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La pandémie de COVID-19 est le résultat de la propagation mondiale du virus SRAS-CoV-2 (Organisation mondiale de la Santé [OMS], 2020), qui est aujourd’hui l’une des principales causes de décès dans le monde (Zhai et Du, 2020) avec plus de 2 millions de morts depuis son apparition (Santé publique France, 2021). Au Québec, en date du 20 avril 2021, un peu moins de 11 000 personnes étaient décédées de la COVID-19 depuis son apparition, et ce nombre continue d’augmenter (Gouvernement du Québec, 2021).

De ce fait, les populations font exceptionnellement face à de nombreux deuils (Zhai et Du, 2020). Le deuil est une expérience dite normale de la vie qui arrive à la suite de la perte d’un être cher (Lombardo et al., 2014). Cet événement des plus stressants est vécu différemment d’une personne à l’autre (Stroebe, Schut et Boerner, 2017; Lombardo et al., 2014).

Lorsque ce processus de deuil se prolonge et implique une souffrance chez la personne, il est décrit comme compliqué (Philippin, 2006). Cependant, s’il se prolonge au-delà de 12 mois chez l’adulte et qu’il génère des effets négatifs sur l’état psychologique ou physique de la personne endeuillée, comme de la colère, de l’isolement, de la solitude ou encore des symptômes que pouvait avoir la personne décédée (Lobb et al., 2010), et que cela déclenche une pathologie (Philippin, 2006), il devient alors un deuil complexe persistant (DSM-5, 2015) ou un deuil pathologique (Philippin, 2006).

Le deuil est influencé par la relation avec la personne décédée, les expériences passées, la culture, les croyances, les valeurs, le soutien disponible et les circonstances liées au décès (Stroebe, Schut et Boerner, 2017). Certaines circonstances peuvent entraîner des complications du deuil, telles que les désastres naturels (Eisma et al., 2019) ou la crise sanitaire mondiale de la COVID-19 (Zhai et Du, 2020). Dans le contexte de la pandémie, son caractère précipité et imprévisible (Cardoso et al., 2020; Mayland et al., 2020) a exacerbé les réactions émotionnelles des personnes touchées (Dodd et al., 2022). De plus, le risque d’être exposé au virus et le risque de décéder de cette maladie a constitué un facteur de vulnérabilité supplémentaire pour les proches (Cardoso et al., 2020).

Par ailleurs, pour limiter la propagation de la COVID-19, des restrictions de déplacements ou de visites ont été mises en place partout dans le monde, comme en France, en Italie ou au Québec, suscitant une augmentation de l’anxiété et de la dépression parmi la population (Chew et al., 2020). Dans les milieux hospitaliers, les visites pour les personnes hospitalisées en fin de vie ont été restreintes, voire interdites (Feder et al., 2021; Dhala et al., 2020; Kuntz et al., 2020; Mayland et al., 2020). Une fois le décès survenu, les familles ont fait face aux restrictions des rituels funéraires (Cardoso et al., 2020). Les cérémonies ont été reportées pour certains et annulées pour d’autres. Le fait de ne pas avoir pu se recueillir ou encore se soutenir mutuellement dans ces moments difficiles a eu un impact négatif sur l’expérience de deuil (Mayland et al., 2020). Entre autres, une détresse psychologique et un sentiment de solitude ont été révélés chez les personnes endeuillées (Cardoso et al., 2020; Mayland et al., 2020; Zhai et Du, 2020).

Ainsi, pour pallier cet isolement et les difficultés émotionnelles qui leur sont liées, certaines familles ont décidé de recourir à des moyens virtuels de communication dans les derniers instants de la vie de leur proche (Feder et al., 2021) et lors des cérémonies funéraires. Les moyens virtuels de communication sont toutes les technologies regroupant les téléphones intelligents, les tablettes ou les ordinateurs qui permettent aux personnes les utilisant d’accéder à des plateformes audiovisuelles pour communiquer à distance (Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture, s. d.). Les établissements de santé ont eux aussi reçu la consigne du ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS, 2020) de se munir d’appareils numériques pour permettre aux familles de rester en contact avec leur proche.

