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Si l’on veut bien mettre de côté des projections rapidement condamnées dans lesquelles, par exemple, l’anachronisme ou l’anthropomorphisme sont trop évidents, il reste que nous avons tendance à faire de nos objets de recherche des auberges espagnoles : nous y trouvons ce que nous y apportons. Souvent, nous produisons des mécanismes d’observation et d’explication qui forment un cercle herméneutique dont l’expression la plus poussée est le déni. Bien entendu, les choses ne sont pas si simples. Si vous pénétrez un monde déjà balisé par votre discipline, les gatekeepers se chargeront de faire le tri dans ce que vous apportez et observez. Or la richesse du présent numéro et la variété de ses contributions – regroupées en trois thématiques qui n’ont rien d’arbitraire – montrent précisément que les enjeux liés à la promenade ne sont ni stabilisés ni saturés de sens.

De fait, les terrains investigués sont à ce point multiples et singuliers, avec leurs évolutions spécifiques et complexes (où se croisent trois trajectoires : celle du milieu d’accueil, plus ou moins planifié, celle des promeneurs et celle des interactions) qu’eux-mêmes peuvent nourrir des perspectives nombreuses, plus ou moins indépendantes, que l’on n’a pas fini d’explorer avant que leur confrontation, peut-être inévitable, opère un tri et qu’un cercle herméneutique ne se referme.

Ainsi, pour les uns, la promenade est un lieu planifié visant l’asservissement consenti des pratiques quotidiennes de loisir à la grande machine du fonctionnement néolibéral de l’urbain et de la société de consommation (de type Disneyland). Pour d’autres, au contraire, le terrain montre que la promenade constitue l’un des derniers lieux de résistance et de réflexivité nous aidant à mettre à distance ce qui nous arrive et nous menace. Cela peut concerner l’expérience personnelle ou de groupe, à travers laquelle la découverte d’un quartier, aidée par exemple par la lecture d’un roman qui en structure le sens, fait passer le promeneur de ses premières observations à leur mise en mots, à leurs confrontations, à leurs réalités augmentées. Pour d’autres encore, le terrain expose des promenades de l’entre-deux, où les usagers font tout à la fois l’expérience de processus d’émancipation ainsi que de choix d’actions et de sens pouvant apparaître comme des exutoires, ces derniers participant des conditions de survie et d’adaptation du « système » auquel ils pensent échapper.

Il y a donc de la marge et des interstices réels dans lesquels peuvent s’exprimer nos obsessions de recherche. Les miennes m’amènent à considérer la promenade comme un lieu où le système d’action peut être compris comme une forme d’improvisation (en ce qui me concerne, l’improvisation en jazz). La promenade permet de réinterroger les rapports entre l’anticipation et la planification, et le sens de l’action, régis par l’imprévisibilité, l’incertitude, la surprise et l’autonomie de l’acteur. Mon hypothèse est que l’étude de la promenade peut nous aider à réfléchir sur les fondements d’une pensée planificatrice dans laquelle l’idée d’improvisation serait structurante, alors que, a priori, elle passe pour sa négation pure, plus exactement le signe de l’échec d’une action planificatrice (« nous en sommes réduits à improviser », ou « cela ne s’improvise pas, c’est un métier »[1]… comme s’il ne pouvait exister de métier de l’improvisation…).

De ce point de vue, la promenade m’apparaît un modèle fécond que j’évoquerai en quatre points.

1. Tout d’abord, la promenade constitue l’un des rares lieux où l’improvisation peut fonctionner, sans qu’elle soit pour autant le signe de l’échec de la planification. Au contraire, elle concerne une pratique dont l’objectif, du point de vue aménagiste, est de fonctionner sous le mode de l’improvisation… mais pour les autres. Que l’aménageur l’envisage comme un modèle d’action pour sa discipline est une autre affaire. Mais, au moins, l’improvisation n’est pas discréditée a priori.

