Abstracts
Résumé
Dans cet article, j’examine les nombreuses dédicaces offertes à Anne de Bretagne à la fin du xve et au début du xvie siècle. Le corpus des 22 dédicaces qui sert de base à cette étude nous donne un aperçu de la nature des oeuvres dans sa bibliothèque, la motivation des auteurs qui lui ont présenté leurs livres, l’image de la reine qu’ils y ont construite, et la culture livresque de l’époque. C’est grâce en partie aux hommes écrivains engagés par Anne de Bretagne, ou attirés par la possibilité de son mécénat, que la littérature à la louange et à la défense des femmes a été promue à la cour de France, ainsi qu’auprès d’un public plus large, puisque leur stratégie consistait à portraire la reine sous un jour très positif et à faire des choix littéraires qu’elle préférait, y compris des oeuvres au sujet des femmes et leurs vertus. La plupart de ces auteurs de dédicaces s’adressaient à Anne de Bretagne sous forme manuscrite. Lorsque ces dédicaces à la reine de France précédaient des textes imprimés, elles visaient un autre public. Pour le libraire ou l’imprimeur, il s’agissait d’attirer des acheteurs bourgeois en soulignant l’association directe entre l’auteur et Anne de Bretagne. Dans l’Appendice I, je fournis une liste des 21 oeuvres contenant les 22 dédicaces adressées à Anne de Bretagne. Dans l’Appendice II, j’édite sept des dédicaces qui n’ont jamais été publiées, tirées des oeuvres suivantes : Robert du Herlin, L’Acort des mesdisans et bien disans ; Alberto Cattaneo, [Histoire des rois de France, en latin] ; Pierre Le Baud, Le liure des Cronicques des roys, ducs et princes de Bretaigne ; Antoine Dufour, Les epîtres de saint Jérôme ; Germain de Brie, Chordigerae nauis conflagratio ; Pierre Choque, L’incendie de la Cordelière ; Maximien, La Vie de Sainte Anne.
Abstract
In this article, I examine the many dedications addressed to Anne of Brittany in the late 15th and early 16th centuries. The 22 dedications that form the corpus of this study offer scholars insight into the nature of the books in her library, the motivations of the authors who gave her these works, the image of the queen so depicted, and the book culture of the time. Thanks in part to the male writers seeking and receiving the patronage of Anne of Brittany, a substantial body of literature praising and defending women emerged at the French court and in the public at large, all strategically favourable to the queen and highlighting themes that would please her, including the subject of female virtues. Most of these authors addressed Anne of Brittany in manuscript form. A different public was targeted when the printed works included dedications to the queen, with printers and booksellers wooing a middle class market by playing up the author’s direct association with Anne of Brittany. Appendix I provides a list of the 21 works that contain the 22 dedications addressed to Anne of Brittany. Appendix II includes edited versions of the dedications never before published, which appear in the following works: Robert du Herlin, L’Acort des mesdisans et bien disans; Alberto Cattaneo, [Histoire des rois de France, en latin]; Pierre Le Baud, Le liure des cronicques des roys, ducs et princes de Bretaigne; Antoine Dufour, Les epîtres de saint Jérôme; Germain de Brie, Chordigerae nauis conflagratio; Pierre Choque, L’incendie de la Cordelière; Maximien, La Vie de Sainte Anne.
Article body
C’est en partie grâce aux hommes écrivains engagés par Anne de Bretagne ou attirés par la possibilité de son mécénat que la littérature à la louange et à la défense des femmes a été promue à la cour de France, ainsi qu’auprès d’un public plus large, à la fin du xv e et au début du xvi e siècle. Les dédicaces rédigées par ces écrivains, la plupart sous forme manuscrite, visaient en premier lieu la reine, en vue d’obtenir sa reconnaissance en tant que mécène ou un poste à sa cour, et servaient souvent de préambule à des oeuvres au sujet des femmes. Lorsque ces dédicaces à la reine de France figuraient en tête de textes imprimés, elles visaient un autre public. Pour le libraire, l’imprimeur ou le poète même, il s’agissait d’attirer des acheteurs potentiels, impressionnés par le fait que l’auteur associait directement son nom à celui d’Anne de Bretagne.
Dans cet article, nous nous proposons d’examiner les nombreuses dédicaces offertes à Anne de Bretagne, deux fois reine de France, comme témoignages de son rôle remarquable de mécène à l’aube de la Renaissance. Le corpus des 22 dédicaces (tirées de 21 oeuvres) qui sert de base à notre examen[1] nous donne un aperçu de la nature des oeuvres conservées dans sa bibliothèque, la motivation des auteurs qui lui ont présenté leurs livres et l’image qu’ils y ont construite de la reine. En outre, ces écrivains nous en apprennent davantage sur le mécénat et la culture livresque de l’époque.
Tous les livres comportant une dédicace ont été offerts à Anne de Bretagne lorsqu’elle était épouse du roi Charles VIII (1491-1498) ou femme du roi Louis XII (1498-1514). Seuls quatre datent de son premier règne, ce qui témoigne d’un mécénat bien plus développé lors de son deuxième règne[2]. Le fait que toutes les dédicaces, sauf quatre[3], se trouvent dans des livres manuscrits confirme la prédilection de la reine pour la culture manuscrite. Deux dédicaces ont été rédigées en latin, les autres en français. Trois dédicaces sont versifiées[4], les autres sont en prose.
Il importe de signaler que quatre oeuvres dédiées à Anne de Bretagne ne contiennent aucune dédicace à proprement parler, mais que l’on y découvre, par contre, une miniature de présentation qui dépeint la reine. Un exemplaire de l’édition des Apologues de Laurens Valle (v. 1493) (BnF Rés. Vélins 611) contient au folio 1 une miniature de dédicace qui représente le libraire Antoine Vérard offrant son livre à Charles VIII et à la reine. Mais la rubrique sous l’illustration ainsi que le prologue de l’auteur Guillaume Tardif ne mentionnent que Charles VIII comme dédicataire. Une illustration du roi Louis XII et de la reine intronisés se trouve à la place d’une dédicace écrite au début d’une copie de l’édition du Modus et Ratio (1506) (BnF Rés. Vélins 1763). Dans deux autres cas, la reine est dépeinte seule dans une miniature de dédicace : dans un exemplaire de l’édition du Trésor de l’Âme de Robert de Saint Martin, offert à Anne par le libraire Antoine Vérard vers 1497 (BnF Rés. Vélins 350), et dans une copie des Louenges du roy Louis de Claude de Seyssel, publiées aussi par Vérard, et présentées à la reine par l’auteur vers la fin de 1508 (BnF Rés. Vélins 2780). Comme nous le verrons, plusieurs oeuvres dédiées à Anne de Bretagne seule contiennent une dédicace écrite ainsi qu’une miniature de présentation. Si l’on fait abstraction des ouvrages de la bibliothèque de la reine ne portant pas de dédicace écrite ni d’illustration de présentation[5], la liste de tous les livres existants dédiés à Anne de Bretagne comprend donc 25 oeuvres. Une analyse des indices discursifs et matériels associés à ce corpus de dédicaces nous permettra de mieux comprendre les rapports que ces auteurs cherchaient à établir avec Anne de Bretagne et son entourage ainsi que l’importance, pour certains d’entre eux qui visaient aussi un public en dehors de la cour, d’un lectorat bourgeois qui achèterait leurs livres dédicacés à la reine sous forme imprimée.
Stratégies d’adresse
Ce qui frappe le plus dans toutes les dédicaces, c’est l’expression excessive des formules d’adresse à Anne de Bretagne placées pour la plupart au début, plus rarement au milieu ou à la fin de la dédicace[6]. Afin de témoigner de leur respect extrême pour la reine, afin de la louer de la manière la plus élogieuse, nos auteurs la saluent, de manière conventionnelle, par une accumulation d’adjectifs au superlatif, l’emploi répété de « tres » traduisant la terminaison « -issime » du latin que l’on trouve dans la dédicace de Cattaneo : « Serenissime et gloriosissime domine, domine Anne, Francorum regine Britanieque duci christianissime[7]… » (fol. 1 r). Plusieurs suivent ce même modèle en ajoutant un troisième superlatif après un deuxième substantif, comme Antoine Vérard : « ma treschiere et tressouveraine dame Anne, Royne de France treschrestienne… » (p. 362). D’autres, comme Choque dans son Discours, poussent à l’extrême l’accumulation de ces adjectifs et substantifs : « Très crestienne, très haulte, très puissante, très excellante princesse, ma très redoubtée et souveraine dame… » (p. 166). Nos écrivains amoncellent les mêmes titres et les mêmes adjectifs pour honorer Anne de Bretagne : dame, princesse et royne sont les titres les plus souvent employés et treshaulte, tresexcellente, tresredoubtee et trespuissante, les superlatifs les plus souvent associés à la reine[8]. Il y a une vingtaine de références à Anne de Bretagne comme reine de France, mais les auteurs ne font pas toujours allusion à son titre de duchesse de Bretagne. Il ne semble pas y avoir une seule explication stratégique (par exemple l’emploi poursuivi de la flatterie pour garantir une réception positive par la reine) concernant la référence à Anne de Bretagne comme « duchesse de Bretagne » dans les différentes dédicaces. Le traducteur des Nobles et cleres dames, et Vérard et Maximien, qui cherchaient sans doute le mécénat de la reine, figurent parmi ceux qui ne se référaient à Anne que comme « royne de France[9] », tandis que Lemaire, dans ses quatre oeuvres, Marot (Advocate, Gênes, Venise), La Vigne et Brie, qui envisageaient aussi le soutien financier de la reine, l’ont qualifiée de « duchesse de Bretagne[10] ». La motivation politique d’un tel choix est également difficile à confirmer. Il est toutefois vrai que certains, comme Herlin, Vérard et Seyssel, qui ont omis le titre de duchesse, avaient des rapports solides avec la cour de France et que les écrivains bretons Le Baud et Choque (Incendie) n’ont pas négligé d’adopter le titre « duchesse de Bretagne[11] ».
