Enfances, Familles, Générations
Number 25, 2016 Enfance et famille autochtones Guest-edited by Christiane Guay and Sébastien Grammond
Table of contents (12 articles)
Enfance et famille autochtones
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Les enjeux de la recherche concernant l’enfance et la famille autochtones
Sébastien Grammond and Christiane Guay
AbstractFR:
Cet article fait le point sur les politiques coloniales qui ont eu des impacts dévastateurs sur les enfants et les familles autochtones, dont la politique des pensionnats autochtones et l’application des régimes de protection de la jeunesse. Il examine les efforts qui sont déployés depuis une quarantaine d’années pour adapter les institutions étatiques qui affectent les enfants et les jeunes autochtones. Enfin, il donne un aperçu des enjeux culturels et identitaires auxquels font face les enfants, les jeunes et les familles autochtones, notamment concernant le territoire, les conceptions de la famille élargie et les pratiques parentales. Il poursuit par une réflexion sur la nécessaire autodétermination des peuples autochtones dans les domaines liés à l’enfance et à la famille.
EN:
This article presents a review of the colonial policies that had devastating consequences on Aboriginal children and families, among which residential schools and the enforcement of youth protection regulations. It examines the efforts that have been made in the last forty years to adapt the State institutions that impact children and young Aboriginals. It also gives an overview of the cultural and identity-related issues facing Aboriginal children, youths and families, especially as regards the land, views of the extended family and parenting practices. It follows with considerations on the necessary self-determination of Aboriginal peoples in the fields relevant to childhood and the family.
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Pensionnats autochtones : impact intergénérationnel
Jacinthe Dion, Jennifer Hains, Amélie Ross and Delphine Collin-Vézina
AbstractFR:
Les pensionnats autochtones sont des institutions ayant été en activité de la fin du 19e siècle à la fin du 20e siècle, que des enfants autochtones ont été forcés de fréquenter au Canada. Des enquêtes ont démontré que plusieurs jeunes fréquentant ces institutions y ont été victimes de négligence et de mauvais traitements. Les conséquences négatives découlant des mauvais traitements durant l’enfance ont été amplement documentées, notamment à travers les travaux de la Commission de vérité et réconciliation du Canada. Néanmoins, très peu d’études quantitatives ont été réalisées à ce sujet. L’objectif de cette recherche est de documenter, chez une population autochtone du Québec, les impacts associés à la fréquentation des pensionnats chez les survivants, mais également chez leurs enfants devenus adultes. Au total, 301 participants autochtones ont été rencontrés. Parmi les participants, 26,9 % ont fréquenté les pensionnats et 45,5 % ont un parent qui les a fréquentés. Les résultats indiquent que la fréquentation des pensionnats est associée à une probabilité plus élevée d’avoir vécu des traumas (agression sexuelle, agression physique, violence conjugale, etc.) dans l’enfance ou à l’âge adulte. Les résultats révèlent également que la fréquentation des pensionnats est associée à plusieurs difficultés, notamment à la consommation problématique d’alcool ou de drogues, au jeu problématique et à la détresse psychologique. Les résultats de cette étude soulignent l’importance de tenir compte des conséquences des traumatismes historiques et intergénérationnels liés aux pensionnats dans notre compréhension de la situation actuelle des peuples autochtones du Canada.
EN:
Residential schools were institutions that operated from the late 19th century to the late 20th century that Indigenous children in Canada were forced to attend. Investigations have shown that many of the youths attending these institutions were the victims of negligence and abuse. The negative impacts of abuse during childhood have been well documented, in in particular by the work of the Truth and Reconciliation Commission of Canada. Nevertheless, few quantitative studies on this topic have been conducted. The goal of this research is to document the impacts of residential school attendance – both on former attendees and on their adult children – for a population of Québec Indigenous people. In all, we met with 301 Indigenous participants. Among them, 26.9% attended a residential school, and 45.5% had a parent who frequented one. The results indicate that residential school attendance is associated with a higher likelihood of having experienced trauma (sexual abuse, physical abuse, spousal abuse, etc.), either as a child or as an adult. The results also show that residential school attendance is associated with several problems such as excessive drug or alcohol consumption, problem gambling, and psychological distress. The study highlights the importance of taking into account the consequences of historical and intergenerational trauma stemming from residential schools in our understanding the current situation of Indigenous peoples in Canada.
