Abstracts
Résumé
Cet article s’intéresse à la forme de l’environnement bâti des villages inuit du Nunavik qui résulte d’un processus d’urbanisation relativement récent. Il s’agit de comprendre comment le cadre bâti de ces villages s’est transformé, dans le temps et dans l’espace, depuis leur fondation jusqu’à aujourd’hui. Comment ces environnements se sont-ils adaptés aux contraintes territoriales, climatiques et aux aspirations culturelles de ses habitants ? À partir de cartes géographiques, de photographies aériennes, de plans d’aménagement, de textes relatant l’occupation du territoire et de photographies historiques et récentes, l’auteur fait l’analyse morphologique des 14 villages inuit, c’est-à-dire une caractérisation des formes paysagères et bâties actuelles (analyse synchronique). Différentes variables d’ordre formel, dimensionnel, d’usage et de position relative sont examinées pour révéler trois types d’établissements avec des variantes : en grappes, linéaires et en bloc. Une morphogenèse (analyse diachronique) des villages de Kuujjuaq et d’Inukjuak, deux types portants, permet de caractériser et de comprendre l’évolution de la forme de ces établissements dans le temps. En tenant compte de facteurs historiques, politiques et culturels, cette partie de l’analyse fait ressortir des structures de permanence et des marqueurs culturels symboliques. Une discussion sur la pertinence de la typomorphologie comme méthode de lecture des milieux bâtis nordiques et autochtones ouvre la conclusion qui aborde aussi le développement en contexte inuit.
Mots-clés:
- Inuit,
- Nunavik,
- villages nordiques,
- aménagement,
- morphogenèse,
- design urbain
Abstract
This article looks at the shape of the built environment of the Inuit villages of Nunavik that results from a relatively recent urbanization process. It seeks to understand how the built environment of these villages has been transformed, in time and space, from their foundation to the present day. How have these environments adapted to the territorial and climatic constraints and to the cultural aspirations of their inhabitants? Using maps, aerial photographies, development plans, texts relating the occupation of the territory and historical and recent photographies, the author makes a morphological analysis of the 14 Inuit villages, i.e. a characterization of the current landscape and built forms. Different variables of formal, dimensional, use and relative position are examined to reveal three types of settlements with variants: clustered, linear and block settlements. The morphogenesis of the villages of Kuujjuaq and Inukjuak, two key types, helps to characterize and understand the evolution of the shape of these settlements over time. Considering historical, political and cultural factors, this part of the analysis brings out structures of permanence and symbolic markers. The article concludes with a discussion on the relevance of typomorphology as a method of reading northern and indigenous built environments and urban development in an Inuit context.
Keywords:
- Inuit,
- Nunavik,
- northern communities,
- planning,
- morphogenesis,
- urban design
Article body
Cet article s’intéresse à la forme de l’environnement bâti des villages inuit du Nunavik qui résulte d’un processus d’urbanisation récent. Cette urbanisation, amorcée un peu avant la signature de la Convention de la Baie-James et du Nord québécois (CBJNQ), accompagne une croissance démographique forte et un rythme accéléré de construction de maisons dans plusieurs villages (SHQ 2014). De plus, la fonte du pergélisol et l’accès plus difficile aux sols stables pour la construction sur radiers influencent le processus de transformation des villages qui s’étalent sur le territoire dans des formes empruntées au sud du Canada (Martin 2003 ; Sheppard et White 2017 ; Vachon et al. 2017). En effet, depuis les 45 dernières années, les Inuit déplorent la piètre qualité de ces milieux dont les formes sont souvent peu adaptées à leur mode de vie (Bonesteel 2008 ; Société Makivik et al. 2014). Plus largement, le surpeuplement de ces maisons et leur inadéquation avec les aspirations liées à l’identité inuit entraînent plusieurs problèmes sociaux, familiaux et de santé dans les communautés (RRSSSN 2011). En 2017, une statistique de l’Office municipal d’habitation Kativik révélait un manque de près de 800 logements pour loger de façon appropriée toutes les familles inuit (OMHK 2017). Le taux de croissance de la population au Nunavik est près de six fois plus élevé que dans le reste de la province (Duhaime, Caron et Lévesque 2015). Bien que rapide, la construction est difficile au Nunavik, d’abord à cause de l’éloignement géographique des villages nordiques et leur manque d’accessibilité (Vachon et al. 2017), mais aussi parce que la fonte du pergélisol et l’érosion du littoral causent la dégradation prématurée de l’ensemble des installations (Allard et al. 2015). À cela s’ajoutent les rudes conditions climatiques (blizzards, froid arctique, par exemple).
La mise à jour des plans directeurs des villages et les prochaines étapes de développement urbains nécessiteront des terrains pour construire de nouvelles maisons. Sous l’angle de l’aménagement du territoire et du design urbain[1], l’auteur cherche à répondre dans cet article à la question suivante : comment le cadre bâti des villages inuit du Nunavik s’est transformé, dans le temps et dans l’espace, depuis le début du XXe siècle jusqu’à aujourd’hui ? Cet article vise à révéler le processus de cette transformation dans ses dimensions spatiales, en tenant compte des adaptations aux contraintes territoriales, climatiques et aux aspirations culturelles de ses habitants. Grâce à l’adaptation d’une méthode d’analyse d’un cadre bâti, la typomorphologie, au contexte inuit nordique, l’auteur tente de contribuer aux connaissances sur l’organisation formelle et fonctionnelle de ces établissements. Les résultats présentés dans l’article pourront aussi potentiellement éclairer une planification urbaine plus respectueuse des particularités et des aspirations locales par l’identification de marqueurs culturels symboliques, qui peuvent aider à définir l’identité d’un lieu.
Du land aux villages nordiques
Les Inuit du Nunavik habitent aujourd’hui dans 14 villages nordiques variant de 250 et plus de 2700 habitants (Statistique Canada 2016). Les Inuit représentent 91 % des 13 000 habitants de ce territoire (Ibid.) qui est divisé, par la signature de la CBJNQ, en trois catégories de terres. Les terres de catégorie I sont la propriété des corporations foncières du Nunavik et sont les seules terres où peuvent officiellement habiter les Inuit. Ces derniers ont des droits exclusifs de chasse et de pêche sur les terres de catégories II et la troisième catégorie sont des terres publiques ouvertes à l’exploitation (Méthot 2019). Chaque village du Nunavik fonctionne comme une petite municipalité du sud du Québec, avec sa mairie, ses écoles, son CLSC ou centre de santé, ses églises, ses épiceries et son aréna. Cependant, comme aucune route ne dépasse les limites du 55° parallèle, les villages ne sont accessibles depuis le Sud que par bateau ou par avion, selon les conditions climatiques. Les maisons qu’habitent les Inuit, sont construites sur des vérins ajustables et déposés sur des radiers. Ces remblais de gravier d’une épaisseur d’environ un mètre servent à mettre à niveau le sol et à protéger le pergélisol du réchauffement dû à la radiation provenant des bâtiments (Claveau Fortin 2017). Les lots sont aussi issus du découpage standardisé du Sud (Figure 1), mais de nombreux chemins créés par les passages répétés se superposent à cette trame. Les contraintes liées au sol gelé imposent également une méthode de collecte et de desserte des eaux usées, de l’eau potable et du mazout par camion à chacune des habitations. En périphérie des villages, les routes sur radier rejoignent le dépotoir et le réservoir d’eau potable pour ensuite donner accès aux cabines construits sur le territoire, on theland[2].
