Volume 45, Number 3, Fall 2014 Adapter le théâtre au cinéma Guest-edited by Esther Pelletier and Irène Roy
Table of contents (18 articles)
Études
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L’Esquive de Kechiche : de Shakespeare à Marivaux, analyse d’une adaptation cinématographique protéiforme
Cécile Sorin
pp. 15–29
AbstractFR:
L’Esquive, un film d’Abdellatif Kechiche, se construit à partir d’emprunts au théâtre. De nature et de modalité diverses, ceux-ci nécessitent la prise en compte des différentes occurrences et des procédés de transformation de textes premiers. Hamlet offre au réalisateur un modèle réflexif ainsi qu’un cadre culturel de valorisation des dialogues. Le Jeu de l’amour et du hasard de Marivaux est adapté et transposé dans un contexte radicalement différent. Cela suscite la mise en place de procédés de transposition diachroniques et synchroniques ainsi que des choix de mise en scène cloisonnant espace théâtral et cadre cinématographique. Appuyée sur les distinctions terminologiques opérées par Gérard Genette et Linda Hutcheon, l’analyse de L’Esquive permet de mettre en valeur la synergie liant le film aux textes premiers de même que le processus de création relatif à son interaction avec le spectateur.
EN:
Abdellatif Kechiche’s movie L’Esquive owes much to the stage. The theatrical elements used are diverse in scope and nature, and call on an understanding of the various ways in which source writings are adapted. Where Shakespeare’s Hamlet inspires introspection and a cultural focus on dialogues, Marivaux’s Game of Love and Chance is treated in a drastically different manner. Along with the requirement for diachronic and synchronic transposition mechanisms, the direction calls on distinct stage and movie sets. Based on Gérard Genette and Linda Hutcheon’s terminological distinctions, this analysis of L’Esquive highlights the synergy between the movie and the original text, as well as the creative process required to interact with the audience.
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L’adaptation cinématographique d’oeuvres théâtrales chez Jean Cocteau
Rana El Gharbie
pp. 31–41
AbstractFR:
Jean Cocteau adapte à l’écran trois de ses pièces : L’Aigle à deux têtes en 1947, Les Parents terribles en 1948 et Orphée en 1950. À travers la structure de leur intrigue, leur langage, leurs décors et un jeu de mise en abyme, les deux premières adaptations affichent une théâtralité qui les apparente. Mais elles se distinguent en ce que leur degré d’utilisation des techniques cinématographiques, et par conséquent la profondeur de leur pouvoir de théoriser le rapport liant le théâtre et le septième art, diffère significativement. De plus, l’écriture cinématographique se révèle en elles essentiellement par le changement de l’échelle des plans et la variation des angles. Or, Cocteau réussit pleinement sa deuxième pièce filmée, puisque la caméra y joue le rôle d’un spectateur, qui se déplace librement sur une scène de théâtre. Avec Orphée, le poète détourne la source théâtrale de son film en multipliant les intrigues, les actions et les décors extérieurs. Plus encore, il recourt à nombre de trucages fabriqués et d’artifices que permet le montage. Ces astuces cinématographiques témoignent parfaitement du réalisme irréel tant recherché par Cocteau. L’adaptation de pièces en films permet donc à l’auteur d’explorer l’art de l’artifice afin de mettre en scène l’invisibilité et de déjouer son statut de poète inconnu et incompris. C’est ce que nous verrons dans cet article.
EN:
Cocteau made movies of three of his plays : the 1947 L’Aigle à deux têtes, the 1948 Les Parents terribles and the 1950 Orpheus. The first two share a plot structure, a language, sets and mirror text that are theatrical in nature. Where they do differ markedly, however, is in their cinematic techniques and how deeply each theorises the relationship between stage and screen, focusing chiefly on changes in shooting angles and framing.Cocteau pulls off his second foray quite successfully, making the camera a member of the audience who moves freely about the stage.However, he dilutes the theatrical origins of his third venture, Orpheus, with an abundance of plots, subplots and outdoor settings, not to mention several mechanical effects and tricks made possible at the editing stage.All these point to the unreal realism of which Cocteau was so fond.This essay will explain how adapting his plays into movies allowed Cocteau to delve into deceit, to stage the invisible and to break free of his reputation as a little known, misunderstood poet.
