Abstracts
Résumé
Dans cet article, je discute les principaux procédés graphiques utilisés par Michel Tremblay pour rendre compte des particularités orales de langue de ses personnages, en me concentrant sur cinq pièces. Je m’intéresse plus précisément aux procédés graphiques qui permettent une « mise en texte » des caractéristiques communicationnelles de l’oralité et de ses variations. Ces éléments sont de trois ordres, en rapport avec le dispositif discursif particulier de la littérature et du genre dramatique. Je me concentre sur les éléments graphiques qui relèvent de l’échange personnage-personnage. Dans les textes choisis, ces éléments sont souvent associés à une « déraison graphique » (Christin en référence à Goody), c’est-à-dire à une certaine iconicité du langage, mais cette déraison est toute relative. Les « néographies phonétisantes » (Anis) en constituent un exemple majeur. Ces formes, qui sont détournées de l’orthographe pour rendre compte de phénomènes oraux comme le débit ou la variation phonétique, résultent plus d’une négociation avec les contraintes du code écrit, que de leur remise en cause radicale. La plupart des dramaturges qui usent de ce procédé n’inventent pas une nouvelle langue ni de nouveaux graphèmes, ils essaient de rendre compte de la variété linguistique des personnages qu’ils créent, ils bricolent des profils langagiers crédibles pour stigmatiser une classe sociale ou simplement différencier les personnages entre eux.
Abstract
In this paper, focusing on a set of five plays by Michel Tremblay, I discuss the major graphical techniques that he exploits in order to take into account the spoken language features of his characters’ linguistic usage. More precisely, I examine those techniques that allow one to “textualize” the specific aspects of oral speech and its variations. I investigate the graphical elements of communication between characters. In the texts at hand, these elements are often associated with some “déraison graphique” (“graphical deviance,” Christin echoing Goody) that is, to a form of iconicity in language, whose deviant character is in fact rather moderate. The phonetic transliterations are a case in point. Those forms depart from standard spelling to capture oral phenomena such as speed and phonetic variation and result more from an adaptation of the code constraints, than from a radical upturn. Most drama writers who use that technique do not create new languages nor new graphemes ; rather, they try to do justice to the linguistic diversity of their creations, making up plausible linguistic profiles in order to stigmatise a social class or just to distinguish between the characters.