Abstracts
Résumé
Casse-pipe, description du milieu militaire par l’écrivain qu’est Céline, est un observatoire idéal pour l’injure, forme privilégiée de l’invective. L’esthétique de l’injure tient au signifiant et au signifié, lequel peut être très divers, tout mot pouvant devenir injure, en général du fait d’un emploi figuré. Elle tient aussi à l’usage qui est fait de l’injure, celle-ci étant avant tout un acte de langage, de type performatif primaire, et pouvant se formuler directement ou indirectement. L’injure est ainsi représentative d’une organisation hiérarchique qui peut permettre à l’« injurieur » de n’être jamais l’« injurié ». Elle peut alors, se donnant libre cours, aller de l’insulte précise et motivée à l’injure la plus gratuite, quasi rituelle, de fonction purement expressive. S’agissant d’une oeuvre littéraire, l’esthétique de l’injure est indissociable de l’intégration de celle-ci dans l’écriture. Dans Casse-pipe, l’injure est pleinement intégrée à l’écriture, phoniquement, sémantiquement et plus intimement encore, par le rythme qu’elle contribue à créer.
Abstract
Casse-pipe, a description of the military background by Céline the writer, is the perfect observation post for the study of insult, the extreme form of invective. The aesthetic of insult is linked to the signifier and the signified which can both take different forms, each word becoming an insult generally because of a figurative use. It is also linked to the use of insult, the latter being an act of language, of a primary formation type, that can be formulated directly or indirectly. Insult therefore is representative of a hierarchical organisation that may allow the “insulting” one never to be insulted. So, while freely expressing itself, it can go from a definite and motivated insult to the most gratuitous, nearly ritualistic one, then a purely expressive function. In a literary work, the aesthetic of insult can’t be dissociated from its integration in the writing, phonically, semantically and in a more intimate way, by the rhythm it helps to create.
Article body
L’invective, conformément à son étymologie latine invectivae (orationes), adjectif à rattacher à in-vehi (« s’emporter », « attaquer »), qui comportant le préfixe « in » indique l’orientation vers, est définie comme « parole ou suite de paroles violentes contre quelqu’un ou quelque chose[1] ». Elle a une manifestation privilégiée : l’injure qui, à la différence du juron, a un destinataire, l’« injuriaire[2] », qui peut ou non être l’« injurié ». Quand « injuriaire » et « injurié » se confondent, l’injure est directe, « interpellative » ; l’« injurié » peut d’ailleurs être l’« injurieur ». Quand « injurié » et « injuriaire » diffèrent, l’injure est indirecte.
Si l’on peut parler d’une esthétique de l’invective, c’est tout particulièrement dans le domaine de l’injure. En effet, l’injure, spécifiquement orale, autorise toutes les créations, puisque tout mot est susceptible de devenir injure et d’être reconnu comme tel par l’« injurié », dans la mesure où l’intonation et les éléments paraverbaux ont une fonction déterminante dans son identification. Sa nature et l’intention qui la sous-tend font ainsi de l’injure un lieu privilégié de créativité, voire de transgression langagière. Quand il s’agit de littérature, cette créativité possible implique choix et, de ce fait, recherche, ce qui autorise d’autant plus à parler d’une esthétique de l’injure.
S’il est un milieu où, par tradition, jurons et injures font partie du parler quotidien, c’est le milieu militaire. Aussi a-t-il paru intéressant d’examiner les injures à travers la représentation qu’a donnée de cet univers Céline dans Casse-pipe[3].
Pour parler de l’esthétique de l’injure, plusieurs aspects doivent être pris en compte, non seulement l’injure même, mais encore, quand il s’agit de littérature, l’emploi qui en est fait et dans le monde créé et dans l’écriture elle-même.
• L’esthétique de l’injure commence par le signifiant. L’injure est, en effet, présentée comme destinée à être entendue ; aussi le travail sur le signifiant est-il essentiel. Ce travail se manifeste par des récurrences internes à l’injure, allitérations et / ou assonances, qui contribuent à lui donner du poids ; l’injure n’agit plus alors seulement par son signifié : « Beauté du Bagne ![4] », « maquereaumaudit[5] », « cholérascochons pareils[6] ». Les récurrences peuvent être celles de consonnes ayant les mêmes caractéristiques articulatoires et / ou ne différant que par un trait distinctif : ainsi dans « grand cagneux guignol[7] », [g] (« grand ») ne diffère de [k] (« cagneux ») que par la sonorité. La recherche de récurrences phoniques peut déterminer le choix d’injures successives, comme « truffe » et « malotru », la syllabe récurrente étant dans les deux cas porteuse de l’accent tonique, donc particulièrement mise en évidence : « — Alors dis donc un peu truffe comment que je m’appelle ? Hein, dis voir tout de suite, malotru[8] ? » Ces récurrences phoniques peuvent mettre en jeu le cotexte : « Les miches en avant ! Maudite chiure[9] ! » L’injure est ainsi générée phoniquement par le cotexte ou par une autre injure.
Le signifiant injurieux joue aussi sur le paradigmatique. Une paronymie, qui sous un terme invite à voir un autre terme, peut contribuer au choix d’une injure ; ainsi « petits piafs[10] » ne peut pas ne pas évoquer « paf[11] » qui apparaît ailleurs dans « empaffés[12] ».
