Abstracts
Résumé
Le roman à clés a mauvaise presse. Pourtant, il a innervé, tout au long du XXe siècle, des livres fondamentaux comme À la Recherche du temps perdu de Marcel Proust ou certains romans de James Joyce et de Virginia Woolf. Plus largement, de nombreux romans contemporains ont recours à des dispositifs de « floutage » pour faire entrer le réel, et plus particulièrement les personnes réelles, dans la fiction. Ainsi l’enjeu, dans les deux romans québécois qui se voient analysés dans cet article, consiste à trouver une autre manière d’inscrire le réel dans la fiction. Les exemples de « réticences » et d’hésitations vis-à-vis du nom propre correspondent ici à des stratégies diverses d’appréhension de l’histoire ou du rapport intime entre les êtres, qui commandent certes des détours mais qui, en même temps, exigent une certaine transparence de la référence pour laisser percevoir un poids de réalité garant d’une authenticité dont les lecteurs d’aujourd’hui auraient, dit-on, une insatiable faim. Ces stratégies, on le verra, invitent à revoir les rapports entre le réel et la fiction, à remettre en cause les frontières censées les cloisonner.
Abstract
The roman à clé receives a lot of negative press. Yet, throughout the twentieth century, it has innervated fundamental books such as Marcel Proust's À la recherche du temps perdu or some novels by James Joyce and Virginia Woolf. More widely, many contemporary novels use devices of “blurring” to bring reality, and more particularly real people, in the fiction. Thus the issue, in the two Quebec novels analyzed in this article, is to find another way to include reality in fiction. The examples of “reluctance” and hesitation vis-à-vis the proper name correspond here to various strategies of perception of history or of the intimate relationship between beings, which certainly require detours but which, at the same time, require a certain transparency of the reference to let perceive a weight of reality – the guarantee of an authenticity for which the readers of today would have, so one says, an insatiable hunger. These strategies, as we shall see, invite us to review the relationship between reality and fiction, to question the boundaries that are supposed to partition them.
Appendices
Bibliographie
- Baier, L. (1992 [1985]). Le délai. Arles, Actes Sud.
- Baier, L. (1989 [1988]). L’entreprise France. Paris, Calmann-Lévy.
- Baier, L. (1989 [1986]). Un Allemand né de la dernière guerre. Essai à l’usage des Français. Paris, Calmann-Lévy.
- Caron, L. (1990). Les fils de la liberté, t. 3.Le coup de poing. Montréal, Boréal.
- Dion, R. (2018). Des fictions sans fiction ou le partage du réel. Montréal, Presses de l’Université de Montréal.
- Dion, R. (2015a). « Le passé historique dans les écritures québécoises du présent (Hamelin, Ouellette-Michalska, Leclerc, Mavrikakis) ». Letras de Hoje (Porto Alegre), vol. 50, no 2 (avril-mai), p. 168-178.
- Dion, R. (2015b). « Présences d’Octobre. Variations littéraires autour d’un épisode de l’histoire québécoise (Louis Hamelin, Carl Leblanc) ». Voix et Images, no 121 (automne), p. 87-100.
- Ferretti, A. (1990). « Octobre de lumière ». Dans La vie partisane. Montréal, l’Hexagone, p. 47-66.
- Ferron, J. (1969). Le ciel de Québec. Montréal, Éditions du Jour.
- Frédérick, H. (2015 [2014]). Forêt contraire. Montréal, Héliotrope (coll. « Série “P” »).
- Frédérick, H. (2014 [2010]). La poupée de Kokoschka. Montréal, Héliotrope.
- Frédérick, H. et G. Massoutre. (2014). « Les créatures libres d’Hélène Frédérick. Rencontre avec une romancière audacieuse, qui invente Munich aussi bien qu’Inverness » [entrevue]. Le Devoir, 22 mars.
- Glinoer, A. et M. Lacroix. (2014). Romans à clés. Les ambivalences du réel. Liège, Presses universitaires de Liège.
- Hamelin, L. (2014). Fabrications. Essai sur la fiction et l’histoire. Montréal, Presses de l’Université de Montréal.
- Hamelin, L. (2012 [2010]). La constellation du Lynx. Montréal, Boréal (coll. « Boréal Compact »).
- Hamelin, L. et N. Mercier (2010). « La bombe Hamelin ». L’Actualité, 29 septembre.
- Lacroix, M. (2014). « Imaginaire, légendaire, fictif : romans à clés et fiction de la vie littéraire ». Dans A. Glinoer et M. Lacroix (dir.), Romans à clés. Les ambivalences du réel. Liège, Presses universitaires de Liège, p. 11-20.
- Latham, S. (2014 [2009]). « Réalité, fiction et plaisir. Introduction du livre The Art of Scandal. Modernism, Libel Law and the Roman à Clef ». Dans A. Glinoer et M. Lacroix (dir.), Romans à clés. Les ambivalences du réel. Liège, Presses universitaires de Liège, p. 21-42.
- Nardout-Lafarge, É. (2013). « La mémoire de Ferron dans La constellation du Lynx de Louis Hamelin ». Dans I. Daunais (dir.), La mémoire du roman. Montréal, Presses de l’Université de Montréal, p. 177-190.
- Pelletier, J. (2007 [2002]). « Octobre 1970 : la leçon de la fiction ». Dans Question nationale et lutte sociale, la nouvelle fracture. Écrits à contre-courant 2. Québec, Nota bene, p. 171-182.
- Pelletier, J. (1995 [1982]). « La crise d’Octobre 1970 et la littérature québécoise ». Dans Le poids de l’histoire. Littérature, idéologies, société du Québec moderne. Québec, Nuit blanche éditeur, p. 141-162.
- Shields, D. (2010). Reality Hunger. A Manifesto. New York, Vintage Books.
- Turgeon, P. (1990). Un dernier blues pour Octobre. Montréal, Libre Expression.
- Wagner, F. (2008). « Perturbations onomastiques : l’onomastique romanesque contre la mimèsis ». Dans Y. Baudelle (dir.), Onomastique romanesque, Narratologie, no 9. Paris, L’Harmattan, p. 17-42.