Volume 46, Number 1, 2022
Table of contents (15 articles)
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Gospel Selections: The First Book in Inuktitut Syllabics
Kenn Harper
pp. 1–16
AbstractEN:
The syllabic writing system invented for the Cree was first introduced to Inuit in 1855 by Rev. Edwin A. Watkins (1827–1907) at Fort George and Little Whale River on the James Bay and Hudson Bay coasts, respectively. That same year at Fort George, Watkins prepared a small book of gospel selections in Inuktitut syllabics with the help of a young Inuk, Peter Okakterook (circa 1836–1858), and sent it to Rev. John Horden (1828–1893) in Moose Factory, who printed it on the press he had acquired for his mission. This small book is one of the earliest items printed on Horden’s press, and the only one printed in Inuktitut. Only one copy is known to have survived, at Library and Archives Canada, where it is catalogued under the title Selections from the Gospels in the Dialect of the Inuit of Little Whale River. The small volume of eight pages, transliterated into syllabics from Moravian publications prepared in the roman orthography used for Inuttut on the Labrador coast in present-day Nunatsiavut, was intended for use by Inuit in Nunavik. Although printed in syllabics using what are today seen as western Cree syllable-final symbols, the text is readable by and understandable to modern Inuit readers. This paper examines early missionary efforts to develop literacy for mission purposes among Inuit, including the printing and distribution of this small volume.
FR:
Le système d’écriture syllabique inventé pour les Cris a été introduit pour la première fois aux Inuit en 1855 par le révérend Edwin A. Watkins (1827-1907) à Fort George et Petite rivière de la Baleine sur les côtes de la baie James et de la baie d’Hudson respectivement. Cette année-là, Watkins, qui travaillait à Fort George, rédigea avec l’aide d’un jeune Inuk, Peter Okakterook (vers 1836–1858), un petit livre d’extraits des évangiles en syllabaire inuktitut. Il envoya le manuscrit au révérend John Horden (1828–1893) à Moose Factory qui l’imprima sur la presse acquise pour sa mission, en 1855. L’impression a été achevée en 1856. Ce livret est l’un des premiers ouvrages tirés sur la presse de Horden, et le seul en inuktitut. L’unique exemplaire connu à avoir survécu se trouve à Bibliothèque et Archives Canada où il est catalogué sous le titre Selections From the Gospels in the Dialect of the Inuit of Little Whale River. Le volume de huit pages, destiné à être utilisé par les Inuit du Nunavik, a été translittéré en syllabique à partir de publications moraves écrites en alphabet latin et préparées pour l’Inuttut de la côte du Labrador dans l’actuel Nunatsiavut. Bien qu’il ait été rédigé en syllabique en employant ce que l’on considère aujourd’hui être des symboles finaux du syllabaire des cris de l’Ouest, le texte est lisible et compréhensible pour un lectorat inuit moderne. Cet article examine les efforts des premiers missionnaires pour développer l’alphabétisation à des fins évangéliques chez les Inuit, y compris l’impression et la distribution de ce petit volume.
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Archibald L. Fleming, un observateur intéressé ? Entre christianisation et chamanisme, le recensement des Inuit du sud de la terre de Baffin en 1913-1914
Frédéric Laugrand and Louis-Jacques Dorais
pp. 17–42
AbstractFR:
À deux reprises, entre 1909 et 1915, Archibald Lang Fleming a séjourné dans la région de Lake Harbour (Kimmirut) pour y convertir les populations à l’anglicanisme. Avant de devenir le tout premier évêque du Diocèse de l’Arctique, il a voyagé en traîneau à chiens avec des Inuit qui l’ont surnommé Inuktauqauq, « le nouveau membre Inuk ». L’essentiel de son travail est demeuré l’évangélisation, et c’est dans ce cadre qu’il a réalisé en 1913-14 un recensement détaillé de tous les Inuit qui vivaient dans des camps situés entre la baie de Cumberland et la région de Cape Dorset. Cet article contextualise ce document inédit et fondamental pour l’histoire des Inuit de la terre de Baffin. Il montre qu’en marge de ce recensement, Fleming s’est interrogé sur les conceptions « païennes » de ses ouailles et, fait rare dans l’histoire des missions, qu’il a même participé à une fête de Sedna. Ces actions fondent l’idée qu’il agissait, selon sa propre expression, comme « un observateur intéressé ».