L’évolution des communautés du Nunavik est marquée par des structures exogènes à la culture inuit, comme la création d’organisations municipales de gestion du territoire, mais aussi par leur adaptation aux contextes naturels et territoriaux. C’est d’abord par une succession de politiques et d’actions gouvernementales externes que la formation des villages nordiques du Nunavik a été influencée et accélérée. Déjà, au début des années 1960, le sociologue Fried notait dans sa première classification des villages inuit du Canada que les « nouveaux établissements du Nord ne découlent pas nécessairement de l’expérience et ne reflètent pas un processus d’adaptation historique par les habitants[3] » (Fried 1963, 94), mais bien d’un désir de sédentarisation de la part des gouvernements. Ces premiers établissements permanents et planifiés révèlent déjà un manque d’innovation ou de flexibilité dans leur implantation.
Les jalons de l’urbanisation au Nunavik
Avant leur sédentarisation, les Inuit habitaient dans des tentes, des igloos ou des maisons semi-souterraines. Ils se déplaçaient d’un territoire de chasse et de pêche à l’autre, en érigeant des campements aussi bien sur les côtes qu’à l’intérieur des terres ou des îles (Dorais 1997). Dans la première moitié du XXe siècle, le rôle du gouvernement fédéral dans l’Arctique se résumait à la distribution de secours par temps de crise (Duhaime 1985) et n’intervenait pas dans l’aménagement ou la position des campements. Alors que les compagnies de traite de la fourrure et le gouvernement fédéral décourageaient au Nunavik plutôt l’installation des Inuit près des postes de traite, certains facteurs ont tout de même favorisé leur regroupement près de ces établissements : la création d’une patrouille annuelle de médecins par bateau, les épidémies et les famines qui obligeaient certaines familles à quémander à la HBC dans certains villages (Ibid.). Au milieu de la Seconde Guerre mondiale, la construction de bases militaires états-uniennes à Kuujjuaq et à Kuujjuarapik augmente les transports et les installations permanentes sur ces territoires. Certains Inuit vont même y trouver du travail salarié (Fried 1963).
Au tournant des années soixante, deux politiques d’habitation orchestrées par le ministère des Affaires indiennes et du Nord Canada se sont succédées. Dans le but d’égaliser les conditions de vie des Inuit par rapport aux autres Canadiens, de diminuer les coûts des soins de santé dans le Nord et principalement pour les sédentariser de force, le gouvernement leur fournit des maisons à loyer modique[4]. Ces programmes ont initié la construction des premières maisons permanentes des Inuit sur le territoire, sans pour autant régler les problèmes liés à l’apparition de nouveaux maux sociaux causés notamment par le surpeuplement (Duhaime 1985). À l’intérieur de la politique de 1959, le gouvernement fédéral vendait ou fournissait aux Inuit des maisons, mais leur laissait le choix de l’emplacement. Malheureusement, ces programmes n’ont pas eu l’effet escompté : les habitations sont trop petites pour les familles nombreuses, leur construction fragile et leur conception ne sont pas adaptées au climat. La charge financière est souvent trop importante pour les Inuit et les modèles offerts sont uniformes.
L’intérêt grandissant de la province de Québec envers son territoire nordique se traduit par l’annonce d’un vaste projet de développement hydro-électrique dans la région en 1971. Des négociations entre les gouvernements et les communautés cries et inuit aboutissent à la CBJNQ signée en 1975 par l’Association des Inuit du Nouveau-Québec, le Grand Conseil des Cris, les gouvernements fédéral et provincial, Hydro-Québec, la Société de développement de la Baie-James et la Société d’énergie de la Baie-James (Martin 2005). Cette entente prévoit le versement d’une indemnité aux Inuit, la création de structures administratives et publiques, régionales et locales, comme le Conseil régional de la santé et des services sociaux, la Commission scolaire Kativik, l’ARK ainsi qu’un corps de police régionale autochtone. Par l’adoption de la Loi sur les villages nordiques et l’Administration régionale Kativik (Loi Kativik), chaque communauté au Nunavik devient une municipalité de villages nordiques où les habitants peuvent élire un maire et des conseillers. Les villages sont aussi soumis à la Loi sur l’aménagement et l’urbanisme de la province de Québec. C’est en vertu de cette dernière que l’aménagement du territoire devient une compétence relevant des villages nordiques. Des plans directeurs des villages sont établis dans les années 1980 puis adoptés en 1992 (Chabot et Duhaime 1998). Ces plans, récemment complétés par des règlements de zonage, sont en processus de révision et devaient être terminés avant 2020 (Vachon et al. 2017). La CBJNQ rend aussi possible le développement économique et hydro-électrique de la région. De cet accord, les Inuit obtiennent une indemnité sous forme de fonds patrimonial qui est reçu et administré par la Société Makivik. Les années qui suivent la signature ont vu les conditions matérielles des Inuit, des Cris et des Naskapis s’améliorer grandement, à cause de l’intervention massive de l’État dans les affaires des Autochtones.
Par une entente conclue en 1981, le gouvernement fédéral transfère à la Société d’habitation du Québec (SHQ) l’ensemble de ses responsabilités en matière de logement. Cette entente prévoit le versement à l’État provincial d’une subvention initiale, maintenant renouvelée aux cinq ans, permettant à ce dernier de poursuivre la rénovation et le développement de la région du Nord-du-Québec (Therrien et Duhaime 2017). C’est à la fin des années 1990 que l’Office municipal d’habitation Kativik (OMHK) voit le jour. Cet organisme est chargé d’administrer, d’entretenir et de percevoir les loyers des logements sociaux financés par la SHQ et la Société canadienne d’hypothèques et de logement (SHQ 2014). C’est donc selon des ententes signées par les gouvernements du Québec et du Canada, la Société Makivik, l’ARK et l’OMHK, que la construction de nouvelles maisons se réalise annuellement.