2. Ensuite, si la promenade est un peu comme une auberge espagnole, elle n’est pas pour autant un ventre mou. Elle est aussi réflexive, et tous les styles de promenade – ou, dit autrement, toutes les projections de la tension entre planification et improvisation – ne sont pas également admissibles.

Le problème est de savoir quels modèles d’action solliciter pour rendre compte de la façon dont les gens se promènent, marchent et interagissent, mais aussi pour nous donner les moyens d’agir sur ces pratiques. Ainsi, nous aurions du mal à mobiliser le modèle de la marche militaire, même si l’on admet que, comme tout modèle réductionniste de la connaissance et de l’action, la réalité (ici, la marche en promenade), c’est le modèle, mais en beaucoup plus compliqué. Nous irions néanmoins dans ce cas bien au-delà de correctifs, d’altérations, de complications à apporter à ce modèle théorique pour qu’il soit à même de nous faire comprendre ce qu’est la promenade et y intervenir sans la trahir. Il est vrai que la limite est parfois ténue et difficile à justifier entièrement sans accepter une part d’arbitraire. Dans le cas présent, ce pourquoi nous trouvons la marche militaire totalement irrecevable et irréductible à un modèle réductionniste tient à ce qui fonde la possibilité de la promenade (imprévisibilité et incertitude comme ressources, absence d’anticipation, aventure, possibilité d’être l’auteur de sa propre action) et qui est incompatible avec ce qui fonde la possibilité de la marche militaire.

Cependant, si ce rejet nous semble aller de soi, il n’en reste pas moins que nous sommes encore pénétrés d’une conception de l’action réussie, plus proche du modèle de la marche militaire que de celui de la promenade entendue comme action improvisée. Nous sommes prompts à rejeter le modèle militaire, mais moins ce qui le fonde. Car nous restons attachés à l’idée que l’action planificatrice, pour être crédible, tend à construire un environnement prédictible, relativement stable pour que nous puissions croire aux effets attendus de l’action préconisée et ainsi fonder en raison l’anticipation. C’est ce qui permet de poser les conditions d’une action réussie. L’action et ses conséquences doivent être intentionnelles et correspondre aux effets attendus. En effet, on a rarement vu des conduites de projet se justifier, a priori, en affirmant se dérouler par une suite d’actions et de conséquences non intentionnelles, peu prévisibles; ce serait alors précisément avouer que « nous en sommes réduits à improviser ». Encore une fois, pour le planificateur, ces situations où « nous en sommes réduits à improviser » – donc totalement dépassés par ce qui nous arrive – constituent le signe même de l’échec.

Or la promenade comme objet de recherche nous invite à concevoir l’action, son sens, sa « raisonnabilité » d’une tout autre façon, plus proche de ce que la planification voit comme l’échec absolu. Au risque d’être provocateur, il faut admettre que l’improvisation rend compte de situations où l’action n’est ni purement intentionnelle ni totalement accidentelle. C’est dans cet entre-deux que celui qui improvise devient l’auteur de ce qu’il fait, tout en ne sachant qu’en partie ce qu’il fait. Il sait cependant que le sens de son action est appelé à se transformer par les conséquences de celle-ci, plongées dans un milieu qu’il contribue à fabriquer, mais qu’il ne maîtrise pas. Et c’est précisément cela qui l’intéresse.