Toutefois, les bénéfices de ces technologies de communication et leurs impacts sur le deuil des familles sont encore mal connus. C’est pourquoi une revue de la littérature a été réalisée avec pour objectif de décrire l’impact de l’utilisation des technologies de communication virtuelles chez des personnes ayant perdu un proche en fin de vie en temps de pandémie.

Méthodologie

Démarche de recherche

Pour répondre à cet objectif de recherche, une revue de la littérature inspirée de la méthodologie de type examen de la portée (Grimshaw, 2010) a été réalisée. Selon Arksey et O’Malley (2005), une revue de la portée a pour but de répertorier les écrits scientifiques disponibles (résumé des résultats) sur un sujet en particulier et ainsi, identifier de possibles lacunes pour appuyer l’intérêt de réaliser une revue systématique ou une étude qui permettrait de combler cette lacune de connaissances. Pour cette revue plus particulièrement, l’objectif était de rassembler toutes les études portant sur l’utilisation des technologies virtuelles en situation de soins palliatifs, de soins de fin de vie ou de cérémonies funéraires et l’impact que celles-ci ont eu sur les proches endeuillés en temps de pandémie afin d’identifier de possibles lacunes de connaissances sur ce sujet.

La recherche documentaire a été réalisée en consultant les bases de données électroniques PubMed, Cinahl, Embase et Web of Science. Ces bases de données ont été choisies parce qu’elles répertorient des périodiques sur les sciences médicales et paramédicales. Les stratégies de recherche (tableau 1) ont été développées à partir d’un vocabulaire libre et contrôlé. Celles-ci ont été validées par une bibliothécaire spécialisée en sciences de la santé. Cette recherche a été réalisée le 20 novembre 2020, puis à nouveau le 10 décembre 2020. Elle a été effectuée quelques mois après l’apparition de la pandémie de COVID-19 afin d’obtenir des études en lien avec les premières restrictions pouvant avoir un impact sur le vécu des personnes ayant perdu un proche en temps de pandémie.

Critères d’inclusion et d’exclusion

Dans le cadre de cette revue, seules les études évaluant l’utilisation des technologies virtuelles de communication entre les personnes et leurs proches pendant l’épisode de soins palliatifs et de fin de vie sur l’expérience de deuil ont été incluses. Les études évaluant l’utilisation des moyens virtuels de communication lors des cérémonies funéraires en contexte de pandémie de COVID-19 étaient incluses. Les études qui évaluaient uniquement l’utilisation des technologies de communication entre les proches ou le patient et les professionnels de santé ont été exclues. Les articles écrits dans une autre langue que le français ou l’anglais ainsi que les articles non scientifiques n’ont pas été pris en compte. La littérature grise n’a pas été incluse.

Processus de sélection et d’analyse des articles

Les articles obtenus par les différentes stratégies de recherche ont été importés dans Covidence. Ce logiciel permet d’effectuer et de faciliter les phases de sélection et d’extraction des données. La sélection des articles a été réalisée en deux étapes. La première étape a consisté en une lecture des titres et des résumés afin de rapidement éliminer les articles non pertinents pour le sujet. Le texte intégral de ces articles a été ensuite analysé par deux membres de l’équipe de recherche de manière indépendante, en fonction des critères d’inclusion et d’exclusion prédéterminés. Les désaccords sur l’inclusion des articles ont été résolus avec des discussions et, au besoin, une tierce personne était disponible pour valider ou non l’insertion d’un article. Le contenu des articles scientifiques sélectionnés a été reporté dans un tableau Excel afin de réaliser une synthèse narrative de leurs informations et de leurs résultats (tableau 2). Ces derniers ont ensuite fait l’objet d’une analyse de contenu, qui consiste à présenter le contenu des articles en décrivant leurs différentes caractéristiques (Vaismoradi, Turunen et Bondas, 2013). Il n’y a pas eu évaluation de la qualité des études, car cette étape n’est pas nécessaire dans une revue de la portée.

