Abstracts
Résumé
Les études sur l’oeuvre de Monénembo tiennent assez rarement compte du quatrième roman de l’écrivain, Un attiéké pour Elgass, qui semble occuper une place à part dans sa production. Il présente en effet une forme hybride où le populaire et le « lettré » se rencontrent. Sans se réclamer ouvertement du roman policier, le roman convoque plusieurs de ses composantes pour construire une double enquête dont l’une cherche à élucider les circonstances de la mort d’Elgass, tandis que l’autre s’éloigne du canon du genre en inscrivant dans le texte un questionnement sociopolitique sur les dérives des indépendances africaines. Une analyse intertextuelle révèle que le roman renvoie spécifiquement au célèbre classique d’Agatha Christie, Le meurtre de Roger Ackroyd, dont il emprunte plusieurs procédés et motifs, pour les redistribuer, les adapter au contexte africain et les mettre au service d’un discours moins ludique. D’une part, la fonction de la narration truquée déjoue les attentes du lecteur et met en lumière le dérèglement de l’ordre social lorsque l’usage du « mensonge bien arrangé » se généralise ; d’autre part, la mise en scène du pouvoir de la parole collective (la rumeur) suggère que le langage dispose encore de ressources pour contrer cette glissade vers le chaos.
Abstract
Studies of Monénembo’s work rarely take into account his fourth novel, Un attiéké pour Elgass, which seems to occupy a special place in his output. It presents a hybrid form where the popular and the “literate” meet. Without openly claiming to be a detective story, the novel draws on several of its components to construct a double investigation, one of which seeks to elucidate the circumstances surrounding Elgass’s death, while the other departs from the genre’s canon by inscribing in the text a socio-political questioning of the failings of African independence. An intertextual analysis reveals that the novel refers specifically to Agatha Christie’s celebrated classic, The Murder of Roger Ackroyd, from which it borrows several devices and motifs, only to redistribute them, adapting them to the African context and placing them at the service of a less playful discourse. On the one hand, the function of the rigged narrative thwarts the reader’s expectations and highlights the disruption of the social order when the use of “well-arranged lies” becomes widespread; on the other, the staging of the power of the collective word (rumor) suggests that language still has resources to counter this slide into chaos.