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Depuis une décennie, les États-Unis affichent des changements notables au sein de leur programme de sécurité. La montée de la violence terroriste, le militantisme islamique, la prolifération des armes de destruction massive, l’instabilité des gouvernements des puissances émergentes, la multiplication des conflits ethniques, la vulnérabilité des territoires à des catastrophes naturelles sont quelques-uns des défis qui imposent de nouvelles exigences aux forces armées des États-Unis. Ce nouveau programme met à l’épreuve les talents, la ténacité et l’imagination des stratèges de l’administration américaine.
Tous les quatre ans depuis la fin de la guerre froide, le Pentagone publie un Quadriennal Defense Review qui présente les capacités, les ressources et les programmes associés à la défense des États-Unis. Depuis sa parution, cette revue de la défense américaine fait l’objet de critiques et d’analyses d’établissements universitaires, d’agences gouvernementales et de groupes de réflexion aux États-Unis. Ces derniers tentent d’apporter une contribution originale à la direction des politiques de défense du pays en réévaluant le concept de menace et de sécurité et en démontrant l’inadéquation de l’appareil militaire. Cet ouvrage s’inscrit dans le cadre de cet ensemble de réflexions en cherchant à faire évoluer la politique de défense des États-Unis.
Le livre regroupe la contribution de 18 membres de l’Institut d’études stratégiques nationales de l’Université de défense nationale des États-Unis. Il rassemble une vaste expertise régionale et thématique afin de présenter un aperçu général des défis que les États-Unis ont à relever au sein d’un environnement global. L’ouvrage aborde sept thèmes sous autant de chapitres, dont la résistance aux actes terroristes, la riposte aux menaces de prolifération d’armes de destruction massive, la protection du territoire des États-Unis, la neutralisation des conflits des régions instables, l’engagement d’autres grandes puissances militaires, l’adaptation des alliances et des partenariats ainsi que la transformation de l’organisation militaire et de la défense stratégique des États-Unis.
Les auteurs commencent chaque chapitre en présentant le problème que pose chaque thème pour les États-Unis. Ils tracent ensuite un portrait du contexte historique qui préside à l’émergence d’une menace. Enfin, les auteurs abordent de façon critique la réponse des États-Unis à cette menace.
Il existe de nombreuses études sur les stratégies militaro-diplomatiques des États-Unis. De façon générale, ces études soulignent les problèmes dans la direction de la gestion du programme de sécurité des États-Unis. Force est de reconnaître toutefois qu’il existe peu d’études critiques émanant de participants au processus de décision de l’administration américaine. L’aspect remarquable de l’ouvrage repose sur la contribution de personnes ayant exercé des fonctions au sein du Secrétariat à la défense, du Secrétariat d’État et du Conseil national de sécurité des États-Unis. Plusieurs auteurs ont également servi dans les forces armées des États-Unis à l’occasion d’opérations militaires à l’étranger. Il en résulte que tous les auteurs ont une grande expérience des mécanismes de décision de l’appareil administratif des États-Unis, sont remarquablement documentés et affichent une connaissance aiguë des enjeux et intérêts qui permettent une analyse approfondie des problèmes de sécurité des États-Unis.
Tous les textes soulignent les faiblesses, limites, erreurs ou impacts des stratégies militaires des États-Unis. Bien qu’il existe peu de liens entre les chapitres de l’ouvrage, trois éléments semblent se dégager. D’abord, les textes permettent de mieux comprendre le rôle d’une information de qualité dans la prise de décision. À cet égard, le chapitre de McMillan et Cavoli sur le terrorisme islamique est remarquable de nuances. Ensuite, tous les auteurs soulignent la nécessité d’établir des mécanismes de coopération avec des partenaires internationaux et intra-gouvernementaux dans le but d’influencer les choix stratégiques et de construire des relations politiques pacifiques et constructives. Cela est particulièrement vrai dans l’analyse des relations des États-Unis avec l’Inde, la Chine et la Russie. Enfin, la force ne doit être utilisée qu’en dernier recours. Plusieurs auteurs soulignent que les guerres en Irak et en Afghanistan ont créé d’immenses obstacles à la constitution d’une politique de défense cohérente aux États-Unis.
Les textes permettent d’étudier les effets des décisions passées des États-Unis sur l’espace géographique mondial et le jeu politique international. Tous les auteurs insistent, à l’aide de nombreux exemples, tableaux, cartes et figures, sur la nécessité de réexaminer les politiques de défense des États-Unis et d’entreprendre les réformes appropriées. Les États-Unis doivent développer une couverture stratégique beaucoup plus nuancée que par le passé en matière d’engagement et de dissuasion. Chaque chapitre insiste sur la nécessité de créer un nouveau maillage global de relations. Une telle démarche permettrait de mieux évaluer le concept de menace et d’élaborer des standards et mécanismes internationaux permettant à différentes forces militaires d’entreprendre des actions communes effectives sur des défis stratégiques majeurs incluant la construction d’États de droit et les défis environnementaux.
Depuis 2001, les politiques et initiatives organisationnelles du département de la Défense des États-Unis ont été erratiques et marquées par une pensée manichéenne issue de la guerre froide où l’ordre global et la protection des intérêts vitaux des États-Unis se conjuguent avec le contrôle d’un « arc d’instabilité » et les stratégies afférentes d’endiguement héritées des théories de géographie politique de Mackinder et Spykman. La bêtise qui a caractérisé les décisions militaires américaines sous l’administration Bush trouve opposition au sein des forces armées des États-Unis. De l’avis des auteurs, l’environnement géostratégique global sera de plus en plus caractérisé par deux tendances interreliées : l’accélération du changement résultant des processus globaux et la prééminence des États-Unis à titre d’hyperpuissance.
Les auteurs adressent une critique constructive aux politiques militaires des États-Unis. Bien que le chantier demeure immense, force est de reconnaître que le livre apporte d’importants progrès à la solution de sept défis stratégiques majeurs.