On voit bien que cela est on ne peut plus éloigné de la pensée planificatrice moderne et de sa tendance à vouloir réduire ce qui nous arrive à ce que nous fabriquons. Une obsession de l’emprise et de la maîtrise en aménagement tend ainsi à assurer la durabilité d’une modernité fondée sur la rupture et la radicale nouveauté. Cette circularité de l’action n’est pas du tout ce qui caractérise l’action improvisée qui, elle, se nourrit de ce qui arrive, par l’écoute, pour capter la surprise, l’inattendu, sachant que l’action improvisée produira de l’imprévisible. Au lieu de parler d’action par séquences – qui caractérise notre pensée planificatrice – il faut plutôt concevoir l’action dans l’improvisation, comme un flux, un flux expérientiel. J’insiste sur la notion d’expérience, car souvent, pour faire comprendre la notion d’improvisation et tenter de la légitimer en planification, ce sont plutôt les notions d’expérimentation ou de bricolage qui sont mobilisées. Il est vrai qu’elles ont l’avantage de faire sentir le mouvement hésitant, les ajustements constants – d’une certaine façon : l’action en contexte d’incertitude –, tout en étant audibles pour l’imaginaire moderniste de la planification. La façon d’agir dans un monde où nous ne sommes pas sûrs de ce que nous faisons peut mobiliser la notion de bricolage, lorsque les moyens patentés ne sont plus disponibles (ce qui peut obliger à un renversement des priorités entre moyens et objectifs, développé en planification par les perspectives incrémentales). Elle peut aussi mobiliser la notion d’expérimentation lorsque nous sommes dans le doute au sujet de ce qui fonde l’action et son résultat attendu. L’expérimentation se trouve alors légitimée par ce à quoi on la renvoie : une démarche scientifique.

Or, en réalité, nous savons que nous ne sommes pas dans des conditions de laboratoire et que les ressorts des conditions de l’expérimentation, du passage à sa généralisation, de ce qui est validé dans le cas où l’expérimentation est un échec ou une réussite (les motivations, les hypothèses qui fondent l’action, les raisons d’agir, la nature des résultats attendus, les processus d’implémentation, le kaïros, les spécificités du milieu d’accueil), la façon dont se décide la sanction (échec ou réussite) sont fondamentalement de nature politique.

Dans l’expérience, il n’y a pas cette mise à distance entre celui qui agit et l’action sur lui-même, et ce, précisément parce que l’action ne se pose pas en termes de moyens et d’objectifs à atteindre, d’hypothèses à vérifier. L’improvisateur est engagé dans une oeuvre ouverte, admettant justement que l’enrichissement de l’action vient de ce qu’il s’ouvre à l’environnement et que la qualité de l’improvisation est souvent en raison inverse de sa reproductibilité. L’improvisateur ne fait pas de son expérience, dans laquelle il est totalement engagé, une expérience de laboratoire. Autrement dit, il ne met pas de filtre entre lui et les conséquences de son action, quitte à en être affecté précisément parce qu’il est réflexif.

3. La promenade peut ainsi nous aider à comprendre comment des acteurs agissent lorsque les intentions sont émergentes, implicites, fruits d’interactions subtilement coconstruites comme un phénomène collectif, sans pour autant qu’il y ait, a priori, anticipation, prévisibilité et planification par le haut. Ce qui résonne naturellement avec l’improvisation, mais aussi avec l’évolution du rôle du planificateur ces dernières décennies : de chef d’orchestre il est devenu animateur d’un processus de design collectif, d’une coconstruction de projets ou de politiques avec les publics concernés. D’où l’intérêt pour lui de comprendre la promenade comme une action improvisée. Cependant, même bienveillant à l’égard de cette façon d’agir, il commet souvent des erreurs d’interprétation. Croyant promouvoir l’improvisation, il en affadit le sens et la portée. Citons deux exemples : le statut de l’urgence dans l’improvisation et la notion d’erreur.

