Avec cet ouvrage, Mathieu Flonneau ouvre un nouveau champ dans l’histoire de l’automobile en France. En effet, sur le modèle de Wolfgang Schivelbush qui avait, il y a de cela quelques années, proposé une histoire culturelle des voyages en train, Mathieu Flonneau propose d’analyser une histoire culturelle sur la longue durée de ce qu’il appelle l’automobilisme. Selon sa définition, l’automobilisme consiste donc dans « l’ensemble des usages de l’automobile » depuis ses débuts à la fin du XIXe siècle jusqu’à l’orée du XXIe siècle. L’auteur, agrégé et docteur en histoire, est maître de conférences à l’université Paris I-Panthéon-Sorbonne. Il s’est auparavant intéressé aux mutations sociales introduites à Paris durant le XXe siècle dans une thèse pionnière en France et choisit avec cette publication d’élargir son champ d’intérêt. Pour se faire, il s’est appuyé sur une documentation phénoménale et très hétérogène : les ouvrages spécialisés pour chacune des époques (L’Argus), le recours à l’iconographie (Edward Hopper entre autres), les romans (avec de grands noms tels que Marcel Proust, Paul Morand, Sinclair Lewis, Roland Barthes pour n’en citer que quelques-uns mais aussi des romans de gare), les documents publicitaires, les sources gouvernementales, les sources archivistiques (celles Automobile-Club de France par exemple) et les sources visuelles (avec l’exemple du film fameux Cars pour lequel on attend une suite). Son livre est construit en suivant la chronologie avec deux parties contenant chacune d’elle dix chapitres. La première partie s’attache à évoquer et rappeler les débuts de l’automobilisme et de l’automobile en partant directement de la source, soit la France de la Belle Epoque jusqu’à la veille de l’entre-deux-guerres. Avec beaucoup de précision, l’auteur nous fait traverser cette période un peu oubliée par le commun des mortels contemporains où l’on peut voir renaitre des noms célébrissimes du passé qui ont encore quelques échos de nos jours tels que les industriels français Panhard, Levassor et Edouard Michelin ; on retrouve aussi l’engouement des premières courses automobiles (le premier grand prix de l’histoire apparait en 1906 sur le circuit de la Sarthe) et le rôle décisif qu’a joué l’Automobile-Club de France fondé en 1895 (le premier au monde) dans l’avènement de l’automobile. Pourtant, rapidement, l’automobilisme s’expatriera du côté du nord-américain et désormais les Etats-Unis s’érigeront en promoteur par excellence de l’automobilisme – c’est en grande partie grâce à l’essor de la Ford T dès 1908 qui rendra accessible l’automobile à tous. Dans le même temps, l’espace urbain est fondamentalement modifié par l’automobile qui impose un ordre nouveau ; c’est encore une fois la France avec Paris en tête qui sert de laboratoire d’expérimentation originel avec par exemple comme le premier code de la rue et le premier sens giratoire. En matière de législation, les contemporains de l’époque se sont concertés sur la vitesse et sur l’objet automobile en lui-même : cela amena progressivement à une circulation plus policée. Poussée par ces développements, l’automobilisme est rapidement adopté par les artistes. L’on voit poindre des manuels du bon conducteur, des récits de voyage, le courant du futurisme avec la figure principale de Filippo Marinetti exprime la violence désormais accessible par l’acquisition d’une automobile, des auteurs rédigent des romans avec pour sujet l’automobile et parfois même en la prenant comme personnage principale et en l’incluant directement dans le titre du roman — c’est le cas d’Octave Mirbeau qui publia en 1907 le premier roman automobile, La 628E8. Aux vues de ces dix étapes que sont ces dix premiers chapitres, on peut voir que l’automobilisme fascine, elle est riche de promesses dans cette fin du XIXe et ce début du XXe siècle. Pourtant, le …
Les cultures du volant XXe-XXIe siècles. Essai sur les mondes de l’automobilisme. Par Mathieu Flonneau (Paris, Edition autrement, 2008, Pp. 220, ISBN 978-2-7467-1183-9)[Record]
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Étienne Faugier
Université Laval