Qui sont ces écrivains ? La plupart étaient attachés à la cour royale, ce qui n’a rien pour surprendre. Jean Marot, poète de cour depuis 1506, et Jean Lemaire de Belges, qu’Anne de Bretagne a engagé comme indiciaire tard dans sa vie, en 1512, dédient le plus grand nombre d’oeuvres à la reine, à savoir quatre chacun. Pierre Choque, héraut d’armes de la reine, rédige en son honneur trois dédicaces, dont deux figurent dans une oeuvre sollicitée par la reine[12]. Antoine Dufour, prédicateur officiel de la cour et plus tard confesseur royal, offre à Anne de Bretagne deux ouvrages qu’elle a commandés. André de la Vigne, secrétaire de la reine à partir de 1504, Pierre Le Baud, à qui elle a commandé l’histoire de son duché, et Germain de Brie, futur secrétaire de la reine, adressent chacun un livre à Anne. Outre Marot, Lemaire et Brie, trois auteurs cherchaient vraisemblablement le soutien financier d’Anne de Bretagne en lui dédiant leurs livres : ce sont le traducteur des Nobles et cleres dames, le libraire parisien Vérard et Maximien. Au nombre des autres dédicateurs comptent aussi Robert du Herlin, secrétaire du roi Charles VIII et Claude de Seyssel, l’un des conseillers les plus prisés du roi Louis XII[13].
La plupart de nos treize auteurs utilisent le prénom d’Anne en s’adressent à la reine[14], et huit parmi eux s’identifient dans leurs dédicaces : Herlin[15], Cattaneo[16], Dufour (Femmes célèbres, Saint Jérôme)[17], La Vigne, Le Baud[18], Marot (Gênes, Venise, Prières), Lemaire (Illustrations III) et Brie[19]. Souvent, cette désignation de soi fait pendant à la salutation à Anne de Bretagne. En fait, il semble y avoir eu un protocole implicite pour les nouveaux écrivains qui souhaitaient présenter leurs ouvrages à Anne, car ils s’abaissent tous, du moins dans un premier temps, devant la figure royale. Ainsi, Lemaire ne se nomme pas dans ses trois premières dédicaces[20], mais dans la dernière, qui ouvre ses Illustrations III, il s’identifie à plusieurs reprises. En outre, de tous nos auteurs, Lemaire est l’un des seuls (avec Maximien et Brie) qui tutoie la reine[21]. Suivant une démarche similaire, Marot, qui ne se nomme dans ses dédicaces qu’une fois engagé par la reine[22], s’efface dans sa première dédicace où il écrit ne pas « oser prendre la hardiesse d’imprimer mon nom en mes rudes, incongruz et mal porporcionnez escrips… » (Advocate, p. 94)[23]. La Vigne, secrétaire de la reine depuis peu de temps quand il lui offre le compte rendu de son sacre et entrée à Paris en 1504, est plus discret que la plupart de ses homologues, car il place ses vers de dédicace à la fin de son oeuvre[24] et s’identifie par un jeu visuel dans la dernière strophe : une signature en acrostiche (p. 254). Quoique Vérard ne se nomme pas dans sa dédicace à Anne, il s’identifie dans le colophon à la fin de son livre.
Pour rehausser l’image d’Anne de Bretagne incarnée dans leurs formules d’adresse, plusieurs auteurs se décrivent en termes dévalorisants, employant souvent les mots « treshumble » ou « humblement[25] ». Se servant des formules d’incapacité traditionnelles plus ou moins affectées, presque tous s’excusent auprès de la reine pour leur incompétence. Herlin parle de son « petit, foible et imbecille entendement » (fol. 18), Lemaire de « l’imbecilité de [son] jeune scavoir » (Plainte, 91) et Choque s’excuse de ne pas (bien) comprendre le hongrois (Discours, 439). Mais Marot, dont les auto-critiques sont les plus exagérées, pousse à l’extrême le dénigrement de ses compétences poétiques[26] :
Je, qui suys des petiz le moindre, emmailloté au berceau d’ingnoscence, si peu extimable… Ay, incapax et non digne de ce faire, entreprins de, selon mon gros et ruralit mestier, forger et marteller sur l’encluclume [sic] de mon insuffisance…
Advocate, p. 94
Par contre, d’autres écrivains, tels que Vérard, Dufour (Femmes célèbres, Saint Jérôme) et Lemaire dans ses oeuvres tardives (Dyalogue, Illustrations III), assez discrets dans leurs descriptions de la reine à qui ils s’adressent d’un ton de pédagogue, sont bien plus sûrs d’eux-mêmes et de ce qu’ils peuvent lui apporter[27].
En dépit de leurs supposés défauts, tous ces auteurs finissent par offrir leurs livres à Anne de Bretagne pour des raisons similaires : pour la divertir de ses soucis[28], pour garder la reine et son entourage de l’oisiveté[29] et pour les encourager à se comporter vertueusement[30]. Trois auteurs d’histoires, Choque, Le Baud et Lemaire, sont motivés par des buts politiques[31], et, comme nous le verrons, plusieurs auteurs rédigent leurs oeuvres pour défendre les femmes.
Seules six des oeuvres se présentent comme des commandes d’Anne de Bretagne elle-même[32]. Mais les écrivains qui avaient des postes à la cour se trouvaient certainement dans une situation où la reine s’attendait à ce qu’ils produisent des oeuvres pour elle sans qu’elle ne les sollicite explicitement. Certains poètes comme Marot et Lemaire ont offert des ouvrages à Anne de Bretagne au début de leurs carrières dans l’espoir de se faire une situation à la cour, sans toujours exprimer explicitement leur objectif. Marot a réussi à obtenir un poste grâce à son premier livre (Advocate), mais Lemaire a dû solliciter la reine plusieurs fois avant de faire sa place à la cour[33]. Une fois engagé, La Vigne n’hésite pas à demander à Anne de ne pas l’oublier (« Et n’oubliez vostre humble secretaire » [p. 254]), et Maximien, qui fait don à la reine de sa Sainte Anne, peut-être le premier ouvrage qu’il lui dédicace, exprime plus directement son voeu de soutien financier… mais à la troisième personne[34] :
En esperance que si l’euure vous agree… il vous plaist commander que l’acteur procede a la declaration des raisons pressuposees et des uertus et merites d’icelle saincte de point en point plus amplement…
fols. 2 r-2 v
Toutefois, la sollicitation directe peut également porter ses fruits : la reine offre un poste à Brie après avoir reçu sa requête directe dans la dédicace de son premier livre.
La dédicace écrite à la reine s’accompagne souvent d’une représentation visuelle, soit des armes de la reine[35], soit de la scène de la présentation du livre[36], soit des deux[37]. Cet apport visuel rehausse d’autant plus la rhétorique de la louange des dédicaces écrites qu’Anne de Bretagne y figure dans une position de pouvoir susceptible d’impressionner le lecteur ou que l’image même de ses armes évoque l’autorité de sa lignée royale et ducale[38].
Choix de sujets littéraires : comment plaire à la reine
Onze des oeuvres contenant une dédicace écrite à Anne de Bretagne mettent en avant l’histoire des hommes, surtout des hommes d’État ou des militaires tels que ses maris, leurs ancêtres et leurs associés : Histoire de France, Plainte, Cronicques de Bretaigne, Louenges du roy, Gênes, Venise, Dyalogue, Saint Jérôme, Illustrations III, Conflagratio et Incendie. Il est fort possible que certains auteurs aient cherché à attirer l’attention du roi lui-même à travers sa femme, qui avait une meilleure réputation comme mécène[39].
L’autre moitié des oeuvres dédicacées explicitement à Anne de Bretagne, à savoir dix, s’associent aux femmes. Cinq oeuvres mettent en scène des femmes nobles ou une sainte liée à la reine, soit Anne de Bretagne elle-même, sa cousine Anne de Foix, Marguerite d’Autriche et sainte Anne (Discours, Sacre et entrée, Seconde epistre, Sainte Anne et Prières). Cinq autres ouvrages s’insèrent dans la Querelle des femmes en s’adressant aux vertus des femmes (Acort, Nobles et cleres dames, Trésor, Femmes célèbres, et Advocate). Ce nombre important de livres sur les femmes dédiés à Anne de Bretagne témoigne de son grand intérêt pour ce sujet. D’une manière ou d’une autre, tous mettent en question les attitudes misogynes traditionnelles envers le sexe féminin. Le fait qu’Anne ait commandé l’un de ces livres pendant chacun de ses règnes — l’Acort en 1493 et les Femmes célèbres en 1504 — témoigne de sa prédilection pour des livres traitant des femmes dès son premier mariage. Est-ce une coïncidence qu’au moment où Anne de Bretagne commandait et recevait ces deux livres, le traducteur des Nobles et cleres dames (1493), l’éditeur du Trésor de Christine de Pizan (1497) et l’auteur de l’Advocate (1506) faisaient don de leurs ouvrages sur la femme à la reine[40] ? Il n’en est rien. Cherchant le soutien financier d’Anne de Bretagne, ces écrivains ont certainement bien compris que l’une des meilleures façons d’attirer son attention et sa protection éventuelle était de mettre en scène des femmes célèbres et de flatter la reine en l’associant aux plus vertueuses de ces dames renommées.