Résultats

La recherche dans les différentes bases de données a rapporté 344 références, dont 166 doublons. Ainsi, 178 études ont été soumises à la première étape de sélection et 55 d’entre elles ont été retenues. Lors de la deuxième étape de sélection, portant sur l’analyse complète des articles, 51 ont été exclus. Parmi ces exclusions, 37 articles n’étaient pas des études scientifiques, six articles ne portaient pas sur les technologies virtuelles de communication, trois étaient dans une langue autre que le français ou l’anglais, deux articles visaient les professionnels de la santé, un article portait sur un contexte autre que les soins palliatifs et de fin de vie, un article explorait la méthode de communication à adopter lors de visites virtuelles en cas de maladies graves et enfin, une référence s’inscrivait dans une période précédant la pandémie de COVID-19. Ainsi, quatre articles ont été soumis au processus d’analyse complet. Le diagramme de flux est présenté à la figure 1.

Caractéristiques des études

Les articles analysés ont été publiés en 2020 et 2021. Trois études ont été réalisées aux États-Unis (Feder et al., 2021; Dhala et al., 2020; Kuntz et al., 2020) et une en Italie (Mercadante et al., 2020). Deux des quatre articles portaient sur la mise en place de moyens technologiques pour pallier les restrictions de visites des familles à leur proche hospitalisé (Dhala et al., 2020; Kuntz et al., 2020) ainsi que sur leur satisfaction à l’égard de leur utilisation (Kuntz et al.,2020). Un article s’interrogeait uniquement sur la satisfaction des familles lors de la visite clinique virtuelle, qui consistait essentiellement en la participation lors de l’épisode de soins (Mercadante et al., 2020). Enfin, le dernier article se concentrait sur la perception des familles endeuillées sur la qualité de la communication en fin de vie lors des restrictions de visites (Feder et al., 2021). Aucune étude ne portait sur les cérémonies funéraires. Pour ce qui est du type de devis, deux articles présentaient les résultats d’une étude mixte (Kuntz et al., 2020; Mercadante et al., 2020), les deux autres, les résultats d’une étude qualitative descriptive (Feder et al., 2021; Dhala et al., 2020). Les caractéristiques des études sont représentées dans le tableau 3.

Dans toutes ces études, la population d’intérêt était les familles ayant perdu un proche pendant la pandémie de COVID-19 en soins palliatifs et de fin de vie (Feder et al., 2021; Kuntz et al., 2020; Mercadante et al., 2020) ou aux soins intensifs (Dhala et al., 2020). En ce qui concerne les instruments de mesure pour les deux études mixtes (Kuntz et al., 2020; Mercadante et al., 2020), les auteurs ont utilisé des questionnaires maison, spécifiquement développés pour répondre aux objectifs de l’étude. Les questions étaient fermées, par exemple : « Pensez-vous que votre proche était heureux de vous voir pendant les visites cliniques? » (Mercadante et al., 2020, p. e80, traduction libre), ou encore : « Grâce à la réunion de famille virtuelle, j’ai pu comprendre les pensées et les souhaits de mon proche. » (Kuntz et al., 2020, p. e31, traduction libre). Elles étaient composées d’échelles de type Likert en 4 points (Mercadante et al., 2020) et en 5 points (Kuntz et al., 2020) ainsi que d’entretiens individuels semi-structurés. Pour l’étude qualitative descriptive (Feder et al., 2021), les chercheurs ont réalisé des entretiens individuels en utilisant des questions ouvertes comme « Y a-t-il autre chose que vous aimeriez partager sur l’utilisation de la communication à distance entre votre proche et vous-même au cours de son dernier mois de vie ou sur la façon dont le personnel […] aurait pu améliorer cette connexion? » (Feder et al., 2021, p. 588, traduction libre). Enfin, dans la dernière étude, les chercheurs ont réalisé une description de leurs observations sur la mise en place de leur unité virtuelle de soins intensifs (Dhala et al., 2020).