EN:
On two occasions, between 1909 and 1915, Archibald Lang Fleming sojourned in the area of Lake Harbour (Kimmirut), to convert the local population to Anglicanism. Before he became the very first bishop of the Diocese of the Arctic, he had travelled by dog team with Inuit, who nicknamed him Inuktauqauq, “the Inuk who recently joined in.” His labour was essentially devoted to evangelizing the Inuit, and in virtue of that, he completed in 1913-14 a detailed census of all Inuit who lived in camps between Cumberland Sound and the Cape Dorset area. This article contextualizes this unpublished document, fundamental to the history of the Baffin Land Inuit. It shows that besides his census work, Fleming questioned himself on the “pagan” concepts of his flock and, unusually in missionary history, he even took part in a Sedna festival. These activities support the fact that, according to his own words, he acted as an “interested observer.”
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“If They Were Important, We Would Have Heard About Them”: Inuit History Beyond Canadian Mythology
Mark Stoller, Jennifer Ullulaq and Barbara Okpik
pp. 43–62
AbstractEN:
The community of Gjoa Haven/Uqsuqtuuq has recently received national and international attention for its proximity to the lost ships of the nineteenth century Franklin expedition. The locating of Franklin’s ships in 2014 and 2016 has been followed by celebrations of the role of Inuit knowledge in finding the wrecks, and thought to hold promise for how Inuit and Western research partnerships are conducted. Yet many people in Gjoa Haven, and particularly its youth, have little knowledge of or interest in the Franklin story. Locally, Franklin stores are associated with Qablunaat (non-Inuit) interests in northern history, but they are not representative of Inuit history. We examine the relationship between Inuit and Qablunaat history in Gjoa Haven, with a focus on what is important to its youth. Although Franklin stories are of limited importance in Inuit history, they continue to influence how Inuit are perceived by non-Inuit and present obstacles to informing Qablunaat about Inuit history and culture. As young Inuit have more opportunities to interact with Qablunaat, the subject of history offers space for these youth to articulate their own views and priorities for learning and sharing northern stories.
FR:
La communauté de Gjoa Haven/Uqsuqtuuq a récemment reçu une attention nationale et internationale pour sa proximité avec les navires perdus de l’expédition Franklin du XIXe siècle. La découverte des navires de Franklin en 2014 et 2016 a été suivie par les célébrations du rôle des savoirs inuit dans la découverte des épaves, et on pense qu’elle est prometteuse vu la manière dont les partenariats de recherche inuit et occidentaux seront mis en place. Pourtant, de nombreuses personnes à Gjoa Haven, et en particulier les jeunes, ont peu de connaissances ou d’intérêt pour l’histoire de Franklin. Localement, Franklin est associé aux intérêts des Qallunaat pour l’histoire du Nord, mais n’est pas représentatif de l’histoire des Inuit. Nous examinons la relation entre l’histoire inuit et l’histoire qallunaaq à Gjoa Haven en nous concentrant sur ce qui est important pour les jeunes. Bien que les histoires de Franklin aient une importance limitée pour l’histoire inuit, elles continuent d’influencer la façon dont les non-Inuit connaissent les Inuit et constituent des obstacles à l’information des Qablunaat sur l’histoire et la culture inuit. À mesure que les jeunes Inuit ont davantage d’occasions de s’adresser aux Qallunaat, le sujet de l’histoire offre un espace pour que les jeunes puissent articuler leurs propres points de vue et leurs priorités en matière d’apprentissage et de partage des histoires du Nord.
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Inuit Women Working in the Nunavik Justice System: A Relational Perspective on Justice
Caroline Hervé and Pascale Laneuville
pp. 63–83
AbstractEN:
The literature on how Inuit women relate to justice has thus far portrayed them largely as victims of various types of violence and in need of assistance. However, justice does not concern them only as victims, offenders, or affected family members, as many of them work in this field as crucial actors for their communities, providing people in difficulty with support and helping them navigate a complex structure. This article emphasizes the important role of Nunavik Inuit women today in maintaining community harmony. We also explore their views on the justice system and outline what an Inuit system of justice could look like today. Our research project used a participatory methodology, an ontological approach, and both qualitative and quantitative methods. Our results suggest that Nunavik justice is not simply a legal institution and should therefore be defined much more broadly and incorporate the moral principles of social responsibility and interdependence.
