Abstracts
Résumé
Le jeune Poulou n’aimait pas se relire, à en croire Les mots. Mais Poulou devenu grand, c’est-à-dire Sartre ? Sans même avoir à les relire, un grand écrivain peut dialoguer avec ses propres textes. Ne cesser de les repenser, de les réécrire. C’est le cas pour Sartre — notamment pour ce qui est de la nouvelle qu’il a intitulée « Le mur » (1937). Il s’agit d’en rappeler quelques enjeux, autour de trois motifs (les lieux funèbres, la farce jouée aux franquistes et le rire final), avant de faire entendre les échos que Sartre, explorant la pré-mort et l’après-mort,lui a donnés dans la suite de son oeuvre — c’est-à-dire dans les Carnets de la drôle de guerre, Le sursis, L’être et le néant, Les jeux sont faits, Huis clos, les Cahiers pour une morale, Les séquestrés d’Altona, la Critique de la raison dialectique enfin. La nouvelle de 1937, que Gide tenait pour un chef-d’oeuvre, apparaît alors comme un texte matriciel pour tout un pan de l’oeuvre de Sartre. Matriciel dans la mesure où elle réunit un problème philosophique (que fait la mort, ou son approche, à l’existence ?), un mystère de la condition humaine (peut-on entrevoir l’autre côté du mur ?), qui sollicite une veine fantastique chère à Sartre, et l’un des plus vieux fantasmes de l’auteur (qu’est-ce que vivre pour un homme qui ne s’est fait écrivain qu’en devenant dès son jeune âge — selon Les mots, encore — « tout à fait posthume » ?).
Abstract
If we can believe The Words, the young Poulou hated rereading his own work. But what about the adult Poulou, namely Sartre? Great writers can dialogue with their own texts, rethink and rewrite them without rereading them. Such is the case for Sartre, notably the short story called The Wall (1937). It revolves around three themes (death scenes, the joke played on Francoists, and the last laugh), presaging Sartre’s explorations of pre-death and after-life that inhabit his ensuing works (War Diaries: Notebooks from a Phony War, The Reprieve, Being and Nothingness, The Chips are Down, No Exit, Notebooks for an Ethics, The Condemned of Altona, Critique of Dialectical Reason). The 1937 short story that Gide considered a masterpiece is a template for much of Sartre’s work, uniting a philosophical problem (how does death, or its approach, affect existence?), a mystery of the human condition (can we glimpse the other side of the wall?), and one of Sartre’s dearest and most enduring fantasies (what is living for a man who became a writer only by becoming from his youth —once again from The Words — “totally posthumous”?).