Ce travail sur le signifiant détermine des modifications morphologiques : ainsi la resuffixation « enculeux » contribue à la cohésion phonique du syntagme injurieux en permettant l’assonance en [ø] : « l’enculeux bleusaille[13] ! »
Le signifiant de l’injure est indissociable de la morphologie de celle-ci. L’injure, pour être efficace, doit surprendre. Si elle peut surprendre par sa forme, c’est de deux manières :
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par la déformation qu’elle fait subir à des injures existantes, grâce à des procédés divers :
aphérèse dans « culeur d’âne[14] » qui rend plus présente la base « cul », sans pour autant effacer pour le récepteur « enculeur » ; apocope dans « gougnafes[15] » ; imbrication de signifiants dans un mot-valise tel que « malagaufre[16] », résultat de « malagauche » (maladroit) et « gaufre » (imbécile), abréviation de l’injure « moule à gaufres » ; suffixation nouvelle dans « merdure[17] », « enfoirure[18] » grâce au suffixe « -ure » du parler standard (« chevelure », « ramure »), déjà présent dans « chiure ». Le terme injurieux est par là intégré en quelque sorte dans le lexique courant, mais ne perd nullement sa force grâce à l’effet de surprise produit. Cette suffixation, qui crée une sorte d’oxymore faisant côtoyer deux constituants qui relèvent de registres différents : un terme reconnu comme vulgaire et un suffixe standard, est d’autant plus subtile que le signifiant injurieux est proche de celui d’un terme qui ne l’est en rien ; le néologisme « merdure » est ainsi un paronyme de « verdure ». Une resuffixation renouvelle le signifiant injurieux et crée des rapprochements avec des termes qui, ayant le même suffixe, ont une autre connotation : « -eux » , variante de « -eur » a une connotation archaïque : « l’enculeux bleusaille[19] », « Ronfleux maudit[20] ! » Ce suffixe, en concurrence parfois avec le suffixe « -eur » (« partageur » / « partageux »), est en effet particulièrement fréquent dans la seconde moitié du XVIe siècle ;
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par sa composition. L’appellatif injurieux donne lieu à des translations, insolites par les termes concernés :
translation en nom de l’adjectif « joyeux » : « mon joyeux[21] » ; du participe présent « dévorant » : « mon dévorant[22] » ; d’un impératif : « dis, la mords-moi[23] ». L’injure s’autorise toutes les audaces morphosyntaxiques et syntaxiques : changement de genre : « ce charogne[24] » et irrégularité d’accord, le genre étant déterminé par le sexe de l’injurié : « Maudit chiure[25] ! », « Gros andouille[26] ! »[27]; juxtaposition, irrégulière, de noms : « saloperie fiote[28] » ; accumulation d’adjectifs juxtaposés : « Malheureux maudit foutu ours ![29] » ; adjectif ayant la distribution d’un nom, dans le cas de la juxtaposition de deux adjectifs tels que « Malheureux saoul ![30] » où « malheureux » peut aussi être interprété comme un nom ; concaténation, grâce à la préposition « de », d’injures renforcées par le juron « nom de Dieu », qui a une valeur prédicative par rapport au reste de l’injure : « Des nom de Dieu de maquereaux de trous du cul pareils ![31] ». L’injure est souvent développée, par un adjectif ou un participe-adjectif tels « gros[32] », « sale[33] », « triste[34] », « foutu[35] », « pourri[36] », « maudit[37] », « sacré[38] », parfois par plusieurs : « damnés croquants chassieux ![39] » ou bien par un complément : « Pitre du tonnerre ![40] », « chiure à pattes[41] ».
• L’injure est destinée à blesser. Elle est d’autant mieux susceptible d’atteindre sa visée que son emploi est motivé et son signifié, précis. Ce signifié n’est donc pas indifférent. Si l’on peut parler d’une esthétique de l’injure chez Céline, dans Casse-pipe, c’est d’abord du fait de la luxuriance du vocabulaire injurieux. Les injures y sont particulièrement nombreuses et si certaines se répètent, le plus souvent, elles n’ont que deux occurrences : « arsouille[42] », « bourrique[43] », « cave[44] », « cochon[45] », « galvaudeux[46] », « ordure[47] » ; rarement trois : « bandit[48] », « vache[49] » ; et au maximum quatre, ce qui est le cas de « charogne[50] ».
Le vocabulaire injurieux puise à tous les domaines lexicaux qui l’alimentent ordinairement : la sexualité : « con[51] », « empaffé[52] », « casse-couilles[53] », « Jésus[54] », « la tante[55] » ; l’excrémentiel et la saleté, qui n’en sont qu’un avatar : « dégoûtant[56] », « petit sale[57] », « salaud[58] », « saloperie[59] ». Le terme injurieux peut dénoncer explicitement la saleté : « sagouin[60] » ; la méchanceté : « brutes[61] » ; l’incapacité : « propres à rien[62] », « jean-foutre[63] », « paumé[64] » ; la bêtise : « andouille[65] », « con[66] », « enfoiré[67] » ; la malhonnêteté : « bandit[68] », « canaille[69] » ; l’incorrection : « malotru[70] » ; ou plus généralement, l’absence de valeur : « fantoche[71] », « guignol[72] », « frappe[73] », « arsouille[74] », « galvaudeux[75] », « voyou[76] », « zigoto[77] ».
Tout mot est susceptible de devenir injure. Ainsi deviennent injures des noms du lexique courant qui en principe n’ont pas cet emploi : « bijou[78] », « bises[79] », « fainéantise[80] », « girouette[81] », « grelots[82] », « guirlande[83] »[84], « maladie[85] », synonyme de « choléra[86] », « miniature[87] », « poireau[88] ». C’est restituer l’injure dans son caractère fondamentalement oral qui en permet l’identification uniquement par l’intonation. Ces termes ne peuvent évidemment être injurieux qu’employés figurément.
L’injure a en effet largement recours à la rhétorique[89]. Elle repose ainsi sur des figures diverses, la plus fréquente étant la métaphore, parfois filée : « Faut pas qu’il fonde le bonbon ! La praline au pas ![90] ». Céline a recours aux métaphores traditionnelles puisées dans le lexique du déchet : « pelure[91] », « ordure[92] », « charogne[93] » ; de la saleté : « saloperie[94] » ; et surtout de l’excrémentiel : « chiure[95] », « la colique[96] », « la caille[97] », « l’enfoirure[98] » ; mais aussi dans celui de l’écart par rapport à la normalité : « bosco[99] », « enflure[100] », « tordu[101] », « choléra[102] », « maladie[103] ». Bon nombre de métaphores sont des métaphores animales[104] : « bourrique[105] », « cafard[106] », « canard[107] », « chien[108] », « cochon[109] », « ours[110] », « vermines[111] », dont certaines sont inhabituelles comme injures : « mouche[112] », « chacal[113] », « ouistiti[114] », « papillon[115] », « taupe[116] ». Une métaphore traditionnelle peut être renouvelée par un changement de signifié : « ours », qui habituellement dénote le manque de civilité, est employé pour dénoter la puanteur : « Mais il pue cet ours ma parole ![117] ». Si certaines métaphores sont banales, leur emploi l’est moins. Ainsi, « vache », généralement employé en injure indirecte : « la vache », est employé en injure directe, précédé du déterminant possessif qui, du fait de sa valeur en général affective, crée une sorte d’oxymore et atténue la force de l’injure : « tiens ma vache ![118] ». L’emploi métaphorique inusité de certains termes pose le problème de leur signifié : c’est le cas par exemple de « truffe[119] ». La métaphore n’est pas la seule figure sur laquelle repose le signifié de l’injure. Celui-ci peut aussi relever d’une métonymie : « fainéantise[120] » ou d’une synecdoque : « bouche d’enfant[121] ».
