Abstracts
Résumé
L’insurrection de 1871 est un événement majeur qui a profondément marqué la Kabylie. Rien ne l’a autant et plus durablement bouleversée que l’insurrection d’El Hadj Mohand Aït Mokrane (El Mokrani) et du cheikh El Haddad. Cette révolte populaire a eu des conséquences désastreuses pour les Kabyles qui ont perdu leurs terres, leur élite traditionnelle et leur style de vie. La défaite et ses conséquences ont traumatisé la population au point qu’elles n’ont pas pu manquer de laisser des traces dans la poésie populaire. Le séquestre et la spoliation des terres, l’effondrement des structures de l’ancienne société kabyle, la violence de la répression et le triomphe définitif de la colonisation ont inspiré une poésie nouvelle. Plus douloureuse et plus inquiète, celle-ci exprime deux sentiments nouveaux inconnus jusque-là dans la tradition de la poésie kabyle : la stupeur et le désarroi qui ont saisi la population au lendemain de cette défaite. Notre propos s’attache à lire les traces de cet événement traumatisant dans la poésie orale kabyle. Nous montrons la manière dont les poètes se sont appropriés l’événement pour témoigner du désastre de 1871 et de ses conséquences dans l’imaginaire populaire.
Abstract
The uprising of 1871 is a major event that deeply marked Kabylia. Nothing ever affected it more radically and more lastingly than the insurgency of El Hadj Mohand Aït Mokrane (El Mokrani) and Cheikh El Haddad. This popular revolt had disastrous consequences for the Kabyles who lost their lands, their traditional elite, and their lifestyle. The defeat and its consequences traumatized them to the point of leaving marks in popular poetry. The sequestration and spoliation of the lands, the collapse of the structures of the ancient Kabyle society, the violence of the repression and the final triumph of the colonization inspired a new poetry. More grievous and more anxious, it expressed two feelings unknown until then in Kabyle traditional poetry: the stupor and disarray which seized the population in the aftermath of this defeat. Our purpose is to read the traces of this traumatic event in Kabyle oral poetry, and to show how poets appropriated this event to bear witness to the disaster of 1871 and its consequences in the popular imagination.
Article body
Cent cinquante ans après le soulèvement anti-colonial de 1871, il nous a semblé utile d’écouter enfin les vaincus et de lire dans la poésie kabyle les traces du profond traumatisme qui a saisi les populations au lendemain de leur défaite. Celle-ci constitue incontestablement un tournant dans l’histoire de la Kabylie et ses conséquences tant matérielles que morales furent plus que désastreuses pour les populations : leur élite traditionnelle fut décimée, leurs terres, confisquées et, plus que tout, leur mode d’organisation sociale et politique, totalement démantelé. Il faut sans doute remonter très loin dans l’histoire, jusqu’à la révolte dite des Quinquegentiens[1] pour trouver une insurrection populaire équivalente qui a embrasé toute la Kabylie de Saldae (Bejaïa) à Russucru (Dellys) et jusqu’au Mons Ferratus, « la montagne de fer » des Romains[2].
La répression terrible qui s’est abattue sur les villages, l’effondrement puis le démantèlement des anciennes structures sociales, le séquestre des terres et l’appauvrissement des tribus ont laissé des traces dans la poésie populaire kabyle et nourri une inspiration où dominent l’angoisse et le désarroi. Notre propos s’attachera à lire les traces mémorielles du trauma historique et de ses conséquences sur les plans économique, politique et social à partir d’un corpus de poésies orales kabyles constitué principalement de chansons[3] de Smaïl Azikiw traduites et éditées par Jean-Dominique Luciani[4] et de poèmes de Si Mohand Ou Mhand des Aït Iraten choisis et transcrits par Mouloud Mammeri[5].
On sait peu de chose de la vie de Smaïl Azikiw sinon qu’il a été un ami fidèle et un client loyal des Aït Kaci, une grande famille de jouads (noblesse guerrière) qui avait dirigé la révolte de 1871 dans la vallée du Sébaou. Comme son nom l’indique, il fut le poète de la tribu des Aït Ziki (commune de Bouzguène) située à une soixantaine de kilomètres à l’est de Tizi-Ouzou dans la Daïra (sous-préfecture) d’Azazga à la limite des wilayas (départements) de Tizi-Ouzou et de Béjaïa. Ses poèmes ont été initialement recueillis et transcrits en arabe par le cheikh Mohand-Saïd Ibnou Zekri qui officiait alors comme imam à la mosquée de Sidi Ramdane d’Alger. Ils ont ensuite été remis à Jean-Dominique Luciani qui les a traduits en français et publiés dans trois livraisons de la Revue africaine[6] sous le titre « Chansons kabyles de Smaïl Azikkiou[7] ».
