Abstracts
Résumé
Cet article examine la juridicisation de deux questions politiques internationales, à savoir la question des droits de l'homme en Turquie (incluant la question kurde) et la question chypriote. La Turquie, membre du Conseil de l'Europe et signataire de la Convention européenne des droits de l'homme, a reconnu en 1987 le droit de recours individuel devant la Cour européenne des droits de l'homme et, en 1990, la juridiction obligatoire de la Cour. Depuis, nous assistons à une croissance exponentielle du nombre de requêtes individuelles introduites devant la Cour contre la Turquie émanant de citoyens turcs, d'origine kurde pour nombre d'entre eux, et de Chypriotes grecs. Elles concernent les violations massives des droits de l'homme en Turquie (particulièrement en raison de la répression du séparatisme kurde) et la politique chypriote de la Turquie qui occupe ce qu'elle reconnaît comme la « République turque de Chypre-nord » dont l'accès est interdit aux Chypriotes grecs.
La Turquie se trouve ainsi confrontée à la constitution d'un « espace international des droits de l'homme » dans lequel les individus parviennent à se faire entendre et à mettre en difficulté certains États qui, à l'instar de la Turquie, avaient repoussé jusque-là toute pression extérieure comme attentatoire à leur souveraineté. Les condamnations et le paiement de dommages et intérêts à des individus ordonnés par une instance supranationale remettent en cause les politiques de la Turquie et, dans le cas Loizidou, la contraindrait, si elle acceptait de payer, ce qu'elle n'a toujours pas fait, à dénier toute souveraineté à la « RTCN » et à endosser l'entière responsabilité de la situation actuelle à Chypre. Alors que le débat fait rage sur une éventuelle adhésion de la Turquie à l'Union européenne, les requêtes devant la CEDH donnent au problème une nouvelle dimension et montrent que les citoyens turcs et chypriotes expérimentent déjà leurs droits de citoyens européens.
Abstract
This paper considers the juridicization of two political problems, the human rights question in Turkey (including the Kurdish problem) and the Cyprus problem. Turkey, as a member of the Council of Europe and signatory of the European Convention on Human Rights, recognized in 1987 the individual right of application to the European Court of Human Rights and, in 1990, the binding jurisdiction of the Court. Since that, we observe an exponential growth of the number of applications v. Turkey introduced to the Court by Turkish citizens, some of Kurdish origin, andGreek Cypriots. They concern massive violations of human rights in Turkey (particularly because of the repression against Kurdish separatism) and Turkey's Cypriot policy, i. e. the occupation and recognition of the so-called « Turkish Republic of Northern Cyprus » which access is denied to Greek Cypriots.
Turkey is face to face with the constitution of an « international human rights area » in which the individuals succeed to make them selves heard and to make difficulties to states who, as Turkey, have refused all external pressures as a challenge to their sovereignty. The condemnations and payments of compensations and damages to individuals sentenced by a supranational institution are summoning the policies of Turkey and, in the Loizidou case, would force it, if it accepts to pay, that it has not done, to deny sovereignty to the « TRNC » and to accept the entire responsability of the current situation in Cyprus. At the time when the debate on Turkey's candidacy to the European Union is blazing, the applications to the ECHR give to the problem a new dimension and show that Turkish and Cypriot citizens are already using their European citizens' rights.