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Opening Night et la remédiation théâtrale. « Film-balade » ou film « tragique » ?
Thomas Carrier-Lafleur
pp. 43–63
AbstractFR:
S’inspirant à la fois de la critique deleuzienne du « nouvel Hollywood » et de la dialectique métaphysique de l’apollinien et du dionysiaque telle que pensée par Nietzsche dans La Naissance de la tragédie, nous souhaitons interroger ici quelques-uns des modes sur lesquels le théâtre habite le cinéma. Par suite, afin de déplacer légèrement l’angle sous lequel on envisage habituellement l’adaptation et pour profiter ainsi d’un changement de point de vue, nous préfèrerons à la problématique du théâtre filmé le concept de « filmer le théâtre ». Nous explorerons celui-ci à partir d’une analyse du film Opening Night de John Cassavetes (1977), où la crise d’une actrice qui se trouve entre deux âges constitue, pour le réalisateur, et donc pour le septième art, une occasion de produire de la nouveauté théâtrale.
EN:
Drawing both on Deleuze’s critique of “the new Hollywood” and on the metaphysical dialectics of Apollo and Dionysus as expressed in Nietzsche’s The Birth of Tragedy, this essay will look at some of the means through which theater inhabits the movies. Then, it will slightly shift from the usual focus — and shed new light — on the concept of adaptation by delving on the “filming of theater” (as opposed to the more generic “theater on film”). Its starting point will be the 1977 movie Opening Night, shot by John Cassavetes, in which the director (and cinema in general) exploits the middle-age crisis of an actress to create anew for the theater.
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Ce qui reste du théâtre dans le film : le « cas » Marguerite Duras
Julie Beaulieu
pp. 65–79
AbstractFR:
Examiner les aspects formels du théâtre durassien facilite la compréhension du système filmique non conventionnel de Marguerite Duras, car bien avant de se livrer à la pratique du cinéma, l’écrivaine s’est consacrée à la littérature, puis au théâtre. Dans le texte dramatique La Musica (créé en 1965), des éléments cinématographiques attirent d’emblée l’attention. De fait, sa mise en scène préfigure celle d’un cinéma à venir, appuyé sur une rupture entre la bande sonore et les images — une mise en scène cinématographique dont seuls les personnages principaux, une femme et un homme ordinaires, seront présents sur scène, dans un décor minimaliste qui annonce la future « disparition » des personnages aux yeux du spectateur. Quelques meubles et des décorations placés ici et là serviront d’assise aux voix, celles-là mêmes qui donneront naissance au cinéma durassien — un cinéma de la littérature, tel que le suggérait Dominique Noguez, un cinéma de la parole. Notre article propose donc une réflexion sur le rapport singulier qu’entretiennent le texte dramatique et le cinéma dans le contexte de l’adaptation filmique, et plus spécifiquement de la réécriture, qui se situe au carrefour des pratiques, des genres et des discours.
EN:
A close study of Marguerite Duras the playwright yields a better understanding of her unconventional role as a movie director, one she embraced long after having established herself as an author of books and plays. La Musica, a drama brought to the stage in 1965, already contains movielike elements : an ordinary couple who will soon “be lost” to the audience, a minimalist stage, a couple of pieces of furniture, a few scattered decorative elements, all of which focus the attention on the voices, the core of “Durassian” movies. Indeed, these cinematic elements foreshadow her films, which dissociate images from their soundtrack and which Dominique Noguez considered as literary ones, where the Voice was paramount. Our essay will focus on the singular relationship between the written word and its movie utterance, on the process of adaptation and more particularly on the requirements of re-writing, an exercise that draws from a variety of genres, processes and viewpoints.
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L’adaptation cinématographique comme héritage aporétique : l’hantologie shakespearienne dans Ran d’Akira Kurosawa
René Lemieux
pp. 81–100
AbstractFR:
Cet article a pour objet le film Ran d’Akira Kurosawa (1985), qui se veut une adaptation de la pièce King Lear de William Shakespeare. Il s’agit ici d’étudier ce qui se passe (ou ce qui ne passe pas) entre l’oeuvre originale et son adaptation, mais aussi dans leurs intrigues respectives. Loin de se limiter à voir l’oeuvre cinématographique japonaise comme la simple traduction transculturelle d’une pièce de théâtre occidentale, cet article reprend la notion d’hantologie de Jacques Derrida et propose de voir réapparaître en Ran ce qu’a toujours été la pièce shakespearienne : une fable portant sur une certaine impossibilité d’hériter, ou encore sur l’absence d’héritage pris comme héritage.