L’injure met aussi en jeu l’oxymore traditionnel, qui, juxtaposant des termes contraires ou même contradictoires, crée un effet de surprise. Cette figure peut avoir des formes différentes : un caractérisant, adjectif (« merveilleux salaud[122] ») ou nom recteur de valeur prédicative (« crème d’ordure[123] », « fleur d’insolence[124] »), marqué positivement et employé avec un nom marqué négativement, prend une valeur ironique et superlative. La structure nom + « de » + nom peut aussi mettre en relation des substantifs dont les signifiés paraissent s’exclure : « beauté » et « bagne » dans « Beauté du bagne [125]! ». Juxtaposant des termes dont les signifiés sont incompatibles, l’oxymore en vient à l’expression de l’impossible : « Charognes ivres ![126] ».
L’injure utilise l’antiphrase ironique : « ma petite aubaine[127] », « marles[128] », ou l’hyperbole qui permet l’expression de l’infiniment petit : « pine de mouche[129] », « chiasse de mouche[130] ».
Céline joue également sur le signifié par des détournements subtils : ainsi « nature », bien qu’étant indiscutablement nom du fait du déterminant, a en fait le signifié du mot employé comme adjectif qui est celui de « naïf » : « ah ma nature ![131] » ; « bouzeux[132] », issu de « bouse » et adressé au garde-écurie, chargé de transporter le crottin des chevaux, retrouve son signifié étymologique. L’injure peut aussi être renouvelée par substitution synonymique : « petit sale[133] » pour « saligaud ».
Elle peut être totale création, tel « fin Parisien de la grande jacasse ![134] », où « Parisien », dans la bouche de quelqu’un qui ne l’est pas, devient injure, où « fin » a une valeur ironique et où « jacasse », synonyme de « pie », n’a pas la dénotation habituelle de personne bavarde, mais est synonyme de « jacassement » ou « jacasserie[135] ».
• L’injure est acte de langage : prononcer une injure, c’est faire l’acte d’injurier. Elle se range parmi les énoncés performatifs primaires[136]. De ce fait, l’esthétique de l’injure est inséparable de l’emploi qui en est fait.
L’injure implique « injurieur » et « injurié » qui ne sont pas forcément interchangeables. Dans l’univers hiérarchisé qu’est le monde militaire, n’importe qui ne peut être « injurieur » ; n’importe qui ne peut être « injurié ». Pour avoir toute sa portée, l’injure doit être présentée comme prononcée « par la personne qui convient[137] ». Elle est présentée dans Casse-pipe comme le mode d’expression habituel[138], notamment des gradés, ce dont témoigne son emploi dans les propos prêtés par le brigadier Le Meheu au maréchal des logis Rancotte : « Vous connais charogne ![139] » ou les réactions de Le Meheu : « il en trouvait plus ses insultes[140] ». Rancotte injurie tous ceux qui sont au-dessous de lui, le brigadier : « Meheu ! Meheu ! […] Triste frappe ![141] », le planton : « Saute planton ! Bourrique ! Vas-tu bondir fainéantise ![142] » ou la patrouille : « Garde à vous vermines ![143] ». En revanche, il n’est jamais injurié. Le brigadier injurie ses hommes individuellement ou collectivement et n’est injurié par l’un d’entre eux qu’une fois, lorsqu’il est ivre[144]. Les hommes de troupe, eux, s’injurient entre eux et peuvent être « injurieurs » ou « injuriés », mais le narrateur Ferdinand, le bleu, lui, est abondamment injurié, mais n’injurie pas. L’injure participe donc de la représentation de la hiérarchie militaire où la parole est instrument non tant de communication que de domination.
L’esthétique de l’injure est inséparable de sa formulation, laquelle, selon qu’elle est directe ou indirecte, atteint différemment l’« injurié » et induit une relation différente entre « injurieur » et « injurié ». L’injure de formulation indirecte implique un destinataire qui n’est pas « l’injurié » : celui qui reçoit l’injure n’en est que le dépositaire, qu’Évelyne Larguèche[145] appelle « injuriaire ». Dans l’injure directe, « injuriaire » et « injurié » ne font qu’un.
L’injure indirecte est précédée du déterminant article défini ou démonstratif. C’est la forme sous laquelle est construite l’injure à l’adresse d’un absent : « Alors ! alors ! Ce charogne ! où qu’il est ce foutu salaud ![146] ». C’est sous forme indirecte qu’est assénée la première injure du roman : « “Brigadier ! C’est l’engagé ! / — Qu’il entre ce con-là !”[147] » ; est ainsi mis en évidence l’arbitraire d’une injure qui est prononcée avant même que ne paraisse l’« injurié », ce qui suffit à donner une idée des rapports entre gradés et hommes de troupe et, partant, du monde militaire. Cette forme indirecte permet aussi aux hommes de troupe de formuler impunément des injures qu’ils ne peuvent adresser directement, l’« injurié » étant un supérieur : « Ah ! Le Meheu dis donc l’ordure ! Tu parles d’un phénomène de con ![148] ». L’injure de formulation indirecte prononcée en présence de l’« injurié » est particulièrement blessante puisqu’elle fait de celui-ci un absent et donne la place essentielle aux témoins. Il est révélateur que ce soit le narrateur qui fasse l’objet de cette forme d’injure qui le néantise[149] : « Il m’a repéré dans le fond du groupe. “Il a du retard le chacal !… […] Ah ! le guignol ! […]”[150] ».
