Abstracts
Résumé
L’article présente une enquête du Groupe de travail sur la promotion et le développement des compétences informationnelles (GT-PDCI), lancée à l’automne 2018. Cette enquête visait à vérifier l’hypothèse que le niveau des compétences informationnelles des étudiants du réseau de l’Université du Québec n’atteint pas le niveau requis par le parcours universitaire ou attendu par le marché du travail.
Le questionnaire est composé de 22 questions basées sur les fondements des compétences informationnelles et a pour objectif d’identifier les stratégies utilisées par les étudiants et les connaissances mobilisées par ceux-ci lors de tâches liées aux compétences informationnelles. Les questions, à choix multiples, présentent des mises en situation et demandent à l’étudiant de choisir la meilleure stratégie ou attitude à adopter par rapport à un problème informationnel.
Les trois quarts des questions ont été réussis par moins de 50 % des répondants. En général, les répondants utilisent des stratégies qui mettent à contribution leurs compétences informationnelles, mais ils auraient avantage à utiliser des stratégies plus précises et plus efficaces, qui semblent méconnues ou mal maîtrisées.
Abstract
The article presents a survey conducted by the Groupe de travail sur la promotion et le développement des compétences informationnelles (GT-PDCI), in the Fall of 2018. This survey aimed to verify the hypothesis that the information literacy level of Université du Québec students does not meet the level required by the university route or expectations from the job market.
The survey is comprised of 22 questions based on information literacy fundamentals and has the objective to identify the strategies used by the students and the mobilized knowledge by these students linked to information literacy tasks. The multiple-choice questions present scenarios and ask students to choose the best strategy or approach to adopt with respect to a problematic information-retrieving query.
Three quarters of the questions were successfully answered by less than 50% of respondents. Overall, the respondents use strategies that engage their information literacy skills. However, they would benefit from using more precise and effective strategies, which seem unknown or poorly contained.
Article body
Introduction
Les compétences informationnelles (CI) ont un impact sur la réussite et la persévérance scolaires (Blake et al., 2017 ; Harrison, 2017 ; Murray, 2014 ; Soria et al., 2017). Depuis plusieurs années, les bibliothécaires universitaires forment et accompagnent les étudiants et les professeurs dans l’utilisation et la gestion efficace de l’information (Kuh et Gonyea, 2003 ; Oakleaf, 2015). Cet accompagnement peut être fait par une offre d’activités informelles. Par exemple, les compétences peuvent être enseignées à l’intérieur d’activités de la bibliothèque, des services aux étudiants ou lors de séminaires d’apprentissage en ligne. Elles peuvent également être formellement intégrées dans le plan d’un ou de plusieurs cours d’un programme universitaire (Donahue, 2015 ; Mologanyi, 2017). L’intégration des CI au curriculum universitaire est facilitée lorsque la haute direction de l’établissement croit à la nécessité de leur enseignement (Dubuc, 2019 ; Owens et al., 2016 ; Pouliot, 2011). L’effort pour la mise en place de projets d’intégration des CI peut également être lié aux exigences d’un ordre ou d’une association professionnelle afin d’assurer, chez les futurs professionnels, le développement des compétences informationnelles nécessaires à l’exercice d’une profession (Pouliot, 2017).
La Promotion du développement des compétences informationnelles (PDCI), coordonnée par l’Université du Québec (UQ), a été mise en place en 2003. Ses travaux soutiennent le développement des CI des étudiants et accompagnent les bibliothécaires et les enseignants à cet effet. Au cours des dernières années, le groupe de travail de la PDCI (GT-PDCI) a posé l’hypothèse que, malgré l’accroissement du nombre de formations documentaires offertes aux étudiants, le niveau de CI requis dans le parcours universitaire (Association des doyens des études supérieures au Québec, 2015 ; Bureau de coopération interuniversitaire, 2019) ou attendu par les employeurs (GT-PDCI, 2018 ; Travis, 2011) n’est pas atteint. Le GT-PDCI a donc mené une enquête afin d’obtenir un portrait des CI des étudiants[1] du réseau de l’Université du Québec. Ce portrait permet de proposer des pistes d’amélioration pour ajuster les objectifs d’apprentissage des formations aux compétences informationnelles, et il permet de démontrer les lacunes actuelles des étudiants universitaires auprès des instances concernées.
La présente communication décrit d’abord l’élaboration de l’instrument d’enquête sur les compétences informationnelles des étudiants. Elle expose ensuite les résultats de la collecte de données et détaille le profil des répondants. Enfin, les résultats sur les CI des étudiants sont analysés, puis discutés.
Méthodologie
Pour documenter les compétences informationnelles des étudiants, le GT-PDCI s’est d’abord inspiré de l’Étude sur les connaissances en recherche documentaire des étudiants entrant au 1er cycle dans les universités québécoises de Mittermeyer et Quirion (2003). Le groupe a choisi de développer un court questionnaire à choix multiples afin de favoriser un bon taux de participation (Crawford, Couper et Lamias, 2001 ; Liu et Wronski, 2018). Puisque les étudiants du réseau de l’Université du Québec sont répartis à travers la province, le groupe a privilégié l’envoi d’un questionnaire électronique acheminé via les adresses courriel institutionnelles des participants. Également, le GT-PDCI a depuis 2016 adhéré à une nouvelle version du Référentiel de compétences informationnelles en enseignement supérieur de l’Association of College and Research Libraries (ACRL) (ACRL, 2015 ; PDCI, 2016). Le questionnaire devait refléter cette adhésion.