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« Le tahitien, c’est pour dire bonjour et au revoir » : paroles d’enfants sur une langue autochtone en sursis
Marie Salaün, Jacques Vernaudon and Mirose Paia
AbstractFR:
Tahiti est l’île principale d’un archipel du Pacifique Sud, la Polynésie française, lié, sous des statuts divers depuis 1842, à une République française éloignée de 16 000 kilomètres. S’ils n’ont donc pas été minorisés démographiquement, ni spoliés de leurs terres, dans les proportions que l’on connaît ailleurs, en Amérique et dans le Pacifique, les Tahitiens (environ 80 % d’une population de l’île estimée à 183 000 habitants aujourd’hui) ont incontestablement été victimes d’une politique d’assimilation qui a connu une accélération au début des années 1960, avec la nouvelle vocation de ce territoire à devenir le lieu des essais nucléaires français. Exposés plus massivement aux institutions importées de Paris (justice et école), plus urbanisés et dépendants de l’emploi salarié, les Tahitiens ont eu tendance alors à projeter leurs enfants dans un avenir francophone au sein duquel les langues polynésiennes étaient d’autant moins transmises qu’elles apparaissaient comme préjudiciables à l’intégration sociale. De fait, la déperdition d’une génération à l’autre est patente : si 52 % des 75-79 ans déclarent une langue polynésienne comme étant la plus parlée en famille, ce n’est le cas que de 17 % des 15-19 ans en 2012.
En réaction à l’ambition souvent hégémonique de la langue et de la culture françaises, et pour préserver ce qui peut l’être de la langue et de la culture tahitiennes, une politique visant à promouvoir cette langue et cette culture à l’école a été mise en application depuis le début des années 1980.
Basée sur des enquêtes empiriques auprès des enseignants, des parents et des enfants eux-mêmes (notamment via le programme de recherche « École plurilingue outre-mer » de l’Agence nationale de la recherche française en 2008-2012 et le programme de recherche « Les langues entre l’école et la famille : représentations et pratiques linguistiques contemporaines des enfants de CM2 à Tahiti » du Ministère de la Culture français en 2013-2014), notre contribution interroge les enjeux de la complémentarité entre école et famille élargie dans la transmission linguistique et culturelle, avec une attention toute particulière pour les représentations enfantines des langues que parlent les enfants, des langues qu’ils entendent autour d’eux, et des langues qui seront les leurs plus tard.
EN:
Tahiti is the main island of the South Pacific archipelago French Polynesia that has been linked since 1842 through various statutes to the French Republic, 16,000 kilometres away. And while they have never been a demographic minority, nor had their land taken away to the same extent as occurred in the Americas and the Pacific, Tahitians (about 80% of the island’s population of about 183,000 people) have incontestably been victims of a policy of assimilation that accelerated in the early 1960s, as the territory became the French nuclear testing ground. With much greater exposure to institutions imported from Paris (legal and educational), and more urbanized and dependent on salaried employment, Tahitians began to project their children into a French-speaking future, within which the transmission of Polynesian languages came to be seen as prejudicial to social integration. As a result, the loss of these languages has become obvious: while 52% of people 75 to 79 years old say they speak a Polynesian language in the family, this is true of only 17% of people 15 to 19 years old.
As a reaction to the often hegemonic ambition of the French culture and language, and to preserve what can be saved of the Tahitian language and culture, a policy aimed at promoting this language and culture at school was implemented in the early 1980s.
Based on empirical studies carried out among teachers, parents, and the students themselves, in particular through programs conducted by the French National Research Agency in 2008–2012, and the French ministry of culture in 2013–2014, this article examines the issues of the complementarity between school and extended family in the transmission of language and culture, with a particular focus on children’s representations of the languages they speak themselves, the languages they hear around them, and the languages that they will learn later.
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Significations accordées par des jeunes et des enseignants inuit à leur vécu familial, scolaire et communautaire au Nunavik
Tatiana Garakani
AbstractFR:
Les familles autochtones ont vécu des transformations et des ruptures profondes à la suite des effets néfastes du colonialisme, des relocalisations forcées et des écoles résidentielles. Malgré de nombreuses initiatives et d’importants progrès, les séquelles perdurent dans les communautés.
