Pour une publication scientifique comme la Revue Éducation relative à l'environnement : Regards, Recherches, Réflexions, un numéro hors thème constitue un apport précieux et ce, à plusieurs titres. Si les numéros thématiques ont l’avantage de proposer un degré d’approfondissement élevé et une diversité de perspectives autour d’un sujet délimité, les numéros sans thème (ou hors thème) permettent pour leur part de capter plus largement et d’une manière plus ou moins aléatoire, certaines préoccupations — émergeantes ou persistantes — qui émergent dans la recherche actuelle. Les textes ainsi regroupés proposent des intuitions de recherche, des questionnements, des diagnostics, une vue d’ensemble de certaines tendances, des préoccupations émergentes et surtout, des manières d’appréhender certains nouveaux problèmes qui se posent aux chercheurs et aux praticiens d’aujourd’hui autour de l’éducation relative à l'environnement. Ces avenues de recherche apportent des problématisations inattendues ou renouvelées, des références à des auteurs émergeants et à des publications récentes ou méconnues du lectorat habituel. Un numéro thématique correspond ainsi à une sorte de polaroid, à un instantané de certaines avenues de la recherche en cours dans la Francosphère, en 2022, dans le vaste domaine de l’éducation relative à l'environnement. Pour recycler la belle expression d’Edgar Morin, les perspectives, les intuitions et les avancées réunies ici correspondent davantage à un échantillon de ce que l’on nommait autrefois le Zeitgeist, « L’Espritdu temps » (Morin, 1962). Ce numéro hors thème réunit seize articles. En soi, chacune des questions de recherche qui y sont posées indique une direction particulière, pose un état des lieux renouvelé sur un aspect particulier de nos champs d’intérêt ou de pratique. On y trouve en filigrane des références théoriques, des cadres conceptuels originaux, des méthodologies particulières, des avancées multidisciplinaires et interdisciplinaires. Car il s’agit bien de plusieurs disciplines qui sont convoquées dans nos travaux d’éducation relative à l'environnement. L’interdisciplinarité est inhérente à l’éducation relative à l'environnement ; c’est une dimension fondatrice, indispensable et féconde. Cette interdisciplinarité permet précisément de relier les connaissances et de convoquer des chercheurs actifs dans différents domaines. Durant toute sa carrière, Edgar Morin dénonçait la résistance à l’interdisciplinarité et les limites de la compartimentation des spécialités, autant dans la recherche que dans les classes ; il mettait en évidence « la non-pertinence de notre mode de connaissance et d’enseignement, qui nous apprend à séparer (les objets de notre environnement, les disciplines les unes des autres) et non à relier ce qui pourtant est "tissé ensemble"» (Morin, 1999, p. 8). Ce constat devrait alimenter nos réflexions en matière d’éducation relative à l'environnement. Ce numéro hors thème peut apporter une contribution significative en abordant des problèmes actuels ou persistants comme l’éducation en contexte de transition énergétique et de changements climatiques, mais également en soulignant l’importance d’instaurer de véritables dialogues de savoirs entre chercheurs et acteurs engagés, et enfin, en reliant l’éducation relative à l’environnement à d’autres dimensions comme l’éducation artistique, le travail social ou la pratique méditative par exemple. Ce sont ces dimensions épistémologiques, politiques, sociologiques, éthiques, artistiques et même spirituelles de ce champ de recherche qui sont ici explorées et approfondies, témoignant une fois de plus de la diversité, de la vivacité, mais aussi de la grande pertinence académique et sociale de ce domaine de recherche. Il suffit de proposer un nouvel angle face à une question environnementale (et/ou éducative peut-on ajouter) pour relancer tout un programme de recherches (Pelissolo et Massini, 2021). Les quatre premiers articles de la section « Recherches-Réflexions » traitent, de manières différentes mais complémentaires, des dimensions politiques de l’éducation relative à l’environnement. L’article de Laurence Brière et des membres de son équipe témoigne d’une posture critique …
Appendices
Bibliographie
- Beck, U. (2001), La société du risque. Sur la voie d'une autre modernité [traduction de l'allemand par Laure Bernardi]. Paris : Aubier
- Bihouix, P. et Mauvilly. K. (2022). Le Désastre de l'école numérique. Plaidoyer pour une école sans écrans. Paris : Seuil
- Cassuto, L. et Weisbuch, R. (2021). The New PhD. How to Build a Better Graduate Education. Baltimore : Johns Hopkins University Press
- Morin, E. (dir.) (1999). Relier les connaissances. Le défi de XXI e siècle. Paris : Seuil
- Morin, E. (2008). L’Esprit du temps. Paris : Armand Colin/Institut national de l'audiovisuel, collection. « Médiacultures »
- Pelissolo, A. et Massini, C. (2021). Les émotions du dérèglement climatique : Canicules, inondations, pollution. L'impact des catastrophes écologiques sur notre bien-être et comment y faire face ! Paris : Flammarion
- Vogelaar A.-E., Hale, B. W. et Peat, A (dirs.) (2018). The Discourses of Environmental Collapse : Imagining the End. London : Routledge, collection « Routledge Studies in Environmental Communication and Media »
- Wallenhorst, N. (2022). Qui sauvera la planète ? Les technocrates, les autocrates, ou les démocrates. Paris : Actes Sud, collection : « Questions de société »