Si Mohand Ou Mhand Aït Hamadouche des Aït Iraten (1845-1906), appelé communément Si Mohand, est le plus célèbre des poètes kabyles. Sa vie et son oeuvre ont été marquées par le soulèvement de 1871. Sa famille a été décimée pour la part active qu’elle avait prise dans l’insurrection[8]. Son père a été fusillé en 1871 à Fort-National (aujourd’hui Larbaâ Nath Irathen). Lui-même ne dut la vie sauve qu’au capitaine Ravez, chef du Bureau arabe, qui avait jugé sa mort inutile. Tous leurs biens familiaux ont été séquestrés et leurs terres situées dans la fertile vallée du Sébaou, confisquées et distribuées à quelques familles kabyles collaboratrices et à des colons venus s’installer en Kabylie après 1871. Ruiné et déclassé, sans attache tribale ni familiale, vivant d’expédients et de petits métiers, Si Mohand Ou Mhand a passé près de trente ans à errer et à essaimer ses poèmes entre la Kabylie, l’Algérois et l’est de l’Algérie où vivait une forte communauté kabyle. Une grande partie de son oeuvre a été recueillie, traduite, annotée et éditée par Mouloud Mammeri sous le titre Les Isefra. Poèmes de Si Mohand Ou Mhand[9]. Le destin singulier de Si Mohand Ou Mhand reflète le « drame, qui fut celui de tout un peuple » (LI, 31). Son recueil témoigne de l’état social et psychologique des hommes de son temps même si, contrairement à l’oeuvre de Smaïl Azikiw, il ne contient pas de poèmes faisant explicitement référence à l’événement lui-même. Il ne fait, même, aucune mention des Européens qui semblent avoir subitement disparu. Toute la colère, toute l’indignation du poète est réservée à ses compatriotes devenus collaborateurs de l’administration, aux caïds, aux affairistes et autres parvenus à la faveur des événements.
À travers les « Chansons kabyles de Smaïl Azikkiou » et Les Isefra de Si Mohand Ou Mhand et, en complément, à travers les vers de poètes qui, eux, sont demeurés anonymes[10], c’est l’état d’âme d’une population totalement stupéfaite par le désastre de 1871 et par la violence des représailles qui s’est abattue sur elle que nous lisons. Chaque poète a, selon son talent ou son tempérament, traduit un désarroi collectif. Ce sont « ces voix qui nous viennent du passé[11] » et qui transmettent la mémoire d’une catastrophe historique que nous voulons faire réentendre.
La poésie comme « mémorial »[12] de la répression
Si l’on considère le panorama de la poésie orale kabyle du xviie au xixe siècle telle qu’elle est arrivée jusqu’à nous à travers les recueils Poésies populaires de la Kabylie du Jurjura d’Adolphe Hanoteau[13] et Poèmes kabyles anciens de Mouloud Mammeri[14], force est de constater une rupture brutale au point de vue thématique et stylistique après la défaite de 1871. Ce qui frappe de prime abord, c’est l’introduction pour la première fois d’un vif sentiment d’inquiétude et d’un profond désarroi inconnu jusque-là dans la poésie traditionnelle des Kabyles. En effet, la violence inouïe de la répression, l’instauration brutale du nouveau régime civil et l’agressivité de la nouvelle politique de colonisation imposée à la population ont été interprétées par les poètes comme la fin de leur monde. Pour Smaïl Azikiw, « le monde s’écroule, lézardé » (« CKSA » 1900, 51) et, selon Si Mohand Ou Mhand, « [l]e monde pour tous a explosé » (LI, 139).
Dans le climat général de prostration qui a saisi le peuple abasourdi par la violence et l’ampleur de la répression, les poètes disent leur conviction d’assister à l’avènement du fameux « quatorzième siècle » que la tradition populaire tenait pour un siècle de ruine annonçant la fin des temps[15]. Ainsi pour Si Mohand Ou Mhand :
LI, 137Nous sommes au quatorzième siècle
Le treizième a pris fin
Esprit avisé écoute et comprends-moi
Les métèques ont prospéré
Ils parlent haut
Et des nobles le nom s’est perdu
On s’adonne maintenant à l’amour des garçons
On est sans foi ni loi
On va attifé comme une fille.
Pour Smaïl Azikiw, l’année 1871 annonce la fin des temps telle que les livres la prédisent. Un des signes annonciateurs est, selon le poète, le règne de l’injustice sur terre : « L’année 1871 fut l’année terrible. / Les livres l’avaient bien prédit ; / La justice disparut ainsi que la vérité » (« CKSA » 1899, 151). Pour exprimer le désastre de 1871, un autre poète resté anonyme a forgé l’image d’un « soleil qui s’éteint » : « Le soleil encagé s’est obscurci / Le pays tout entier n’en peut mais / Le tout pour l’amour du Prophète » (PKA, 455).