Louanges de la reine et des femmes vertueuses
Qu’ils aient répondu à une commande ou qu’ils aient spontanément offert un livre à la reine, les auteurs n’ont pas justifié leur production en alléguant la simple nécessité ; ils ont cru bon de fournir diverses raisons, qui reviennent toutes à magnifier la dédicataire. Vérard, par exemple, tout en sachant que sa dédicataire « desire veoir bonnes choses et vertueuses » et en louant « l’honneur et magnificence » de son « trestriumphante souveraineté » (p. 362), adopte un ton moralisateur envers Anne de Bretagne lorsqu’il lui présente le livre de Christine de Pizan qui enseigne les vertus aux femmes[41]. Dufour opte pour la même ligne didactique que Vérard au moyen de commentaires insérés dans les Femmes célèbres, mais dans sa dédicace même, il se place clairement du côté des défenseurs des femmes contre les hommes qui « se adonnent à blasmer les dames, tant de langue que de plume… comme Bocasse, Théophraste et ung tas d’aultres » (p. 1)[42]. Cette prise de position permet au futur évêque de Marseille de glorifier Anne de Bretagne comme « l’abisme et comble de vertus » (p. 1), d’exalter le « si grant nombre de bonnes et sages dames » de son époque (p. 1) et d’attribuer tout mal fait par les dames à « l’instruction d’aulcuns maulvais hommes qui par aventure les admonestoient à pis faire » (p. 2). Là où Dufour fait une allusion brève aux critiques contemporaines de la femme et à son but de « brider la langue de ceulx qui ne ont veu ny leu que fables et mensonges » à propos d’elles (p. 1-2), le traducteur des Nobles et cleres dames intervient bien plus vigoureusement dans la Querelle des femmes, car il présente son livre à Anne de Bretagne comme une arme de défense contre les détracteurs misogynes à la cour :
… affin que vous, ma tresredoubtée dame, ayez matière de répliquer et alléguer les nobles et célébrables vertuz qui ont esté par cy devant ou sexe feminin, quant les princes et seigneurs du royaume vouldroient en devisant devant vostre illustre majesté, proposer les beaux faitz et vertuz des hommes à la diminution des louables vertuz des dames.
p. 174
Comme ses collègues, le traducteur anonyme profite de son sujet pour célébrer les vertus de la reine elle-même, en invoquant « [sa] noble clerté et tresresplandissante gloire » (p. 174), « [ses] faciles, doulces et célébrables meurs et [ses] trescellentes honesteté et prudence » et « l’elegance de [ses] parolles, ensemble la tresexcellente vertu qu[’elle a] aporté en ce royaume » (p. 175). Il estime en fin de compte qu’Anne de Bretagne est « le souverain honneur des dames, non pas seullement du royaulme de France, mais… du monde » (p. 175).
Marot, aussi prolixe sur les qualités des femmes qu’au sujet de ses supposées faiblesses littéraires, s’exprime le plus longuement sur les vertus féminines dans sa « deffence, louenge et victore de l’honneur des dames » (p. 94), l’Advocate. Il y met en relief « les grandes, excellentes, admirables et infuses graces, vertus et merites, dont de tous temps et de present la femenine geniture et maternelle secte a esté et est douée, fulcie, decorée et en si hault degré eslevée » (p. 93). Aussi fervent que le traducteur des Nobles et cleres dames, Marot insiste sur les vertus d’Anne de Bretagne dès qu’il peut :
… mais en cheminant par ce sentier avez tousjours travaillé et par sollicitude applicqué vostre naturelle entente à l’augmenter, exaulcer et eslever de mieulx en plus, en accumullant voz vertuz avec celles de voz preterites et anciennes instructrices ; joinct que vous estes la superintendente fleur de toutes celles qui, au vergier de ce val, centre et territoire, tiennent ores dominations, principautez et seigneuries.
p. 94-95
Ces dédicaces à Anne de Bretagne, surtout celles qui sont articulées dans les livres sur les femmes, nous éclairent aussi sur la culture livresque de leur public, qui comprend non seulement la reine, mais aussi les dames de sa cour et, dans un cas, les femmes du royaume. Dans l’un des premiers livres commandés par la reine (1493), Herlin fait allusion à la réception orale de son oeuvre par toutes les femmes : « Entre vous, tresnobles et tresexcellentes princesses, dames, damoiselles, et autres de l’estat commun, preparez vous a oyr lire… » (fol. 2). Une décennie plus tard (1502), Choque adopte la même perspective en s’adressant uniquement à Anne de Bretagne : « vous oyez et entendez voluntiers haultes et sollempnelles choses, mesmement quand elles procedent de vertueux faictz » (Discours, p. 166). De même, en 1511, Lemaire évoque la réception orale de son oeuvre par Anne dans sa dédicace du Dyalogue : « Maintenant orrez vous, s’il vous plaist, deviser lesdictes deux dames… » (p. 1). Vérard, par contre, se réfère aux deux modes de réception, l’audition et la lecture, en dédiant le Trésor à la reine : « … ainsi que vostre tresglorifique et beneuree dignité en lisant le livre, ou faisant lire, par maniere de recreation pourra veoir et congnoistre » (p. 362). De même, Marot fait allusion au fait que la reine a daigné « voyre et… oyr » son Gênes (Venise, p. 146-147). L’insertion de miniatures peintes par Jean Bourdichon dans le manuscrit royal de Gênes a sans doute joué un rôle considérable dans sa réception à la cour par un public moins instruit qu’Anne de Bretagne aussi bien que par les lettrés comme elle, étant donné le caractère extraordinaire des scènes allégoriques et militaires qui s’y trouvent. Les Femmes célèbres de Dufour offraient également une lecture à multiples niveaux grâce aux illustrations remarquables de Jean Pichore[43]. Choisissant de rédiger son oeuvre en français en raison des compétences linguistiques des femmes de la cour, qui ne connaissent pas forcément le latin, Dufour fait aussi allusion aux deux modes de réception (« en lisant ce présent oeuvre… ainsi que vous voirrez et orrez en ce présent livre » [p. 2]). Mais quatre ans plus tard le même auteur ne parle que de la lecture de ses Epistres de saint Jérôme, peut-être parce qu’Anne est le seul public visé : « Et croy que en lisant ce que s’ensuit on aura cause de prier Dieu pour vous, ma tressouueraine dame, ainsi que suis tenu de faire toute ma vie » (fol. 3 r) [44].
Le traducteur des Nobles et cleres dames, rédigé tôt dans le premier règne d’Anne de Bretagne, présume que toutes les femmes liront son livre. En outre, s’opposant à l’attitude misogyne qui réprouvait qu’une telle liberté de lecture soit accordée aux femmes, cet auteur attribue à Anne de Bretagne en particulier l’intelligence et l’aptitude de pouvoir distinguer entre les exemples positifs et négatifs des femmes du passé :
Et suppose que en récitant les beaux faitz et félicitez desdictes dames, l’acteur narre ou récite aucuns faitz impudiques ou infélicitez desdictes dames, ce ne vous debvra mouvoir ou divertir de la lecture de ce présent livre, car la fin et intencion dudit acteur est monstrer l’instabilité et variacion de fortune, laquelle souventesfois, après plusieurs grandes prosperités, renverse l’estat des humains ou parfond[eur] de misérable infélicité…. vous saurez bien cueillir et retenir les choses louables et vertueuses desdictes anciennes dames, fuir et éviter les vicieuses. Et certes quant aucune dame crestienne lyra quelque chose en ce présent livre digne de louenge, laquelle chose elle congnoistra ne estre point en elle, ce luy sera cause et matière de éveiller son engin, affin qu’elle puisse surmonter en honnesteté, pudicité ou autre vertu les dames gentilles et païennes. Et mètra lors ladicte dame crestienne toutes les forces et vertu de son engin à ce qu’elle ne soit vaincue en vertu par aucune dame paienne du temps passé.
p. 175-176
Brie, qui n’hésite pas à glorifier la reine, va plus loin en comparant favorablement les goûts intellectuels et culturels d’Anne de Bretagne à ceux de ses homologues masculins[45].
Ces diverses dédicaces témoignent en fin de compte de plusieurs phénomènes quant à la transmission littéraire à l’époque d’Anne de Bretagne. Il va sans dire que la reine et duchesse prônait l’activité littéraire à sa cour, surtout auprès des dames de son entourage. Les nombreuses références à la lecture à haute voix confirment qu’elle figurait parmi les occupations prisées par la reine. En fait, Anne de Bretagne, la première reine de France à s’entourer d’un si grand cercle de femmes, avait la réputation de surveiller le comportement des femmes à sa cour[46]. L’on ne saura jamais la nature des discussions déclenchées par ces lectures orales de livres à la défense des femmes, mais il est certain qu’Anne en était la figure centrale. Il est évident aussi que la reine — et sans doute certaines femmes de sa cour — poursuivaient seules la lecture des livres qui lui avaient été dédiés.
Le public bourgeois
Le public en dehors de la cour, à savoir le lectorat bourgeois, avait aussi accès à certains livres dédiés à Anne de Bretagne. Des cinq livres imprimés qui contiennent une dédicace à la reine, trois ont été publiés par Vérard. Celui-ci pensait sans doute profiter du prologue adressé à la reine par le traducteur des Nobles et cleres dames et bénéficier de l’impression favorable créée par cette association prestigieuse auprès d’acheteurs potentiels. Exploiteur par excellence des formats hybrides, Vérard a dédié deux autres copies de luxe de cette édition imprimée aux rois de France et d’Angleterre. Vérard cherchait vraisemblablement le soutien financier de la reine en lui dédiant le Trésor de Christine de Pizan. Le fait que Seyssel a choisi d’adresser à Anne, et à d’autres dédicataires, une copie imprimée sur vélin de ses Louenges du roy suggère que les auteurs, aussi bien que les libraires, avaient compris combien l’impression était pratique, bien plus que le manuscrit, pour disséminer leurs oeuvres et pour répandre leur réputation et celle de leurs destinataires en dehors de la cour.
Les nouvelles possibilités offertes par l’imprimerie ont influencé Lemaire, comme le confirme la reproduction de sa Plainte, de sa Seconde epistre et de ses Illustrations III sous formes manuscrite et imprimée ; mais il est à noter qu’il n’a pas fait imprimer toutes ses oeuvres (Dyalogue), peut-être parce que celles-ci visaient uniquement un public royal. Grâce à l’impression posthume de Venise par Clément Marot, nous possédons les seules traces d’une dédicace que Jean Marot a écrite à Anne de Bretagne, vraisemblablement sous forme manuscrite à l’origine, dont l’exemplaire semble avoir disparu. La dédicace que Dufour a rédigée à l’intention de la reine dans le livre manuscrit de Saint Jérôme, aujourd’hui perdu, nous est accessible dans une version imprimée posthume. Même après la mort d’Anne de Bretagne, les éditeurs de Saint Jérôme (ainsi que ceux d’autres oeuvres offertes à la reine) gardaient les dédicaces d’origine comme une forme d’autorisation implicite de leur décision d’imprimer une telle oeuvre. Quant à l’édition de la Conflagratio de Brie, imprimée à Lyon en janvier 1513, il est probable que l’auteur avait déjà offert une version de son ouvrage à Anne, peut-être sous forme manuscrite, parce qu’il a fait imprimer dans cette édition son épître dédicatoire à la reine, rédigée quelques mois auparavant[47].
