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Ainsi que l’exprime Stéphane Doumbé-Billé dans ses propos introductifs, La régionalisation du droit international est un ouvrage collectif s’inscrivant dans les intérêts de recherche du Centre de droit international (Université Lyon 3), dont il est le directeur. À cet égard, l’objectif du livre est d’étudier l’évolution récente du droit international public à travers le paradigme de la régionalisation, tout en s’éloignant de la dualité entre régionalisme et régionalisation qui a déjà fait couler beaucoup d’encre. Partant, le postulat qui guide les différents contributeurs est que la présence du phénomène régional dans la sphère du droit international public, et son essor, est la manifestation de la régionalisation. De ce fait, c’est l’étude des composantes du phénomène régional, dans une perspective évolutive et dynamique, qui fait l’objet de cet ouvrage et lui donne son originalité.
L’ouvrage est divisé en trois parties, une première plus générale traitant de six domaines de la régionalisation et deux autres plus spécifiques permettant une étude plus approfondie des paramètres du phénomène régional et portant respectivement sur la portée de la régionalisation ainsi que sur les interactions engendrées par celle-ci. Le dynamisme marquant le phénomène de la régionalisation s’avère présent tout au long de l’ouvrage. De façon explicite ou non, les auteurs font fréquemment référence à la notion de « fécondation croisée », tant institutionnelle que normative, qui, par des échanges entre les ordres juridiques, permet la réalisation et l’enrichissement du droit international et du droit régional.
Ces échanges constants s’opèrent entre le droit international et le droit régional et entre les régions elles-mêmes, ainsi que le démontre notamment, dans la première partie, la contribution de Paul Tavernier portant sur la régionalisation du droit international des droits de l’homme. Devant l’exigence d’universalisme des droits de l’homme, ce dernier note qu’en l’absence d’une juridiction universelle ayant compétence en la matière, la mise en place des mécanismes régionaux de protection a permis une véritable régionalisation de la substance des droits protégés. Paradoxalement, il soulève que le phénomène de « fécondation croisée » entre régions, qui se produit par la voie des mécanismes juridictionnels, entraîne l’apparition d’un droit commun des droits de l’homme basé sur les instruments régionaux. Enfin, il constate que la régionalisation du droit international des droits de l’homme est un phénomène positif tant et aussi longtemps qu’il y a également « fécondation croisée » entre l’universel et le régional.
Dans la seconde partie, les quatre contributions mettent en exergue divers aspects liés à l’étendue et aux degrés de la régionalisation. Le texte de Kiara Neri est particulièrement intéressant à cet égard, car il analyse un phénomène découlant de celui faisant l’objet de l’ouvrage, la sous-régionalisation, en tentant de déterminer s’il s’agit d’un phénomène utile ou nuisible au droit international. En recensant les domaines dans lesquels la sous-régionalisation s’opère ainsi qu’en effectuant un bilan géographique de son efficacité du côté des Amériques et de l’Afrique, cette contribution offre un regard complémentaire à celui de plusieurs autres textes de l’ouvrage.
Dans la troisième partie, le texte de Liliana Maria Haquin Sáenz est l’une des contributions qui permettent d’apprécier cette complémentarité. L’auteure répond à la question de savoir si la multiplication des organisations sous-régionales en Amérique contribue au renforcement de la coopération internationale, notamment en matière pénale et en matière de droits de l’homme, ou si, au contraire, cette multiplication est la preuve que la régionalisation est devenue obsolète en raison de l’impossibilité d’obtenir un consensus au niveau régional. Sa conclusion est mitigée. Sans l’énoncer explicitement, en traitant des échanges constants entre organisations sous-régionales et organisations régionales, ainsi qu’entre les organisations sous-régionales elles-mêmes, Haquin Sáenz s’inscrit dans la ligne directrice de l’ouvrage en démontrant le dynamisme qui sous-tend les relations institutionnelles.
Dans la troisième partie de l’ouvrage, trois contributions portent sur les interactions matérielles amenées par le phénomène de la régionalisation. C’est dans cette section que la régionalisation ainsi que les interactions entre régionalisation et universalisme apparaissent plus limitées ou du moins en cours d’élaboration. C’est particulièrement le cas dans le domaine du droit des investissements. Baba Hamady Deme, qui analyse le développement de la régionalisation dans ce domaine, conclut que, bien que celle-ci permette l’universalisation des normes, ce processus est limité par la nécessité de renforcer la régionalisation et de rationaliser un droit international des investissements segmenté.
Somme toute, La régionalisation du droit international se révèle un ouvrage complet dont la complémentarité des contributions est apparente. Le livre nous apparaît utile pour ceux qui s’intéressent à la régionalisation en tant que phénomène juridique permettant la réalisation du droit international. Il l’est aussi pour ceux qu’intéresse le droit régional relatif à un champ ou à une région spécifiques. La lecture de cet ouvrage sera pour ces personnes l’occasion d’élargir leurs intérêts en constatant les nombreux dialogues qui s’établissent tant verticalement qu’horizontalement. Nous devons tout de même souligner des lacunes sur le plan de la présentation (coquilles, erreurs grammaticales, hiérarchisation des parties de texte ne correspondant pas à celles nommées par l’auteur dans le corps du texte) qui témoignent d’une relecture inadéquate, ce qui nuit à la qualité de l’ensemble.