EN:
Akira Kurosawa’s 1985 movie Ran is a new take on William Shakespeare’s King Lear. Considering Ran as more than just a cultural translation of a Western play, this essay looks at how the original English text was adapted in Kurosawa’s film, and compares their respective plot lines. In so doing, this essay calls on Jacques Derrida’s concept of hauntology and suggests that the movie is a faithful echo of the original play : a tale about the impossibility of inheritance, also seen in itself as a legacy.
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Medium, figure : deux mots pour une conversation sur l’adaptation
Éric Prince
pp. 101–133
AbstractFR:
L’adaptation du théâtre au cinéma, tout comme celle qui opère entre n’importe quels media, a souvent été étudiée sous l’angle de la matérialité propre à chaque moyen d’expression, à la lumière des limitations qu’implique cette dernière. Or, cet article emprunte une voie différente et propose une conception figurale du medium inspirée du pragmatisme peircéen. Comment, aujourd’hui, poser la question « qu’est-ce que le cinéma ? ». Dans ce texte, nous aborderons d’abord les difficultés que soulève une telle interrogation, après quoi nous élaborerons une définition du medium. Puis, nous exemplifierons sa contribution à l’épistémologie des études cinématographiques en nous penchant sur la comédie romantique américaine, genre des plus significatifs pour l’histoire du cinéma, qui continue la tradition théâtrale tout en rompant avec elle. Nous conclurons par un examen de Nô, un film de Robert Lepage, adapté d’une pièce du même auteur.
EN:
As for all translations from a given medium to another, adapting a play for the silver screen is often studied from the inherently limited physical viewpoint peculiar to each medium. Yet, this essay adopts a different tack, drawing on Charles Sanders Peirce’s pragmatism to focus instead on the figures that characterise each medium. How is one to ask about the nature of cinema nowadays ? Beginning with this difficult question, this essay will then define the medium before illustrating its contribution to cinematic epistemology through, for example, the all-important American romantic comedy, a genre firmly rooted in, yet now freed from, the stage. This essay will end with a study of the Robert Lepage movie Nô, adapted from his namesake play.
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Dogville : un récit en adaptation
Lucie Roy
pp. 135–144
AbstractFR:
Le film Dogville de Lars von Trier met à nu les grands enjeux de l’adaptation, à commencer sans doute par la notion d’adaptabilité des supports théâtraux et filmiques. Une vocation littéraire s’y exprime au surplus, par l’intervention d’une voix off qui participe de l’identité des personnages et qui explique la composition de l’intrigue. Cette voix invite à réfléchir sur la couture scénaristique qui tend à prendre ensemble les diverses matérialités du film. Présentant, tout au long, un univers fictif, Dogville se conclut par un retour à une réalité documentaire qui renforce le sens de l’oeuvre. Voilà chacune des propositions qui émailleront l’argumentation de notre article et qui y tiendront, de fait, lieu de parcours.
EN:
Lars von Trier’s Dogville is a study in adaptation, laying bare notions such as the adaptability of stage and movie trappings, and even providing a literary presence : a voice over that narrates both the characters and the plot, calling attention to the way the script pulls together the various material components of the movie. Indeed, the fictitious world of Dogville relies on a documentary realism that strengthens the storyline. All these elements will form the basis for, and structure of, this essay.
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La comédie du théâtre au cinéma : une histoire de dramaturgie ?
Johanna Krawczyk
pp. 145–162
AbstractFR:
Si elles émergent depuis quelques années, les tentatives de décloisonnement destinées à interroger les croisements du théâtre et du cinéma ont tendance à délaisser un genre : la comédie. Or, dans l’adaptation d’une comédie théâtrale au cinéma advient une dramaturgie particulière, qui offre une possibilité d’inventivité scénaristique et filmique inédite. C’est cette question que nous nous proposons d’approfondir en étudiant Cuisine et dépendances et Un air de famille, deux pièces écrites par Agnès Jaoui et Jean-Pierre Bacri et respectivement adaptées au cinéma par les réalisateurs Philippe Muyl et Cédric Klapisch.