En conclusion, c’est surtout le pouvoir culturel de la reine vis-à-vis de ces hommes-poètes qui a dicté leurs choix littéraires. Mettant à profit leurs talents littéraires, ces auteurs signalaient implicitement, par leurs louanges de la reine, des dames de son entourage et des femmes en général, ainsi que par leurs mises en scène d’actions héroïques des hommes associés au couple royal, qu’Anne de Bretagne avait continuellement besoin de leurs aptitudes poétiques pour transmettre son image. Quoique la reine semble avoir préféré ces dédicaces et les livres qu’elles introduisaient sous forme manuscrite, c’est grâce à leur reproduction simultanée ou subséquente sous forme imprimée que sa réputation en tant que femme vertueuse, cultivée et généreuse a réussi à atteindre un public plus répandu au xvi e et au xxi e siècle.
Appendices
Annexes
Appendice I. Oeuvres contenant une dédicace à Anne de Bretagne[48]
Anonyme, De la louenge et vertu des nobles et cleres dames [Nobles et cleres dames] (Paris : pour Antoine Vérard, 28 avril 1493) (voir BnF Rés. G. 365 et l’édition de G. Jeanneau dans Antoine Dufour, Les vies des femmes célèbres, Genève, Droz, coll. « Textes littéraires français », no 168, 1970, p. 174-177)
*Robert du Herlin, L’acort des mesdisans et bien disans [Acort] – 13 novembre 1493 (voir Arsenal ms. 3658)[49]
Christine de Pizan, Le trésor de la cité des dames selon Dame Cristine [Trésor] (Paris : pour Antoine Vérard, 8 août 1497) (voir ÖNB, Ink, 3.D. 19 et l’édition de la dédicace de Mary Beth Winn dans Anthoine Vérard, Parisian Publisher, 1485 - 1512 : Prologues, Poems, and Presentations, Genève, Droz, coll. « Travaux d’humanisme et Renaissance », no 313, 1997, p. 362)
*Alberto Cattaneo, [Histoire des rois de France et de Francion a Charles VIII, en latin] [Histoire de France] – [avant le 7 avril 1498] (voir Arsenal ms. 1096)
Pierre Choque, Discours sur le Voyage d’Anne de Foix [Discours] – août-décembre 1502 (voir BnF ms. fr. 90 et l’édition de Le Roux de Lincy dans « Discours des cérémonies du mariage d’Anne de Foix de la Maison de France », Bibliothèque de l’École des Chartes, XXI [1861], p. 156-185, p. 422-439)
Jean Lemaire de Belges, La plainte du Désiré [Plainte] – [ca. 1504] (voir BnF ms. fr. 1583 et 23988 et l’édition de Dora Yabsley dans Jean Lemaire de Belges, La plainte du Désiré, Paris, Droz, 1932)
Antoine Dufour, Les vies des femmes célèbres [Femmes célèbres] – 1504 (voir Musée Dobrée ms. XVII et l’édition de G. Jeanneau dans Antoine Dufour, Les vies des femmes célèbres, Genève, Droz, coll. « Textes littéraires français », no 168, 1970)
André de la Vigne, Le sacre et l’entrée de la royne a Paris [Sacre et entrée] – [après novembre 1504] – (voir Waddesdon Manor ms. 22 et l’édition de Cynthia J. Brown dans Pierre Gringore, Les entrées royales à Paris de Marie d’Angleterre ( 1514 ) et Claude de France ( 1517 ), Genève, Droz, coll. « Textes littéraires français », no 577, 2005, p. 215-254)
*Pierre Le Baud, Le liure des cronicques des roys, ducs et princes de Bretaigne armoricane aultrement nommee la moindre Bretaigne [Cronicques de Bretaigne] – [1505, avant le 29 septembre] (voir BL ms. Harley 4371)
Jean Marot, La vraye disant advocate des dames [Advocate] – [1506] (voir BnF fr. ms. 1704 et l’édition de Gérard Defaux et Thierry Mantovani dans Jehan Marot, Les deux recueils, Genève, Droz, coll. « Textes littéraires français », no 512, 1999, p. 93-119)
Jean Marot, Le voyage de Gênes [Gênes] – [1507] (voir BnF ms. fr. 5094 et l’édition de Giovanna Trisolini dans Jehan Marot, Le voyage de Gênes, Genève, Droz, coll. « Textes littéraires français », no 205, 1974)
Claude de Seyssel, Louenges du roy Louys XII e de ce nom [Louenges du roy] (Paris : pour Antoine Vérard, 24 décembre 1508) (voir BnF Vélins 2780 et l’édition de la dédicace insérée dans l’exemplaire de la reine de Mary Beth Winn dans Anthoine Vérard, Parisian Publisher, 1485 - 1512 : Prologues, Poems, and Presentations, Genève, Droz, coll. « Travaux d’humanisme et Renaissance », no 313, 1997, p. 133)
*Antoine Dufour, Les epistres de saint Jérôme [Saint Jérôme] – [1506-09] (voir BnF Rés. C5984 [Paris, 1518])
Jean Marot, Le voyage de Venise [Venise] – [après mai 1509] (voir l’édition des Deux heureux voyages de Genes et Venise [Paris, G. Tory, 22 janvier 1532] [BnF Rés. Y 4482] et l’édition de la dédicace de G. Trisolini dans Jehan Marot, Le voyage de Gênes, Genève, Droz, coll. « Textes littéraires français », no 205, 1974, p. 146-147)
Jean Lemaire de Belges, Le dyalogue de Vertu militaire et de Jeunesse françoise [Dyalogue] – 1 er juillet 1511 (voir BnF ms. fr. 25295 et l’édition d’Adrian Armstrong et Jennifer Britnell dans Jean Lemaire de Belges, Épistre du roy à Hector et autres pièces de circonstances ( 1511 - 1513 ), Paris, STFM, 2000, p. 1-9)
Jean Lemaire de Belges, Les epistres de l’amant vert [Seconde epistre] (Lyon : Étienne Baland, 1511) (voir l’édition de Jean Frappier dans Jean Lemaire de Belges, Les épîtres de l’amant vert, Lille, Giard, 1948, p. 18-37)
Jean Marot, Prières sur la restauration de la sancté de Madame Anne de Bretagne royne de France [Prières] – [printemps 1512] (voir BnF ms. fr. 1539 et l’édition de Gérard Defaux et Thierry Mantovani dans Jehan Marot, Les deux recueils, Genève, Droz, coll. « Textes littéraires français », no 512, 1999, p. 120-154)
Jean Lemaire de Belges, Troisième livre des illustrations et singularitez de France orientalle et occidentalle [Illustrations III] – décembre 1512 (voir Bern, Burgerbibliothek ms. 241 et l’édition de J. Stecher dans Oeuvres de Jean Lemaire de Belges, Louvain, Lefever, 1882, t. II, p. 248-475)
*Germain de Brie, Chordigerae nauis conflagratio [Conflagratio] (Paris : Josse Bade, 15 janvier 1513) (voir BnF Rés. m. Ye 68) (Dédicace datée du 23 octobre 1512)
*Pierre Choque, L’incendie de la Cordelière [Incendie] – [ca. 1514] (voir BnF fr. 1672 et Société des Manuscrits des Assureurs français, ms. 85.1)
*Maximien, La vie de Sainte Anne et d’autres poèmes pour Anne de Bretagne [Sainte Anne] – [ca. 1514] (voir Nantes, Bibl. mun., ms. 652)
Appendice II. Dédicaces à Anne de Bretagne sans édition moderne
Établissement des textes : les graphies telles qu’elles se présentent dans le texte d’origine sont conservées dans les passages édités ci-dessous. Toutes les abréviations ont été résolues. L’élision des voyelles est indiquée par une apostrophe. L’accent aigu sert à indiquer les participes passés au masculin singulier et au pluriel en –s, mais non pas ceux en –ez ; il indique aussi qu’une syllabe finale se prononce. La ponctuation et l’emploi des majuscules suivent les normes modernes. Les lettres entre crochets représentent des corrections.
Robert du Herlin, L’acort des mesdisans et bien disans (Arsenal ms. 3658, fols. 2 r-2 v, 18 r-19 r)
Entre vous, tresnobles et tresexcellentes princesses, dames, damoiselles, et autres de l’estat commun, preparez vous a oyr lire ce que vng petit et treshumble acteur veult dire pour viuifier voz nobles couraiges, le deffendeur et champion a conseruer l’onneur des dames. I’ay fait comme cellui qui est en vng grant pré plain de tres belles fleurs. Et qui eslit les symes des fleurs pour faire vng tres beau et tres excellent chappellet que entre vous grandes princesses, dames, damoiselles, et celles de l’estat commun porterez, s’il vous plaist me faire cest honneur. Et se aucun deffault y est fait, je suis content qu’il soit amendé a la discrecion de ceulx qui le liront. Et que gracieux pardon m’en soit donné.
Aprés tout, treshaulte, tresexcellente et tresuertueuse dame, je, vostre treshumble et tresobeissant seruiteur, chief enclin et genoul flechy, Robert du Herlin, pour donner conclusion a ce petit ouuraige. Se ma personne estoit douee de la grandeur de Charlemagne, de la force de Sanson, de la prouesse de Hector, des fortunes de Alexandre, des richesses de Octouien, de la sapience de Salomon, des subtillitez de Aristote, des enchantemens de Virgille, des destinees de Perseus et d’Ercules, des fairies de Lancelot et de tous les dons que le sainct Esprit a creature peut donner, toutes celles vertuz vouldroye aussi liberalement et volentiers et plus encoires exploiter a vous complaire et en tout obeir a voz bons commandemens, comme j’ay fait en la presente occupacion nommé L’Acort des mesdisans et bien disans contre l’onneur des dames, damoiselles et celles de l’estat commun. Et feroye en toutes autres choses [qui] me seroient possibles de acomplir, selon mon petit foible et imbecille entendement. Priant cellui seul Dieu qu[’il] vous doint regner que par sa grace augmente voz vertuz et vostre seignourie. A la fin vostre salut et beatitude et de tous voz nobles et subgectz. Ffait a Tours le xiiie jour de nouembre 1493.