En nous appuyant sur une recherche participative effectuée au Nunavik, nous examinons comment la famille, la communauté, la langue inuktitut et la culture inuit ainsi que la question de l’identité et la vision de l’avenir sont évoquées dans les propos des élèves et de leurs enseignants inuit. L’étendue de cette recherche, menée sur trois ans, nous a permis d’assurer une présence continue dans l’école et dans la communauté, instaurant ainsi une relation de confiance, en plus de donner le temps nécessaire aux jeunes et aux enseignants de participer et de contribuer à leur rythme et selon leurs préférences.
Les élèves interrogés expriment leur sentiment de vivre à la croisée de deux mondes (inuit et non inuit). Ils tentent de trouver un équilibre tout en revendiquant leur langue et leur culture, et partagent les mêmes craintes que les adultes sur l’avenir de leur communauté. De plus, leur incapacité à bien maîtriser l’inuktitut les empêche de développer des liens significatifs avec les aînés. Les enseignants comme les élèves souhaitent retrouver l’implication plus soutenue des familles et de la communauté.
EN:
Aboriginal families have suffered transformations and long-term disruptions following the nefarious effects of colonialism, forced relocation and residential schools. Despite many efforts and considerable steps forward, the aftermath is still felt in communities.
Based on participatory research in Nunavik, we examine the expressions of family, community, the Inuktitut language and Inuit culture as well as of the topic of identity and visions of the future in the statements of Inuit students and teachers. The scope of this study, which was carried out over three years, allowed us to maintain a continuous presence in the school and the community and to thus foster relationships based on trust. It also allowed time for the youths and the teachers to participate and contribute according to their own rhythm and preferences.
The students we spoke with express feelings of living at the intersection of two worlds (Inuit and non-Inuit). They try to strike a balance while asserting their language and their culture, and they share the same fears as the adults do concerning the future of their community. Furthermore, their inability to fully master Inuktitut prevents them from developing significant relationships with the elders. Teachers and students alike want to see more commitment on the part of families and the community.
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Regard sur l’interaction de l’urbanisation, du traumatisme historique et de l’identité culturelle parmi la jeunesse autochtone au Canada
Elizabeth Fast, Jennifer Nutton, Mireille De La Sablonnière-Griffin, Anna Kozlowski, Nahka Bertrand, Swaneige Bertrand and Jennifer Mitchell
AbstractFR:
L’urbanisation est une forme de colonisation actuelle des peuples autochtones (Taylor et Bell, 2004). Elle est, d’une part, une conséquence d’un traumatisme historique, soit l’aboutissement des pertes subies par les peuples autochtones au Canada en raison du colonialisme, qui s’est traduit par des manifestations comprenant une incidence accrue de dépendances, de troubles de santé mentale et de violence familiale (Code Criminel (R.S.C., 1985, c. C-46); Brave Heart, 1998; Evans-Campbell, 2008; Wesley-Esquimaux et Smolewski, 2004). D’autre part, elle est une manifestation des conditions colonialistes actuelles, comme le manque d’infrastructures permettant aux gens de demeurer dans leur communauté pour travailler, suivre un enseignement supérieur ou, dans de nombreux cas, recevoir des soins médicaux vitaux. À l’aide d’entrevues réalisées dans le cadre d’une étude plus vaste qui explorait l’identité culturelle de la jeunesse autochtone urbaine à Montréal, nous montrerons comment l’urbanisation, le traumatisme historique et l’identité culturelle interagissent dans la vie des jeunes rencontrés. L’étude a mis en œuvre les principes de propriété, de contrôle, d’accès et de possession (PCAP ®) en se dotant d’un comité composé de jeunes autochtones urbains qui surveillait tous les aspects du processus de recherche (CPN, 2007). L’analyse a mené à la formulation de quatre grands thèmes reliant entre eux l’urbanisation, le traumatisme historique et l’identité culturelle. Les participants ont d’abord défini la manière dont le traumatisme historique a touché leur vie. Le discours convergent des jeunes a permis de caractériser l’urbanisation comme une forme actuelle de politique coloniale ainsi qu’une forme de traumatisme historique. Enfin, les jeunes ont partagé leur expérience du racisme et des stéréotypes en milieu urbain de même que l’impact de ceux-ci sur leur sens de l’identité culturelle. Nous montrerons comment l’urbanisation, le traumatisme historique et l’identité culturelle interagissent dans la vie de ces jeunes.