Toutes ces études se sont servies de moyens de communication virtuels commerciaux comme WhatsApp (Mercadante et al., 2020), Zoom (Feder et al., 2021; Kuntz et al., 2020), FaceTime ou Skype (Dhala et al., 2020). Cela a permis aux familles de rester en contact avec leur proche malade ainsi qu’avec les professionnels de la santé (Dhala et al., 2020; Feder et al., 2020; Kuntz et al., 2020; Mercadante et al., 2020). L’utilisation de ces applications accordait aux patients isolés qui le souhaitaient de pouvoir prendre contact avec leurs proches de leur propre initiative (Dhala et al., 2020). Ces réunions permettaient aussi aux familles d’avoir des informations sur l’état de santé de leur proche (Kuntz et al., 2020), de pouvoir assister aux soins (Mercadante et al., 2020) ainsi que de participer aux décisions médicales (Dhala et al., 2020; Kuntz et al., 2020).

Suivi de l’état de santé

En ce qui concerne les résultats de ces études, la communication virtuelle a apporté aux familles la possibilité de suivre l’état de santé de leur proche. En effet, elles ont été en mesure de mieux comprendre et d’observer directement la détérioration rapide de l’état de santé de leur proche (Kuntz et al., 2020). Afin de les accompagner au mieux, les professionnels de la santé les préparaient ainsi à être témoins de changements importants dans la santé et la vie de leur proche (Kuntz et al., 2020). Parfois, bien que l’accès à ces technologies de communication virtuelle ait été proposé, certaines personnes ne souhaitaient pas les utiliser, car elles ne voulaient pas avoir de souvenirs de leur proche dans un état de santé très détérioré (Feder et al., 2021). Il apparaît que plus de 80 % des familles interrogées étaient en « accord » ou en « accord total » avec le fait qu’elles aient pu comprendre l’état de santé de leur proche grâce à l’utilisation des technologies virtuelles (Kuntz et al., 2020).

Seules deux études ont évalué explicitement la satisfaction des familles lors du recours aux moyens de communication virtuels pendant des réunions familiales (Kuntz et al., 2020) et à l’occasion d’un épisode de soins (Mercadante et al., 2020). En moyenne, les familles étaient très satisfaites d’avoir pu assister à distance à l’épisode de soins (Mercadante et al., 2020). Cependant, seulement 50 % des personnes ont affirmé qu’utiliser ce moyen de communication leur a permis de comprendre les souhaits de leur proche quant aux soins et traitements (Kuntz et al., 2020). Les autres études ont rapporté le sentiment de joie et d’appréciation des familles lors de réunions familiales virtuelles entre elles et leur proche (Feder et al., 2021; Dhala et al., 2020). Les mesures sanitaires pour limiter la propagation du SRAS-CoV-2 ont entraîné chez certains membres de la famille une détresse émotionnelle ou une angoisse de voir leur proche mourir seul (Feder et al., 2021). Ce moyen de suppléance aux visites en personne a permis aux familles éloignées de leur proche de se sentir moins anxieuses (Kuntz et al., 2020).

Pour ce qui est des patients, les familles ont affirmé que leur proche était heureux d’avoir pu les voir virtuellement (Mercadante et al., 2020). Ces technologies virtuelles de communication ont également permis aux patients isolés de leurs proches de renforcer leur état mental et émotionnel (Dhala et al., 2020).

Participation aux rencontres

La plupart des familles étaient heureuses et satisfaites d’avoir pu participer à ces réunions familiales et médicales virtuelles (Feder et al., 2021; Dhala et al., 2020). Certaines d’entre elles ont appuyé le fait que si cette technologie virtuelle de communication n’avait pas été une option possible pour pallier les restrictions de visites, elles auraient été encore plus anxieuses de ne pas pouvoir être présentes, d’autant plus lorsque l’état de leur proche se dégradait (Kuntz et al., 2020). Cependant, Mercadante et al. (2020) ont retracé que, globalement, les familles étaient en désaccord avec le fait que ce moyen virtuel pouvait se substituer à leur présence lors des visites cliniques.