À peine les armes déposées, des représailles terribles se sont abattues sur les populations. Les témoins de l’époque, des historiographes militaires pour la plupart comme le commandant Rinn[16] et le colonel Robin[17], reconnaissent que la répression a été expéditive, aveugle et, bien souvent, disproportionnée par rapport à la culpabilité réelle ou supposée des révoltés. Le colonel Robin le dénonçait ainsi :
La répression de l’insurrection algérienne de 1871 a été sans mesure ; elle a plutôt ressemblé à un acte de vengeance implacable qu’à l’application d’un châtiment proportionné aux méfaits commis. Les indigènes révoltés les avaient pourtant déjà durement expiés, ces méfaits, par les hécatombes d’hommes que nos armes perfectionnées avaient produites, par les ruines matérielles qui avaient jalonné le passage de nos colonnes[18].
Pour venir à bout de l’insurrection, les puissantes colonnes des généraux Cérez, Lallemand et Saussier ont pratiqué une véritable politique de terreur : incendies et destructions systématiques des villages, saccages méthodiques des récoltes et des arbres fruitiers, razzias, sacs des mosquées et des mausolées, exécutions sommaires, etc. Louis Rinn et le colonel Robin ont condamné les exactions et la répression exercées sur de pauvres populations désarmées. Pour les vaincus, cette violence inouïe était incarnée par le général Cérez, chargé de réprimer la révolte et réputé pour sa grande brutalité :
PKA, 445Le général C[é]rez s’est mis en campagne
Il a exterminé le monde entier
Hommes vous entendez ce que parler veut dire
Il en a fait décapiter beaucoup
Qui n’avaient commis nul crime
Mon coeur en est bouleversé
Et, fait plus grave pour ces hommes très croyants, même les mosquées, les mausolées et autres lieux saints pourtant réputés inviolables n’ont pas été épargnés : « C[é]rez défigure celui qu’il n’a pas pendu / Il a fait jouer du tambour dans les mosquées / Ses soldats y ont dansé et chanté à qui mieux mieux » (RPK, 220). Tous ont relevé les exécutions sommaires : « Quiconque reconnaissait ce dont on l’accusait / Était guillotiné / Combien en a-t-on exécuté qui n’avaient rien fait » (PKA, 453), ainsi que les incendies de villages : « Tamda n’est plus que ruines / Murs éboulés / Tu peux prendre le deuil demeure du caïd Ali[19] » (PKA, 445).
Cette violence était réclamée par les colons qui, à travers leur presse, leurs relais et leurs représentants, poussaient et encourageaient les autorités à une politique de terreur et d’extermination. Un collaborateur de L’Union de Sétif exigeait ainsi de « supprimer tous les chefs, caïds, cheicks, etc., sans exception, car il n’y en a pas un de sincère […]. Il faut donc les supprimer tous, les soi-disant fidèles par extinction, si l’on veut. [… L]’occasion est on ne peut plus belle puisqu’ils sont tous insurgés et qu’on a le droit de les faire fusiller[20]. »
La défaite des insurgés a eu pour conséquence de donner un nouvel essor à la colonisation. Le parti colonial s’est saisi de cette opportunité pour réclamer de nouvelles terres. La loi Warnier[21] du 26 juillet 1873 leur donne le cadre juridique et les moyens légaux pour spolier les populations et en priorité les terres dites « arch » (propriété collective des tribus) très convoitées par le colonat. Un autre collaborateur de L’Union de Sétif résume parfaitement l’état d’esprit des colons qui voulaient que « partout où il y a [eu] une insurrection, il n’y [ait] plus qu’une propriété domaniale à partager entre les colons, les immigrants et les indigènes demeurés fidèles[22] ». Les poètes kabyles se sont fait l’écho de cette dépossession comme Smaïl Azikiw qui note : « Les gens sont partis, emportant leurs ustensiles ; / Les terres ont été prises par les Espagnols, / Par les Maltais et par les agents prévaricateurs » (« CKSA » 1900, 55). C’est impuissant qu’un autre poète constate : « Le géomètre mesure / Avec ses instruments / Il a cadastré les terres » (PKA, 447).
Le séquestre collectif des terres a provoqué la ruine des tribus déjà fortement ébranlées. Pour agrandir les domaines, on a exproprié de nouvelles tribus pour « cause d’utilité publique » :
PKA, 447Depuis Boudouaou jusqu’à Oudris
Jusqu’aux Aït Ouaghlis de delà la montagne
De Bou-Aréridj à Michelet
Il a séquestré toutes nos terres
Prélevé tribut
Réduit les musulmans à la famine
Au drame du séquestre collectif s’est ajouté le séquestre individuel qu’un poète anonyme décrit ainsi :
PKA, 449De Boudouaou à Sedouk
Il a cadastré la terre
L’a mesurée à l’hectare
Chacun ouvrant ses coffres
Donnait jusqu’aux baguettes
Des longs fusils endeuillés
Un autre poète aussi anonyme ajoute :
RPK, 220Le pouvoir a redoublé de férocité
Les gens sont hantés par l’angoisse
Vers nous il envoie l’usurier
On a battu le tambour pour lire son avis
Il dit inscrire le nombre de nos brebis
Alors que sur un chien nous avons payé l’impôt
Le colonel Robin lui-même fut offusqué par ces mesures de répression qui ont provoqué un appauvrissement rapide des populations : « On pourrait croire que lorsqu’un individu condamné par les tribunaux de droit commun avait porté sa tête sur l’échafaud il avait suffisamment payé sa dette à la société ; il n’en était rien, tous les biens meubles et immeubles de sa famille étaient saisis et on vouait à la plus noire misère des femmes et des enfants qui ne nous avaient rien fait[23]. »
Le désarroi qui suivit l’écrasement de la révolte fut immense car la population avait compris que sa liberté était irrémédiablement perdue et qu’à la défaite s’ajoutait la ruine pour les tribus insurgées qui devaient s’acquitter aussi, en guise de réparation, d’un impôt de guerre s’élevant à trente-cinq millions de francs (somme fixée en juin 1872) :
« CKSA » 1899, 167L’impôt s’abattit sur nous à coups répétés ;
Soixante écus par tête à chaque fois ;
Apporte-les ou débrouille-toi !