L’injure « interpellative » qui s’adresse directement à l’« injurié » peut être formulée, s’il s’agit d’un nom, sans déterminant ou avec un déterminant, possessif ou article défini[151]. Dans ce dernier cas, seul l’emploi simultané d’un pronom et / ou d’une forme verbale de deuxième ou de cinquième personne montre qu’il ne s’agit pas d’une injure indirecte : « Tu vois la fleur t’es mal venu… pauvre casse-couilles ![152] […] ». L’injure formulée sans déterminant, forme habituelle de l’apostrophe quand celle-ci est un nom commun, est en quelque sorte non marquée. Elle est employée par tout « injurieur », quel que soit son grade, à la différence de l’injure à déterminant possessif qui est employée par un supérieur dont elle marque le pouvoir lorsqu’il s’adresse à un inférieur. Ainsi le déterminant possessif est-il mis dans la bouche du sous-officier Rancotte s’adressant au brigadier : « Ah ! Le Meheu mon arsouille ![153] », au planton : « Il s’est repenché sur le planton. / “Toi mon zoulou ! mon tire au cul ![154] […]” », aux hommes de troupe : « Faudrait savoir mes empaffés ![155] », mais très rarement dans celle du brigadier Le Meheu : « Du coup mes vaches là c’est votre mort ![156] ». Les hommes de troupe qui n’ont d’autorité sur personne formulent leurs injures essentiellement sans déterminant. L’injure précédée du déterminant article défini est souvent au pluriel, s’adressant à l’ensemble des hommes de troupe. Employée au singulier, elle est toujours adressée au narrateur, que ce soit par Rancotte : « La gondole ![157] », par Le Meheu : « l’enflure[158] » ou par l’ancien, L’Arcille : « le loustic ![159] ». Le déterminant, dans ce cas, donne à l’injure un caractère définitoire ; ce qui pouvait sans déterminant être tenu pour une qualification passagère devient caractérisation permanente, présentée comme reconnue non seulement par l’« injurieur », mais aussi par le reste de la collectivité. L’injure prend ainsi une dimension polyphonique. La majorité des injures sont de formulation directe, forme de la franche agression verbale. Il est significatif que, dans une même intervention, l’« injurieur » passe d’une formulation indirecte à une formulation directe sans déterminant, l’« injurié » étant présent : l’agressivité est présentée comme allant croissant : « Dis donc la bleusaille, c’est pas bon ça […] Dis cafard ?[160] ». L’inverse est aussi possible, le passage de la formulation directe à la formulation indirecte représentant une variation de l’agressivité : « Mais que t’es plâtré petit sale ! Ah ! le coucou ![161] ».
L’esthétique de l’injure ne saurait être envisagée en dehors de la portée de celle-ci. La valeur d’un acte de langage s’évalue, en effet, en termes de réussite ou d’échec. Pour juger de l’injure doivent être pris en compte l’« injurieur », l’« injurié », la forme, le contenu de l’injure et la fonction syntaxique du terme injurieux. Lorsque celui-ci est employé en apostrophe et constitue la désignation même de l’individu au même titre que le nom propre : « Tu m’entends voyou ?[162] », il a plus de portée que lorsque, employé seul, il n’a qu’une valeur prédicative : « Maquereaux pourris ![163] ». Dans Casse-pipe, la majorité des injures sont employées en apostrophe. Dans le monde militaire, hiérarchisé, le fonctionnement habituel des actes de langage est perturbé : une question posée par un supérieur peut devoir rester sans réponse : « “[…] Y a plus rien à manger chez toi ? Le four a chu ?” / Je voyais qu’il fallait rien répondre[164] ». L’injure, on l’a vu, est à sens unique, exceptée entre hommes de même grade : « T’en as bandit ! / — D’où qu’il se trouve alors, cré cochons ? / — Dans ton bordel eh ! canaille ![165] ». C’est dans ce cas seulement que peut se poser la question de la coïncidence ou non entre l’effet visé et son effectivité.
L’activité de l’« injurieur », qui sait ne pas avoir de réponse, peut s’exercer sans entraves. Le plus souvent, dans Casse-pipe, l’injure n’a d’autre motivation que l’emportement de l’« injurieur » : « Il est revenu vers moi Rancotte, il a repiqué une petite crise […] “Regarde bleusaille ! Regarde ça fleur d’insolence !”[166] » ; il importe peu qu’elle ait un signifié précis. Même dans ce cas, elle peut être immotivée, telles les injures dénonçant la puanteur du nouveau : « C’était évident ce Rancotte rien qu’à ma dégaine qu’il me prenait en antipathie[167]… ». L’injure a essentiellement une fonction expressive et se traduit souvent par l’excès : « C’était le Rancotte… […] Il aboyait de plus en plus, de rage. / “Meheu ! Meheu !… Faut-il que j’arrive ? Assassin !”[168] ». L’« injurieur » peut employer successivement à l’adresse d’un même « injurié » les termes injurieux les plus divers : « fin Parisien de la grande jacasse », « grand cagneux guignol » et « culeur d’âne[169] ». L’injure importe non tant par son signifié que par l’acte qu’elle constitue, ce dont témoigne la diversité sémantique des variantes : « dégoûtant ! »[170] est le résultat d’hésitations entre « insolent », « choléra », « canaille », « bourrique »[171]. Une même injure peut être employée dans des contextes différents : ainsi, « ours » ne dénote pas toujours la puanteur : « Gafez bien les ours…[172] ». En l’absence de motivation et de signifié précis, l’injure devient quasiment « insulte rituelle[173] », marque de l’échange dans le milieu militaire.
L’esthétique de l’injure en tant qu’acte de langage est liée à la fonction que celle-ci assume dans la construction textuelle et à la part qu’elle a dans la signification du texte.
L’injure dans Casse-pipe est un élément narratif dans la mesure où c’est une injure « guirlande[174] » qui déclenche le souvenir du mot de passe perdu[175].