Alberto Cattaneo, [Histoire des rois de France et de Francion a Charles VIII, en latin] (Arsenal ms. 1096, fol. 1 r)
Serenissime et gloriosissime domine, domine Anne, Francorvm regine, Britanieque dvci christianissime, Albertvs Cattanevs, jvris vtrivs doctor, archidiaconvs Cremonensis, felicitatem.
Francorum sicuti initia Illustria extitere Ita eorum gesta a Pharmundo, primo Rege, in Ludouicum xiium mille per Annos et septuaginta tres tam Ampla magnificaque fuere. Vt qui corires legunt non unius prouintie sed uniuersi fere orbis facta discant Ego autem Virago prestantissima et unicum in terris sidus fulgentissimum tuo intuitu Francorum gesta describens. Censui paucis multa perstringere faciamque ut qui terrarum situs pingunt in breui quasi tabella totam corum imaginem amplectar ut paruo temporis interuallo Egregia Francorum gesta congnoscens Inuictum consortem tuum Ludouicum cristianissimum Francorum Regem maiorum suorum exemplo ad orthodoxe fidei protectionem accendas Clodouicus primus inter Francos Rex Christianus hortatu Chrotildis Vxoris sacrum Baptisma suscipiens Visogoros Arianos interfecto Alarico Rege Aquitanie imperitanti ex Gallia expulit Childericus Clodouei filius euisdem Crotildis genitricis impulsit Pyrreneos montes trangressus Almaricum Visogothorum Regem superauit de eiectis sismaticis Catholicos Epons…
Pierre Le Baud, Le liure des cronicques des roys, ducs et princes de Bretaigne armoricane aultrement nommee la moindre Bretaigne (British Library Harley ms. 4371, fols. 1 r-2 v)
A treshaulte, trespuissante et tresexcellente princesse, ma tresredoubtee et souueraine damme, madamme Anne par la grace de Dieu royne de France, et par celle mesme grace duchesse de Bretaigne. Pierre Le Baud, thesaurier de l’eglise collegialle de la Magdalene de Vitre, et vostre treshumble et tresobeissant subiect, seruiteur, orateur et aumosnier, honneur et reuerence auecq prompte et deue subiection et obeissance.
Combien, treshaulte, trespuissante et tresexcellente princesse, ma tresdoubtee et souueraine damme, que au commendement par vous a moy fait de compiller, concorder et assembler les genealogies, les noms, les temps et les faitz notables de voz tresnobles progeniteurs et predecesseurs, les roys, ducs et princes royalux de vostre region, duché et principaulté de Bretaigne armoricane, et iceulx rediger par escript en liure et volume auctenticque, a ce que si trescleres et tresnobles choses dignes de perpetuité ne soient par silence mises en oubly et hors d’usaige, j’eusse peu affin de non l’emprendre, pour excuse enuers vostre royal maiesté, alleguer l’ignorence de moy, indiscret et simple prebstre qui comme cy apres assez manifestement vous appara en ay bien peu d’experience.
Touteffoiz, contraint par vostre ordonnance a laquelle je ne puis ne doy desobeir, et considerant le vouloir que auez de celles choses cognocstre, lequel est singulierement a louer, car puis que a toute personne diligente, si comme l’a escript Leonard Aretin en son prologue du liure de la bataille itallicque contre les Goths, il appartienne scauoir l’origine, extraction et progression de son pais et toutes les choses qui aux temps passez y sont advenues, par raison se doibt ung chascun plus naturellement incliner et applicquer a cognocstre celles de ses nobles parents, consanguans et antecesseurs et la narration de leurs magnificques, vertueux et victorieux faitz.
Je me suys enhardy d’asseoir et apposer ma plume a escripre ce que j’ay peu trouuer touchant ladicte matiere en lisant et en cerchant aucuns liures ystoriaulx auecques les cronicques, annaulx des roys, des princes et des temps, celles aussi de plusieurs eglises anciennes, et les legendes des saints et sainctes qui de ce font mention.
Et moiennant l’aide de Dieu, sans lequel nul ocupure n’est commencé, medié ne finy, ay le tout concuilly, composé et mis ensemble en ce present liure, depuis Conan Meriadoch, qui fut le premier roy breton de vostre dicte Bretaigne armoricane, jusques au temps de prince de bon memoire le duc Françoys derrenier, vostre bon pere, dont Dieu ait l’amme.
Auquel duc Françoys, vostre pere, j’ay fait fin et arrest, non pas que ses faitz soient moins dignes de recordacion et collaudation que ceulx de ses predecedents, mais pour ce qu’ilz sont de fresche et recente memoire et que plusieurs sont encores en vie, ausquelz ilz touchent de bien pres. Je les ay delaissez jusques a une aultre foiz, ne me semblant pas estre conuenable escripre les gestes des viuants en leur temps, pourtant que ces rapports faitz de celle maniere, la verité est souuentesfois supprimee et la mensonge aidee. Car comme les maulx des presents soient dits perilleusement et les biens joyeusement, il aduient souuent que par crainte l’on passe soubz silence les maulx contraires et faignt l’on pour applaudir les biens qui n’y sont pas.
Au commencement duquel volume j’ay premis et adiousté deux chapitres, dont le premier est de la diversité des gens qui habitent nostre Gaulle que les Romains appellent transalpine, et de la description et situation de la Bretaigne armoricque, affin de donner intelligence aux choses qui ensuiuent aprés. Et ouquel premier chappitre est aussi descript quels peuples possidoient Armoricque au temps que Julles Cesar la submist, et la resistance qu’ilz fistrent contre luy et les Romains, non pas pour attribuer la gloire d’elx aux Bretons qui occupent leurs lieux, mais pour manifester et magnifier la vertu desditz Armoricques, et aussi monstrer que Armoricque n’estoit pas deserte ni inhabitee avant que lesditz Bretons y unissent, si comme aucuns ont voulu dire en leurs liures.
Le second est de la premiere origine des Bretons qui au commencement obtindrent l’isle de la Grant Bretaigne, a present nommee Angleterre, et des roys qui regnerent sur elx avant que l’empereur Maxime et Conan Meriadoch conquissent ladicte Armoricque, par lequel second chapitre est aussi demonstree la generation d’icelluy Conan, la noblesse de luy et l’antiquité du nom Breton….
En quoy faisant combien que plusieurs choses me aient troublé pour le naturel amour du pais ou maintes aduersités sont aux temps passez seuruenues par les discordances des Bretons, celle raison toutesfoiz enfin m’a consolé que quant ilz se sont reduitz en bonne union et derrenierement par vous et vostre bon mean, elle a esté releuee resource et restauree et est jucq a cy demourré pacificque, populeuse et puissante par terre et par mer.
Et lesquelles choses j’ay pour la pluspart deduites plus par forme de cronographie que d’ystoriographie. Car a l’istoriographie apartient a plain d’escripre l’istoire et l’ordre des choses faictes. Et a cronographie principallement denoter les temps et succintement en discourrir la memoire…. dont il est aduenu que le temps que scelon Petrarche triumphe sus renommé, par ses reuolutions en a effacé la congnoicssance : et pourtant que les modernes n’en puent parler…. mais je n’y ai riens mis ne adiousté que je n’aye trouué en escript notable et que je ne croye contenir verité.
Et lequel liure et volume, treshaulte, trespuissante et tresexcellente princesse, ma tresredoubtee et souueraine damme, jay presumé vous presenter combien qu’il soit en gros et rude stille mipolly et mal ourné, confiant que de vostre benignité me tendrez excuse des diffaults et que vous reputerez le bon et entier vouloir que ce faisant j’ay eu de vous obeir et complaire et tousiours ay de vous servir en faisant mieulx si j’en auoye le sens.
Antoine Dufour, Les epîtres de saint Jérôme (Paris : Jean de la Garde, janvier 1519 [n.st.]) (BnF Rés. C5094, fols. 2-3)
Le prologue du translateur adressant a treshaulte, trespuissante et excellente dame Anne de Bretaigne, en son viuant royne de France.
Prologue
Considerans que tous les anciens interpretes ont sué et labouré, auons rompue la noix pour trouuer le noyau[50] en translatant de langue hebrayque en grecque en celle mesmes qui nous est la plus commune, la latine, comme les septante deux[51] interpreteurs Origenes, Synacus, Theodoncion, sainct Jherosme, Ruffin. Et n’eust esté sainct Iherosme, nous ne fussions iamais paruenus a l’intelligence de la Bible et sainctes Escriptures congnoissant la gra[v]ité[52] et exemple de bien viure et mourir estre viuement escripte en plusieurs epistres de luy. Voyant aussi le tresbegning vouloir et sçauoir de treshaulte et trespuissante et tresexcellente royne[53], dame et princesse, ma tressouueraine dame et princesse, Anne de Bretaigne, royne de France et duchesse de Bretaigne, en laquelle toute[s][54] vertus ont prins repos par Prouidence Diuine, et ses[55] vertueulx merites de double couronne decoree, je, Frere Anthoine du Four, docteur en theologie de l’Ordre des Freres Prescheurs, par miseration diuine euesque de Marcelles, ay bien voulu en ensuiuant mes predecesseurs translater de latin en françoys les epistres sequentes par le commandement de ma dicte dame souueraine, en cherchant a mon pouoir le plus pres de ce qu’il me semble que sainct[56] Jhierosme en ses[57] epistres entendoit, suppliant treshumblement qu’il vous plaise, ma tresouueraine dame, prendre mon petit ouurage agreable et plus, s’il vous plaist, le bon vouloir de l’ouurier, car tant que poures, meates et nurnigues arteres et ioinctures tiendront mon corps possesseur de la myenne emprisonnee ame, je ne cesseray de langue et de plume suiure voz bons vouloirs et commandements[58]. Et croy que en lisant ce que s’ensuit on aura cause de prier Dieu pour vous, ma tressouueraine dame, ainsi que suis tenu de faire toute ma vie[59].