FR:
La littérature concernant les rapports des femmes inuit avec la justice les a jusqu’à présent dépeintes essentiellement comme des victimes de divers types de violence ayant besoin d’aide. Cependant, la justice ne les concerne pas seulement en tant que victimes, délinquantes ou membres de la famille affectés. Aujourd’hui, nombre d’entre elles travaillent dans ce domaine en tant qu’actrices cruciales pour leur communauté, apportant un soutien aux personnes en difficulté et les aidant à s’orienter dans une structure complexe. Nous soulignons ici le rôle important que jouent aujourd’hui les femmes inuit du Nunavik dans le maintien de l’harmonie communautaire. Nous présentons également leur point de vue sur le système judiciaire et esquissons ce à quoi pourrait ressembler un système de justice inuit aujourd’hui. À cette fin, nous présentons les résultats d’un projet de recherche pour lequel nous avons mobilisé une méthodologie participative, une approche ontologique, ainsi que des méthodes qualitatives et quantitatives. Nos résultats suggèrent que la justice au Nunavik n’est pas simplement une institution légale et devrait être définie de manière beaucoup plus large. Elle devrait incorporer les principes moraux de la responsabilité sociale et de l’interdépendance.
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Required Elements for Success and Benefits of Participation in Camps of an On-The-Land Program in the Inuvialuit Settlement Region
Mary Ollier, Audrey R. Giles, Meghan Etter, Jimmy Ruttan, Nellie Elanik, Ruth Goose and Esther Ipana
pp. 85–109
AbstractEN:
We report on a partnership between the Inuvialuit Regional Corporation (IRC) and the University of Ottawa to determine whether/how on-the-land programming offered culturally safe experiences to meet the self-identified needs of the residents of the Inuvialuit Settlement Region. This study draws upon the experiences of participants in the IRC’s land-based healing program, Project Jewel. We used postcolonial theory supported by a decolonization framework and critical Inuit studies to direct this community-based research methodology. The community advisory committee and the research advisory team co-determined semi-structured interviews, sharing circles, and photovoice as the chosen research methods for this project. Results indicate that land-based healing programs considerably enhanced cultural identity and meaningful connections to social support and Inuvialuit heritage in an “on-the-land” environment. Land-based programs may thus offer an alternative and effective healing opportunity for participants who feel uncomfortable or are not being adequately served by conventional community-based or residential treatment programs.
FR:
Cet article rend compte d’un partenariat entre la Société régionale inuvialuit et l’Université d’Ottawa déterminant si et comment le programme de guérison sur les terres ancestrales offre une expérience culturellement adéquate pour assurer les besoins identifiés par les résidents de la région des Inuvialuit. L’étude se base sur l’expérience des participants du programme de guérison sur les terres ancestrales Jewel développé par la Société régionale inuvialuit. Nous avons utilisé la théorie postcoloniale soutenue par des études critiques inuit et un cadre conceptuel de décolonisation pour orienter notre méthodologie de recherche communautaire. Le comité consultatif communautaire et l’équipe consultative de recherche ont co-déterminé comme méthode de travail pour ce projet des entretiens semi-dirigés, des cercles de partage et un photovox. Les résultats indiquent que les programmes de guérison sur les terres ancestrales ont considérablement renforcé l’identité culturelle et les liens significatifs avec le soutien social et le patrimoine inuvialuit dans un environnement « sur le terrain ». Les programmes sur les terres ancestrales peuvent donc offrir une possibilité de guérison alternative et efficace aux participants qui ne se sentent pas à l’aise ou qui ne sont pas adéquatement servis par les programmes de traitement communautaires ou résidentiels conventionnels.