EN:
Urbanization is a form of ongoing colonization of Indigenous peoples (Taylor and Bell, 2004). It is a consequence of historical trauma – a culmination of losses suffered by Indigenous peoples in Canada as a result of colonialism that has manifested as trauma symptoms such as higher rates of addiction, mental health problems, and family violence (Criminal Code, R.S.C., 1985, c. C-46; Brave Heart, 1998; Evans-Campbell, 2008; Wesley-Esquimaux and Smolewski, 2004). It is also a symptom of current colonialist conditions, such as infrastructure deficiencies that force people to leave their home communities to work, undertake higher education or, in many cases, receive essential medical care. Using interviews from a larger study that explored the cultural identity of urban Indigenous youth in Montreal, we illustrate how urbanization, historical trauma, and cultural identity interplay in the lives of the youth interviewed for this study. The study operationalized OCAP® principles by having a committee comprised of urban Indigenous youth oversee all aspects of the research process (CPN, 2007). The analysis identified four broad themes interconnecting urbanization, historical trauma, and cultural identity. First, participants identified the ways in which historical trauma impacted their lives. Their discourse converged to identify urbanization as a form of ongoing colonial policy and of historical trauma. Finally, the youth discussed their experiences of racism and stereotypes in urban settings and how this affected their sense of cultural identity. We illustrate how urbanization, historical trauma, and cultural identity interplay in the lives of the youth interviewed for this study.
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La plainte de discrimination devant le Tribunal canadien des droits de la personne portant sur les services d’aide à l’enfance aux enfants des Premières Nations et le Principe de Jordan
Anne Levesque, Sarah Clarke and Cindy Blackstock
AbstractFR:
Il y a aujourd’hui plus d’enfants des Premières Nations placés en famille d’accueil qu’il y a jamais eu d’élèves autochtones fréquentant les pensionnats. Il est de plus en plus évident que ce problème est causé par les structures de financement inéquitables et déficientes du gouvernement fédéral pour les services d’aide à l’enfance. En 2007, la Société de soutien à l’enfance et à la famille des Premières Nations du Canada (la Société de soutien) et l’Assemblée des Premières Nations (APN) ont déposé une plainte qui mettait de l’avant deux allégations de discrimination. La première allégation portait sur les conflits de compétence entre les gouvernements fédéral et provinciaux, qui font en sorte que les enfants des Premières Nations sont souvent laissés en attente de services dont ils ont désespérément besoin ou se voient même refuser des services qui sont offerts aux autres enfants. La deuxième allégation de discrimination concernait le traitement défavorable de 163 000 enfants des Premières Nations dans le cadre du système de protection de l’enfance offert sur les réserves. Dans les deux cas, il était allégué que ces traitements constituaient des actes discriminatoires prohibés par la Loi canadienne sur les droits de la personne (LCDP). Au cours des six années suivantes, le gouvernement canadien a dépensé des millions de dollars dans une multitude de tentatives infructueuses pour faire avorter la poursuite. L’audience a néanmoins commencé en février 2013 devant le Tribunal des droits de la personne (TCDP). Pour la première fois dans l’histoire du Canada, la responsabilité du gouvernement fédéral quant à des allégations de discrimination envers les enfants des Premières Nations a été évaluée par un organisme pouvant rendre des décisions judiciairement contraignantes et des ordonnances réparatrices. Au cours de l’année suivante, le Tribunal a entendu plus de 25 témoins et a examiné plus de 500 documents mis en preuve. Les documents internes fédéraux déposés ont révélé une discrimination constante et systématique envers les enfants des Premières Nations ainsi que l’échec du gouvernement fédéral à résoudre le problème même si les solutions étaient connues. Alors même que le procès se déroulait devant le Tribunal, plusieurs auteurs de doctrine et membres des Premières Nations établissaient un parallèle entre la réaction du gouvernement fédéral dans ce dossier et d’autres cas de discrimination quant à l’accès à des services tels que l’éducation, la police, la santé et le logement dans les communautés autochtones. Cet article est écrit du point de vue des trois auteures, qui étaient étroitement impliquées dans la cause, deux à titre d’avocates et l’autre à titre de témoin et plaignante. Il offre d’abord une vue d’ensemble des principales questions juridiques soulevées par ce dossier avant d’analyser la preuve documentaire et testimoniale. La nécessité de redresser la situation dans d’autres sphères de services gouvernementaux pour les Premières Nations sera aussi abordée.
