Abstracts
Résumé
Dans l’avertissement à Les sept solitudes de Lorsa Lopez (1985), Sony Labou Tansi définit l’art comme « la force de faire dire à la réalité ce qu’elle n’aurait pu dire par ses propres moyens ou, en tout cas, ce qu’elle risquait de passer volontairement sous silence ». Chez Ross Chambers, cette force confère à la littérature le statut d’« enfant terrible » en ce sens qu’elle bouleverse les mentalités par sa volonté de « changer le monde » (Room for Maneuver, 1991). Rien ne peut mieux définir l’oeuvre de Monénembo, dont la tension morale se situe dans cet effort de faire dire à la réalité ce qu’elle ne voudrait pas articuler. Elle y arrive en prenant à contre-pied le réalisme par un décalage constant du référent, qu’il soit social, politique ou historique. L’écriture de Monénembo opère dans un « espace oppositionnel » (R. Chambers), où l’art du déplacement permet la liberté du dire. À partir de Les crapauds-brousse (1979), Les écailles du ciel (1986) et L’aîné des orphelins (2000), cet article montre comment la tactique de l’écart permet au romancier de contourner l’indicible du réel.
Abstract
In the foreword to Les sept solitudes de Lorsa Lopez (1985), Sony Labou Tansi defines art as “the power to make reality say what it could not have said on its own, or at least what it risked keeping voluntarily unsaid.” For Ross Chambers, this strength confers on literature the status of “wild child” in the sense that it disrupts mentalities through its desire to “change the world” (Room for Maneuver, 1991). Nothing could better define Monénembo’s work, whose moral tension lies in this effort to make reality say what it does not wish to articulate. It achieves this by countering realism with a constant shift in the referent, whether social, political or historical. Monénembo’s writing operates in an “oppositional space” (R. Chambers), where the art of displacement allows freedom of expression. Based on Les crapauds-brousse (1979), Les écailles du ciel (1986) and L’aîné des orphelins (2000), this article shows how the tactic of distance enables the novelist to bypass the unspeakableness of reality.