Les gens ont vendu leurs arbres à fruits,
Et même leurs vêtements ;
C’est pour eux une époque terrible.
Pour le poète Smaïl Azikiw, cette mesure injuste frappa jusqu’au coeur des familles puisque les liens qui jadis attachaient solidement ses membres se délièrent au point de pousser les hommes, dans leur malheur, à renier leur propre parentèle : « Quand l’impôt de guerre nous affola, / Nous tombâmes tous sur l’aire, / Chacun renia son frère germain » (« CKSA » 1899, 151). Si cet impôt de guerre eut comme conséquence immédiate d’appauvrir plus lourdement encore les tribus et les populations déjà fortement éprouvées par la dépossession de leurs terres, qui constituaient leur unique ressource et leur principal moyen de subsistance, la nouvelle politique de colonisation mise en place par les vainqueurs après 1871 affectera plus profondément la société kabyle et aura des conséquences plus dramatiques sur les populations. En effet, pour asseoir définitivement sa domination, l’administration coloniale s’est attaquée aux fondements mêmes de cette société : son organisation sociale et politique ancestrale qu’elle s’est acharnée à démanteler pièce par pièce.
Requiem pour une société disparue
La révolte jugulée et le procès des grands chefs terminé, les autorités coloniales s’attelèrent à casser les ressorts d’une population attachée à son élite traditionnelle, à ses anciennes coutumes et à son mode de vie ancestral. La disparition des anciennes chefferies religieuses et guerrières a fini de désemparer une population, déjà fortement éprouvée, qui a vécu l’élimination de son élite traditionnelle comme une perte pénible, voire une punition, qui s’ajoutait aux autres épreuves : « Finis sont les nobles pauvres d’eux / Sur les enfants de pure race / Les épreuves sont tombées par monceaux » (PKA, 451). Ainsi d’Ali Oukaci, un des chefs de la révolte, regretté par Smaïl Azikiw : « Il est tombé, le rempart de Thamda. / Tous les peuples en furent informés. / La vallée demeura déserte » (« CKSA » 1899, 155).
Livrées à elles-mêmes, les populations médusées virent apparaître à la faveur des événements une nouvelle race d’hommes, sans relief et sans réelle tradition de commandement, qui parvinrent, à prix d’argent et d’entregent, à se faire nommer à des postes de responsabilité comme le dénommé Achertouh[24] qui réussit à obtenir un poste de caïd chez les Amraouas[25] après 1871 et que fustige Smaïl Azikiw :
« CKSA » 1899, 31, 33Celui dont le coursier hennissait,
Dont on écoutait jadis la parole,
Sur qui les mouches ne se posaient pas,
Est remplacé par un Achertouh’,
Dont la morve ressemble à un morceau de viande séchée !
Qu’êtes-vous donc devenus, faucons !
C’est à un ivrogne, qui n’a pas de terre à cultiver,
Qui boit du vin dans les coupes,
Que le Gouvernement a donné un rang.
Ce qui caractérise la société nouvelle née des décombres de la défaite de 1871, c’est l’ascension d’hommes issus de classes réputées inférieures, d’anciens bergers, maquignons ou bouchers (métiers totalement décriés et méprisés dans la société kabyle), de nouveaux riches qui ont acquis frauduleusement des biens et des terres et qui exhibent leur richesse avec morgue. Une promotion sociale qui a offusqué les anciens « aristocrates » déchus comme Si Mohand Ou Mhand, scandalisé par cet ancien boucher :
LI, 159Jadis
Il se vendait comme bétail
On le menait où bon semblait
Ore son bonheur se hausse
Par-dessus tous
Et sa chance l’emporte sur toutes les autres.
Et par cet ancien berger, El Hadj M’Barek, qui monte une mule harnachée, qui étale avec arrogance sa nouvelle fortune et
LI, 157Qui a oublié le temps qu’il se louait comme berger
À Icheriden
Et qui maintenant que les temps ont tourné
Est devenu propriétaire
Et compte parmi les citoyens d’Icheraiouen[26].