EN:
More First Nations children today are being placed in foster care than the number of students who ever attended residential schools. It is becoming increasingly clear that this problem is caused by inequitable and insufficient federal government funding for child welfare services. In 2007, the First Nations Child & Family Caring Society of Canada (the Caring Society) and the Assembly of First Nations filed a complaint concerning two allegations of discrimination. The first allegation concerned a conflict of jurisdiction between the federal and provincial governments that resulted in First Nations children often having to wait to receive vital services or even refused services provided to other children. The second allegation of discrimination concerned the unfair treatment of 163,000 First Nations children in the child welfare system provided on reserves. In both cases, it was alleged that these treatments constituted discriminatory acts prohibited under the Canada Human Rights Act. Over the next six years, the Canadian government spent millions of dollars on numerous unsuccessful attempts to derail the case. The case was nevertheless brought before the Human Rights Tribunal in February 2013; for the first time in Canadian history, the federal government’s liability regarding allegations of discrimination toward First Nations children was examined by a body that could make legally binding decisions and remedial orders. Over the year that followed, the Tribunal heard from over 25 witnesses and examined over 500 evidentiary documents. Internal federal documents that were submitted revealed consistent and systematic discrimination against First Nations children, along with a failure to resolve the problem, even with known solutions at hand. Even while the case was still before the Tribunal, a number of academics and members of First Nations began making parallels between the federal government’s reaction in this case and other cases of discrimination in access to services such as education, policing, health, and housing in Indigenous communities. This article expresses the perspectives of three authors who were closely involved in the case: two as lawyers and the other as a witness and complainant. It first provides an overview of the main legal issues raised in the case and then analyses the documentary and testimonial evidence. The need to correct the situation in other spheres of governmental services for First Nations people is also discussed.
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De la Loi sur la protection de la jeunesse au Système d’intervention d’autorité atikamekw (SIAA)-La prise en charge d’une nation pour assurer le bien-être de ses enfants
Anne Fournier
AbstractFR:
Cet article porte sur l’application de la Loi sur la protection de la jeunesse en milieux autochtones au Québec et plus particulièrement sur l’initiative de la nation atikamekw en cette matière. Il situe d’abord le régime général de protection de la jeunesse dans le contexte de son adoption à la fin des années 1970 et fait état des difficultés de son application en milieux autochtones au Québec. Il précise le contexte dans lequel est intervenue la prise en charge des services sociaux par les Atikamekw et leurs efforts pour créer, puis pour expérimenter, un régime particulier de protection de la jeunesse applicable à leurs membres. Ce régime particulier est à l’origine de l’inclusion de l’article 37.5, de droit nouveau, dans la loi, lequel permet désormais au gouvernement du Québec de conclure une entente avec une nation, une communauté ou d’autres groupes autochtones afin d’appliquer un régime particulier de protection de la jeunesse sur un territoire déterminé. Le Système d’intervention d’autorité atikamekw (SIAA) constitue le régime particulier qui s’applique aux Atikamekw issus des communautés de Manawan et de Wemotaci depuis un peu plus de 15 ans. Le SIAA évolue aux côtés du régime étatique. Il comporte ses propres acteurs et son propre fonctionnement, lesquels seront décrits. Les points de convergence et de divergence entre le régime général et le régime particulier de protection de la jeunesse seront exposés et l’article sera complété par le partage de quelques résultats découlant de l’application du SIAA.
