de 18 cm d’épaisseur, est semblable à celle de l’unité 5, c’est-à-dire, une tourbe de sphaignes de couleur brun pâle à jaune, de type ombrotrophe, peu décomposée. En surface, l’unité 8 est une tourbe ligneuse sèche à lichens avec des ligneux en tapis (Empetrum nigrum) ou des buissons nains (Vaccinium sp., Rubus chamaemorus).
Âge de la tourbière
Le tableau II présente les dates au radiocarbone obtenues pour les différentes unités de la coupe principale ; une courbe de l’âge selon la profondeur est livrée à la figure 5. Les échantillons datés ont été prélevés sur une épaisseur variant de 1 à 2 cm. Comme il s’agit de tourbe ou de débris végétaux prélevés et datés en vrac, l’étalonnage des dates au radiocarbone en années sidérales doit être effectué en référant à une courbe lissée sur 5 points (50 ans), à l’aide du logiciel CALIB 4.4 (Stuiver et al., 1998).
La matière organique a commencé à s’accumuler dans le fond du lac vers 10 200 ans étalonnés BP (9 ka 14C BP) et la tourbe, entre 9500 et 9300 ans cal. BP (fig. 5). Sans doute en régime minérotrophe au début, suite au comblement de l’étang puis durant une courte phase de marais (unité 2), l’entourbement s’est poursuivi durant plus d’un millénaire en milieu ombrotrophe. Vers 7800 ans cal. BP, les conditions hydriques ont changé (fig. 5). On est passé à un milieu minérotrophe, une étape d’une durée d’environ un millénaire. Puis de nouveau, la tourbière a connu un environnement ombrotrophe entre 6800 et 4400 ans, alors qu’est survenu un feu (vers 4 ka 14C BP).
La coupe étudiée révèle peut-être une lacune sédimentaire (unité 7). En effet, la couche sus-jacente à l’horizon du feu est mince (18 cm seulement) ; toutefois, seuls les premiers centimètres à la surface de cette couche ont été datés à environ 500 ans 14C BP (fig. 5).
Par contre, la partie supérieure du couvert tourbeux a aussi été datée dans deux sites voisins de la coupe principale situés dans la partie centrale de la tourbière (tabl. II). Dans les sites 2 et 3, la couche de lichens en surface a donné un âge moderne, alors que la couche de sphaignes sous-jacente, respectivement à 15 et 20 cm de profondeur a été datée à 430 ± 50 et à 620 ± 60 14C BP (respectivement 500 et 600 ans étalonnés BP). Dans les deux mêmes sites, les couches sous-jacentes ont donné des âges plus vieux allant jusqu’à 2300 ans cal. BP (2280 ± 60 14C BP) à 50 cm de profondeur (tabl. II). À cet endroit, il ne semble donc pas y avoir eu d’interruption dans l’accumulation de la tourbe après 4400 ans étalonnés BP (fig. 5). La faible épaisseur de l’unité 7 de la coupe principale pourrait être attribuée à un délai de recolonisation par la tourbe de sphaigne après le feu ou encore à une période d’érosion ou de corrosion d’une tourbe préalablement accumulée en réponse à la formation d’une palse (Richard, 1981 ; voir aussi Heim, 1976 ; Laprise et Payette, 1988 ; Lavoie et Payette, 1995 et Pissart et Gangloff, 1984). Dans cette hypothèse, une palse se serait mise en place durant le Néoglaciaire.
Il semble toutefois établi que l’accrétion verticale du couvert organique dans l’ensemble de la tourbière à palses de Blanc-Sablon ait été continue entre 9000 et 500 ans cal. BP environ, c’est-à-dire jusqu’au début de la période du Petit Âge glaciaire.
Taux d’accrétion verticale
Si on se base sur la coupe principale décrite plus haut, le taux moyen d’accrétion verticale pour l’ensemble de la séquence tourbeuse serait d’environ 0,32 mm/an (étalonné). Toutefois, pour la période comprise entre 9300 et 4400 ans cal. BP, période durant laquelle il s’est accumulé 260 cm de tourbe, le taux moyen annuel s’établit à 0,53 mm. Dans le détail, on constate des différences entre les diverses unités. Pour l’unité 3 constituée de sphaignes peu décomposées de milieu ombrotrophe, les 125 cm de tourbe se seraient accumulés à un taux moyen de 0,86 mm/an, atteignant 2 mm/an dans la partie supérieure. Dans l’unité 4, le taux moyen a été de 0,49 mm/an, alors que dans l’unité 5, le taux moyen ne fut que de 0,32 mm/an, si on se base sur les dates disponibles.
L’accrétion verticale après l’événement de feu est difficile à évaluer au droit de la coupe principale, faute de date pour la base de l’unité 7 ; toutefois, elle peut être estimée à partir des sites 2 et 3 : elle fut d’environ 0,29 mm/an dans le site 2, et de 0,21 mm/an dans le site 3, ce qui ressemble au taux de la partie supérieure de l’unité 5 de la coupe principale (fig. 5). Notons que les taux calculés ne tiennent pas compte de la compaction, ni de la décomposition à long terme de la tourbe. Il s’agit donc de valeurs apparentes.
Le taux moyen d’accrétion verticale de la tourbière de Blanc-Sablon est supérieur à celui de trois des quatre tourbières de la côte ouest de la mer d’Hudson étudiées par Dredge et Mott (2003, p. 11) : 0,20, 0,22, 0,27 et 0,48 mm/an (années étalonnées) ; deux d’entre elles affichent une réduction dans les couches supérieures (70-75 cm), le taux s’établissant alors à 0,06 et 0,13 mm/an, suivie d’une remontée. Au lac à l’Eau Claire, en Hudsonie, Payette (1988, p. 523), mentionne des taux variés d’accrétion verticale pour de petites tourbières ombrotrophes de couverture : 0,17 à 0,30 mm/an pour le versant ouest, mais 0,36 à 0,45 mm/an pour le versant est.