Comme l’a montré Mouloud Mammeri[27], les perturbations jetées dans les hiérarchies sociales ont bouleversé l’ordre ancien qui fixait les rôles et les valeurs des individus dans le groupe selon leur sagesse et leur savoir. Désormais, c’est l’argent qui procure respect et considération : « Le monde est à ceux qui ont de l’argent / On leur donne du Monsieur / Tout comme si c’était des clercs » (LI, 165). L’époque nouvelle imposée par la colonisation appartient désormais aux profiteurs et aux affairistes, ces « hommes de rien » qui eurent les faveurs des Français depuis « l’exil des preux » : « Le sort maintenant favorise la valetaille / C’est elle qui commande / Ce siècle est venu pour son bonheur » (LI, 163).
Le bouleversement s’étendit au domaine politique de l’ancienne société kabyle. Parce qu’elles les soupçonnaient d’entretenir le bellicisme et l’esprit de résistance des populations, les autorités coloniales s’attaquèrent à l’armature politique et aux cadres séculiers qui maintenaient depuis des siècles la société kabyle. Contrairement à la conquête de 1857 où on respecta (du moins formellement) la promesse faite par le maréchal Randon aux Kabyles vaincus de leur laisser, pour le prix de leur reddition, leurs coutumes, leurs lois et leur organisation municipale[28], l’administration coloniale, après 1871, décida de reconfigurer totalement le paysage politique du pays en soumettant les populations, qui obéissaient jusque-là à leurs assemblées citoyennes, à l’autorité d’un administrateur civil qui installa à leur tête des hommes qui lui étaient acquis par intérêt, par opportunité ou par sympathie. Ces nouveaux chefs, sans tradition et sans passé, devinrent les agents à tout faire de l’administrateur et des colons. Les assemblées de villages qui réglaient et régulaient la vie des citoyens furent dessaisies de leurs pouvoirs de juridiction et de leurs prérogatives en matière civile et pénale et placées sous l’autorité de caïds, un temps nommés « présidents », aux pouvoirs exorbitants et arbitraires qui donnèrent lieu à de nombreux abus.
Smaïl Azikiw a témoigné de ces assemblées nouvelles devenues, au gré des événements, des espaces où s’affrontent désormais les intérêts les plus vénaux, où règnent corruption, mensonge et faux témoignages : « On vend la justice comme on vend un tissu ; / L’iniquité règne en maîtresse ; / Comment espérer d’abondantes récoltes ! » (« CKSA » 1899, 25). Ces assemblées jadis dirigées par des hommes éclairés respectés par leurs concitoyens pour leur sagesse et leur probité se transforment, après 1871, en espaces pleins d’abus et de passe-droits présidés par des hommes sans foi ni loi : « Nous allons vous raconter, enfants, / L’histoire de l’assemblée des douze[29], / Dont le président est un coquin » (« CKSA » 1899, 23).
Plus scandaleux encore, pour une société volontiers gérontocratique, ces assemblées ont même été remises entre les mains de jeunes hommes sans aucune connaissance ni expérience des affaires de la cité : « Un enfant encore tout jeune, / Dont la tête est sans jugement, / Est président d’une tribu » (« CKSA » 1899, 31). Les populations sont désemparées et désorientées parce qu’elles assimilent la perte de leurs anciennes structures politiques à une destruction de leur style de vie. Le monde ancien définitivement disparu, elles ressentent un profond sentiment d’affliction. Les temps nouveaux, loin de les rassurer, sont au contraire perçus comme une époque de désespoir. Smaïl Azikiw a saisi cette transformation dans les esprits et rendu dans ces vers le désarroi des hommes :
« CKSA » 1900, 51Le monde s’écroule, lézardé
Par le feu du parjure ;
Le doux est dominé par l’acide.
La fortune est dure pour tous ;
Nous sommes tombés dans la misère,
Tous jaunis par la fumée, comme les chèvres.
Et celui des familles :
« CKSA » 1900, 51Le fils s’éloigne du père ;
Il n’a plus confiance en lui ;
Il méconnaît les bienfaits qu’il en a reçus.
L’enfant d’aujourd’hui est comme la punaise ;
Devenu grand, il vous étrangle ;
Il frappe sa mère avec le pilon.
Même les valeurs religieuses ont été bafouées :
LI, 155Quels méfaits commettent tous ces cheiks
Emportés par l’éboulement
En même temps que leurs ouailles
Les ordures ils nous ont dit que c’était or
Le soleil s’est voilé
Ils ont délaissé le Koran pour l’intrigue.
Après 1871, la poésie kabyle est marquée d’un pessimisme profond. À l’effondrement des anciennes institutions politiques et sociales, aux mutations socio-économiques introduites par la colonisation et à la violence inouïe de la répression qui ont atomisé la population répond une manière nouvelle d’exprimer le réel. Les cadres de la société traditionnelle s’étant écroulés, l’ancienne poésie devient inopérante et dans l’incapacité d’exprimer la nouvelle réalité coloniale. Le démantèlement de la société kabyle a exigé une nouvelle forme d’expression chargée de traduire la nouvelle réalité coloniale, de sublimer le traumatisme de la défaite et le désarroi des populations.