EN:
This article is concerned with the application of the Youth Protection Act in Aboriginal settings in Quebec and more specifically with the initiatives taken in this regard by the Atikamekw nation. It begins with a presentation of the general system of the Youth Protection Act in the context of its being adopted at the end of the 1970s and states the difficulties surrounding its application in Aboriginal areas in Quebec. It specifies the context in which social services were taken over by the Atikamekw and their efforts to create, and later to experiment with, a specific youth protection system applicable to their members. This specific system is at the origin of the inclusion of Article 37.5 in the Act, thereby allowing the Government of Quebec to conclude agreements with a nation, community or other aboriginal group in order to apply a specific youth protection system on a determined territory. The Atikamekw Authority Intervention System (SIAA) is the specific system that has applied to the Atikamekw of the Manawan and Wemotaci communities for a little over 15 years. SIAA exists alongside the State system. It has its own stakeholders and its own operations, which we will describe. Commonalities and differences between the general system and the specific youth protection system will be clarified and the article will be further supplemented by sharing some results ensuing from the application of SIAA.
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L’adoption coutumière chez les Inuit du Nunavik : ses spécificités et conséquences sur le développement de l’enfant
Béatrice Decaluwe, Marie-Andrée Poirier and Gina Muckle
AbstractFR:
Diverses pratiques d’échange ou de transfert d’enfants existent au sein de différents groupes indigènes ou autochtones. Notamment chez les Inuit du Nunavik, un tiers des enfants sont adoptés selon la coutume (Rochette et al., 2007). Basée sur le don d’un enfant à un autre membre de la communauté, cette pratique d’adoption informelle découle de la façon dont les Inuit conçoivent la famille et définissent la notion de filiation. Cet article vise à faire un portrait de l’adoption coutumière chez les Inuit. La première partie énonce les éléments culturels qui influencent la façon dont s’articule cette pratique et les principales caractéristiques (motif menant à l’adoption, préservation du lien de filiation, consentement, etc.) qui la distinguent des autres formes d’adoption (adoption simple, plénière, ouverte) existantes en Occident. La deuxième partie s’intéresse à l’environnement familial et au développement des enfants adoptés en le comparant à celui des enfants non adoptés.
EN:
Different practices relating to the exchange or transfer of children can be observed within indigenous or aboriginal groups. Notably, among the Inuit of Nunavik, one third of the children are adopted according to tradition (Rochette et al., 2007). Based on the gifting of a child to another member of the community, this practice of informal adoption stems from the way in which the Inuit understand the family and define the concept of filiation. This article aims to offer a description of traditional adoption among the Inuit. The first part outlines the cultural elements influencing the way this practice unfolds and the main characteristics (reasons leading to the adoption, upholding of the filial relationship, consent, etc.) that distinguish it from other types of adoption (simple, full and open adoption) existing in the Western world. The second part is concerned with the family environment and with the development of adopted children, which is compared to that of children that were not adopted.
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L’éducation scolaire et l’éducation mapuche : points de vue des parents mapuches
Daniel Quilaqueo, Héctor Torres and Segundo Quintriqueo
AbstractFR:
Cet article est le résultat d’une recherche portant sur une critique épistémologique des principales caractéristiques de l’éducation scolaire et de l’éducation mapuche, selon une approche basée sur les sciences de l’éducation et le raisonnement épistémique des parents de famille mapuches de la région de l’Araucanie au Chili. Dans le contexte actuel de la réforme du système scolaire chilien, il s’avère nécessaire de contribuer aux débats sur les façons de penser, d’imaginer et de critiquer l’éducation scolaire donnée à la population mapuche. Pour ce faire, il est particulièrement fécond de prendre en compte la double immersion éducative reçue par les Mapuches (éducation mapuche et éducation scolaire). Sur la base d’une recherche qualitative réalisée auprès de parents mapuches et de kimches (savants mapuches), nous identifions, dans leurs discours sur l’école, les aspects d’ordre colonial – aspects construits à travers la scolarisation des élèves dans les écoles situées dans des contextes de vie mapuches. Cependant, la réforme mise en œuvre par l’État chilien, visant à instaurer une éducation interculturelle bilingue, veut intégrer des contenus éducatifs mapuches au sein du programme scolaire. Nous concluons que les contenus éducatifs mentionnés dans les discours des parents peuvent contribuer à transformer le modèle hégémonique et asymétrique que l’on retrouve encore dans l’éducation interculturelle bilingue proposée par l’État. Il s’agit de repenser l’école afin de l’adapter aux relations interethniques présentes dans le contexte de vie des familles mapuches et non mapuches du Chili.