Cadre conceptuel et méthodologique
Pour comprendre l’organisation spatiale et formelle de villages et leur transformation, l’analyse typomorphologique fait « l’étude des caractéristiques physiques des éléments constitutifs du paysage bâti et de leur logique de structuration » (Lacroix 2003, 11). Cette approche cherche d’abord à classifier le cadre bâti en « types », c’est-à-dire un groupe d’objets « ayant un certain caractère, ou une série de caractères communs » (Caniggia et Maffei 1979, 38). On parle alors d’étude synchronique, pour un moment précis dans le temps. La morphogenèse s’intéresse ensuite aux logiques de formation et de transformation des tissus urbains, aux conditions extérieures qui influencent ces lois et aux structures de permanence qui résistent au passage du temps. On parle alors d’étude diachronique, sur plusieurs périodes d’édification (Rivard 2008). Au final, elle aide à définir des règles d’organisation des tissus urbains et leur évolution dans le temps : la morphologie.
Les principaux concepts sur lesquels s’appuie la présente recherche sont les structures de permanence et les marqueurs symboliques découlant de l’analyse typomorphologique d’un milieu nordique. Ces structures serviront à faire ressortir des environnements bâtis relativement jeunes des particularités qui ont traversé le temps et qui révèlent l’identité du lieu. Ces nuances spécifiques à l’habitat inuit démontreront aussi la manière dont chaque village s’est adapté différemment aux multiples contraintes du milieu.
Typomorphologie, structures de permanence et géo-symboles
La typomorphologie est à la fois théorie, discipline et méthode scientifique de lecture urbaine qui pose l’existence d’un processus logique dans l’organisation et l’évolution d’un tissu urbain (Larochelle 2006). L’analyse typomorphologique découlant des écoles italienne (Caniggia et Maffei 1979) et anglo-saxonne (Conzen 1960) évoque le concept d’emboîtement de plusieurs échelles des éléments constitutifs du milieu bâti pour les classer selon des types (Lacroix 2003) : le territoire, la ville, le tissu et le bâti. À l’échelle du territoire s’ajoute une composante paysagère, c’est-à-dire les paysages naturels et culturels. Ils sont le produit des relations entre le milieu naturel et les activités humaines qui s’y sont établies (Larochelle 2006). Aussi, à l’opposé des sites exceptionnels, les paysages ordinaires sont perçus et construisent l’identité territoriale de la population : les traces héritées de la topographie, l’usage et les voies sont des composantes indispensables dans l’analyse des villages nordiques. Ce sont des lieux du quotidien, des espaces habités et fréquentés par les populations locales (Jackson 2009). Ces caractères essentiels permettent de lire dans les villages du Nunavik la mémoire des communautés qui y vivent. De variables d’analyse supplémentaires s’ajoutent pour tenir compte de la réalité locale : chemins piétons, espaces communs, lieux de rassemblement formels ou informels (Marchand 2011), noyaux de services et distance de marche (Lacroix 2003).
À l’intérieur des villes et des territoires, les structures de permanence sont des formes urbaines qui maintiennent des caractères reconnaissables malgré le renouvellement de leurs composants. Elles fixent des limites au changement et assurent une continuité dans le processus de transformation (Caniggia et Maffei 1979). Ces « permanences structurales » conservent aussi les caractéristiques héritées d’un milieu bâti ou d’un lieu, et concrétisent son identité à travers le temps (Larochelle 2002). En ce sens, leur conservation « fournit la clé pour concilier identité et changement, clarifiant en même temps le lien entre identité et continuité » (Larochelle et Iamandi 1999, 6). Cette identification de permanences dans des villages de différents types assure une compréhension globale de leur évolution et des caractères identitaires. Elle offre ainsi aux instances locales d’aménagement des outils pour contrôler l’évolution des milieux bâtis (Ibid.). Ces éléments de la forme urbaine peuvent se retrouver à différentes échelles, allant du territoire jusqu’au bâtiment, comme des tracés de rues, des bâtiments publics ou commerces, ou encore un type de bâtis résidentiels.
Cependant, on peut supposer que la notion de permanence auprès de peuples jusqu’à tout récemment nomades ne se traduit pas de la même manière que celle employée par Larochelle, plus haut. Les marqueurs physiques d’une telle permanence seraient en constante évolution chez les Inuit du Nunavik. En effet, l’organisation du territoire, basé sur des lieux, des lignes et des surfaces, s’adapte continuellement aux conditions climatiques et aux situations changeantes (Collignon 1996). Il convient plutôt de croiser les structures de permanence à la notion de géosymboles (Bonnemaison 1981). Ces marqueurs symboliques sont des lieux, des itinéraires ou des étendues qui fixent l’identité d’un peuple. Ils marquent, par leur importance culturelle, religieuse ou politique, le paysage identitaire des peuples inuit (Desbiens, Rivard, et Hirt 2017). Les structures de permanences chez les Nunavimmiut seraient donc à la croisée de l’espace matériel et immatériel, du physique et du symbolique. Plusieurs de ces marqueurs de permanence « sociale » ont été validés par des recherches contemporaines, notamment les cycles d’occupation saisonnière des villages (Stuckenberger 2006), et le partage et le travail collectif (Duhaime 2001 ; Martin 2003).
Dans une étude de la forme des villages réalisée à partir de cartes et de photographies comme la présente, ces marqueurs se définissent par l’adaptation et l’appropriation des milieux au mode de vie des Inuit. Comme l’aménagement des villages et ses habitations sont presque entièrement imposés aux résidents par des organisations externes (Chabot et Duhaime 1998), les structures de permanence réelles seraient plutôt en lien avec l’appropriation, le vécu de ces espaces. À l’échelle du village, ces appropriations se manifestent par une liberté des modes de déplacements, une superposition de nouveaux chemins piétons et VTT entre les maisons et à travers les îlots. Les grands espaces repères des villages, des lieux de rencontres informels et des espaces publics comme l’aréna, le magasin coop, l’école ou l’église, sont ainsi ancrés dans la mémoire collective et les pratiques culturelles inuit (Landry 2018).