Barrières

L’analyse des articles a également mis en évidence des barrières aux technologies virtuelles de communication. Feder et al. (2021) ont notamment montré que les familles ont éprouvé une grande déception face au manque ou à l’absence de soutien de la part du personnel soignant pour faciliter l’usage de ces technologies, surtout en contexte de problèmes techniques. Par ailleurs, la perception de la qualité de la communication avec les professionnels était, pour plusieurs familles, fortement associée à l’accessibilité et à la possibilité de faire usage de ces technologies (Feder et al., 2021). Inversement, le manque d’accès à ces moyens constituait une source d’insatisfaction, car il était perçu comme un manque de transparence de la part des professionnels dans un contexte où les familles ne pouvaient pas assister et apprécier directement les soins prodigués à leur proche (Feder et al., 2021).

Discussion

Les résultats de cette revue de littérature ont mis en évidence que la mise en place et l’utilisation des technologies de communication virtuelle ont permis de favoriser la satisfaction des familles (Feder et al., 2021; Dhala et al., 2020; Kuntz et al., 2020; Mercadante et al., 2020) ainsi que de diminuer leur sentiment d’anxiété (Kuntz et al., 2020; Mayland et al., 2020). Ces méthodes ont constitué, pour certains, un moyen complémentaire efficace pour répondre aux besoins des patients et des proches, notamment lorsque ces derniers ne pouvaient se déplacer (Mercadante et al., 2020).

Ces technologies de communication virtuelle ont pour la plupart eu un impact positif sur les personnes ayant perdu un proche (Dhala et al., 2020; Kuntz et al., 2020). Elles leur ont permis de pouvoir appréhender l’évolution de son état physique, de comprendre et de se préparer à son décès (Kuntz et al., 2020). En effet, l’évolution rapide de la COVID-19 (Zhai et Du, 2020) chez certains patients faisait en sorte que les familles avaient de la difficulté à concevoir que leur proche puisse être aussi malade, voire décéder si rapidement (Mayland et al., 2020). Le fait de pouvoir suivre l’évolution de la condition de leur proche a permis à ces familles de saisir la gravité de la situation et d’anticiper la perte à venir (Kuntz et al., 2020). Ces technologies virtuelles leur ont aussi permis d’accompagner leur proche en fin de vie et de lui dire au revoir (Kuntz et al., 2020). Par ailleurs, lorsque cette option n’était pas disponible pour des raisons d’organisation ou de connexion (Feder et al., 2021), les familles ont associé ces difficultés à une mauvaise prise en charge de leur proche ou à une mort indigne, puisque vécue en situation de solitude (Feder et al., 2021).

Les résultats de ces études sont semblables à ceux obtenus lors d’études antérieures portant sur l’utilisation de technologies virtuelles pour les parents ayant un enfant dans un service de néonatalogie (Leblanc et al., 2013; Yeo et al., 2011). En effet, les parents ont affirmé que leur anxiété et leur stress ont diminué (Yeo et al., 2011), qu’ils se sentaient même rassurés lorsqu’ils ont pu voir leur enfant à l’aide d’un service de vidéo (Leblanc et al., 2013). La technologie virtuelle constituait un choix acceptable en l’absence de la possibilité d’être physiquement auprès de leur bébé. En effet, les familles préféraient pouvoir être en personne pour toucher et voir leur enfant (Yeo et al., 2011), tout comme l’ont démontré Mercadante et al. (2020).

Dans le cadre de la présente revue, aucun article portant sur l’impact de ces technologies virtuelles lors des cérémonies funéraires n’a été retracé. Toutefois, des écrits issus de la littérature grise suggèrent que la restriction de commémoration a eu un impact négatif sur les personnes endeuillées. En effet, restreindre ces commémorations a généré une détresse supplémentaire chez ces personnes, ainsi qu’une incapacité à effectuer des rites de passage dans des conditions acceptables (Cardoso et al., 2020; Muturi, Freeman et Banner, 2020).