La plupart des situations où le planificateur est confronté à son échec – et pourtant sommé de réagir – sont des situations d’urgence. De sorte que, pour lui, l’improvisation n’est pas dissociable de l’urgence de l’action. En cela, d’ailleurs, il adhère à l’idée communément admise suivant laquelle l’improvisation relève de la spontanéité, de la simultanéité entre composition et exécution. Comme s’il ne pouvait y avoir d’urgence sans réponse improvisée et d’improvisation sans situation d’urgence, sans besoin de réponse instantanée. Bien sûr, une telle association n’est pas totalement fausse, à commencer par l’improvisation musicale : lorsqu’un musicien improvise, il est dans l’instant. Mais résumer le temps de l’improvisation à la réponse instantanée, c’est se limiter à la perception de celui qui écoute et non à celle de celui qui improvise, qui s’écoute tout en écoutant ce qui se joue. En faisant référence à l’improvisation en jazz, je dirais qu’un bon improvisateur peut bien sûr se laisser « posséder » par ce qu’il écoute, mais pour répondre, pour agir, il doit suspendre le temps chronologique, désolidariser ses enchaînements automatiques, et ce, pour réussir à prendre le temps – non pas tant pour réintroduire du calcul et de la prédictibilité dans son jeu, mais pour se laisser imprégner et s’engager dans l’action mi-consciente, mi-intentionnelle. Il doit arriver à improviser comme s’il avait « tout le temps devant lui »; bref, jouer, agir dans un temps suspendu et dilaté, ce qui est une condition du surgissement de l’inédit. Une technique toute simple est, par exemple, lors d’un tempo rapide (supérieur à 250 à la noire), de ne pas compter à la noire, mais à la blanche, voire à la ronde. Pourtant, il ne s’agit pas de jouer comme si le morceau était lent (une « ballade »), car le phrasé doit s’ajuster à la pulsation très rapide. En somme, même si le public le perçoit peu, l’improvisateur et le groupe sont dans la polyrythmie. Et cette façon de dilater le temps, de démultiplier le temps disponible, est la condition de la rencontre entre l’improvisateur et lui-même, entre lui-même et le groupe, et peut-être aussi une façon de se perdre ou, plus exactement, de s’abandonner. Il me semble que la promenade incarne cette expérience du temps suspendu.

Le second exemple est celui d’une notion essentielle en planification – parce qu’elle est non seulement une condition de l’apprentissage, mais aussi, sur un autre plan, parce qu’elle permet de distribuer les rôles de victime, d’innocent, de coupable, de responsable, qui structurent le discours aménagiste pour justifier l’action – soit la notion d’erreur. Or la pensée planificatrice la conditionne à la possibilité de prévoir. C’est précisément ce qui fait dire à ceux qui veulent promouvoir l’improvisation en planification que l’erreur n’existe plus dans l’improvisation, puisqu’il n’existe plus de prévisibilité. Lorsque je joue une partition totalement écrite, l’erreur peut exister, car la prédictibilité de ce que je dois jouer est totale. Mais si j’improvise, par définition, la prédictibilité n’existe plus, et donc avec elle la possibilité de l’erreur et donc de l’apprentissage.

Ces difficultés, certains peuvent les interpréter comme la preuve de l’impossibilité de transposer une pensée de l’improvisation en aménagement. D’autres y voient au contraire une opportunité offerte par l’improvisation de libérer l’aménagement des contraintes d’un pilotage par le haut, pour laisser travailler les dynamiques plus horizontales de coconstruction et de participation, qui diluent les responsabilités. Mais cette stratégie d’inclusion des acteurs dans une conduite de projet ne fait pas que diluer les responsabilités. Elle permet, d’une part, la multiplication des points de vue à partir desquels des effets indésirables, non prévus par certains acteurs, sont néanmoins prévisibles pour d’autres. Par conséquent, c’est la probabilité de commettre des erreurs qui diminue. Mais, d’autre part, nous pouvons aller plus loin et penser que c’est la possibilité même de l’erreur qui tendrait à disparaître.

Raisonnons de la même façon que lorsqu’est abordée la question des impacts environnementaux en aménagement. Un impact en aménagement survient lorsqu’un projet produit des conséquences non intentionnelles nuisibles, plus ou moins prévisibles, au point de remettre en cause la faisabilité sociale du projet. Mais si on les dit « nuisibles », elles le sont pour quel public? Sur quelles échelles spatiales et temporelles? Tant que ce public ne sera pas audible, légitime (que ce soit légalement ou par la contestation), l’impact sera invisibilisé et, à vrai dire, n’aura pas de réalité. Nous comprenons alors que les stratégies d’inclusion des publics (surtout ceux qui sont capables de bloquer le projet), par la négociation ou la participation, ont pour effet d’empêcher la possibilité que des conséquences non intentionnelles se transforment en impacts. En effet, qui parlerait en leur nom? Je pense qu’il en va de même pour l’erreur. Cette dimension un peu cynique de la participation en aménagement, qui tend à éliminer la possibilité de l’erreur dans la conduite de projet, peut être discutée, même si on peut la constater dans la réalité aménagiste. Cela dit, le débat sur le statut de l’erreur en aménagement est loin d’être clos pour autant, spécialement lorsqu’il s’agit de réfléchir aux fondements de l’action en contexte d’incertitude radicale et de menace.