Une approche méthodologique adaptée au contexte inuit
Cette recherche interprétative s’organise en fonction de deux hypothèses. D’abord, une analyse des caractères physiques et formels permet d’élaborer une typologie de villages nordiques à partir de traits communs. Ensuite, une analyse du processus de transformation pour deux villages typiques – Inukjuak et Kuujjuaq – permet de cerner les éléments qui sont particuliers au contexte de développement du Nord. Ces éléments s’apparentent à des géomarqueurs qui pourraient être porteurs d’une « couleur », voire d’une identité locale. L’analyse des villages inclut, en plus des éléments de base de la typomorphologie, l’étude des lieux de rassemblement (intérieurs et extérieurs), des réseaux de chemins informels, ainsi que des paysages culturels, naturels et ordinaires. Pour mener l’analyse synchronique, la grille de critères avancée par Prémont (1994) pour classifier les villages du Nunavik sous un angle géographique est un point de départ : année de création du village, présence de poste de traite et de campements traditionnels. D’autres critères s’ajoutent :
Composantes démographiques et historiques : population et nombre de logements (Statistique Canada 2016), ancien site de base militaire, année des premiers établissements permanents (Duhaime 1985) ;
Composantes géomorphologiques : présence de topographie importante dans le village, forme générale du réseau viaire, position de l’aéroport par rapport du village, orientation des principaux parcours, noyau(x) de services.
Pour mener la morphogenèse, les données géographiques (cartes et photographies aériennes) sont superposées et croisées avec des informations historiques sur les territoires et les villages. Les cartes résultantes illustrent la manière dont les villages de Kuujjuaq et Inukjuak ont évolué. Des géosymboles et marqueurs de permanence sont ensuite identifiés et caractérisés.
Dans le cadre de cette recherche, la documentation analysée a été tirée de différentes banques de données et sources afin d’établir un corpus de cartes et de photographies d’époques multiples. Les cartes anciennes et récentes (cartes de villages, de zonage et plans d’aménagement) proviennent de l’ARK, de l’OMHK, de la SHQ et de monographies (Duhaime 1985, 2001). Les photographies aériennes proviennent quant à elles de la base de données GeoIndex, du site Web Google Earth, et des archives du Centre d’études nordiques (CEN) de l’Université Laval (dont certaines appartiennent au ministère des Ressources naturelles du Québec et du Canada). Le mémoire de Pouliot (1967), qui décrit et qualifie l’utilisation du sol à Fort-Chimo en 1966, et celui de Prémont (1994), qui contient des cartes de Kuujjuaq entre 1948 et 1994, s’ajoutent au corpus. Des photographies supplémentaires ont été tirées des collections de la Bibliothèque des archives nationales du Québec (BANQ). Des données photographiques ont également été recueillies par l’auteur lors de séjours sur le terrain en automne 2015 (Kuujjuaq et Inukjuak) et en été 2016 (Kuujjuarapik-Whapmagoostui, Umiujaq, Inukjuak, Puvirnituq, Akulivik, Ivujivik, Salluit, Kangirsuk et Kuujjuaq), et grâce aux visites d’autres étudiants de l’École d’architecture de l’Université Laval à l’automne 2015 (Kuujjuaq et Inukjuak).
La forme des villages du Nunavik : typologie et transformation
Trois types d’établissements nordiques
La classification des villages du Nunavik est réalisée à partir de caractères physiques communs. Plus particulièrement, elle s’opère à partir de critères ayant trait à la topographie et aux sols, à la position relative d’éléments importants dans l’organisation d’ensemble et à la forme ou l’ampleur que prennent les secteurs résidentiels (Tableau 1).
Topographie et types de sols
La topographie exerce une influence majeure sur la forme des villages. Des 14 communautés, la moitié doivent s’adapter à une topographie accidentée, comme la présence de collines et de caps rocheux. On note d’ailleurs que l’ensemble des villages (six) ayant un réseau viaire dit « perpendiculaire » doivent cohabiter avec de fortes pentes et que ces mêmes villages ont une morphologie générale en bloc. D’ailleurs, la condition du pergélisol et les types de sols influencent aussi beaucoup l’évolution des villages. À cause des méthodes de construction sur radiers sur des sols stables au dégel (Allard et al. 2015), les nouveaux développements des villages se font en contournant le roc et certaines pentes, créant ainsi de multiples grappes de maisons comme à Kuujjuaq.
Relation entre le village et un cours ou plan d’eau à proximité
Puisque la majorité des villages se sont formés en lien avec la présence d’un poste de traite de la HBC (Duhaime 2001), nécessitant ainsi un accès par bateau, il est normal que tous les villages se retrouvent à proximité de cours d’eau. La seule présence d’un plan d’eau n’est donc pas un facteur significatif pour expliquer les différences entre leur forme. Cependant, le mode d’implantation du village en relation avec ce plan d’eau est plus particulier. L’organisation des principaux parcours et des rues diffère d’un village à un autre. Ils forment ainsi des systèmes viaires perpendiculaires, linéaires ou complexes. Par exemple, le village de Salluit comporte une trame viaire orthogonale, c’est-à-dire que les rues forment entre elles des angles plus ou moins droits à leur intersection. Cela est aussi le cas pour un village beaucoup moins populeux, celui d’Umiujaq (Fig. 2).
Les villages comme Puvirnituq et Kuujjuaraapik, sur la baie d’Hudson, ont une trame de rue manifestement plus complexe. Cela est visible dans les formes et dimensions très diverses des îlots de Puvirnituq. Le réseau de rues est aussi très différencié selon les secteurs du village en raison de la topographie et des types de sols. Les rues devant être construites sur des radiers, elles nécessitent des sols relativement plats. Concernant les villages avec une forme de trame plus linéaire, comme Akulivik et Aupaluk, les rues secondaires sont alignées parallèlement au cours d’eau (Fig. 3). La grosseur (population) de ces villages influence nécessairement la longueur de ces parcours.
Position relative de l’aéroport
Comme le transport aérien est le principal moyen de transport moderne entre les villages nordiques, la situation de l’aéroport semble importante. La présence de l’aéroport près du village est une limite de développement, comme dans le cas de Kuujjuarapik, ce qui rend souvent le réseau viaire complexe dans son organisation. Il est aussi important de noter que certaines pistes ont été déplacées au fil des ans pour faire place à des habitations (Kuujjuaq, Inukjuak, Kuujjuaraapik-Whapmagoostui).
Envergure des villages
La population et le nombre de logements ont assurément une influence sur la forme générale du village, mais davantage au niveau de l’ampleur. Par exemple, dans le village d’Inukjuak, la trame linéaire se développe en sections dans le village, créant ainsi une trame plus complexe (Fig. 4). Le village de Salluit est aussi très bon cas. Les cartes les plus récentes informent sur les nouveaux ensembles résidentiels loin du village actuel, de nouvelles grappes, rendant la catégorisation plus complexe. Le secteur « Salluit 2 » est d’ailleurs en réalisation et les secteurs « 3 » et « 4 » sont en planification.