L’expropriation des terres et l’introduction de la propriété privée dans une société qui avait érigé en dogme l’indivision des terres a provoqué une prolétarisation des masses et une désintégration sociale qui a jeté sur les routes d’Algérie tous les expropriés, réduits, comme Si Mohand, à travailler dans les exploitations des colons de la plaine de la Mitidja, ou dans les chantiers de Bône, d’Alger et d’ailleurs :
LI, 183Cet an inspire l’épouvante
Qui a trompé tant de jeunes gens
Sortis des médersas
Ils vont de ferme en ferme se présenter aux portes
Kabyles et Arabes
Et les porcs de se gaver de rire[31]
Beaucoup d’anciens propriétaires ruinés et déclassés s’étaient remis à la fortune hasardeuse des routes de l’exil ou des chemins de l’exode à la quête d’un hypothétique gagne-pain :
LI, 181Nobles que je vous dise
Le départ de cette fois m’effraie
De l’exil rude est la condition
Dieu daigne exaucer mes voeux
En Lui j’espère s’Il veut bien m’assister
Nul n’est libre de ne pas quitter sa maison.
L’introduction du thème de l’exil, inconnu jusque-là dans la poésie kabyle, trouve sa source dans cette nouvelle réalité sociologique. Pour Ouahmi Ould Braham :
Les changements socio-économiques, la mobilité sociale, le déclassement des anciens chefs et des élites, le désarroi des générations montantes sont autant de maux qui ont durablement marqué la société. Une seule issue s’offre à une partie de la jeunesse : partir et chercher fortune ailleurs. Autant de bouleversements sociaux qui vont se ressentir dans la création littéraire[33].
Esthétiquement, l’après-1871 verra l’apparition dans l’horizon culturel de la Kabylie d’une poésie inquiète et tourmentée qui trouve son explication dans la décomposition sociale et la tendance inédite de la société à l’individuation et au relâchement des liens sociaux[34]. L’exil, la solitude, l’angoisse de la séparation deviennent dès lors des motifs poétiques nouveaux qui expriment la dislocation sociale, le déracinement et l’éclatement des familles. En effet, si dans l’ancienne société kabyle, l’individu pouvait compter sur la solidarité tribale, clanique ou familiale, dans le nouveau monde de la colonisation, il est en revanche livré à lui-même :
LI, 181Je suis malade sans raison
J’ai consulté les savants
Sans trouver remède auprès d’eux
Je suis écrasé
Du pays de mes pères
Ceux qui me connaissaient ont fui
Je me suis exilé en terre étrangère
Clercs pleurerez-vous
Esprits qui saisissez tout.
L’inquiétude gagne l’exilé séparé de sa famille :
LI, 221Mon coeur pleure et c’est à raison n’est-ce pas
Il a tant subi
Qu’il saigne chaque fois qu’il se ressouvient
Qui Dieu n’a-t-il pas éprouvé
Nous nous plaignons à Lui chaque jour
Et aux saints grands et petits
Rappelez-moi je veux revenir
Trop longue a été mon absence
Mon nom perdu s’est oublié.
Tout effrayé de mourir socialement, oublié des siens[35] :
LI, 227Faucon écoute bien mon message
Avant de déployer tes deux ailes
Sois de ceux qui comprennent
Par-delà la montagne
Emporte mes lettres
Et raconte à chaque ami
S’il est encore des coeurs qui s’attendrissent
Qu’ils se souviennent de moi
Enfant prédestiné à l’exil.
Incontestablement l’insurrection de 1871 a marqué un tournant dans l’histoire de la Kabylie. Après une répression sanglante, le séquestre foncier et l’impôt de guerre ont ruiné les tribus et accéléré la déchéance socio-économique et la prolétarisation des populations. L’instauration du régime civil a bouleversé le paysage politique ancien. Les populations, qui s’auto-administraient jusque-là, sont désormais soumises à l’autorité d’un administrateur qui place à leur tête des représentants qui lui sont acquis. Les anciennes coutumes et les vieilles institutions qui maintenaient l’équilibre politique volent en éclats. Ce sont tous ces bouleversements économiques, politiques, religieux et sociaux que Smaïl Azikiw, Si Mohand Ou Mhand ainsi que d’autres poètes restés anonymes ont transfiguré dans leurs vers. C’est le spectacle de la décomposition d’une société multiséculaire, dans le sillage de la défaite de 1871, qu’ils nous ont donné à voir. Leurs poèmes témoignent des nouvelles conditions de vie, des angoisses et de la colère d’une génération condamnée par le nouvel ordre social imposé par la colonisation à laquelle elle impute sa misère matérielle et sa déchéance morale. Désorientés dans une société nouvelle à laquelle ils ne peuvent ni adhérer ni se soustraire, Smaïl Azikiw, Si Mohand Ou Mhand et d’autres ont témoigné pour une population vaincue et désemparée par la perte de ses terres, l’écroulement de ses structures traditionnelles et la fin de son style de vie pluriséculaire.