Forces et limites

Cette revue comporte certaines forces. En appui à sa pertinence scientifique, la méthodologie utilisée a servi à regrouper et à analyser rigoureusement les articles disponibles sur le sujet de l’utilisation des technologies virtuelles de communication lors de la fin de vie ou lors des épisodes de soin du proche en temps de pandémie. Elle a permis de mettre en évidence la nécessité de réaliser d’autres travaux pour combler une lacune de connaissances attribuable au petit nombre d’études analysées. C’est un sujet novateur et d’avant-garde.

Néanmoins, cette revue présente quelques limites. En ce qui concerne la démarche de recherche, la revue portait sur un sujet très précis et était limitée aux articles scientifiques. Pour des raisons de coûts et de faisabilité, cette recherche n’a pas pris en compte d’autres sources de données telles que la littérature grise. Ceci aurait permis d’enrichir les propos et la compréhension du phénomène ainsi que de diversifier les sources de données, notamment en consultant les bases documentaires en sciences sociales. De même, la recension d’articles visant à comparer l’utilisation d’une autre modalité de communication, par exemple le téléphone, ou encore la communication entre la famille et les professionnels de la santé, aurait permis de nuancer et d’enrichir les résultats obtenus dans cette revue. Toutefois, de tels articles ne correspondaient pas à l’ensemble des critères d’inclusion de la revue.

Par ailleurs, le peu de données scientifiques mesurant l’impact des technologies virtuelles sur l’expérience de deuil limite la portée des résultats présentés dans cette revue. En effet, cette revue n’a analysé que quelques articles, principalement de nature qualitative. La période de collecte des données de la majorité des études correspond au début de la pandémie de COVID-19. Il est donc possible que les expériences rapportées à cette époque aient évolué et ne soient pas représentatives de la situation actuelle par rapport aux restrictions de visite et à l’utilisation des moyens technologiques de communication.

En outre, même si le plan de concepts avait explicitement cherché à identifier des résultats liés au deuil des personnes et aux impacts associés à l’utilisation de technologies virtuelles lors de cérémonies funéraires, aucun article recensé n’a traité spécifiquement de ces sujets. En effet, le deuil n’a pas constitué une variable mesurée dans ces études et les cérémonies funéraires n’ont pas été évaluées. En ce sens, d’autres travaux doivent être menés pour traiter de ces enjeux.

À la lumière des résultats présentés dans cet examen de la portée, il serait pertinent de favoriser la production de nouvelles données scientifiques sur les différents impacts de l’utilisation des technologies virtuelles de communication lors des soins palliatifs et lors des cérémonies funéraires. Ces études permettraient d’informer la population, les professionnels de la santé et les dirigeants politiques au sujet des possibilités novatrices disponibles pour l’accompagnement des personnes en fin de vie et le soutien des personnes endeuillées. Ces études permettraient également d’orienter le développement et l’accessibilité à ces technologies virtuelles de communication dans les milieux de soins afin de permettre aux familles de rester en contact avec leur proche malgré des restrictions en vigueur ou des difficultés de déplacement. Il serait également bénéfique de former le personnel soignant à soutenir les personnes ne pouvant être physiquement auprès de leur proche en fournissant les outils technologiques de communication nécessaires ou encore en organisant les rencontres virtuelles.

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Cet article avait pour but de présenter les résultats d’une revue de la littérature au sujet de l’impact de l’utilisation des technologies virtuelles de communication lors de la fin de vie et lors des épisodes de soins sur les personnes ayant perdu un proche en temps de pandémie. Cette revue s’inspirant de la méthodologie de type examen de la portée a permis de mettre en évidence que ces technologies ont eu, pour la plupart des familles, un impact positif sur leur expérience. En effet, après avoir utilisé ces technologies virtuelles de communication, le stress des familles a diminué. La plupart d’entre elles étaient également satisfaites de les utiliser. Ces technologies ont aussi eu un impact bénéfique sur le vécu des patients. Néanmoins, certaines familles ont évoqué le fait que ces technologies ne pouvaient pas remplacer un réel accompagnement et le contact physique avec leur proche. Les résultats de cette revue ouvrent la porte sur la nécessité d’approfondir ces impacts dans des travaux de recherche subséquents, dans le but ultime de mieux soutenir les personnes faisant face au décès d’un proche en temps de pandémie.