Plus près de nous, à Terre-Neuve, le taux moyen d’accrétion de 14 tourbières est de 0,48 ± 0,22 mm/an (de 0,20 à 1,01 mm/an) (en années étalonnées à partir des données de Davis, 1984). Durant les trois derniers millénaires, le taux d’accrétion y a atteint 0,56 mm/an en moyenne dans six des huit tourbières pour lesquelles ce calcul est possible. L’ensemble de ces données sur l’accrétion de la tourbe traduit manifestement la réduction de la continentalité.
Discussion
Les variations du taux apparent d’accrétion de la tourbe reflètent sans doute des changements hydroclimatiques survenus durant toute la durée du développement de la tourbière à palses de Blanc-Sablon. La correspondance avec les changements de composition botanique de la tourbe (fig. 5) traduiraient fidèlement la sensibilité de ce biogéosystème aux conditions environnementales. La comparaison de multiples carottes au sein de la tourbière permettrait de distinguer entre les réponses locales et la réponse générale du système.
Obstruée par une crête morainique remaniée en surface par les eaux de la Mer de Goldthwait, la cuvette à la tête de la rivière de Blanc-Sablon a formé un lac peu profond lors du relèvement isostatique des terres entre 11 500 et 10 700 ans cal. BP. Le recul de la tête du cours d’eau a entaillé la crête morainique et entraîné la vidange du lac. Ce dernier a alors été envahi par des plantes aquatiques entre 10 200 et 9500 ans avant l’actuel. La tourbe s’est par la suite accumulée dans la cuvette, passant d’un milieu minérotrophe à un milieu ombrotrophe, puis de nouveau à un milieu minérotrophe suivi d’un milieu ombrotrophe avant que ne survienne un feu local vers 4400 ans cal. BP. D’après les données fournies par les sites secondaires 2 et 3 (tabl. II), la tourbe de sphaigne aurait continué à s’accumuler dans la tourbière après le feu. Mais vers 500 ans BP, on est passé à un milieu sec, caractérisé par un tapis de lichens et d’éricacées. Cette période correspond à celle du Petit Âge glaciaire après le maximum climatique du Moyen Âge (1000-1300 ans ap. J.-C. environ). Peut-on alors en conclure que le pergélisol s’est installé dans la tourbière de Blanc-Sablon dès le début de cette période froide ? C’est une possibilité. Cependant, nous pensons que les palses ont connu d’autres périodes favorables à leur développement, notamment durant la deuxième moitié du 16e siècle, la première moitié du 17e, ainsi que durant la deuxième moitié des 18e et 19e siècles (Grove, 1988).
Compte tenu des conditions climatiques particulières à la région de Blanc-Sablon, notamment ses étés plutôt froids et peu ensoleillés, la période plus chaude qui a suivi le Petit Âge glaciaire, en particulier de 1900 à 1950, est demeurée suffisamment froide pour la conservation des palses, d’où la suggestion antérieure qu’elles étaient reliques (Dionne, 1984 ; Dionne et Séguin, 1992).
Conclusion
Dans la tourbière à palses de Blanc-Sablon, la tourbe, d’une épaisseur atteignant 3 m par endroits, s’est accumulée d’une façon continue, mais à des taux différents, entre 9500 ans cal. BP et aujourd’hui. Le pergélisol s’est vraisemblablement installé dans la tourbière au cours du Petit Âge glaciaire et a donné naissance à un complexe de palses de quelques mètres de hauteur. Grâce à un environnement climatique favorable (étés frais et peu ensoleillés), le pergélisol s’est maintenu durant la période plus chaude (1900 à 1950) qui a succédé au Petit Âge glaciaire, mais il s’est néanmoins dégradé.
Le câble à thermistors installé en 1990 par une équipe du Centre d’études nordiques de l’Université Laval enregistre en continu depuis cette date la température de l’air, celle au sol, et celles du sol à différentes profondeurs jusqu’à 10 m. Les données recueillies indiquent un léger réchauffement de l’air et du pergélisol depuis 1995-1996 (Frydecki et Dionne, 1997).
Située au sud de la limite du pergélisol discontinu au Québec (Canada, 1995), la tourbière à palses de Blanc-Sablon constitue un site de grand intérêt dans le contexte actuel des changements climatiques et devrait retenir l’attention des chercheurs.
Appendices
Remerciements
Les travaux sur la tourbière à palses de Blanc-Sablon ont été entrepris en 1989. Outre l’auteur, ont participé aux travaux de terrain Maurice Séguin, Richard Lévesque et Janush Frydecki, tous trois membres, à l’époque, du Centre d’études nordiques de l’Université Laval. De 1990 jusqu’à 2000, J. Frydecki s’est occupé du fonctionnement de la station ; il a en outre régulièrement recueilli les données et les a analysées. L’identification des espèces du couvert végétal a été faite par Claude Roy de l’Herbier Louis-Marie. Les figures 1 à 4 ont été préparées par Karine Tessier du laboratoire de cartographie du département de géographie et le texte a été saisi par Pierrette Morissette. L’auteur a bénéficié d’une subvention de recherche de la Commission géologique du Canada pour les travaux de terrain alors que la plupart des dates au 14C ont été effectuées au laboratoire de radiocarbone du même organisme gouvernemental.
Note
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[*]
Adresse actuelle : 2761 rue de Valcourt, Québec, Québec G1W 1V9, Canada
Références
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