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Épistémologie inuit et pistes de réflexion sur le système d’éducation au Nunavik (Note de recherche)
Alyssa Turpin-Samson
pp. 111–132
AbstractFR:
Selon le plan stratégique de la commission scolaire du Nunavik Kativik Ilisarniriliniq (KI), l’éducation doit permettre à l’apprenant inuk de devenir un homme à part entière, c’est-à-dire Inuguiniq. Cet objectif implique que le système d’éducation en place doit promouvoir l’insertion socioprofessionnelle de l’apprenant inuk, et ce, tout en préservant son intégrité culturelle. En s’inspirant du système multiniveau de Kanu (2011), nous proposons différentes pistes de réflexion conceptuelles et pratiques relatives à l’adaptation culturelle du système d’éducation du Nunavik, et ce, grâce à une intégration transversale de l’Inuit Qaujimajatuqangit. Plus précisément, un regard critique est porté sur l’adaptation culturelle des fondements philosophiques et épistémologiques du système d’éducation, des pratiques et des méthodes évaluatives et pédagogiques, du contenu curriculaire ainsi que des objectifs d’apprentissage. À la lumière de notre argumentaire, cette présentation désire proposer des pistes de solution de manière à favoriser l’autonomisation politique et l’autodétermination des Nunavimmiut en matière d’éducation.
EN:
Based According to the Nunavik Kativik Ilisarniriliniq (KI) School Board’s strategic plan, education must enable the Inuk learner to become a full-fledged human being, that is, Inuguiniq. This objective implies that the education system in place must promote the socio-professional integration of the learner, while preserving the cultural integrity of the Inuk learner. Drawing on Kanu’s (2011) multi-level system, we propose various conceptual and practical avenues for reflection on the cultural adaptation of Nunavik’s education system through the cross-cultural integration of Inuit Qaujimajatuqangit. Specifically, a critical look is taken at the cultural adaptation of the philosophical and epistemological foundations of the education system, assessment and pedagogical practices and methods, curricular content and learning objectives. In light of our argument, this presentation aims to propose possible solutions in order to foster political empowerment and self-determination of Nunavimmiut in the field of education.
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Pratique du silence et responsabilisation des jeunes enfants dans les Centres de la Petite Enfance au Nunavik (Note de recherche)
Ariane Benoit
pp. 133–154
AbstractFR:
La Section des services de garde à l’enfance de l’Administration Régionale Kativik est en charge de la gestion des Centres de la Petite Enfance (CPE). Au Nunavik, les jeunes enfants sont nombreux à fréquenter ces établissements préscolaires. L’analyse des interactions à l’oeuvre dans les CPE montre que le silence détient des fonctions spécifiques en relation avec certains préceptes éducatifs inuit qui permettent aux enfants de prendre conscience de leurs émotions, de leurs actions et de leurs effets sur les personnes et l’environnement. À travers un usage modéré de la parole, les jeunes enfants se responsabilisent et gagnent en maturité. La présentation de trois situations d’observation illustre le lien entre les pratiques interactionnelles, les préceptes éducatifs et les valeurs inuit. Elles sont tirées d’un travail ethnographique réalisé dans les CPE de Kuujjuaraapik et de Kuujjuaq, en 2013 et en 2014. Tout en soulignant la valeur du silence qui en contexte guiderait l’enfant au même titre que la parole, elles révèlent des orientations éducatives favorables à son épanouissement.
EN:
Kativik Regional Government childcare service is in charge of managing daycare centres. In Nunavik, numerous children attend to these childcare centres. The analysis of communicational practices in these preschool institutions underlines silence specific functions. They can be related to Inuit educational practices allowing children to be conscious of their emotions, their actions and their effects on others and the environment. Through a moderating use of speech, young children progressively become responsible and mature. The presentation of three educative situations shows how interactional codes, childrearing practices and Inuit values are related. These observations are part of an ethnographic work held in 2013 and 2014 in Kuujjuaraapik and Kuujjuaq childcare centers. While underlining the value of silence which in context can guide children such as spoken words do, these situations bring insightful educative perspectives about child global development.
