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Le titre n’est pas très clair. La suite ne l’est pas beaucoup plus, mais, en dépit d’une certaine confusion, ce livre ne manque ni d’à-propos ni d’intérêt. Il traite de spiritualité autant que de politique internationale. On peut donc s’étonner de le voir recensé ici, mais il défend un point de vue conservateur au sens le plus classique de ce terme, et ce point de vue mérite d’être rappelé.
D’entrée de jeu, l’auteur soutient deux positions. D’une part, les femmes et les hommes ont besoin de croire au sens et aux valeurs de religions révélées ; ils ont également besoin de l’encadrement d’une culture et de traditions partagées. D’autre part, les sociétés s’autogouvernant et s’autosuffisant doivent être de taille réduite de façon que les citoyens puissent en garder la maîtrise. L’auteur justifie la première position en soulignant que les religions révélées offrent des perspectives plus sensées et plus mobilisatrices que les idéologies séculières, que les traditions soutiennent les volontés et les rassemblent dans une vision commune, qu’on ne peut faire l’économie de rituels collectifs. Non seulement les religions et les traditions soutiennent la responsabilité morale et politique des individus, mais elles peuvent aussi les unir dans l’action. La seconde position repose sur la nécessité de comprendre la société et les relations sociales dont on dépend, ce qui devient impossible avec l’élargissement des marchés et des unités politiques. Il faut pouvoir saisir les conséquences de ses décisions politiques ou économiques pour être un citoyen libre et responsable. L’auteur revendique ici l’héritage de son maître, Leopold Kohr, qui fut aussi le maître de Schumacher (Small is Beautiful, 1973). Il ne nie pas l’urgence d’une gouvernance internationale, mais insiste sur le principe de subsidiarité comme sur l’importance des pouvoirs que l’on devrait accorder aux régions et aux localités. On voit que les deux positions soutenues par l’auteur sont, selon lui, des conditions pour les hommes et les femmes d’exercer des responsabilités morales et politiques.
Bien qu’il en parle beaucoup, la notion de Second Enlightenment n’est pas très bien définie, probablement parce qu’elle embrasse trop d’espoirs. Il s’agit d’une ouverture de la raison aux valeurs spirituelles, d’une démocratie à l’écoute des multiples voix de la société et non limitée à un débat parlementaire et national, d’un dialogue jamais arrêté, d’une valorisation sur le plan holiste et de la connectivité qui ne connaît aucune frontière.
Ce livre souffre de carences graves. D’abord, il semble ne pas avoir été relu attentivement. Certaines propositions ne font aucun sens. Plusieurs sources de l’auteur sont journalistiques et ne font pas autorité. Plus gravement, l’auteur touche à trop de sujets et perd son lecteur. Il se réfère au multiculturalisme pour le critiquer sans préciser ce qu’il entend par là, alors qu’il s’agit d’un ensemble de politiques très variées. Il se réfère à l’évolution, mais considère que celle-ci poursuivrait une fin, ce qui demanderait pour le moins une explication. Il souligne les insuffisances du patriotisme constitutionnel, mais le définit comme un attachement à la démocratie et non aux valeurs libérales.
En dépit de tous ses défauts, ce livre nous interpelle. On souhaiterait qu’il soit réécrit de façon plus ordonnée, car il critique les platitudes de l’individualisme libéral et de la raison instrumentale.