Le sous-groupe du GT-PDCI responsable de l’enquête a recensé les questionnaires sur les compétences informationnelles existants (p. ex. : Blixrud, 2003 ; Mittermeyer et Quirion, 2003). Seul le Threshold Achievement Test for Information Literacy (Carrick Enterprises, 2019) s’appuie sur le nouveau référentiel (ACRL, 2015). Toutefois, ce questionnaire réparti en quatre modules d’évaluation prend plus de 30 minutes à compléter et propose des questions complexes avec de longues mises en contexte. Ces éléments sont considérés comme des freins à l’obtention d’un taux de réponse élevé. Ce questionnaire a donc été exclu.
Par conséquent, le GT-PDCI a entrepris la rédaction d’un questionnaire d’évaluation des CI. Le groupe a pu compter sur la contribution d’une conseillère pédagogique et d’agents de recherche spécialisés dans l’analyse de données pour rédiger un questionnaire efficace en fonction des objectifs pédagogiques et des analyses pressenties pour les données collectées. La rédaction des questions s’est appuyée sur les fondements et les habiletés du Référentiel de compétences informationnelles en enseignement supérieur (ACRL, 2015 ; PDCI, 2016). Seize (16) des 45 habiletés ont été retenues, celles considérées comme les plus importantes, pertinentes et mesurables.
Le questionnaire a été construit dans le but d’identifier les stratégies que les étudiants utilisent et les connaissances qu’ils mobilisent lors de tâches liées aux compétences informationnelles. À cet effet, les questions proposent une courte mise en situation réaliste et concrète, généralement tenant en une phrase. Puis, la réponse demandée est à choix multiples, demandant à l’étudiant de choisir les meilleures stratégies ou attitudes à adopter à l’égard du problème informationnel. Le lancement de l’enquête a été fixé au mois d’octobre 2018 ; cette période correspondant à l’application de la loi canadienne C-45 sur la légalisation de la marijuana, le groupe de travail a orienté les questions de l’enquête vers ce thème. Celui-ci avait également l’avantage de permettre des questions de différents champs disciplinaires. Enfin, les questions ont trois formes et présentent des niveaux de complexité différents : questions à un seul choix ; questions à plusieurs choix dont le nombre attendu est précisé ; questions à plusieurs choix sans précision du nombre de réponses attendues. Cette troisième forme représente un niveau de difficulté plus grand. Également, pour comprendre comment a été discriminée l’habileté de l’étudiant, il est intéressant de savoir que, pour plusieurs des questions, parmi les choix de réponses proposés se trouvent à la fois des bonnes réponses, des moins bonnes réponses et des réponses erronées. La moins bonne réponse n’est pas fausse, mais n’est pas optimale, ce qui vérifie la finesse de l’habileté du répondant.
Le questionnaire, composé de 22 questions, fut proposé en ligne dans l’outil de sondages LimeSurvey. La forme des questions est illustrée en figure 1.
Le groupe a ensuite entrepris des démarches pour vérifier la validité du questionnaire. Le comité des études, composé des doyens des établissements du réseau, le comité des bibliothèques, composé des directions de la bibliothèque des établissements, ainsi que des bibliothécaires-formateurs du réseau ont été sollicités à cet effet. Enfin, le questionnaire a été testé auprès de quatorze (14) étudiants du baccalauréat et de la maîtrise. Il leur a été demandé de commenter chaque question selon les critères suivants : claire, trop facile, mal formulée, ambiguë et irréaliste. En plus de vérifier ces critères, ces prétests ont permis de valider l’absence de problèmes techniques avec le questionnaire en ligne. La majorité des répondants a noté que le questionnaire était d’une longueur raisonnable et que les questions étaient pertinentes, plausibles et cohérentes. Les questions ayant reçu les commentaires « mal formulée et ambiguë » ont été révisées.
Un corrigé indiquant les bonnes réponses aux questions et fournissant des informations complémentaires était rendu disponible à la fin du questionnaire. Les rétroactions n’apparaissaient pas de façon dynamique à la suite de chaque question, afin d’éviter que le participant se forme tout au long du questionnaire et ainsi que ses réponses ne reflètent pas son habileté réelle à l’usage de l’information. Pour la même raison, le questionnaire ne permettait pas de revenir sur les questions précédentes.
L’enquête CI a été transmise à 34 783 étudiants du baccalauréat et de la maîtrise des dix établissements du réseau de l’Université du Québec. Ils ont reçu un lien personnalisé à leur adresse de courriel institutionnelle, ce qui permettait de récupérer les informations démographiques ainsi que sur leur parcours d’études. Il n’a donc pas été nécessaire d’ajouter des questions à cet effet.