Germain de Brie, Chordigerae nauis conflagratio (Paris : Josse Bade, 15 janvier 1513) (BnF Rés. m. Yc. 68, fols. 3 r-4 v)
Augustissimae Francorum Reginae Britonumque Duci Annae, Germanus Brixius, Altissiodorentem Felicitatem.
Ingens illa animi tui beneuolentia, singularis fauor, atque exuberans quaedam benignitas qua Ioannem Deganaeum Franciae Cancellarium haud pridem vita functum dignata, amplexataque fuisti praestartissima Francorum Regina Anna esse cit sane, vt ipse ego (qui me totum Deganaeo dedideram) eo statim extincto in te vltro conuerterim, non eam modo obseruantiam omnem qua viuentem eum fueram prosecutus, sed vt tibi insuper vni dedicarem, quidquid et venerationis et cultus habere vsque poteram. Idque quandoquidem iam pridem spectatum exploratumque nobis erat (si tamen mediocria sublimibus et deae heroa conferre phas est) quemadmodum quoscunque sui ordinis viros ille longo rerum earum quae ad tanti magistratus moderandam molem attinerent vsu atque experientia anteibat. Ita et re vnam caeteras omnis aeui nostri viragines virtutum omnium laude facile praestare et longo post re interuallo relinquere. Erat nimirum Ioannes Deganaeus vir vt summa muneris quo fungebatur auctoritate, dignitarisque celsitudine hominum nostratium amplissimus ; ita et corporis et animi raris eximiisque dotibus nemini nostra aetate (pace aliorum dixerim) secunddus, vt tanti tui numinis tam profuso fauore tamque propensa mentis tuae beneuolentia, si alius quisquis mortalis ; is certe vnus maxime dignus censeretur. Atque equidem cum memor huius erga me benignae voluntatis (vtpote quem dum apud se a secretis habuit humanissime semper non sine aliqua nostri aestimatione fouit ; ac liberalissime vbique nemine id non vidente ornauit) tum vero conscius mihi ; summi mei erga eum studii, integrae fidei singularisque obseruantiae vulgo quidem testatae atque omnibus spectatae ; plane vt tantis vtriusque nostrum affectibus, quantrum in me erat satisfacerem operepretium esse duxi Deganaei de me optime meriti, non modo memoriam dum viuam animo meo identidem recolere sed et oculis quoque quodammodo meis ipsius effigiem et viuam quasi imaginem assidue repraesentare. Id vero ipsum nulla alia potius ratione assequi me posse intellexi quem si me ipsum totum tibi vni deuouerem ; quam quidem sciebam excellentem illius integritatem et nullo vnque aere corruptas manus (vt multiplicem cuius libet disciplinae peritiam caeterasque eximias eius virtutes subticeam) suspicientem admirantemque, non ab re maximi semper fecisse eundemque prae aliis omnibus mira quadam indulgentia, immensaque benignitate fuisse prosecutam. Eo enim pacto fore speraui, vt dum tibi addictus deuotusque te ipsam contemplans admirare[r] ; Deganaei quisquis mortui imago perinde ac viuentis praesentisque, quasi coram adesse, oculisque nostris obuersari atque inhaerere videretur. Huc accedebat omnibus probitatis numeris absolutus animi tui candor et qua omnium animos demereri[t], incredibilis humanitas, quae vtique cum in te tam viuidos virtutis suae igniculos ac (vt verius loquar) clarissimum lumem facemque ardentissimam excitatit ; facit mediustidius vt omnes acque ad tui studium amoremque incendas, atque inflammes, nullusque vsque reperiatur ne beneficentiae quidem tuae expertium (quisquis quis expers est !) quin te ob tantam istam optimo cuique obuiam atque expositam humanitatem vltro admiretur, obseruet, reuereatur. Praeterea et te sciebam bonis ingeniis fauentem Apollinisque et musarum sacra religiosissime colentem ; eos munificentissime fouere qui quidpiam seu soluta seu pedestri oratione quod vel ad tuam vel tuorum gloriam pertineret meditati essent. Esse enim haud falso dictitaris tam generosae tanque diuinae mentis princeps foemina vt quemadmodum nemini nostre aetatis principi viro cedis, nec magnitudine animi, nec liberalitate, nec prudentia, caeterisve animi dotibus egregiis. Ita plaerosque hac vna in re antecedis : que literas literatosque omnis honestissime exornas ; et perbenigne amplexaris. Nimirum arbitrata, idque saepe numero praedicas et crebris vsurpas sermonibus ; magnum quoddam a deo optimo maximo beneficium in eos collatum esse, qui bonarum literarum cognitione excelluerint hominesque ipsos doctrina atque eruditione alios aliis quam maxime praestare. O plusque heroicum mulieris ingenium ! O admirabile reginae iudicium ! O raros desuetosque (fatali quodam tempestatis nostrae contagio) et principis et foeminae mores ! Vbi aliae pompas, luxum, delitias impensius diligentiusque curant, tu vna ingeniorum fautrix doctos studiosius foues, honoribus cumulas, et nihil beneficentiae in eos non confers. Digna me Hercule quam veluti bonorum exemplar morum expressissimamque verae virtutis effigiem principes tum viri tum foeminae omnes imitandam, aemulandamve aut (si id assequi non poterunt) saltem sibi admirandam proponant. Digna quae vna inter eas omnis quas ab huius regni primordiis nobis hactenus reginas habuisse contigit, siue quis corporis, siue animi bona spectet, primas parteis supremumque decus iure quodam tuo vendicare tibi possis. Digna quae (vt tua immensa liberalitate, humanitate, bonitate longum perstuamur vel Nestoris vel Sybillae annos integra valitudine transcendas. Digna cui pro tot tantisque in genus humanum bene meritis perennes statuae decernantur perpetuique honores habeantur. Digna tandem in cuius laudes celebrandas nomenque ipsum immortalitati consecrandum vniuersus eruditorum chorus omnes ingenii vires certatim exponat, intendat, effundat. Quod ipsum tametsi pro virili nostra aggredi statuimus certumque apud me est in te vnam meritis laudibus decantandam (modo tu mihi veluti quaedam ex alto fauens dea adsis) omnes Mineruae nostrae neruos intendere ; ne tamen cumulatissimas tuas virtutes, quas diffusior pleni operis campus vix capiat ; hic me quispiam velle epistolari angustia complecti opinetur, finem epistolae nostrae faciens merita laudum tuarum praeconia in aliud tempus reliciam. Interea vero vt quem tibi paulo ante dolorem tum Herueus Portimoger Nauarchus tuus tum chordigera illa tua toto oceano celeberrima nauis conflagratione sua inusserunt, eum nos aliqua ex parte deliniamus demulceamusque atque eosdem ; eodem simul incendio absumptos tibi quodammodo posteritatique carminibus nostris restituamus eorumque manes facta quasi parentatione euocemus, has veluti quasdam vigiliarum nostrarum primitias tibi praelibandas offerimus. Quas sane si ad stomachum istum facere nec fastidio esse sensero ; equidem et quam maximum fructum tum regiae tuae benignitatis tum nostri huiusce laboris causa tua suscepti me putabo percepisse et nos certe si quos postea magis amoenos flores vberioresque fructus musae nostrae nobis benigniores reddiderint ; eos omnis pleno coplosoque cornu vni tibi consecrabimus. Vale. Blesis decimo Kalends, Nouember .M.D.XII.
Pierre Choque, L’incendie de la Cordelière (BnF fr. 1672, fols. 2 r-2 v)
O tresillustre, trescrestienne, treshaulte, trespuissante et tresexcellente, pacificque, souueraine et sacree dame et princesse, Madame Anne, Brute troienne, Royne de France, deux foz duchesse et seulle heritiere de la noble terre bretonicque. Salut, honneur, reuerence et toute obeyssance[60].
Selon le dit du philozophe, chascune personne appete et desire sauoir. e bien considerant et non acomplissant, ay conceu en memoire que vostre excellente dignité, magnificence et circumference, pareillement beniuolence, ne peuent estre venuez ou procedés sans infusion diuine et que estes en vertus prosperante plus que humain entendement ne peult contempler ou comprendre, dont me suys efforcé a regarder la genealogie des dieux, oeuvre tresexcellente et souueraine. En laquelle regardant ay trouué que estes descendue d’icelle [et][61] de la lignee et generation de Brutus, tressouuerain prince. [Ce] consideré[62] ay esté satifaict de vostre singuliere prosperité et beniuolence. Et me suys reputé indigne escripre ou compiller quelque chose digne de presenter a tant excellente dame et princesse descendue des dieux. Mais Bon Voulloir, qui ses amys poursuyt, m’a contraint et compellé escripre ou translater selon la capacité de mon entendement qui est rude aulx letres. Et plus prompt de vous seruir que aultre chose faire vng traicté faict par scientificque personne, Brice, vostre notable secrettaire, desduisant de la combustion de vostre grande et triumphante nef nommee La Cordeliere, en laquelle fuz en Turquie[63] et passay maintes mers[64]. Lequel traicté semble Virgille et Homere exceder jacoit comme est predit que mon paouoir soit bien petit a translater de latin en françoys jouxte et ainsy que ay peu concepuoir par ledict Brice, compositeur tresexcellent dudict traicté, la translacion rude et de gros stille ay tousiours craint a vostre sacree clemence presenter. Mais consideré vostre beniuolence et clemence, me suys ingeré combien que soye insuffisant et indigne icelle presenter. Laquelle presentacion plaira a vostre sacree clemence de moy comme le moindre de voz seruiteurs et subgectz benignement recepuoir par icelle supplicacion, mon bon voulloir accepter et excuser mon oser temeraire.
Maximien, La vie de Sainte Anne et d’autres poèmes pour Anne de Bretagne (Nantes, Bibliothèque municipale, ms. 652, fols. 1 v-2 v)
¶ A la royne, ma souueraine dame.