La plupart y étant employées en apostrophe, les injures sont la modalité la plus fréquente de désignation des individus. Adressées à un seul, elles dépersonnalisent l’individu[176] ; c’est ce que fait Rancotte qui utilise surtout l’injure comme modalité d’adresse individuelle. Non content de dépersonnaliser l’individu, il en fait sa chose par l’emploi particulièrement fréquent, on l’a dit, du déterminant possessif. Dans le cas d’une injure comme terme d’adresse employé au pluriel, la portée est évidemment moindre puisque la cible est indifférenciée, mais l’insulte noie tout de même l’individu dans l’indistinction du collectif. C’est ainsi que l’emploient souvent Le Meheu : « en file ! les lardons ![177] » et L’Arcille : « les grosses bises[178] ». Celui-ci, toutefois, se distingue par l’emploi de termes à valeur hypocoristique qui, précédés du déterminant possessif, traduisent une attitude protectrice : « mes petites têtes ![179] », « Mes chères cocottes ![180] ». L’emploi qui est fait de l’injure, on le voit, contribue à la différenciation des personnages. Ainsi Rancotte apparaît-il comme le plus vicieux, se signalant par un sadisme qui s’exprime à travers l’ironie de ses appellatifs : « Attendez, ma superbe recrue. […] Que t’en baveras des chambrières ![181] ».
• L’esthétique de l’injure est liée encore à la manière dont elle s’intègre dans l’écriture même.
Elle s’y agrège phoniquement, comme on l’a vu, dans la mesure où elle peut être générée par le cotexte phonique : « La tante il me la sonne en fanfare ! […] Fantoche ![182] », permettant à l’occasion un calembour : « il est rond ce veau[183] ».
Elle s’y attache sémantiquement, qu’elle se justifie par le cotexte antérieur gauche : « Allez me remplir le seau ! la cruche ![184] », ou par le cotexte droit : « Triste frappe ! votre baguette est pourrie ![185] ». Elle peut ainsi pénétrer dans un réseau d’isotopies[186] : « Qu’est-ce que ça va être mon oiseau quand on va vous faire envoler ! Ah ! pardon alors la voltige ! Ah ! le joli colibri ![187] ». Cette intégration est d’autant plus forte que l’injure s’insère dans le réseau développé dans la narration : « Je le voyais pas bien dans ses frusques, dans ses épaisseurs. Il était trop dissimulé entre ses volants, dans la compression, entre son casque et le fond de l’ombre. “Va chier hé poireau !”[188] ». Un terme injurieux peut appeler un synonyme : le narrateur est ainsi qualifié de « sagouin[189] », puis de « ouistiti[190] », termes qui dénotent tous deux à l’origine un petit singe à longue queue.
Si l’injure s’intègre pleinement dans l’écriture, c’est aussi par le rythme qu’elle contribue à créer. Le rythme, « organisation du mouvement de la parole[191] », est généralement considéré comme lié à la perception de rapports entre le nombre de syllabes que comportent dans un énoncé les divers groupes rythmiques[192]. Cette perception joue à différents niveaux ; l’injure, en effet, doit être prise en compte dans son rapport au reste de l’énoncé et dans son rapport avec les autres injures.
Elle contribue au rythme de l’énoncé du fait de sa nature même. Elle en est, en effet, un élément fondamental, en ce qu’elle est, dans un emploi direct ou indirect, toujours terminée par un accent. Elle constitue souvent à elle seule un groupe rythmique, terminé par une syllabe accentuée. C’est toujours le cas lorsqu’elle a une formulation directe, qu’elle soit simple appellatif : « Tu m’entends toi la godille ?[193] » ou qu’elle ait une valeur prédicative : « Un kilo de rouille dans son pétard ! Ah ! Ah ! zigoto ![194] ». De surcroît, le poids de ce groupe est renforcé par la place très fréquente de l’injure en fin d’énoncé : « Comment que t’es foutu malagaufre ![195] », « Entendez charognes ![196] ». Les injures rythment ainsi l’énoncé de manière variable selon la densité plus ou moins grande de leur emploi. Le rythme qu’elles créent est souvent souligné par une disposition remarquable, comme le chiasme : « Cochon ! (2 syllabes) Attends ! attends ! la colique ! (2 syllabes)[197] », ou par une identité de position dans des énoncés successifs : « Il est fin perdu l’empaffé ! […] Ils vont le tuer le sacré outil ! […] Je le vois bien mort moi votre macaque ![198] ». L’effet de cette identité de position peut être souligné par des parallélismes syntaxiques et lexicaux : « Z’ont bouffé des cartouches, les carcans maudits ! Z’ont l’enfer au cul, les salopes ![199] », « Regarde bleusaille ! Regarde ça fleur d’insolence ![200] » ; par l’identité de longueur des injures : « Te voici alors mon joyeux ! (3 syllabes) Attends ma petite tête ! (3 syllabes) Attends mon arsouille ! (3 syllabes)[201] », « — Oui que c’est pour ta tronche paumé (2 syllabes) ! Oui que c’est bien pour toi guignol (2 syllabes) ![202] ».
Elle participe au rythme par les récurrences phoniques qu’elle contribue à créer, notamment en syllabe finale accentuée : « — Debout, Meheu ! Debout, sale andouille ![203] ». Le poids d’une récurrence phonique en syllabe accentuée peut être renforcé par la récurrence du phonème à l’intérieur de l’injure elle-même : « Il a du retard le chacal ![204] » , « C’est magnifique ! Il est fadé le ouistiti ![205] ».
Elle contribue métriquement au rythme de l’énoncé par le rapport qu’elle entretient avec le cotexte. Dans le cas d’une injure isolée, le rythme est déterminé par le rapport de longueur entre le groupe constitué par l’injure et les groupes antécédents et / ou suivants. Ce rapport peut valoir entre énoncés différents aussi bien qu’à l’intérieur d’un même énoncé [206] ; ce peut être un rapport d’égalité, source d’un rythme régulier : « Ah ! Le Meheu (3 syllabes) dis donc (2 syllabes) l’ordure (2 syllabes) ![207] ». Un rapport d’inégalité correspond souvent à une cadence mineure qui, rapprochant les accents, souligne l’agression que constitue l’injure : « “Te rappelle plus alors (6 syllabes ) manche ? (1 syllabe)”[208] ». Un rythme peut s’insérer dans un rythme plus large : les deux séquences parallèles composées chacune de 1+2 syllabes — « Halte ! Cochon ! […] Halte, bandit ![209] » — sont ainsi les composants d’un rythme plus large, fait de groupes de trois syllabes interrompus par un groupe de quatre syllabes : « Brigadier ! (3 syllabes) Brigadier ! (3 syllabes) Halte (1 syllabe) ! Cochon ! (2 syllabes) À ma botte ! (3 syllabes) Entendez-vous ! (4 syllabes) Halte, bandit ! » (1+2 syllabes). Le rythme créé par l’injure peut être nuancé et brouillé, notamment par la ponctuation ; ainsi, dans « Cochon (2 syllabes) ! Attends (2 syllabes) ! attends (2 syllabes) ! la colique ! (3 syllabes)[210] », le rythme dissyllabique, souligné par les récurrences lexicales, est brouillé du fait de la majuscule d’« Attends » qui isole la première injure, ainsi que par la forme indirecte de la dernière injure qui lui donne trois syllabes, en dépit de l’identité métrique de « cochon » (2 syllabes) et « colique » (2 syllabes) renforcée par l’identité de leur première syllabe « co- ».