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Une histoire des services de santé, des services sociaux et des services de protection de la jeunesse au Nunavik : portrait de la littérature (Note de recherche)
Myriam Lévesque
pp. 155–176
AbstractFR:
Les recherches sur les services médicaux, les services sociaux et la protection de la jeunesse au Nunavik sont depuis plusieurs années animées par une volonté d’« autochtoniser » la prestation de soins en laissant une plus grande place aux travailleurs inuit et en documentant les inégalités de pouvoirs entre les professionnels allochtones et les bénéficiaires inuit. Peu d’études se sont toutefois penchées sur l’histoire de l’organisation de ces services en territoire nordique, en particulier l’histoire des relations entre les différents acteurs du système de soins au Nunavik. Cette note de recherche vise à mettre en lumière l’état des connaissances actuelles et la littérature existante sur l’histoire des services de santé, des services sociaux et de la Direction de la protection de la jeunesse (DPJ) au Nunavik. En nous appuyant sur l’historiographie et sur les résultats préliminaires d’entretiens conduits entre 2021 et 2022 auprès d’anciens membres du personnel inuit et non inuit, nous souhaitons mettre en valeur les voix des personnes ayant contribué aux services et comprendre l’évolution de ces dernières à travers la perspective des professionnels et de la clientèle. Nous présentons un portrait chronologique des ressources en santé et en services sociaux au Nunavik depuis la première moitié du XXe siècle. Au-delà d’une histoire institutionnelle, les récits de vie nous permettent de documenter la contribution historique du personnel soignant inuit à l’ensemble des services de santé, des services sociaux et des services de protection de la jeunesse au Nunavik et de tracer l’histoire des relations entre les soignants allochtones et la clientèle inuit.
EN:
Research on medical services, social services and youth protection in Nunavik has been driven for several years by a desire to “indigenize” the delivery of healthcare by giving more space to Inuit workers and by documenting the inequalities of power between non-Native professionals and Inuit beneficiaries. Few studies, however, have examined the history of the organization of these services in the North, particularly the history of the relationships between the different actors in the health care system in Nunavik. The purpose of this paper is to highlight the current state of knowledge and literature on the history of health and social services and the Youth Protection Branch (YPB) in Nunavik. Based on historiography and on the preliminary results of interviews conducted between 2021 and 2022 with former Inuit and non-Inuit staff members, we intend to highlight the voices of those who have contributed to the services and to understand the evolution of these services through the perspective of professionals and clients. We present a chronological portrait of health and social services resources in Nunavik since the first half of the 20th century. Beyond an institutional history, the oral stories allow us to document the historical contribution of Inuit caregivers to the overall health, social services and youth protection services in Nunavik and to trace the history of the relationship between non-Aboriginal caregivers and Inuit clients.
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Linguistic Relativism and the Expression of Basic Theoretical Rationality in Inuktitut
Marc-Antoine Mahieu
pp. 177–192
AbstractEN:
This paper begins by stressing the importance of distinguishing between linguistic relativity, whose reality is hardly debatable, and linguistic relativism, which ultimately holds that language communities are locked within their own worldview, hence their own notions of truth. It then rejects linguistic relativism by asserting the existence of a universal core of theoretical rationality comprised at the very least of the logical principles of identity, noncontradiction, and excluded middle. It goes on to show how this theoretical rationality manifests itself in the lexicon of a language that differs greatly from English: Inuktitut spoken by Inuit of Nunavik (Arctic Quebec). The definitions provided by Taamusi Qumaq for three words relating to critical thought are translated for the first time. Other quotes give examples of theoretical rationality in actual usage. Finally, the paper asks why logic as such is accorded little value in the culture Inuktitut expresses. The suggested answer follows Jack Goody, who holds that a long written tradition is required for the rules of formal logic to take hold in language practices. Writing is not just a transcription of the spoken word; it is an intellectual technology that impacts the way speakers use their language.