EN:
Recent attempts at melding theater and cinema tend to ignore one particular genre : comedy. Adapting a stage comedy for the silver screen, however, involves a specific dramaturgy that gives much freedom for its screenplay and shooting. That is what this essay will explore through Cuisines et dépendances and Un air de famille. These two stage comedies were coauthored by Agnès Jaoui and Jean-Pierre Bacri, and made into movies by directors Philippe Muyl and Cédric Klapisch, respectively.
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Un cinéma sous influence : Le Soulier de satin de Manoel de Oliveira
Luís Carlos Pimenta Gonçalves
pp. 163–182
AbstractFR:
Le réalisateur portugais Manoel de Oliveira, en activité jusqu’à son décès à 106 ans, s’est très tôt intéressé au théâtre et à la représentation non réaliste qui se trouve aux antipodes du travail de l’Actors Studio. Il a adapté au cinéma certaines oeuvres d’auteurs portugais, comme Camilo Castelo Branco, un romancier du XIXe siècle, ou encore, parmi les écrivains du XXe siècle, José Régio ou Raul Brandão, un dramaturge dont le cinéaste a interprété O Gebo e a Sombra (Gebo et l’ombre), qui a été présenté au Festival international du film de Venise, hors compétition, en 2012. Manoel de Oliveira a, par ailleurs, aussi bien réalisé des films à partir de textes d’auteurs français : de Flaubert (selon une réinterprétation de la romancière Agustina Bessa-Luís), de Madame de Lafayette ou de Claudel. Dans cet article, nous nous intéresserons tout particulièrement à une adaptation réalisée en français, Le Soulier de satin, qui s’approprie la pièce du même titre écrite par Paul Claudel. D’une durée de sept heures, le film reprend l’essentiel du texte claudélien et a été montré en avant-première en 1985, dans une salle de théâtre. Nous nous interrogerons ici sur le passage du théâtre à un cinéma non réaliste, qui garde bien visibles tous les artéfacts, tous les artifices, toutes les conventions propres à l’art dramatique.
EN:
Portuguese Manoel de Oliveira was the dean of directors until his recent passing at the venerable age of 106. Following a very early interest in theater and in the exact opposite of the realistic depictions taught at the Actors Studio, he made movies from selected literary works by such Portuguese authors as Camilo Castelo Branco (a 19th century novelist), José Régio and Raul Brandão (two 20th century writers). Manoel de Oliveira adapted the latter’s O Gebo e a Sombra (Gebo and the Shadow)and presented it as a non-competitive entry in the Venice Film Festival in 2012. He also turned into movies selected works by such French literary luminaries as Flaubert (as recast by novelist Agustina Bessa-Luís), Madame de Lafayette or Claudel. This essay will focus on his French cinematic adaptation of Claudel’s play titled The Satin Slipper. The seven-hour long movie is rather faithful to the original text and its premiere screening took place in a (non-movie) theater in 1985. This essay will delve into the transition from the stage to a non-realistic screen world that depicts every single artefact, trick and convention known to stage actors.
Analyses
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André Gide : entre cosmopolitisme, nationalisme et roman pur
Saida Ben Salem
pp. 185–199
AbstractFR:
André Gide fait dire au héros des Faux-monnayeurs, Édouard : « [E]n art, comme partout, la pureté seule m’importe. » La pureté n’est pas alors le propre de l’art ou de la littérature ; elle est « partout » ; la notion de pureté est universelle. D’une façon générale, en tant qu’humaniste, Gide a essayé de faire de la littérature un moyen d’unification de l’Europe et du monde en favorisant l’ouverture à des textes étrangers, et non la division. Or, basée sur des cultures étrangères, sur des traductions, cette littérature favoriserait-elle l’impureté ? La pureté n’est-elle pas essentiellement relative à une littérature nationale authentique ?
EN:
In his Counterfeiters, André Gide has Édouard, his protagonist, declare that “in art as elsewhere, only purity matters to me”. Above and beyond art or literature, purity is everywhere, pervades everything and is universal. A humanist himself, Gide viewed literature as a means to unify — not divide — Europe and the world through exposure to foreign authors. Yet, does the translation of foreign words and cultures not foster impurity ? Or is purity the expected prerogative of an authentic, national literature ?