EN:
This article emerges out of an epistemological study of the primary characteristics of school-based and Mapuche education, using an approach centred on educational science and the epistemic logic of Mapuche parents in Chile’s La Araucanía region. With the reforms to Chile’s education system currently underway, it is vital to contribute to the debates on the ways of thinking, imagining and criticizing the school education given to Mapuche population, with the starting point being the results of dual educational immersion (Mapuche education/school-based education). Based on qualitative research conducted among Mapuche parents and kimches (Mapuche wisemen), this study identifies colonial facets of their discourse regarding school, which have come about through the kind of schooling received by students in schools located in Mapuche environments. However, reforms by the Chilean state aim to implement bilingual intercultural education in order to incorporate Mapuche educational content into the school curriculum. This study concludes that the educational content mentioned in the analyzed discourses may help to transform the hegemonic and asymmetric model that can still be found in the bilingual intercultural education offered by the state. This will help reconsider the concept of school in order to adapt it to the inter-ethnic relations in the life context of Mapuche and non-Mapuche families.
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Être bien attaché à la vie : sécurité routière dans les familles anicinabek
Stéphane Grenier, Laurence Hamel-Charest, Suzanne McMurphy and G. Brent Angell
AbstractFR:
La sous-utilisation des sièges d’auto pour enfants par les Autochtones du Canada pourrait nous laisser penser que les parents autochtones se préoccupent peu de la sécurité de leurs enfants. Nous déconstruisons cette hypothèse en analysant la constitution de programmes d’intervention visant l’amélioration de la sécurité routière dans deux communautés anicinabek du Québec, Lac-Simon et Kitcisakik. Les préoccupations des membres de ces communautés et les angles d’intervention qu’ils désiraient privilégier afin de réduire les risques de blessures causées par des accidents de véhicules motorisés montrent que les enfants occupent un espace symbolique important. Plutôt qu’un résultat de la négligence parentale, la sous-utilisation de sièges d’auto pour enfants semble notamment due à la pauvreté dans laquelle vivent plusieurs familles autochtones. De plus, la sécurité de la jeunesse semble être une motivation amenant les communautés et leurs membres vers un processus de transformation. Cet article nous renseigne aussi sur le type d’éducation ainsi que sur la conception de la famille privilégiée par les Anicinabek. Tenir compte de ces éléments culturels dans le développement des programmes d’intervention permet d’adapter l’action au contexte local.
EN:
The underutilization of child car seats among Canadian Aboriginals could let us think that Aboriginal parents care little for the safety of their children. We unpack this hypothesis through analysing the establishment of intervention programs aimed at improving road safety in two Anicinabek communities of Quebec, Lac-Simon and Kitcisakik. The concerns of these communities’ members and the types of actions they wish to prioritize in order to reduce the harm caused by motorized vehicle accidents show that children hold an important symbolic space. Rather than the result of parental negligence, the underutilization of child car seats appears in great part due to the poverty in which a number of Aboriginal families live. Furthermore, youth safety seems to be a motivation leading communities and their members on the path of change. This article also informs us on the type of education and the concept of family that are most frequent among the Anicinabek. Taking these cultural elements into account in the development of intervention programs allows for the adaptation of action to the local context.
Hors-thème
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La conjugalité contemporaine, une nouvelle façon de penser le lien
Gérard Neyrand
AbstractFR:
La conjugalité est au cœur du processus de transformation des relations privées, qui s’organise autour d’une « démocratisation » de la famille, d’une égalisation des rôles de sexe et d’une promotion des individualités. Mais ce processus mobilise des dimensions multiples, s’appuyant sur l’évolution des normes d’interaction, de leur transcription dans un imaginaire social en mouvement et dans la configuration des identités personnelles. L’article, après avoir rendu compte des logiques globales qui président à ces évolutions, s’attache à décrire leurs effets sur la conjugalité et les différentes fonctions de la vie en couple : expressivité réciproque, refuge identitaire, partage d’une normativité, qui sont interrogées dans leurs multiples rapports. Sur la base de la reconfiguration de la normativité conjugale et de l’affirmation de la dimension identitaire de la conjugalité, on assiste à une métamorphose des liens conjugaux traditionnels que le développement des nouveaux modes de rencontre et l’affirmation de nouvelles valeurs et de nouvelles pratiques contribuent à redéfinir, dans une tension entre hédonisation des relations et responsabilisation des personnes.