FR:
Cet article commence par souligner l’importance de la distinction entre la relativité linguistique, dont la réalité est difficilement discutable, et le relativisme linguistique, qui soutient en définitive que les communautés linguistiques sont enfermées dans leur propre vision du monde, et donc dans leur propre conception de la vérité. Il rejette ensuite le relativisme linguistique en affirmant l’existence d’un noyau universel de rationalité théorique composé au minimum des principes logiques d’identité, de non-contradiction et de tiers-exclu. Il montre ensuite comment cette rationalité théorique se manifeste dans le lexique d’une langue très différente de l’anglais: l’inuktitut parlé par les Inuit du Nunavik (Arctique québécois). Les définitions fournies par Taamusi Qumaq pour trois mots relatifs à la pensée critique sont traduites pour la première fois. D’autres citations donnent des exemples de rationalité théorique dans l’usage réel. Enfin, l’article se demande pourquoi la logique est peu valorisée en tant que telle dans la culture qui s’exprime en inuktitut. La réponse proposée est essentiellement celle de Jack Goody, qui soutient qu’une longue tradition écrite est nécessaire pour que les règles de la logique formelle s’installent dans les pratiques linguistiques. L’écriture n’est pas une simple transcription de la parole, c’est une technologie intellectuelle qui rétroagit sur la façon dont les locuteurs utilisent leur langue.
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Yup’ik Loanword Etymologies for the Yukaghir Languages and Dialects
Peter S. Piispanen
pp. 193–219
AbstractEN:
In this paper, up to twenty-eight new Yukaghir etymologies are described as Eskimo borrowings into the Yukaghir languages and dialects of far northeastern Siberia, with phonological and semantic considerations for each suggestion. These findings provide new insights into the historical phonology of these ancient borrowings as well as fairly clear etymologies for a number of isolated Yukaghir words. The chronology of the borrowings is also considered, and various factors reveal two different competing hypotheses: the Yukaghir correspondences have either resulted from chronologically different borrowing layers through the ages, or the correspondences actually represent the remnants of an ancient genetic language affiliation between the two, a hypothesis supported by the very divergent phonological shapes and semantics of the correspondences. It is argued that the Eskimo correspondences are invariably of the Yup’ik variety (instead of the Inuit variety), and that Yup’ik language(s) were spoken in much earlier times around the Kolyma River, where Yukaghir is still spoken, and in particular close to the Tundra Yukaghirs. The semantic categorization of the borrowings places most of them as elementary phenomena, actions, and perceptions, and if not actually describing an actual genetic language relationship, this at least suggests very intense linguistic contacts between Yup’ik and Yukaghir under bi- or multi-lingual conditions, such as through tribal marriages and where code-switching was the norm for generations.
FR:
Dans cet article, jusqu’à vingt-huit nouvelles étymologies de youkaguir sont décrites comme des emprunts esquimaux dans les langues et dialectes youkaguirs de l’extrême nord-est de la Sibérie, avec des considérations phonologiques et sémantiques pour chaque suggestion. Ces résultats apportent de nouvelles perspectives sur la phonologie historique de ces emprunts anciens et fournissent des étymologies assez claires pour un certain nombre de mots youkaguirs isolés. La chronologie des emprunts est également considérée, et divers facteurs pointent vers deux hypothèses concurrentes différentes: les correspondances de youkaguir sont soit le résultat de couches d’emprunt chronologiquement différentes à travers les âges, soit les correspondances représentent en fait les vestiges d’une ancienne affiliation de langage génétique entre les deuxièmement, une hypothèse étayée par les formes phonologiques et la sémantique très divergentes des correspondances youkaguir. On fait valoir que les correspondances esquimaudes sont invariablement de la variété yupik (au lieu de la variété inuit), et que la ou les langues yupik étaient parlées beaucoup plus tôt autour de la rivière Kolyma où youkaguir est actuellement encore parlé, puis en particulier la proximité des youkaguirs de la toundra. La catégorisation sémantique des emprunts se place surtout en tant que phénomènes, actions et perceptions élémentaires, et si elle ne décrit pas réellement une véritable relation de langage génétique, cela suggère au moins des contacts linguistiques très intenses pour le yupik et le yukaghir dans des conditions bilingues ou multilingues susceptibles avec le mariage tribal et où le changement de code était la norme depuis des générations.
Recensions d'ouvrages / Book Reviews
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Oosten, Jarich et Barbara Helen Miller (dir.), 2018. Traditions, Traps and Trends. Transfer of Knowledge in Arctic Regions. Edmonton, University of Alberta Press, 352 pages.
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Tagaq, Tanya, 2018. Split Tooth, New York, Viking Press, 189 pages
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David Howe Turner, 2018, Eyes of the Shaman: The Visions of Piona Keyuakjuk. Oakville: Rock’s Mills Press, 176 pages.