Appendices
Note biographique
Professeur dans l’enseignement secondaire. Docteur en anthropologie sociale et ethnologie et membre associé du Laboratoire d’Anthropologie Sociale (LAS, ÉHESS), il a soutenu en 2017 à l’École des hautes études en sciences sociales une thèse intitulée « Poésie orale kabyle ancienne. Histoire sociale, Mémoire orale et création poétique ». Il a coédité, avec Tassadit Yacine, les actes de colloque intitulés Kabylie 1871. L’Insurrection (Alger, Koukou, 2019).
Notes
-
[1]
La révolte dite des Quinquegentiens est une coalition de cinq grandes confédérations maures dirigée par Firmus, un prince berbère, qui se souleva contre Rome entre 370 et 375. Elle a été réprimée par Théodose. Voir Adrien Berbrugger, qui a forgé ce terme, Les époques militaires de la grande-Kabylie, Alger, Bastide, 1857, et Si Ammar ou Saïd Boulifa, Le Djurdjura à travers l’histoire (depuis l’Antiquité jusqu’à 1830). Organisation et indépendance des Zouaoua (Grande Kabylie), Alger, J. Bringau, 1925.
-
[2]
Le Mons Ferratus était le nom que les Romains donnaient à l’actuelle chaîne du Djurdjura.
-
[3]
Ces « chansons » sont de véritables poèmes déclamés publiquement. C’était une tendance au xixe siècle de nommer « chansons » toutes les poésies populaires.
-
[4]
Jean-Dominique Luciani (1851-1932) a été conseiller au gouvernement général à Alger et directeur des affaires indigènes. Voir ci-dessous note 7.
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[5]
Mouloud Mammeri (1917-1989) est un écrivain algérien de langue française et l’auteur de romans, de nouvelles et de pièces de théâtre. De 1949 à 1962, il enseigne les lettres françaises en Algérie et au Maroc. Défenseur du patrimoine berbère, il s’est consacré très tôt à la recherche dans le domaine de la langue et de la culture berbère. Il a collecté, transcrit et publié des centaines de poèmes kabyles anciens qu’il a sauvés de l’oubli. Les travaux de cet éminent berbérisant sont incontournables pour tous ceux qui s’intéressent à la culture et à la tradition orale kabyle. Voir ci-dessous note 9.
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[6]
Fondée à Alger en 1856, publiée par l’imprimeur-libraire Adolphe Jourdan, la Revue africaine était l’organe de la Société historique algérienne. Principale revue scientifique d’Afrique du Nord, elle était spécialisée dans le domaine des recherches historiques et ethnographiques. Elle cesse de paraître en 1962. Elle a eu comme premier directeur Adrien Berbrugger.
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[7]
Jean-Dominique Luciani, « Chansons kabyles de Smaïl Azikkiou », Revue africaine, 43e année, no 232, 1er trimestre 1899, p. 17-33 ; nos 233-234, 2e et 3e trimestres 1899, p. 142-171 ; 44e année, no 236, 1er trimestre 1900, p. 44-59. Désormais abrégé « CKSA » 1899 et « CKSA » 1900 suivi du numéro de la page. Les textes sont cités dans la traduction de Jean-Dominique Luciani qui orthographie le nom du poète selon les normes de l’époque, moins proches de la prononciation kabyle que l’orthographe « Azikiw ».
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[8]
Son oncle El Hadj Arezki Aït Hamadouche qui avait dirigé l’attaque de Fort-National, le 17 avril 1871, a été déporté en Nouvelle-Calédonie où il est mort à son arrivée en 1875 ; son oncle El Hadj Ramdane Aït Hamadouche, qui avait suivi Boumezrag Mokrani (le frère du bachagha) dans ses derniers combats, a trouvé la mort près de Ouargla en janvier 1872. Enfin, son oncle cheikh Saïd a dû s’enfuir en Tunisie pour échapper à la répression.
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[9]
Mouloud Mammeri, Les Isefra. Poèmes de Si Mohand Ou Mhand, texte berbère et traduction, Paris, Maspero, « Domaine maghrébin », 1982 [1969] (désormais abrégé LI suivi du numéro de la page). Cette édition contient une longue présentation du poète et de son oeuvre qui reste à ce jour la meilleure introduction au plus célèbre des poètes kabyles. Très tôt Si Mohand Ou Mhand a eu la fortune de voir ses poèmes publiés. Si Ammar ou Saïd Boulifa, qui a eu le privilège de le rencontrer, avait inséré une centaine de ses poèmes dans son Recueil de poésies kabyles (texte zouaoua) traduites, annotées et précédées d’une étude sur la femme kabyle, Alger, Jourdan, 1904. Mouloud Feraoun lui a consacré Poèmes de Si Mohand (édition bilingue), Paris, Minuit, 1960. Younès Adli a traduit une centaine de poèmes inédits sous le titre Si Mohand Ou Mhand. Errance et Révolte (Paris, Éditions Paris-Méditerranée, « Documents et témoignages », 2001).