La deuote foy et creance des fidelles doibt estre opportunement et importunement exitee a craindre, aymer, adorer et prier Dieu de cueur, de ame et de pencee treshumblement. Et les uertus et merites de saincts and sainctes doibuent estre recitees et reduittes semblablement souuent a memoire, affin que a l’exemple de leurs louables vies lesditz fidelles soient incités de les imiter de aultant que la possibilité de humaine fragilité le peult comporter en viuant virtueusement. Par ainsi puissent estre mehus a reuerer et honnorer lesditz sainctz et sainctes par imitation de bonne vie tousiours deuotement. Eue ceste consideration, te vien treshumble subiect ; me suis disposé de composer ung petit traicté de la vie saincte Anne, tendant par ce estre cause de quelque bonne ediffication et esmouuoir les cueurs humains de auoir a la dicte saincte de bien en mieulx grande et singuliere deuotion, comme a celle qui doibt estre reueree et honnoree sur tous saincts et sainctes de affection tresperfaicte. Je loue merueilleusement la fidelité de vous, ma dame, qui croyés que par la grace de Dieu et les merites des bienheurés martirs, sainct Denis et ses compaignons, et par leur intercession le roy, nostre souuerain seigneur, ait heue et optenue victoire et mys en conculcation ses ennemys. Mais ie vous supplie le plus humblement, affectueusement et en la meilleure maniere que vng humble et loyal subiect doit supplier et requerir sa souueraine dame, que saincte Anne ne soit point forcluse de cest honneur, foy et creance par autant que ainsi que ie croy perfaictement et pour certain qu’elle y doibt auoir participation comme par vraye semblable aparence peult aparoir par la inspection des choses a venues par le temps elapsé de puis que par saincte regeneration fustes adoptee fille de Dieu et douhee du nom de la dicte saincte par sainctz fons de baptesme iusques a l’heure presente. Aussi le pourra l’en facillement prouer par ueritable resolution bien fondee, fulcie et munie de cleres aparentes et treseuidentes raisons, des quelles ie me desporte pour le present pour euiter prolixité, tendant de proceder a faire et composer ledict traicté si dessus mentioné. Lequel ie abregeray le mieulx que ie pourray en desclairent tant seullement se qui peut et doibt seruir a la matiere subiecte pour l’heure. En esperance que si l’euure vous agree et il vous plaist commander que l’acteur procede a la declaration des raisons pressuposees et des uertus et merites d’icelle saincte de point en point plus amplement, il s’i emploira a la confiance de la promesse de celluy qui par la bouche du bon prophete et roy Dauid dit et promist a ceulx et a chascun d’eux qui pour honneur et reuerance de luy ou de ses sainctes entreprendront de dire quelque chose salutaire : « Oure ta bouche seullement et te l’empliray de bonnes parolles et te douray entendement ». C’est Dieu nostre Createur a qui ie prie, ma souueraine dame, qui luy plaise vous maintenir et garder longuement en bonne paix, santé et prosperité. Et au proffit et utilité du royaulme et des pais des queulx par diuine miseration obtenés et aués la seignorie et domination. En loyalle et legitime compaignie du trescrestien, tresillustre et victorieux roy de France, Loys douziesme de ce nom. Amen.
Note biographique
Cynthia J. Brown est professeure au Département de français et d’italien de l’Université de Californie à Santa Barbara. Ses nombreuses publications comprennent Poets, Patrons and Printers : Crisis of Authority in Late Medieval France (Ithaca, Cornell University Press, 1995 ; prix MLA Scaglione), Women and the Book Culture in Late Medieval and Early Modern France, en codirection avec Martha Driver (The Journal of the Early Book Society, vol. IV, 2001), The Cultural and Political Legacy of Anne de Bretagne. Negotiating Convention in Books and Documents (Cambridge, D. S. Brewer, 2010) et The Queen’s Library : Image-Making at the Court of Anne of Brittany, 1477 - 1514 (Philadelphie, University of Pensylvania Press, coll. « Material texts », 2011).
Notes
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[1]
Le Discours de Choque contient deux séries de dédicaces. Voir l’appendice I pour la liste des 21 oeuvres connues contenant une dédicace à la reine, avec références bibliographiques et abréviations employées dans cet article. Pour toute dédicace déjà éditée, nous donnons la page de l’édition moderne. Dans les autres cas, nous donnons les folios de l’oeuvre d’origine. Voir l’appendice II pour une édition des sept dédicaces qui n’ont jamais été éditées.
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[2]
Pour un examen du mécénat d’Anne de Bretagne, voir Cynthia J. Brown, The Queen’s Library : Image-Making at the Court of Anne of Brittany, 1477 - 1514 , Philadelphie, University of Pennsylvania Press, 2011. Dorénavant désigné à l’aide des lettres QL, suivies du numéro de la page.
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[3]
Les Nobles et cleres dames, le Trésor, la Seconde epistre et la Conflagratio. Une dédicace manuscrite a été insérée dans l’édition des Louenges du roy de Seyssel offerte à la reine. Il n’est pas exclu qu’elle soit de la main de Seyssel (Jacques Poujol, éditeur de Claude de Seyssel, La monarchie de France [Paris, Libra d’Argence, 1961], p. 28, prétend que c’est le cas), mais le contexte évoqué dans cette dédicace est différent et renvoie aux « heures » dédiées à Anne. J’ai fini par tenir compte de cette dédicace dans le présent article, tout en gardant à l’esprit qu’il y a un décalage entre ces vers de dédicace et le livre même.
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[4]
Voir celles de La Vigne, de Lemaire (Seconde epistre) et de Seyssel.
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[5]
Voir l’appendice dans Cynthia J. Brown, QL, pour une liste des livres associés à la reine.
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[6]
Les dédicaces de Herlin et de La Vigne ainsi que deux de Lemaire (Plainte, Seconde epistre) se trouvent à la fin du livre. Choque s’adresse à Anne au début et à la fin de chaque partie de son Discours.
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[7]
Voir aussi la dédicace de Brie dans l’appendice II. Marot est l’un des cinq auteurs à employer un seul superlatif pour s’adresser à la reine dans son Gênes (voir aussi La Vigne, Lemaire [Seconde epistre], Seyssel et Maximien). Dans ses Prières, Marot ainsi que trois autres auteurs (Herlin, le traducteur des Nobles et cleres dames et Lemaire [Plainte]) adoptent une série de deux adjectifs.
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[8]
L’on trouve souvent aussi « tressouueraine », « treschrestienne », « tresmagnanime » ainsi que « souueraine », « sacree » et « redoubtee ».
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[9]
Herlin, Seyssel, Choque (Discours [mais voir la note 14]) et Marot (Prières) sont les autres auteurs qui n’identifient pas la reine comme « duchesse de Bretagne ».
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[10]
Cattaneo, La Vigne et Dufour sont les autres auteurs qui se servent du titre « duchesse de Bretagne ».
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[11]
Choque n’emploie aucun titre formel en s’adressant à la reine dans son Discours.
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[12]
Discours (deux dédicaces pour chaque partie) et Incendie.
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[13]
Alberto Cattaneo, archidiacre de Crémone, ne semble pas avoir été directement associé à la cour de France.
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[14]
Sauf Herlin, Choque (Discours), La Vigne, Seyssel, Lemaire (Seconde epistre, Illustrations III) et Maximien.
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[15]
je, vostre treshumble et tresobeissant seruiteur, chief enclin et genoul flechy, Robert du Herlin…
fol. 18 -
[16]
Albertus Cattaneus, juris utrius doctor, archidiaconus Cremonensis…
fol. 1 r -
[17]
je frère Anthoine Dufour, docteur en théologie, de l’ordre des Frères Prescheurs, général inquisiteur de la foy… » (Femmes célèbres, p. 1) et « je, Frere Anthoine du Four, docteur en theologie de l’Ordre des Freres Prescheurs, par miseration diuine euesque de Marcelles…
Saint Jérôme, fol. 2 v -
[18]
Pierre Le Baud, thesaurier de l’eglise collegialle de la Magdalene de Vitre, et vostre treshumble et tresobeissant subiect, seruiteur, orateur et aumosnier…
Cronicques de Bretaigne, fol. 1 r -
[19]
Augustissimae francorum reginae britonumque duci Annae, Germanus Brixius, altissiodorentem felicitatem
Conflagratio, fol. 3 r -
[20]
Plainte, Seconde epistre, Dyalogue.
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[21]
ton treshumble Secretaire, et Indiciaire Iean le Maire de Belges…
p. 248 -
[22]
« je Jehan Des Marestz, vostre povre escripvain, serviteur treshumble des vostres treshumbles et tresobeyssans serviteurs… » (Gênes, p. 84) ; « moy Jan Marot, vostre humble poete et escrivain » (Venise, p. 147) ; et « je, Jehan des Marestz, alias Marot, de tous facteurs le moindre disciple et loingtain imitateur des meilleurs rethoriciens, vostre treshumble et tresobeissant et tresadvoué subject, serviteur et esclave… » (Prières, p. 120).
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[23]
Maximien ne s’identifie pas dans sa dédicace, mais Brie se nomme dans la sienne (voir la note 19).
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[24]
Voir la note 6.
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[25]
Voir l’auteur des Nobles et cleres dames (« vostre escolier, treshumble et obéissant subjet, lequel treshumblement se prosterne et incline devant le siège royal de vostre celsitude et tresnoble majesté » [fol. 176-177]) ; Herlin (« vng petit et treshumble acteur » [fol. 2 r]) ; Vérard (« je, vostre treshumble et tresobeissant serviteur » [p. 362]) ; Choque (« tant et si très humblement que faire le puis à vostre bonne grace me recommande » [Discours, p. 166]) ; La Vigne (« n’oubliez vostre humble secretaire » [p. 254]) ; Le Baud (« vostre treshumble et tresobeissant subiect, seruiteur, orateur et aumosnier » [fol. 1]) ; Marot (« En me prosternant, en treshumble reverence et humilité, au seant des piés de vostre haulte seigneurie… vous suppliant tres humblement… [Advocate, p. 95 ; voir aussi la note 27]) ; Dufour (« suppliant treshumblement qu’il vous plaise prendre mon petit ouurage agreable » [Saint Jérôme, fol. 2 v]) ; Lemaire (« je vous presente en toute humblesse… » [Dyalogue, p. 1]) ; Maximien (« Mais ie vous supplie le plus humblement, affectueusement et en la meilleure maniere que vng humble et loyal subiect doit supplier et requerir sa souueraine dame » [fol. 2 r]).