EN:
Conjugality is central to a process of transforming intimate relationships, one that revolves around the “democratization” of the family, the equalization of gender roles, and the promotion of individualities. But this multifaceted process is also based on changing norms of interaction, their transferal into an ever-changing social imaginary, and the configuration of personal identities. This article first considers the overall logics underlying these changes before attempting to describe their effects on conjugality and the various functions of life as a couple – reciprocal expressiveness, identity refuge, shared normativity – which are examined in their numerous interrelationships. Through the reconfiguration of conjugal normativity and the affirmation of the identity-based nature of conjugality, we are witnessing a metamorphosis of traditional conjugal bonds, which the development of new methods of meeting people and the affirmation of new values and practices have helped to redefine, within a tension between the hedonization of relationships and personal accountability.
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Les associations des enfants et jeunes travailleurs du Burkina Faso comme espace d’expression de la capacité d’action des enfants ?
Joséphine Wouango
AbstractFR:
Depuis l’adoption de la Convention internationale des droits de l’enfant par les Nations Unies en 1989, la prise en compte du point de vue des enfants dans les décisions qui les concernent (article 12 de la Convention) est une approche de plus en plus plébiscitée. C’est dans ce contexte qu’ont émergé en Asie, en Amérique latine et en Afrique des mouvements d’enfants et de jeunes qui veulent se faire entendre dans le domaine de la lutte contre le travail des enfants.
Les associations des enfants et jeunes travailleurs du Burkina Faso (AEJT/BF) qui sont étudiées dans cet article sont une représentation nationale du mouvement africain des enfants et jeunes travailleurs (MAEJT) créé à la fin des années 1980. Le mouvement est fondé sur deux grands principes : d’une part sur les 12 droits prioritaires des enfants et des jeunes travailleurs, d’autre part sur le principe du « protagonisme » (l’enfant-travailleur comme acteur capable, à la différence de l’enfant-travailleur comme « victime » d’exploitation que prônent les normes internationales.
Cet article présente et analyse le fonctionnement de ce mouvement au Burkina Faso, les changements qu’il a contribué à apporter à la question sociale du travail des enfants et les résultats de la mise en application des principes annoncés. S’appuyant sur une enquête ethnographique, le texte offre des données inédites sur les réalités d’un acteur collectif qui, en utilisant à son avantage la rhétorique de la « participation » prônée par la Convention des droits de l’enfant, a réussi à s’insérer dans l’arène nationale de la protection de l’enfance. Toutefois, la question de la place et du rôle des enfants ainsi que celle du « vieillissement » des membres sont quelques-uns des défis auxquels la section burkinabè du mouvement doit faire face.
EN:
Since the adoption of the United Nations Convention on the Rights of the Child in 1989, taking into account the children’s point of view on decisions that affect them (article 12 of the Convention) has become increasingly popular. In this context child and youth movements have appeared in Asia, in Latin America and in Africa, seeking to be heard regarding the fight against child labour.
The working children and youth associations in Burkina Faso (AEJT/BF) that are studied in this article are a national representation of the African working children and youths movement (MAEJT) that was created at the end of the 1980s. The movement is based on two core principles: on the one hand the 12 primary rights of the children and young labourers and on the other hand the concept of “protagonism” (the child labourer as a capable stakeholder, rather than the child labourer as a “victim” of exploitation such as appears in international norms).
This article describes and analyses the workings of this movement in Burkina Faso, the manners in which it has reframed social issues concerning child labour and the results of the application of its guidelines. Based on ethnographic fieldwork, this paper offers original data on the realities of a collective player that has used the rhetoric of “participation” of the Convention on the rights of the child to its advantage, and has thus succeeded in entering the national debate on child protection. However, the Burkinabe section of the movement must still deal with questions such as those regarding the place and role of the children as well as that of the “aging” of their members.