Au final, la classification critériée révèle que les 14 villages nordiques du Nunavik appartiennent à trois types : les villages en grappes, les villages en bloc et les villages linéaires (Fig. 5).
Villages en grappes : Kangirsuk, Kuujjuaq, Kuujjuaraapik et Puvirnituq
Ces communautés sont caractérisées par des secteurs de bâtiments en groupes isolés ou séparés par des routes. La position de ces grappes est influencée par des contraintes naturelles : des collines (Kangirsuk et Kuujjuaq), un cours d’eau dans le village (Kuujjuaq) et des sols restreignant certaines méthodes de construction (Kangirsuk, Kuujjuaq et Puvirnituq). Des développements sont aussi limités par des barrières anthropiques comme les pistes d’aéroports (Kuujjuarapik). Dans ces villages, l’orientation des rues n’est pas influencée par un cours d’eau, c’est-à-dire qu’elles ne sont ni perpendiculaires, ni parallèles à une rivière. De plus, la présence de bâtiments des deux côtés de la voie principale n’est pas continue, ce qui laisse des tronçons non construits sur lesquels viennent se raccrocher des grappes (Fig. 6).
Dans deux villages de ce type, soient Kuujjuaq et Puvirnituq, un hôpital dessert leur région respective (baie d’Hudson et baie d’Ungava). Ces deux villages plus populeux se développent bien au-delà de leur centre d’origine et accueillent plus de services, souvent dédoublés pour former des pôles secondaires plus en périphérie. Dans le cas de Puvirnituq, de nouveaux services comme un restaurant (construit en 2016) et un nouvel hôtel voisin (2020) ont été construits loin de l’épicerie, des écoles et de l’hôtel existants, probablement en raison de la faible disponibilité de sols stables et assez grands au centre.
Deux villages de ce type ont des conditions de développement plutôt particulières. À Kangirsuk, bien que la forme du réseau de rues soit linéaire (et parallèle à un cours d’eau), la topographie accidentée nécessite un développement en petits groupes de bâtiments. À Kuujjuaraapik, la présence de village cri de Whapmagoostui donne lieu à des services partagés par les deux communautés (aréna, nursing home, hôtel-coop, épicerie et social club) alors que la planification des deux villages est orchestrée par deux instances distinctes (conseil de bande cri et village nordique inuit). La cohabitation de ces deux communautés rend le développement complexe et en ne considérant que les secteurs inuit de Kuujjuaraapik, on dénote un développement par grappes. Malgré l’absence de pergélisol et la possibilité d’enfouir les canalisations (comme c’est le cas dans la communauté cri), l’aménagement des secteurs inuit se fait comme ailleurs au Nunavik.
Villages en bloc : Ivujivik, Kangiqsujuaq, Kangiqsualujjuaq, Quaqtaq, Salluit et Umiujaq
Six autres villages se sont développés majoritairement en un seul bloc de bâtiments circonscrit par des limites souvent naturelles, comme des collines ou une rivière (Salluit et Umiujaq). Les conditions et types de sols ont une influence sur l’ensemble des villages de ce type : ils limitent la construction dans un secteur concentré. La trame des rues est orthogonale et marque le centre de la communauté. Kangiqsujuaq est un cas particulier avec une trame de rues plus complexe à cause de contraintes topographiques importantes qui restreignent le développement loin du centre du village, créant ainsi un agrandissement en un bloc discontinu. Les îlots de ces mêmes villages sont majoritairement rectangulaires et de dimensions assez similaires. Le parcours principal de chacune de ces communautés est toujours orienté perpendiculairement au plan d’eau. Ce parcours relie la plupart du temps l’aéroport au coeur du village. Les services se concentrent habituellement le long de ce parcours.
Les villages d’Ivujivik, Kangiqsualujjuaq et Salluit ont leur propre particularité en ce que les nouveaux bâtiments (résidentiels, commerciaux ou communautaires) sont construits à l’extérieur des « blocs principaux », en raison de la recherche de sols stables à la construction sur radiers.
Villages linéaires : Akulivik, Aupaluk, Inukjuak et Tasiujaq
Quatre villages sont caractérisés par un développement plus ou moins rectiligne le long d’un cours d’eau. Plus particulièrement, ce sont les parcours principaux qui sont alignés parallèlement aux rivières. Les contraintes topographiques importantes empêchant tout type de construction sont rares sauf à Akulivik où la présence d’une baie et d’une rivière de part et d’autre du village limite le développement qui doit se faire de plus en plus vers l’est. Dans le cas d’Inukjuak, la trame des rues y est aussi plus complexe dû à la taille du village plus populeux et au manque de sols stables au dégel à proximité du centre pour y construire de nouvelles maisons. Néanmoins, le village se développe de manière linéaire le long de la rivière Inuksuak, où plus de 60 % des maisons sont implantées près du cours d’eau. Ce village tend, comme Salluit, à se développer de plus en plus en grappes. Une grande partie des commerces et des équipements communautaires (épicerie, mairie, école) sont concentrés le long du parcours principal. Comme pour les villages en bloc, il y a peu ou pas de dédoublement de ces services.
Vers une hybridation des types de villages
Avec le temps, les villages nordiques tendent de plus en plus à ressembler à villages en grappes. Alors qu’au Sud, ces mutations se produisent dans les secteurs qui vieillissent, où les règlements de zonage se modifient et les conditions des bâtiments changent, la mutation des villages nordiques est dirigée par l’augmentation de la population, les changements climatiques et les types de sols qui contraignent la construction dans certaines portions des communautés. C’est donc une mutation « nordique » qui détonne du modèle de banlieue du sud du Québec. C’est en fait l’importance des facteurs naturels, le climat et le territoire, qui fait plier ce modèle rigide et l’adapte au Nord, à sa gouvernance et à ses habitants. Là où l’adaptation semble plus difficile, c’est dans les méthodes de construction que s’ajustent peu à ces contraintes territoriales. Les développements les plus récents, construits en dehors des centres des communautés, sont totalement déconnectés du territoire sur lequel ils s’implantent (Fig. 7).
Morphogenèse de deux villages typiques : Inukjuak et Kuujjuaq
La morphogenèse présentée dans cette section vise à illustrer et comprendre le processus de transformation ayant conduit à la forme urbaine actuelle des villages. Il est présenté dans un ordre chronologique selon quatre périodes d’édification (Fig. 8). L’étude fait ressortir les éléments constitutifs les plus marquants des villages en mettant en lumière les facteurs qui ont influencé la transformation et le rapport entretenu avec le territoire dans le temps. En raison de la disponibilité d’information et des relevés possibles sur le terrain, les villages d’Inukjuak et de Kuujjuaq se prêtent à l’exercice.