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[26]
Il s’agit de son premier don de livre à la reine. Une fois engagé par elle, Marot réduit ses auto-critiques. Toujours est-il qu’il est le plus dépréciatif à son propre égard.
-
[27]
Pour une analyse plus détaillée de l’attitude de ces auteurs, voir la note 41 et Cynthia J. Brown, QL, p. 80-81, 143-144, 159-161.
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[28]
Voir le traducteur des Nobles et cleres dames qui écrit « pour vous donner quelque récréation et passe-temps entre vos solicitudes temporelles » (p. 174). Marot donne son Gênes à Anne pour « faire chose plaisante à l’oeil, recreative à l’esperit, consolative au diuturnel travail de [sa]…maistresse » (p. 83) ; en outre, il désire « par toutes voyes cercher moyens d’acomplir chose qui vous soit agreable » (p. 84). Seyssel (voir la note 3) parle dans les Louenges de la lecture de la légende « plaisante » d’un saint. Dans la Seconde epistre, Lemaire dit que l’« on verra plusieurs gens assez rire » de son « joyeux escripre » (p. 37, v. 575-576).
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[29]
Le traducteur des Nobles et cleres dames explique que son livre « sera occasion de éviter oesiveté et récréation de esperit » (p. 175). Dufour offre ses Femmes célèbres à Anne de Bretagne « pour matter oisiveté » (p. 1).
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[30]
Voir le traducteur des Nobles et cleres dames : « … la lecture de ce présent volume pourra exciter et éveiller le noble courage de plusieurs dames à faire et acomplir plusieurs faiz et opéracions vertueuses, à l’imitacion et manière des nobles dames anciennes » (p. 175). Dans son Discours, Choque dit : « Pour ce que je scay et congnoys vostre passetemps estre en vertueux exercice et que, après le service de Dieu, vous oyez et entendez voluntiers haultes et sollempnelles choses, mesmement quand elles procedent de vertueux faitz » (p. 166). Dufour loue les intérêts vertueux de la reine dans sa dédicace des Épîtres de saint Jérôme : « la gra[v]ité et exemple de bien viure et mourir » (fol. 2 v). Voir aussi les dédicaces de Vérard, de Lemaire (Plainte) et de Maximien.
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[31]
Choque offre son Discours à la reine pour « sauoir dire et determiner des faitz de noblesse, non des armes seullement, mais des alliances et mariages des filz et filles des princes, de leurs parens et affins, et des honneurs qui leur sont faitz en toutes principaultés » (p. 166). Le Baud veut que son histoire du duché de Bretagne « ne [soit] par silence [mise] en oubly et hors d’usaige » (fol. 1 r). Lemaire dédie ses Illustrations III à la reine dans l’espoir que la France orientale et la France occidentale se réunissent (p. 250-252).
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[32]
Il s’agit des oeuvres de Herlin, de Choque (Discours), de Le Baud, de Dufour et de Marot (Venise).
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[33]
Lemaire, ayant entendu dire que la reine avait appris par coeur l’épitaphe versifiée du perroquet qui achève sa Premiere epistre de l’Amant vert, a décidé de lui dédier la version imprimée de cette oeuvre accompagnée de la Seconde epistre de l’Amant vert (1511), mais indirectement, par l’intermédiaire de Jean Perréal, peintre royal (voir la lettre dédicatoire). Ce n’est qu’à la fin de la Seconde epistre que Lemaire ose s’adresser à Anne, mais de manière toujours circonspecte, car il ne fait que réécrire sa première dédicace à Marguerite d’Autriche pour inclure la reine (p. 37, v. 571-73). Voir Deborah McGrady, « Printing the Patron’s Pleasure for Profit : The Case of the Epîtres de l’Amant vert », Journal of the Early Book Society, no 2, 1999, p. 82-112.
-
[34]
Malheureusement, la reine est morte avant de retenir Maximien, qui a fini par dédier la même oeuvre à sa fille, Claude de France. Pour des détails à ce sujet, voir Cynthia J. Brown, « Like Mother, Like Daughter : The Blurring of Royal Imagery in Books for Anne de Bretagne and Claude de France », dans Cynthia J. Brown (dir.), The Cultural and Political Legacy of Anne de Bretagne, Cambridge, R.-U., et Rochester, D.S. Brewer, 2010, p. 111-114. Dorénavant désigné à l’aide des lettres LM, suivies du numéro de la page.
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[35]
Les armes d’Anne de Bretagne décorent L’Acort de Herlin (fol. 2 r), l’Histoire de France de Cattaneo (fol. 1 r), les Cronicques de Bretaigne de Le Baud (fol. 1 r) et le Dyalogue de Lemaire (fol. 3 v). Les armes d’Anne et de Louis XII avec celles d’Anne de Foix et de Ladislaus, roi de Hongrie, ornent les manuscrits du Discours de Pierre Choque (BnF ms. ffr. 90 [fol. 5], BL ms. Stowe 584 [fol. 69 r, 69 v]).
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[36]
Voir l’exemplaire du Trésor (fol. A1 r) et les manuscrits de dédicace de Gênes (fol. 1 r), des Femmes célèbres (fol. 1 r), de Saint Jérôme (St. Petersburg, MS perdu) et de l’Incendie (SMAF 85.1, fol. 5 r [mais la dédicataire pourrait être Claude de France ; voir Cynthia J. Brown, LM, 110-111]).
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[37]
Il s’agit des Illustrations III de Jean Lemaire (Bern, Burgerbibliothek, ms. 241, fol. 1 r, 6 v).
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[38]
Le manuscrit de dédicace de La Vigne ne contient pas de scène de dédicace, mais trois miniatures de la reine sont dispersées à travers l’oeuvre. L’imprimé des Nobles et cleres dames contient un bois générique d’une reine intronisée au fol. 1 v. Pour une analyse de ce bois, voir Cynthia J. Brown, QL, 121-123, 134-136.
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[39]
Lemaire révèle qu’il a composé son Dyalogue pour un public masculin « pour donner exhortation à ung chascun jeune et vertueux seigneur de la langue françoise de tendre à choses plushaultaines et plus memorables, à l’exemple des preux et vaillans princes tant du temps passé que moderne, mesmement du roy, nostre sire treschrestien et tresvictorieux » (p. 1).
-
[40]
Marot « féminise » son Gênes pour la reine vers la même époque. Voir Cynthia J. Brown, QL, 81-107.
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[41]
Et si demonstre comment les bonnes princesses doivent aymer et craindre Dieu pour le premier et principal enseignement, et qu’elles doivent prendre le bon et sainct avertissement qui vient pour l’amour et crainte de Nostre Seigneur, avecques plusieurs beaulx et vertueux enseignemens contenus en celui livre…
p. 362 -
[42]
Herlin se restreint à se décrire comme « le deffendeur et champion a conseruer l’onneur des dames » (fol. 2 r).
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[43]
Voir Cynthia J. Brown, QL, 81-100, 144-166, pour une analyse de ces miniatures.
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[44]
C’est aussi la perspective de Seyssel vers la même époque : « J’ay fantaisie que jours ouuriers et festes,/Lisant au liure ses tresmerueileux gestes/Ceste legende, trouuerés moult plaisante/A vostre vsaige » (p. 133).
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[45]
« Esse enim haud falso dictitaris tam generosae, tanque diuinae mentis princeps foemina vt quemadmodum nemini nostre aetatis principi viro cedis, nec magnitudine animi, nec liberalitate, nec prudentia, caeterisve animi dotibus egregiis. Ita plaerosque hac vna in re antecedis : que literas literatosque omnis honestissime exornas ; et perbenigne amplexaris » (fol. 3 v-4 r) [Sans mentir aucunement, on te considère si généreuse et une princesse d’un esprit si divin que tu n’es nullement inférieure à aucun prince de notre époque ni par la magnitude de ton âme, ni par ta libéralité, ni par ta prudence, ni par les dons illustres de ton âme. Ainsi tu surpasses la plupart des gens dans une chose : tu prises très honnêtement les lettres et les lettrés, et tu les estimes énormément].
-
[46]
Alfred Leroux de Lincy, Vie de la reine Anne de Bretagne, femme des rois de France Charles VIII et Louis XII, Paris, Curmer, 1860-1861, t. II p. 94-95.
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[47]
Une épître de Brie adressée au cardinal Jérôme Aléandre, qui date de la fin de décembre 1512, introduit l’édition.
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[48]
Les dédicaces précédées d’un astérisque sont publiées dans l’Appendice II.
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[49]
D’après Laurent Brun (http://www.arlima.net/qt/robert_du_herlin.html), Herlin a dédié La louange de la Vierge à Anne de Bretagne en 1493, mais la localisation de ce fragment manuscrit est actuellement inconnue.
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[50]
Rés. D 80287 [Paris, Jean Trepperel, s.d.] noya
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[51]
Rés. D 80287 septante et deux
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[52]
Rés. C 5984 , Rés. D 80287 granite
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[53]
Rés. D 80287 treshaulte & excellente royne
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[54]
Rés. C 5984 , tout
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[55]
Rés. D 80287 ces
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[56]
Rés. D 80287 monseigneur sainct
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[57]
Rés. D 80287 ces
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[58]
Rés. D 80287 commandement
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[59]
Rés. D 80287 tout au long de ma vie
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[60]
SMAF 85 . 1 Tresillustre excellente pacifique souueraine et sacree dame et princess Ma dame Anne brute troyenne. Royne de France trescrestienne et duchesse de Bretaigne.
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[61]
1672 et manque
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[62]
SMAF 85 . 1 Brutus tresouuerain. Ce considere ay
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[63]
1672 en Turquie répété
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[64]
Choque parle ici de sa propre expérience à bord de la Cordelière, quand on lui a commandé un compte rendu de l’expédition française à la Terre Sainte en 1501 qui a été déroutée sur mer à Mytilène (voir l’édition suivante de Sandra Provini : Humbert de Montmoret, Germain de Brie, Pierre Choque, L’incendie de la Cordelière, La Rochelle, Rumeur des Âges, 2004, p. 13, 18).