Ce que l’on observe pour les injures qui parsèment un énoncé vaut aussi quand le rythme des injures s’accélère et qu’elles se succèdent sans interruption. Une égalité métrique entre injures crée un rythme régulier : « Voyou ! (2 syllabes) Cochon ! » (2 syllabes)[211], qui peut être souligné par des récurrences phoniques : « gros jobard ! (3 syllabes) salopard ! » (3 syllabes)[212]. Pareille régularité semble laisser le champ ouvert à d’autres injures, sinon à l’infini, du moins autant que l’« injurieur » a de souffle. Les injures peuvent être de longueur inégale déterminant une cadence majeure ou une cadence mineure. Une cadence majeure, qui fait se succéder à une injure une injure plus longue encore, a pour effet de ralentir la cadence injurieuse, les accents que porte la dernière syllabe de l’injure s’éloignant ; le ralentissement est souvent de faible importance : « Galvaudeux ! (3 syllabes) Foutus propres à rien ! » (5 syllabes)[213]. Une cadence mineure, en revanche, fait succéder des injures de longueur décroissante, ce qui accélère la cadence injurieuse, les accents se rapprochant : « damnés croquants chassieux ! (6 syllabes) vendus ! » (2 syllabes)[214]. L’agressivité est d’autant plus marquée que les deux injures diffèrent métriquement et que la seconde est brève, ce qui fait se succéder à un bref intervalle deux syllabes accentuées. Céline, là encore, peut brouiller le rythme par la ponctuation ; l’absence de ponctuation entraîne ainsi à faire de ce qui pourrait constituer deux injures, « fainéants » pouvant être un nom, un seul groupe rythmique, accentué sur la syllabe finale : « Damnés fainéants têtes de bûches ![215] ».
Si l’on peut parler d’une esthétique de l’injure, c’est bien dans Casse-pipe. Céline y met pleinement à profit, tant sur le plan du signifiant que sur celui du signifié, la liberté qu’autorise l’injure, pour représenter un monde où, bien qu’elle soit employée massivement par tous, son fonctionnement est souvent bloqué, faute de réplique permise. Mais l’injure n’est pas seulement le pilier du monde créé. Elle est intimement intégrée à la création même, tant narrativement que stylistiquement : elle contribue à la génération du texte et en nourrit le rythme.
Appendices
Note biographique
Catherine Rouayrenc
Catherine Rouayrenc, agrégée de grammaire, est professeur émérite de linguistique française de l’Université de Toulouse — le Mirail. Sa thèse d’État a eu pour objet l’étude du langage populaire et argotique dans le roman français de 1914 à 1939. Ses travaux portent sur le français non standard et sur la transposition de l’oral dans l’écrit (Céline, Ramuz, Guilloux, Poulaille, etc.). Elle a publié : « C’est mon secret ». La technique de l’écriture « populaire » dans Voyage au bout de la nuit et Mort à crédit (Tusson, Éditions du Lérot, 1994) ; Les gros mots (Paris, Presses universitaires de France, 1996 ; repris dans la collection « Que sais-je ? », 1998). Elle a également rédigé le « Vocabulaire populaire et argotique » du volume IV des Romans de Céline (Paris, Gallimard (Bibliothèque de la Pléiade), 1993).
Notes
-
[1]
Le nouveau Petit Robert, 2007.
-
[2]
Voir Évelyne Larguèche, L’effet injure, 1983.
-
[3]
Ce roman, rédigé après la publication de Mort à crédit, n’a paru qu’en 1948. Les références sont celles de l’édition dans la Bibliothèque de la Pléiade, Romans III, 1988.
-
[4]
Louis-Ferdinand Céline, Casse-pipe, dans Romans III, 1988, p. 40.
-
[5]
Ibid., p. 32.
-
[6]
Ibid., p. 18.
-
[7]
Ibid., p. 28.
-
[8]
Ibid., p. 43.
-
[9]
Ibid., p. 14. Un autre exemple : « Tu charries, nez d’ rat ! », Le feu, 1965, p. 146.
-
[10]
Casse-pipe, op. cit., p. 43.
-
[11]
Une des désignations argotiques du pénis.
-
[12]
Ibid., p. 8.
-
[13]
Ibid., p. 61.
-
[14]
Ibid., p. 28.
-
[15]
Ibid., p. 12.
-
[16]
Ibid., p. 16.
-
[17]
Ibid., p. 17.
-
[18]
Ibid., p. 19.
-
[19]
Ibid., p. 61.
-
[20]
Ibid., p. 30.
-
[21]
Ibid., p. 40.
-
[22]
Ibid., p. 8.
-
[23]
Ibid., p. 46. Déjà présente dans l’expression faite d’un syntagme prépositionnel : « à la mords-moi l’œil, le nœud / pif / doigt / chose… »
-
[24]
Ibid., p. 39.
-
[25]
Ibid., p. 14.
-
[26]
Ibid., p. 25. Cela s’observe couramment dans certains cas où, dans la structure N1 de N2, le déterminant peut s’accorder soit avec N1 : ma vache de frère, soit avec N2 : mon vache de frère ; voir Jean-Claude Milner, De la syntaxe à l’interprétation, 1978, p. 192.
-
[27]
C’est à partir de « guirlande » qu’est formé « enguirlander », réprimander, mais dont le premier signifié est « orner de guirlandes ».
-
[28]
Casse-pipe, op. cit., p. 32.
-
[29]
Ibid., p. 16.
-
[30]
Ibid., p. 21.
-
[31]
Ibid., p. 45.
-
[32]
Ibid., p. 25, 38.
-
[33]
Ibid., p. 33, 39.
