Abstracts
Résumé
Dans les années 1940 et 1950, le poète Magloire-Saint-Aude (1912-1971) publie en quelques minces recueils une « poésie raréfiée à l’extrême » et inaugure la modernité poétique haïtienne. Dans une écriture dense, exigeante, vécue dans son hermétisme comme une parole de l’individualité, comment se pose la question du corps à travers la figuration du sujet ? Comment peut se construire à travers la corporalité un sujet qui se définit aussi résolument par son opacité ? Pourtant, tout un lexique du corps comme matière, comme forme, comme expérience, comme espace ou comme geste, comme figure en un mot, laisse entendre que ce sujet qui se refuse si radicalement à notre reconnaissance n’est pas un sujet complètement abstrait, un pur esprit, une parole inlassable et creuse sur soi. En abordant l’oeuvre poétique de Magloire-Saint-Aude (Dialogue de mes lampes [1941], Tabou [1941] et Déchu [1956]) à travers le problème de son opacité, ce sont ces questions fondamentales concernant la représentation du sujet et de son corps qui sont problématisées ici par une approche à la fois sémiotique et herméneutique. Cet article s’attarde sur le corps du sujet opaque, tout à la fois présence et absence, qui se dérobe irrémédiablement à notre regard au moment même où nous nous interrogeons son sens.
Abstract
The poetry of Magloire-Saint-Aude (1912-1971) is rarified to the extreme. Published in the 1940s and 1950s in three short collections, Magoire-Saint-Aude’s poems inaugurate the literary modernity of Haiti. Dense, demanding, individualized to the point of hermeticism, how can the critic approach in this poet’s work the question of the body as a figuration of the subject? How can one form a subject through the question of a body that defines itself so resolutely by its obscurity? A large lexicon concerning the body exists: as matter, form and experience, as space and gesture, as, in short, figure. The existence of a critical lexicon concerning the body proves that this subject, which essentially refuses recognition, is not a completely abstract, a pure spirit, a relentless and altogether hollow manner of speaking. In reading the poetry of Magloire-Sant-Aude (Dialogue de mes lampes [1941], Tabou [1941], Déchu [1956])—through the question of its obscurity, fundamental questions are raised concerning the representation of the subject and his or her body. Using a semiotic-hermeneutic approach, this article examines the problematic of the body as an obscure subject, presence and absence, avoiding our glance even at the moment we are trying to decipher its meaning.