Revenons cependant à cette idée que l’erreur disparaisse dans l’improvisation, que cette dernière soit vue en planification comme un danger mortifère ou une opportunité de refondation. Le problème est que cette idée repose elle-même sur une erreur. L’erreur existe bel et bien en improvisation (et par conséquent les possibilités d’apprentissage), mais nous devons la concevoir autrement que dans un écart à la prédictibilité et à l’intentionnalité. Cette réflexion s’applique à l’improvisation en jazz et à ses méthodes d’apprentissage par exemple, mais aussi aux différentes actions situées (répétitions, performances). Il me semble que réfléchir sur le statut de l’erreur dans le modèle de la promenade en regard de l’expérience jazzistique pourrait contribuer à travailler la pensée aménagiste en faisant passer le statut de l’improvisation de celui de signe d’échec à celui de principe organisateur de la discipline.

4. Ce que nous considérons comme un retournement de la pensée planificatrice ne doit pas être confondu avec la capacité de la planification à construire des territoires de l’improvisation. Beaucoup de contributions du présent ouvrage attestent de l’existence de promenades comme aménagements à la fois planifiés et structurants (où la balade peut s’avérer un exercice extrêmement codifié et où joue aussi le contrôle social), et autorisant cependant un certain degré d’improvisation. Or l’exemple probablement le plus radical de planification d’un territoire de l’improvisation, tel que la conçoit un planificateur, est le labyrinthe. En effet, il s’agit d’un territoire où tout est fait pour que l’usager soit « déboussolé », sans possibilité d’apprendre, où l’erreur dans l’action est constante, où la construction d’un schéma anticipateur est impossible, où l’écoute, l’attention à la différence ne sont d’aucune utilité, parce qu’il n’y a pas la possibilité de « prises » sur l’environnement. Le labyrinthe est ainsi la représentation de l’ignorance, sans fin. Seulement, pour le planificateur, cette ignorance fait que « nous en sommes réduits à improviser », alors que pour l’improvisateur, cette ignorance fait qu’il lui est impossible d’improviser.

C’est cette contradiction de point de vue qu’il nous faudrait fouiller. Pour une part, elle renvoie aux dimensions cognitives évoquées dans les points précédents. Mais, pour une autre part, elle révèle ce que nous avions peu vu jusqu’à présent : la dimension stratégique et relationnelle de l’improvisation. Cet aspect est difficilement audible pour l’aménagement, puisque l’improvisation est censée incarner l’échec et l’inefficacité de l’action.

Pour en prendre la mesure, nous pouvons par exemple faire un pas de côté et nous intéresser à une « promenade militaire » d’un genre très spécial, que l’on retrouve aujourd’hui théorisée dans les stratégies de guérilla urbaine. Très schématiquement, il s’agit de casser les codes de l’anticipation de l’adversaire pour se construire les possibilités de l’improvisation, pour « pouvoir être là où l’on ne s’y attend pas ». Bien sûr, ce « on », c’est plutôt l’autre, l’adversaire, sans oublier que dans un contexte moins belliqueux, il renvoie aussi à l’improvisateur et au groupe. Il s’agit donc de construire un système d’action chez l’adversaire qui l’amène toujours à se tromper et sans pouvoir apprendre dans les décisions qu’il prend, comme s’il était précisément dans un système d’action labyrinthique. Au moins cet exemple constitue-t-il une preuve que l’improvisation peut incarner autre chose que les errements et l’impotence. Reste à savoir comment notre compréhension de la promenade peut intégrer cette efficacité stratégique sans que le cadre d’interprétation nous enferme dans l’expérience de l’adversité et de la mort.