-
[34]
Ibid., p. 11.
-
[35]
Ibid., p. 23.
-
[36]
Ibid., p. 47.
-
[37]
Ibid., p. 23, 31, 32.
-
[38]
Ibid., p. 27.
-
[39]
Ibid., p. 24.
-
[40]
Ibid., p. 28.
-
[41]
Ibid., p. 54.
-
[42]
Ibid., p. 40, 46.
-
[43]
Ibid., p. 44, 48.
-
[44]
Ibid., p. 31, 29.
-
[45]
Ibid., p. 16, 32.
-
[46]
Ibid., p. 14, 23.
-
[47]
Ibid., p. 36, 40.
-
[48]
Ibid., p. 32, 42, 46.
-
[49]
Ibid., p. 8, 19, 54.
-
[50]
Ibid., p. 18, 23, 39, 42.
-
[51]
Ibid., p. 17.
-
[52]
Ibid., p. 8.
-
[53]
Ibid., p. 29.
-
[54]
Ibid., p. 10.
-
[55]
Ibid., p. 53.
-
[56]
Ibid., p. 41.
-
[57]
Ibid., p. 33.
-
[58]
Ibid., p. 39.
-
[59]
Ibid., p. 30.
-
[60]
Ibid., p. 7.
-
[61]
Ibid., p. 4.
-
[62]
Ibid., p. 23.
-
[63]
Ibid., p. 44.
-
[64]
Ibid., p. 25.
-
[65]
Ibid., p. 53.
-
[66]
Ibid., p. 17.
-
[67]
Ibid., p. 24.
-
[68]
Ibid., p. 46.
-
[69]
Ibid., p. 32.
-
[70]
Ibid., p. 43.
-
[71]
Ibid., p. 54.
-
[72]
Ibid., p. 27.
-
[73]
Ibid., p. 11.
-
[74]
Ibid., p. 46.
-
[75]
Ibid., p. 14.
-
[76]
Ibid., p. 49.
-
[77]
Ibid., p. 11, 23.
-
[78]
Ibid., p. 4.
-
[79]
Ibid., p. 30, 41.
-
[80]
Ibid., p. 48.
-
[81]
Ibid., p. 45.
-
[82]
Ibid., p. 20.
-
[83]
Ibid., p. 46.
-
[84]
Le caractère injurieux peut être donné par le caractérisant, adjectif : « Maudit fifre ! » (ibid., p. 52) ou nom complément : « Individu de vice ! » (id.).
-
[85]
Ibid., p. 44.
-
[86]
Ibid., p. 4.
-
[87]
Ibid., p. 53.
-
[88]
Ibid., p. 5. Voir Marc Angenot, La parole pamphlétaire. Typologie des discours modernes, 1995.
-
[89]
Ceci n’a rien de surprenant, l’assimilation des hommes de troupe à des bêtes étant à plusieurs reprises soulignée dans la narration : « Ils sont là en tas comme des bêtes… » Casse-pipe, op. cit. (p. 9) ; « arqués sur leurs carabines. Comme une troupe de bêtes au piquet […] », ibid. (p. 18).Voir Christine Sautermeister, Céline vociférant ou l’art de l’injure, 2002, p. 111-114.
-
[90]
Casse-pipe, op. cit., p. 12.
-
[91]
Ibid., p. 9.
-
[92]
Ibid., p. 36.
-
[93]
Ibid., p. 18, 23, 42.
-
[94]
Ibid., p. 30.
-
[95]
Ibid., p. 14.
-
[96]
Ibid., p. 16.
-
[97]
Ibid., p. 32.
-
[98]
Ibid., p. 19.
-
[99]
Ibid., p. 12.
-
[100]
Ibid., p. 4.
-
[101]
Ibid., p. 9.
-
[102]
Ibid., p. 4.
-
[103]
Ibid., p. 44.
-
[104]
Dans Louis-Ferdinand Céline, Le feu, op. cit., p. 176 : « fil à trous ».
-
[105]
Casse-pipe, op. cit., p. 19 et 44.
-
[106]
Ibid., p. 14.
-
[107]
Ibid., p. 9.
-
[108]
Ibid., p. 12, 32.
-
[109]
Ibid., p. 16, 32, 42.
-
[110]
Ibid., p. 10, 19.
-
[111]
Ibid., p. 40.
-
[112]
Ibid., p. 19.
-
[113]
Ibid., p. 27.
-
[114]
Ibid., p. 43.
-
[115]
Ibid., p. 18.
-
[116]
Ibid., p. 8.
-
[117]
Ibid., p. 7.
-
[118]
Ibid., p. 18.
-
[119]
Ibid., p. 43.
-
[120]
Ibid., p. 48.
-
[121]
Ibid., p. 30.
-
[122]
Ibid., p. 40.
-
[123]
Id.
-
[124]
Ibid., p. 10.
-
[125]
Ibid., p. 40.
-
[126]
Ibid., p. 42. Ce sens est attesté chez Huysmans, voir Trésor de la langue française, 1971-1994.
-
[127]
Casse-pipe, op. cit., p. 10.
-
[128]
Ibid., p. 26.
-
[129]
Ibid., p. 11.
-
[130]
Ibid., p. 51.
-
[131]
Ibid., p. 10.
-
[132]
Ibid., p. 22.
-
[133]
Ibid., p. 33.
-
[134]
Ibid., p. 28.
-
[135]
Voir John Langshaw Austin, Quand dire c’est faire, 1970.
-
[136]
Voir la définition du discours légitime par Pierre Bourdieu dans « L’économie des échanges linguistiques », 1977.
-
[137]
« Y a eu tout de suite des injures, plein les échos », Casse-pipe, op. cit., p. 22.
-
[138]
Voir les remarques du narrateur concernant l’arrivée de Rancotte : « Et tout de suite une rafale d’injures, de menaces […] », ibid., p. 6.
-
[139]
Ibid., p. 18. Voir Catherine Rouayrenc, « Céline entre juron et injure », 1999.
-
[140]
Casse-pipe, op. cit., p. 16.
-
[141]
Ibid., p. 11.
-
[142]
Ibid., p. 48.
-
[143]
Ibid., p. 40.
-
[144]
Ibid., p. 39. Ce qui est confirmé par sa désignation par le pronom « ça » : « Je veux plus de ça ici ! » Ibid., p. 7.