L’évolution des villages nordiques
Avant 1950 : postes de traites, missions religieuses et campements militaires
Quatre grandes organisations ont façonné les agglomérations qu’allaient devenir Kuujjuaq et Inukjuak. D’abord, la HBC a été la première entreprise à introduire l’économie dans la communauté inuit québécoise. Les nouvelles technologies vendues aux postes de traite réduisaient l’effort pour chasser, donc les Inuit les fréquentaient plus souvent et plus longtemps. À Inukjuak, les bâtiments étaient situés au bord de l’eau, en raison de la proximité des livraisons par bateau. L’impact a été le même à Old Chimo, un ancien village inuit sur la rive est de la rivière Koksoak. Ensuite, le gouvernement fédéral, par la création de programmes d’allocation familiale notamment, accentue le processus de sédentarisation par la traite des fourrures. L’installation de représentants et de postes de la Gendarmerie royale canadienne (GRC) à Inukjuak, pour contrôler la navigation des eaux arctiques, a contribué à augmenter la population permanente.
En 1942, a lieu l’ouverture de l’aéroport et de la base militaire à Kuujjuaq. Ce projet conjoint des États-Unis et du Canada, le Crimson Project, est le premier établissement permanent sur l’actuel site du village. On retrouve alors une rue en boucle sur laquelle sont disposés des baraques et autres bâtiments de services. Le passage de la vie de chasseurs-trappeurs à employés salariés a donc été précipité par la présence militaire. Il y avait des secteurs aménagés pour les Inuit. Après le départ de l’armée en 1948, les Inuit et les missions religieuses se déplacent d’Old Chimo à Kuujjuaq pour utiliser les bâtiments laissés par les militaires (Prémont 1994). En 1950, la base militaire est remise au ministère du Transport du Canada et c’est la fin officielle de la présence militaire dans ce village. Les missions religieuses, quant à elles, y ouvrent des écoles et construisent des églises pour poursuivre leur objectif d’évangélisation des Inuit, forçant ainsi plusieurs familles à demeurer plus longtemps aux postes de traite.
Dans le cas d’Inukjuak, sa formation a été influencée davantage par les missions religieuses, les postes de traites et les départements des transports. C’est en 1909 et 1920 respectivement que s’installent les compagnies de traite de la fourrure Révillon Frères et la Compagnie de la Baie d’Hudson (Willmott 1961). Au milieu du XXe siècle, on retrouve des bâtiments permanents des deux côtés de la rivière : la GRC, des sondes radio, l’église anglicane, notamment.
Dès le départ, la formation des villages s’est produite spontanément de manière différente. Tandis qu’Inukjuak s’implante de part et d’autre de la rivière en la longeant, les bâtiments de Kuujjuaq sont plus en retrait de la rivière en marge des pistes d’atterrissage. C’est alors le mode de transport principal des ressources externes, l’avion ou le bateau, qui impacte l’organisation des villages.
1950 à 1975 : des campements permanents aux villages
L’accélération du processus de sédentarisation et l’expansion des villages permanents sont réellement marquées dans cette deuxième période. Un changement majeur se produit dans le paysage du Nunavik : la création de villages. À Kuujjuaq, le déménagement du poste de traite de la HBC en 1958 d’Old Chimo à Kuujjuaq entraîne l’abandon de l’ancien village par les Inuit (Pouliot 1967). La consolidation du noyau du village par l’ajout de rues résidentielles connectées à la boucle originaire de la période militaire, l’apparition du gouvernement provincial et l’ajout de services, comme le réseau d’écoles à partir de 1963 (Prémont 1994), rendent le centre du village plus dense. En marge de ce noyau, l’une des pistes d’envol est retirée, laissant ainsi la place pour des habitations. Ces bâtiments précaires, construits avec des matériaux récupérés s’implantent organiquement sur les terrains plats, reliés par des chemins informels et accessibles depuis le centre du village par des rues perpendiculaires. Jusqu’en 1972, des maisons sont construites par les programmes fédéraux d’habitation autour du village, suivant une trame orthogonale dont les îlots donnant sur les berges de la rivière ne sont pas reconnectés. L’évolution rapide de la construction montre un désir de contrôler, en repoussant les espaces non planifiés plus loin du centre du village (Fig. 9). Ce qui donne un centre du village mixte, des secteurs en périphéries résidentiels monofonctionnels et en marge, « des agglomérations incontrôlées et occupations de maison improvisées » (Duhaime 1985, 36).
Au début de cette période, le village d’Inukjuak est composé surtout de bâtiments permanents d’institutions gouvernementales. Environ 75 Inuit, dont un membre de chaque famille travaille dans le village, sont installés de manière plus permanente dans des tentes. Quelque 260 autres Inuit vivent dans sept campements sur les côtes, à moins de 50 miles d’Inukjuak (Willmott 1961). Comme pour la période précédente, les habitations permanentes, tentes et bâtiments spécialisés se regroupent le long d’un seul parcours de chaque côté de la rivière. Ce sont les programmes de construction de maison qui décideront de la localisation permanente du village. Considérant la présence des organisations offrant des services aux Inuit sur une seule des rives, les maisons sont installées du côté ouest de la rivière. Avec l’installation d’une piste d’atterrissage, le parcours linéaire du village est alors confirmé et les habitations sont installées soient sur les parcours principaux ou secondaires qui y sont perpendiculaires.
1975 à 2000 : gouvernance locale et aménagement des villages
La troisième phase d’édification des villages est marquée par la signature de la CBJNQ qui permet la création d’organismes prenant part à l’aménagement du territoire au Nunavik. L’augmentation de la population et la construction de bâtiments institutionnels à Kuujjuaq font de ce village une véritable capitale au Nunavik. Dès les années 1980, on assiste à une densification du centre-ville avec l’ajout de nouveaux services : un hôpital régional, les bureaux de l’ARK, un bureau de poste, et une école primaire. Parallèlement, la construction de bâtiments résidentiels s’accélère et on assiste aux premiers dédoublements de noyaux avec la construction d’un aréna à l’extrême est du village, et de nouveaux pôles, avec l’hôtel Kuujjuaq Inn et la mairie à l’ouest.
Dans le village d’Inukjuak, la consolidation du centre du village se fait aussi sentir, malgré l’absence de bureaux des institutions du Nunavik. La mairie, une garderie, le magasin et l’hôtel-coop sont tous installés sur le parcours principal en plein centre de la communauté. Dans les années 80, le déplacement de la piste d’atterrissage plus au nord du village ouvre la porte pour un agrandissement de la communauté vers la pointe.