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[10]
Il s’agit de vers extraits de deux poèmes anonymes : le premier, intitulé « La révolte de 1871 », et le second, « L’insurrection de 1871 », recueillis et traduits respectivement dans deux recueils : Mouloud Mammeri, Poèmes kabyles anciens, textes berbères et français, Alger, Laphomic-Awal, 1988 [Maspero, 1980] ; Boualem Rabia, Recueil de poésies kabyles des Aït Ziki. Le viatique du barde, Tizi-Ouzou, Édition de l’Odyssée, 2005, [l’Harmattan, 1993]. Désormais abrégés PKA et RPK suivi du numéro de la page.
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[11]
Philippe Joutard, Ces voix qui nous viennent du passé, Paris, Hachette, « Le Temps et les hommes », 1983.
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[12]
Nous empruntons cette métaphore de la poésie comme monument à Lucie Taïeb, Territoires de mémoire. L’écriture poétique à l’épreuve de la violence historique, Paris, Classiques Garnier, « Perspectives comparatistes », 2012.
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[13]
Poésies populaires de la Kabylie du Jurjura. Texte kabyle et traduction, Paris, Imprimerie impériale, 1867.
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[14]
Op. cit.
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[15]
Il s’agit du xive siècle du calendrier musulman (Hégire) qui a débuté le 12 novembre 1882 du calendrier julien.
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[16]
Officier (lieutenant puis commandant), Louis Rinn a été chef du Service central des affaires indigènes (Bureau arabe) et conseiller au Gouvernement général de l’Algérie (jusqu’à sa retraite en 1899). Il a notamment publié Histoire de l’insurrection de 1871 en Algérie, Alger, Jourdan, 1891.
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[17]
Le colonel Joseph Nil Robin est aussi un officier affecté au Service central des affaires indigènes dont il deviendra directeur jusqu’à sa retraite en 1897. Il est l’auteur de L’insurrection de la Grande Kabylie en 1871, Paris, H. Charles-Lavauzelle, 1901.
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[18]
Ibid., p. 518.
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[19]
Il s’agit de Ali Oukaci, caïd de la famille des Aït Kaci. Tamda est un village dans la vallée du Sébaou, fief de leur famille.
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[20]
« Mesures à prendre pour prévenir désormais l’insurrection des Indigènes », L’Union de Sétif, samedi 10 juin 1871, p. 1 col. 1, article signé « Georges ». Nous avons respecté l’orthographe et les soulignements de l’auteur.
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[21]
Auguste Hubert Warnier (1810-1875), préfet puis député d’Alger en 1871. Il était membre de la Commission du séquestre et président de la Commission des indemnités aux victimes de l’insurrection de 1871.
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[22]
L’Union de Sétif, samedi 29 avril 1871, cité par Charles-Robert Ageron, Les Algériens musulmans et la France (1871-1919), Paris, Presses universitaires de France, 2005 [1968], t. I, p. 24.
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[23]
Joseph Nil Robin, op. cit., p. 519.
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[24]
Achertouh (ou Ouchertouh) de la tribu des Ichertah. La langue kabyle a gardé jusqu’à aujourd’hui l’expression « lehkem ouchertouh » (la gouvernance d’Ouchertouh) pour désigner un pouvoir illégitime et injuste.
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[25]
Puissante tribu makhzen, vassale des Turcs, qui occupait les fertiles plaines des Issers et du Sébaou.
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[26]
Icheriden et Icheraiouen sont deux villages de la confédération des Aït Iraten dans la wilaya (département) de Tizi-Ouzou.
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[27]
Dans son introduction à Les Isefra. Poèmes de Si Mohand Ou Mhand (LI).
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[28]
Au moment de la soumission de la Kabylie dite du Djurdjura (dernier bastion de la résistance à la conquête coloniale) en 1857, le maréchal Randon promit de respecter les assemblées (djemaa) kabyles. Ces djemaa avaient dans les villages des pouvoirs judiciaires, en même temps que des attributions administratives. Elles sont le coeur de la vie politique kabyle.
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[29]
En Kabylie, les assemblées tribales étaient composées généralement de douze membres.
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[30]
Traditionnellement les gardiens du passé.
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[31]
Les « porcs » désignent ici les colons.
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[32]
Voir note 15. Un proverbe algérien dit qu’« au quatorzième siècle, il n’est ni paix ni pitance ».
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[33]
Ouahmi Ould Braham, « Une biographie de Si Mohand est-elle possible ? », Études et documents berbères, nos 19-20, 2001-2002, p. 10.
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[34]
Sur cette mutation après 1871 de la poésie kabyle au point de vue thématique, stylistique et formel, voir notre étude : « Réflexion sur le neuvain de Si Mohand Ou Mhand », AWAL. Cahiers d’études berbères, nos 40-41, 2009-2010, p. 73-85.
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[35]
Chez les Kabyles, être oublié équivaut à une mise à mort symbolique.