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L’épopée juive et américaine selon Philip Roth
Maxime Decout
pp. 201–214
AbstractFR:
L’oeuvre de Philip Roth peut être lue comme la quête d’un épique perdu, capable de justifier l’individu en l’inscrivant dans un processus historique et dans une collectivité avec qui le lien est rompu. Cette quête met en débat deux interrogations constantes : la judéité et l’identité américaine. Car dans cette Amérique où l’héroïsme vire au conformisme et à l’immobilisme, où chacun aspire au confort de la « pastorale », les Juifs américains sont coupés des souffrances historiques qui, en l’absence de dimension religieuse ou spirituelle, demeurent le seul fondement de l’être juif moderne. La dynamique centrale de l’oeuvre pourrait alors être d’opérer une bascule depuis une épopée enchaînée à une épopée délivrée, qui redéfinit les fondements identitaires des personnages.
EN:
In his books, Philip Roth could be seen to tell of a quest for a lost history that would weave individuals back into their time and place. Roth addresses two outstanding issues : what it means to be a Jew, and the true nature of an American identity where heroism hinges on conformity and the status quo, and where one turns to one’s faith to find solace. Indeed, Jews living in America today are disconnected from the historic sufferings that made their people, regardless of religious or spiritual considerations. Roth might be seen as narrating the transition between the chains of yesteryear to today’s freedom, redefining his characters’ identities in the process.
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Souvenir et désir infantile. L’autobiographie à la manière du récit de rêve chez Salvador Dalí
Carmélie Jacob
pp. 215–230
AbstractFR:
Il n’y a pas que les tableaux, chez Dalí, qui se teintent d’onirisme : son autobiographie, qui tient principalement dans La Vie secrète de Salvador Dalí (1942) et le Journal d’un génie (1964), laisse transparaître du début à la fin une logique du rêve, où s’entrecroisent l’absurde et l’habituel. C’est sur cette construction que nous souhaitons nous pencher, afin d’y repérer les traces du souvenir et du désir, premières assises du rêve. Nous montrerons ainsi quels liens se tissent entre rêves et remémoration dans l’écriture du peintre, comment Gala Dalí agit en tant que figure onirique, et enfin, en quoi la prémonition vient influencer les fantasmes mégalomanes et mystiques daliniens.
EN:
Salvador Dalí’s paintings are not his only oneiric depictions. Indeed, both versions of his autobiography (The Secret Life of Salvador Dalí [1942] and the Diary of a Genius [1964]) tell of the absurd and the unusual, and are rife with references to dreams. Our study will unearth the memories and desires underlying the author’s dreams, and highlight the interconnections between those dreams and the recollections he put to paper. As well, we shall explain why he cast Gala Dalí as an oneiric symbol, and investigate how the author’s premonitions informed his megalomaniac and mystical fantasies.
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Prosaïsme et flânerie chez Eudore Évanturel
Vincent Lambert
pp. 231–240
AbstractFR:
Les Premières poésies d’Eudore Évanturel (1852-1919) forment un recueil qui détonne dans la littérature québécoise du XIXe siècle. Étranger au patriotisme littéraire de son temps, Évanturel est un poète de l’ut pictura poesis, comme Alfred Garneau, mais d’une manière tout à fait inattendue, avec un prosaïsme qui s’attache moins aux paysages silencieux qu’à l’univers urbain, à ses personnages variés, ses mondanités, ses intérieurs bourgeois. Poète ironique, livré à ses humeurs, Évanturel s’adonne à une flânerie qu’il faut distinguer de l’ivresse baudelairienne, car il est plus proche des chroniqueurs de son temps. Toutefois, dans cette attention distanciée, c’est la présence même du monde qui fait évènement.
EN:
A study of 19th century Quebec literature shows how Eudore Évanturel’s Premières poésies stick out. Shunning the literary patriotism of his time, Évanturel (1852-1919) believed in ut pictura poesis — much like Alfred Garneau, albeit in an unexpectedly prosaic way that, over quiet landscapes, favoured the assorted characters, society life and comfortable drawing rooms of city dwellers. Unlike Baudelaire’s intoxicated flights of fancy, Évanturel’s strolls are full of irony and mood. He is close to the chroniclers of his day, yet gives precedence to his surroundings.