2000 à aujourd’hui : prise en charge locale
La dernière phase d’édification, débutant au tournant du XXIe siècle, s’amorce alors que des remaniements s’organisent dans les administrations liées à l’aménagement du territoire et la création de l’OMHK. L’impact sur l’aménagement dans les villages est notable dans le caractère sériel des nouveaux développements. En effet, en raison des contraintes de constructions contemporaines, du nombre inquiétant de bâtiments surpeuplés et de famille cherchant des maisons, la construction doit se faire rapidement et sur des sols stables (Claveau Fortin 2017) dans l’ensemble des communautés.
À Kuujjuaq, capitale administrative du Nunavik, la formation spontanée du village a laissé place à des développements planifiés très typiques des banlieues du sud du Québec. Les nouveaux parcours du début des années 2000 suivent la topographie et les sols, pour y établir quelques bâtiments résidentiels, souvent d’un seul côté des rues. Puis, après 2010, les nouvelles rues, toujours connectées au parcours principal, sont très rectilignes et ordonnées. La construction y est extrêmement planifiée sur les sols stables restants en périphérie du village et très peu accessibles. Pour éviter la surcharge de transport routier sur le parcours principal, une seconde rue rejoignant le centre a été aménagée.
À Inukjuak, en raison des sols stables limités en bas des pentes du village, la construction de nouveaux équipements publics et institutionnels (aréna, école de formation professionnelle et nouvel hôtel-coop) se fait en haut des collines. Le centre-ville est tout de même consolidé et des bâtiments existants sont rénovés et agrandis pour mieux répondre à l’augmentation de la population : l’école, le poste de soin infirmier et un nouveau centre récréatif. Tout comme à Kuujjuaq, cependant, les nouveaux bâtiments et parcours se font en périphérie du village et la construction des bâtiments est sans aucun doute sérielle. Les parcours rectilignes font fi de la topographie et les résidences sont implantées sur d’immenses radiers de graviers.
De manière plus générale, l’évolution morphologique de Kuujjuaq est marquée par des strates de développement perpendiculaires à la rivière qui s’éloignent vers le centre ancien du village, suivant les phases d’édification. C’est cette stratification, rattachée à un parcours principal qui crée des développements en grappes. L’évolution morphologique d’Inukjuak est un plus difficile à qualifier, en raison de la requalification du centre du village au fil du temps, autour du noyau de services. Néanmoins, avec les nouveaux développements dans les deux villages, l’ajout de nouveaux pôles urbains sera nécessaire pour assurer la proximité des services à la population. Pour les deux villages, la construction est optimisée pour limiter les dépenses en temps, argent et matériaux, tout en offrant de nouvelles maisons aux Inuit.
Structures de permanence et géomarqueurs : un potentiel identitaire
La morphogenèse d’Inukjuak et Kuujjuaq fait ressortir quelques éléments qui persistent à travers le temps comme des témoins de l’histoire de ces communautés. Ces composantes, lisibles dans les cartes-synthèses, constituent des repères ou des marqueurs au sein du territoire urbanisé. Ils ont le potentiel de représenter une certaine valeur d’usage ou même symbolique aux yeux des Inuit. Si ce potentiel s’avère après consultation auprès des résidents, il pourrait s’agir d’éléments qui méritent d’être conservés, voire mis en valeur, dans des phases subséquentes de développement.
À Kuujjuaq, la trace d’un établissement ancien persiste au centre du village actuel sous la forme du cercle Kaivivvik. Il s’agit en fait d’une rue principale où est implantée une grande quantité d’équipements communautaires, comme l’école Jaanimmarik. Cette forme provient de l’ancienne base militaire canado-américaine installée en 1942. Les bâtiments d’époque qui composaient les îlots entourant cette rue ont aujourd’hui été remplacés, mais le tracé demeure inchangé et contribue à marquer l’image associée au coeur de Kuujjuaq. Toujours dans le secteur « ancien », plus près de la rivière Koksoak, les rues rappellent les premiers sentiers entre les maisons construites par les Inuit avant les politiques fédérales d’habitation, tels que relevés sur les anciennes photographies aériennes. Ces tracés persistent malgré l’implantation « ordonnée » des maisons actuelles, suivant une logique de découpage en terrains individuels. Un îlot attire particulièrement l’attention : de forme relativement carrée, les bâtiments donnent sur un sentier plutôt que sur une rue pavée. Bien qu’il y reste quelques bâtiments à l’abandon, les maisons sont moins parfaitement alignées que dans le reste du secteur (Fig. 10).
À Inukjuak, certaines structures de permanence correspondent aux premiers équipements allochtones, comme le poste de traite, qui ont influencé l’organisation du centre villageois. Ces lieux, aujourd’hui occupés par la coopérative (magasin général) et le Northern Store, ont toujours des pôles d’attraction et sont maintenant devenus des lieux de rassemblement informel fréquentés au quotidien près de la rivière. Alors que les Inuit se rassemblaient autrefois autour des postes de traite pour vendre leurs prises, dans la première moitié du XXa siècle, cette appropriation des lieux d’échanges semble s’être transposée aux abords des commerces contemporains. Aussi, la forme linéaire du village, dictée par l’implantation des premières institutions, a aussi été influencée par la topographie et la barrière créée par la rivière.
L’attachement à la rive est un autre marqueur qui se rapproche davantage du géo-symbole. En effet, dans le plus récent plan directeur du village et dans les projets réalisés avec l’École d’architecture de l’Université Laval en 2015, des témoignages ont confirmé l’importance de la rivière dans le quotidien des résidents (Vachon et al. 2017) et le désir des Inukjuammuit (les habitants d’Inukjuak) de s’établir « là où les maisons étaient construites ». Une majorité de résidants du village jouit de cette relation particulière grâce à la forme linéaire du village qui épouse le rivage et y donnent accès physique et visuel. Les développements récents, cependant, s’éloignent de cette relation de même que de la proximité avec les espaces de rencontre du centre.
Dans les deux villages, deux tendances persistantes sont relevées sur les photographies aériennes : les sentiers de libre circulation entre les maisons qui ajoutent un niveau de perméabilité au réseau de rues standardisé (Fig. 11). Ce fin réseau de chemins fait écho aux liens étroits et aux échanges nombreux entre les familles. Il manifeste une conception autre de la dualité public/privé dans la communauté, et aussi du sens particulier qu’accordent les Inuit à la propriété du sol (Duhaime 2001). En fait, le modèle de lots et de rues est là, mais l’occupation du sol est toute autre et s’y superpose de manière bien lisible.