-
[145]
Voir Évelyne Larguèche, L’effet injure, 1983.
-
[146]
Casse-pipe, op. cit., p. 39.
-
[147]
Ibid., p. 3.
-
[148]
Ibid., p. 36.
-
[149]
Un terme injurieux peut aussi apparaître dans un énoncé déclaratif, souvent avec un verbe attributif : « Ah vous êtes tous des beaux boudins… », ibid., p. 18.
-
[150]
Ibid., p. 27.
-
[151]
Voir Louis-Ferdinand Céline, « Notes et variantes », dans Romans III, op. cit., p. 918.
-
[152]
Casse-pipe, op. cit., p. 29.
-
[153]
Ibid., p. 46.
-
[154]
Ibid., p. 52.
-
[155]
Ibid., p. 8.
-
[156]
Ibid., p. 19.
-
[157]
Ibid., p. 53.
-
[158]
Ibid., p. 4.
-
[159]
Ibid., p. 32.
-
[160]
Ibid., p. 14.
-
[161]
Ibid., p. 33.
-
[162]
Ibid., p. 49.
-
[163]
Ibid., p. 47.
-
[164]
Ibid., p. 8.
-
[165]
Ibid., p. 32.
-
[166]
Ibid., p. 10.
-
[167]
Ibid., p. 7.
-
[168]
Ibid., p. 40.
-
[169]
Ibid., p. 28.
-
[170]
Ibid., p. 41.
-
[171]
William Labov (Le parler ordinaire, 1978, p. 223-288) distingue « insulte rituelle » et « insulte personnelle » ; voir Catherine Rouayrenc, Les gros mots, 1998.
-
[172]
Casse-pipe, op. cit., p. 19.
-
[173]
« Voilà qu’à ce moment précis Le Meheu qu’était si prostré il lui passe un soubresaut. Il se requinque, il braille / "Ça y est ! J’y suis ! C’est une fleur !" » Ibid., p. 47. Voir Christine Sautermeister, Céline vociférant, op. cit., p. 120.
-
[174]
Casse-pipe, op. cit., p. 46.
-
[175]
Marc Angenot, La parole pamphlétaire, op. cit., p. 266 : « Injurier, c’est d’abord refuser à celui qu’on attaque son nom "propre", refuser de l’identifier. »
-
[176]
Homonymie avec Roncevaux, col des Pyrénées où Roland, neveu de Charlemagne, trouva la mort (15 août 778).
-
[177]
Casse-pipe, op. cit., p. 14.
-
[178]
Ibid., p. 30.
-
[179]
Ibid., p. 34.
-
[180]
Ibid., p. 41.
-
[181]
Ibid., p. 7.
-
[182]
Ibid., p. 53-54.
-
[183]
Ibid., p. 48. Voir également Christine Sautermeister, « Technique de l’injure célinienne », 1981.
-
[184]
Casse-pipe, op. cit., p. 49.
-
[185]
Ibid., p. 11.
-
[186]
Gérard Dessons et Henri Meschonnic, Traité du rythme, 1998, p. 26.
-
[187]
Casse-pipe, op. cit., p. 7.
-
[188]
Ibid., p. 5.
-
[189]
Ibid., p. 7.
-
[190]
Ibid., p. 43.
-
[191]
Voir Jean Mazaleyrat, Éléments de métrique française, 1974, p. 14.
-
[192]
« Énoncé » désigne ici la séquence énonciative que Céline place entre deux points et qui peut correspondre à une ou plusieurs « phrases » syntaxiques.
-
[193]
Casse-pipe, op. cit., p. 15.
-
[194]
Ibid., p. 11.
-
[195]
Ibid., p. 16.
-
[196]
Ibid., p. 23.
-
[197]
Ibid., p. 16.
-
[198]
Ibid., p. 27.
-
[199]
Ibid., p. 15.
-
[200]
Ibid., p. 10.
-
[201]
Ibid., p. 40.
-
[202]
Ibid., p. 25.
-
[203]
Ibid., p. 39.
-
[204]
Ibid., p. 27.
-
[205]
Ibid., p. 43.
-
[206]
Le rythme majoritaire de deux syllabes incite ici à faire de Le Meheu un dissyllabe [l?mø], ce qui renforce ou corrobore l’interprétation onomatopéique du nom du brigadier.
-
[207]
Casse-pipe, op. cit., p. 36.
-
[208]
Ibid., p. 16.
-
[209]
Ibid., p. 42.
-
[210]
Ibid., p. 16.
-
[211]
Ibid., p. 39.
-
[212]
Ibid., p. 38.
-
[213]
Ibid., p. 23.
-
[214]
Ibid., p. 24.
-
[215]
Ibid., p. 19.
Références
- Le nouveau Petit Robert, Paris, Le Robert, 2007.
- Trésor de la langue française, Paris, Éditions du C.N.R.S. — Gallimard — Klincksieck, 16 vol., 1971-1994.
- Angenot, Marc, La parole pamphlétaire. Typologie des discours modernes, Paris, Payot, 1995.
- Austin, John Langshaw, Quand dire c’est faire, Paris, Éditions du Seuil, 1970.
- Bourdieu, Pierre, « L’économie des échanges linguistiques », Langue française, no 34 (mai 1977), p. 17-39.
- Céline, Louis-Ferdinand, Le feu, Paris, Flammarion, 1965 [1916].
- — — —, Romans III, Paris, Gallimard (Bibliothèque de La Pléiade), 1988 (éd. d’H. Godard).
- Dessons, Gérard et Henri Meschonnic, Traité du rythme, Paris, Dunod, 1998.
- Labov, William, Le parler ordinaire, Paris, Éditions de Minuit, 1978 (trad. d’A. Kihm).
- Larguèche, Évelyne, L’effet injure, Paris, Presses universitaires de France, 1983.
- Mazaleyrat, Jean, Éléments de métrique française, Paris, Armand Colin, 1974.
- Milner, Jean-Claude, De la syntaxe à l’interprétation, Paris, Éditions du Seuil, 1978.
- Rouayrenc, Catherine, « Céline entre juron et injure », dans Classicisme de Céline, Actes du XIIe colloque international, Paris, Société d’études céliniennes, 1999, p. 264-288.
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