Abstracts
Résumé
L’opinion reçue veut que le Balzac « réaliste » soit celui qui émerge au moment des Études de moeurs et du Père Goriot, celui qui délaisse les excès de ces premiers textes philosophiques. Il est possible, toutefois, de concevoir ce débordement du vraisemblable comme faisant partie de l’esthétique réaliste, du moment que l’on tient pour acquis l’impossibilité de la représentation du réel dans son intégralité. La nouvelle « Adieu », publiée en 1830 et rangée parmi les Études philosophiques, permet de constater la permanence et l’ambivalence du réalisme balzacien : le protagoniste, dans le but de guérir sa maîtresse de sa folie et de son amnésie, « re-présente » justement l’événement réel qui est censé être à la source de sa maladie. L’échec de la guérison, tout en mettant en cause le projet réaliste, permet également de le repenser selon une logique qui ne serait pas mimétique, mais linguistique : la mise en échec du référent et du savoir des témoins oculaires témoignent de cette absence structurelle qui hante le réel et le réalisme, et souligne l’impossibilité d’un savoir ou d’une représentation qui ne serait pas d’ordre textuel.
Abstract
Received opinion has it that the « realist » Balzac is the one who emerges at the time of the Études de moeurs and Le père Goriot, the one who leaves behind the excesses of his first philosophical textes. It is possible, however, to envisage this overflowing of the verisimilar as forming an integral part of the realist esthetic, provided we assume the impossibility of representing the real in its integrity. The short story « Adieu », published in 1830 and placed in the Études philosophiques, allows us to affirm the permanence and the ambivalence of Balzacian realism : the protagonist, seeking to cure his mistress of her madness and amnesia, represents, precisely, the real event which is presumed to be the cause of her illness. The failure of the cure, while putting the realist project into question, also enables us to rethink it according to a linguistic, rather than a mimetic, logic : the undermining of the referent and of the eyewitnesses’ knowledge is a testament to the structural absence haunting the real and realism, and highlights the impossibility of a knowledge or of a representation which could be other than textual.