Finalement, à l’échelle territoriale, les rivières, la topographie et la géomorphologie des sols sont des composantes qui ont fortement dicté la position des établissements temporaires des Inuit lorsqu’ils étaient nomades. Des considérations liées aux vues, à l’accessibilité à l’eau comme moyen de transport, ou au climat ont façonné le paysage des villages nordiques. Les structures de permanence et les caractères distinctifs des territoires, urbanisés ou non, sont fortement associés aux attributs naturels du site. Par contre, ces caractères sont de moins en moins des déterminants dans la formation des nouveaux développements, comme en témoignent les façons de construire contemporaines (Fig. 12).
En guise de conclusion
Le territoire des villages nordiques d’aujourd’hui peut être lu comme une superposition de couches différenciées par le mode de construction et les interventions de l’État dans l’aménagement par divers programmes d’habitation. Ces strates de constructions ajoutées aux contraintes topographiques et géologiques ont influencé le développement des villages qui appartiennent à trois grandes familles morphologiques : en grappes, en bloc et linéaires. Ces environnements se sont d’abord adaptés aux contraintes territoriales en cherchant des espaces à proximité de plans d’eau. Mais au fil du temps et avec l’avancement des méthodes de construction et des connaissances liées à la fonte du pergélisol, les nouvelles maisons se sont graduellement détachées du sol pour être déposées sur des radiers de gravier. Les formes de ce milieu bâti se sont ainsi éloignées graduellement des formes d’habiter des Inuit nomades pour ressembler aujourd’hui aux banlieues du sud. Des structures de permanence sont peu identifiables dans les formes de l’environnement bâti, notamment en raison de l’évolution récente et rapide des villages. Tout de même, certaines traces perceptibles ont perduré et marquent le paysage urbanisé contemporain. Ces structures identifiées par le biais d’une morphogenèse nécessitent une vérification auprès des résidents inuit pour en valider la valeur, qu’elle soit d’usage ou culturelle. Certaines permanences structurales, comme des tracés de rues, pourraient être conservées pour éviter d’en construire de nouvelles. Les contraintes et coûts de construction peuvent influencer la conservation d’éléments sur cette base. Les marqueurs symboliques découlent, quant à eux, de l’occupation et de l’appropriation des lieux par les occupants : les sentiers informels en dehors de la trame de rue planifiée, la fréquentation prolongée des abords des commerces comme lieu d’échanges et l’ajout d’équipement en coeur d’îlots pour soutenir des activités de la vie quotidienne.
Les défis de l’aménagement dans un contexte nordique autochtone sont grands et connus. La construction stimulée par une forte croissance démographique fait en sorte que les communautés inuit s’urbanisent et s’étalent rapidement. Comme le démontre la morphogenèse d’Inukjuak et de Kuujjuaq, cette expansion rapide se fait au risque d’estomper ou de perdre des caractéristiques distinctives : une perte de connexion avec le land ou la rivière et des développements en grappes le long des parcours principaux, loin des lieux d’échanges au coeur du village. Ce manque accessibilité des services et emplois pour les familles inuit ne possédant pas de moyen de transport motorisé crée des inégalités sociales. Les secteurs sont ainsi peu « marchables », agréables et sécuritaires. Dans l’idée de mieux répondre aux aspirations résidentielles locales, de meilleures connaissances des règles d’évolution des villages et de construction des aménagements actuels et passés pourraient contribuer formuler des directives qui incluent la conservation de caractères distinctifs des villages nordiques du Nunavik, pourvu qu’elles aient un sens pour les habitants. En discuter avec eux pour confirmer la valeur de ces traits distinctifs et autres structures permanences constituerait une prochaine étape de validation, en lien avec les pratiques culturelles et les aspirations locales. Il est aussi évident, autant pour des raisons culturelles qu’environnementales, qu’il faudra porter un regard critique sur les méthodes de constructions et le mode d’implantation des maisons sur le territoire ancestral des Inuit. L’étude des cabins construites par les Inuit à l’extérieur des villages, leur position relative et leur relation au territoire permettrait d’identifier des structures de permanence d’une autre nature, probablement plus porteuses des qualités de l’habiter inuit. De tels marqueurs pourraient être « traduits » dans les formes contemporaines de développements pour assurer une meilleure cohésion entre le milieu bâti et les aspirations des Inuit.
La mise en valeur de pratiques d’aménagement démontrant la compréhension du génie du lieu n’est qu’un élément parmi plusieurs qui permettront aux Inuit de mieux vivre le territoire de leur communauté. Dans ce contexte, une planification raisonnée des villages nordiques ne peut se faire sans l’engagement réel des communautés et des acteurs locaux. Leur connaissance du territoire, leur perception globale de ses dimensions multiples, et une prise en charge locale de la planification du territoire, soutenue par les instances régionales, permettra assurément d’imaginer de nouvelles formes d’habiter plus respectueuses de l’environnement et surtout de la culture inuit.
Appendices
Remerciements
L’auteur tient à remercier sincèrement sa directrice de recherche, Geneviève Vachon, pour ses judicieux conseils tout au long de son parcours universitaire et de la rédaction de l’essai en design urbain duquel découle cet article. Il tient aussi à souligner l’appui de partenariat de recherche « Habiter le Nord québécois : Mobiliser, comprendre, imaginer » (www.habiterlenordquebecois.org / CRSH 2015-2021).
Notes
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[1]
Le design urbain, discipline intégrant les savoirs provenant de l’architecture, de l’urbanisme et de l’architecture du paysage, est particulièrement utile en aménagement du territoire pour favoriser l’application des politiques d’urbanisme et mesurer l’impact des environnements bâtis sur les communautés.
-
[2]
Le terme land est utilisé par les Inuit francophones et anglophones pour décrire le territoire situé à l’extérieur des limites de leur village.
-
[3]
Traduction libre.
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[4]
En 1959, la politique fédérale du logement comporte deux volets : l’introduction d’un marché du logement par la vente de maison à prix subventionné (contenant deux chambres) et la politique d’habitation à loyer modique où le coût du loyer est fixé au prix du chauffage (maisons à une seule pièce, communément appelée matchbox) (Thibault 2016). Quelques 900 matchbox seront construites dans l’arctique canadien jusqu’en 1965 (Duhaime 1985). La seconde politique canadienne du logement, d’abord nommée l’Eskimo Rental Housing Program puis le Northen Rental Housing Program, prévoit la location des maisons construites à un loyer fixé à un maximum 20% du revenu familial. Ce revenu incluait le travail salarié, l’assistance publique, et les revenus de chasse et de pêche (Bonesteel 2008).
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