IntroductionLe Canada après le 11 septembre : Les défis d’une ère nouvelle[Record]

  • Kim Richard Nossal

De l’avis de plusieurs, les attentats terroristes du 11 septembre ont annoncé le début d’une nouvelle ère en politique internationale. Les attentats et leurs conséquences ont définitivement sonné le glas de la période d’après-guerre froide et marqué l’avènement d’une nouvelle façon d’aborder les relations internationales. Il n’y a pas encore de nom officiel pour cette période, et peut-être sera-t-elle simplement connue de la même manière que la période qui a suivi la chute du mur de Berlin et la fin de la guerre froide : ce sera « l’après-11 septembre », tout comme, il y a dix ans, la guerre froide est devenue « l’après-guerre froide ». Il est également possible qu’un autre événement marquant se produise et laisse son nom à cette époque, comme ce fut le cas pour la période de « l’entre-deux-guerres », qui ne peut être appelée ainsi qu’après le début d’une autre « grande guerre » en 1939. Si cette période post-11 septembre n’a pas encore de nom, et ce même un an après son début, il n’y a pas l’ombre d’un doute à l’effet que les relations internationales ont changé de façon importante depuis les attentats, que ces changements sont lourds d’implications pour un acteur de soutien sur la scène internationale tel que le Canada, et que les défis inhérents à cette nouvelle donne sont maintenant bien définis. Il y a eu tout d’abord comme conséquence immédiate des attentats les défis sur la politique étrangère canadienne. Qui plus est, le Canada, comme tous les autres pays, s’est tout de suite vu confronté à une soudaine et abrupte résurgence d’une vision manichéenne du monde par les Américains, pour qui toute la planète sans exception était divisée entre « les bons » et « les méchants ». Cette vision sans compromis du gouvernement des États-Unis, partagée par bien des Américains, a été exprimée de façon on ne peut plus claire par le président George W. Bush, peu après les attentats : « Soit vous êtes avec nous, soit vous êtes avec les terroristes », avait-il martelé, établissant ainsi pour le reste du monde un jalon important de la politique étrangère en ce nouvel âge. En ce sens, le 11 septembre a soulevé, pour le Canada comme pour les Canadiens, certaines questions en rapport avec la politique étrangère. À la fois en verbe et en action, quelle serait la place du Canada dans les plans de Bush ? Plus important encore, qu’impliquerait être « avec » les États-Unis dans leur guerre contre le terrorisme ? Jusqu’à quel point être « avec » les États-Unis (ou du moins en avoir l’air) demanderait une réorientation de la politique étrangère canadienne déjà en vigueur ? Pour la plupart des Canadiens, les attentats ont suscité un vif élan de sympathie et d’appui envers les États-Unis. Un exemple parmi tant d’autres de cette sympathie est l’aide qui a été offerte à nos voisins du sud: l’hébergement des nombreux passagers des vols qui ont été déviés vers le Canada lors de la fermeture de l’espace aérien américain, les dons de sang, de provisions et d’argent. De plus, certains se sont rendus à Ground Zero dans le but de fournir de l’assistance technique et humanitaire. Une autre manifestation de la solidarité des Canadiens a pris la forme d’un affichage très répandu de drapeaux américains dans les jours qui ont suivi le 11 septembre. Ce phénomène est aussi inusité, particulièrement au Canada anglais, que symbolique. Pour le gouvernement canadien, toutefois, l’affaire allait au-delà de l’émotivité, car la vision manichéenne du Président avait des implications concrètes pour un Premier ministre qui, depuis 1993, s’efforçait de garder …

Appendices