Résultats
L’enquête a été répondue au moins partiellement par 8 376 étudiants (24,1 % de la population). Parmi ceux-ci, seuls 6 142 (17,6 % de la population) ont été retenus, car ils ont rempli le questionnaire en entier et ils ont réussi une question de validation contribuant à vérifier que le questionnaire a été rempli sérieusement.
Le tableau 1 montre que des étudiants de tous les établissements de l’Université du Québec ont participé à l’enquête. En effet, le taux de participation doit être mis en perspective relativement à la taille de la population par établissement, qui varie grandement. Par exemple, les 70 participants de l’Institut national de recherche scientifique (INRS) représentent 33 % de son effectif étudiant sollicité, tandis que les 2 258 participants de l’Université du Québec à Montréal (UQAM) représentent 15 % de sa population.
Démographiquement, l’échantillon est composé à 68 % de femmes et 32 % d’hommes. Il se distribue à 80 % d’étudiants âgés de 17 à 34 ans, 19 % âgés de 35 à 54 ans et 1 % âgés de 55 ans ou plus. Puis, 84 % des répondants sont citoyens canadiens, tandis que 16 % sont des étudiants étrangers ou résidents permanents.
Dans leur parcours académique, les répondants suivent un parcours universitaire à temps complet (69 %), à temps partiel (28 %) ou de recherche (4 %) ; et ce, dans les différentes disciplines universitaires. Par ailleurs, le niveau académique du répondant représente assez bien les niveaux d’études, car environ 60 % des répondants sont du baccalauréat, la moitié sont en première année (30 %) et l’autre en dernière année (31 %). Les étudiants à la maîtrise (40 % des répondants) sont aussi répartis assez également entre le début et la fin de la maîtrise, à 19 % respectivement.
Compétences informationnelles des étudiants
La figure 4 illustre le taux de bonnes réponses par question, regroupées par fondement. Chaque fondement (ACRL, 2015) est identifié par une couleur. Sur les 22 questions posées, seulement 6 ont été réussies par plus de 50 % des répondants, tandis que 16 questions référaient à des notions mal comprises. Il est à noter que, parmi les 22 questions de l’enquête, 15 questions exigeaient plus d’un choix de réponse, parmi lesquelles neuf ne précisaient pas le nombre de réponses attendues. Ces questions ont contribué à augmenter le niveau de difficulté du questionnaire. Les répondants utilisaient des stratégies mettant à contribution leurs CI, mais ils auraient avantage à recourir à des stratégies plus précises et efficaces qui semblent méconnues ou mal maîtrisées.
L’analyse des résultats permet certains constats pour chaque fondement de compétences informationnelles. La figure 4 présente les questions par fondement et le résultat par question. D’une part, pour 16 des 22 questions, une majorité d’étudiants n’ont pu fournir la réponse attendue. Ces questions moins bien réussies sont identifiées par un astérisque dans le tableau 2. D’autre part, pour la grande majorité (13/15) des questions pour lesquelles plusieurs réponses étaient attendues, au moins une de celles-ci constitue le choix de réponse le plus fréquent. Ce résultat à l’enquête CI 2019 montre que les étudiants ont certaines habiletés de compétences informationnelles, mais qu’ils auraient avantage à utiliser des stratégies plus efficaces.
Les prochains paragraphes décrivent les résultats par fondements.
L’autorité est construite et contextuelle
Ce fondement questionne entre autres ce qui confère une autorité scientifique à un auteur. Il est représenté par les questions 13 et 14, qui ont été respectivement réussies à 77 % et à 13 %. Ce résultat indique que les répondants savent qu’ils doivent caractériser et distinguer les types d’autorités pour évaluer la crédibilité des sources. Toutefois, une forte majorité des répondants n’utilisent pas les outils de recherche les plus efficaces pour retrouver les indicateurs d’autorité de l’auteur. En d’autres termes, ils ne savent pas appliquer leurs connaissances.
La production de l’information est un processus
Les trois habiletés liées à ce fondement traitent des caractéristiques et de l’usage des types de documents, ainsi que des sources où ils se trouvent. Trois des six questions de ce fondement ont été plutôt bien réussies, contrairement aux trois autres. Les étudiants au baccalauréat ont des lacunes plus importantes que les étudiants à la maîtrise au niveau des habiletés sondées pour ce fondement. Les premiers connaissent moins bien les types de documents, leurs caractéristiques et les contextes dans lesquels ils sont utiles. Les étudiants à la maîtrise savent distinguer et exploiter le processus de création et de diffusion de l’information traditionnelle et émergente dans une discipline donnée, tout comme ils peuvent évaluer en partie l’adéquation d’un processus de création d’un produit d’information avec un besoin précis. Par contre, les répondants ne saisissent pas toutes les nuances de la valeur de l’information créée, qui est valorisée de façon différente dans différents contextes.
L’information a une valeur
Ce fondement est représenté par cinq questions portant sur les notions de citation, de droit d’auteur et de libre accès. La proportion d’étudiants ayant bien répondu aux questions est assez faible (de 30 à 50 %). Au niveau de l’habileté liée à la citation des sources, les répondants connaissent les cas de figure les plus fréquents, mais ne peuvent adapter leurs stratégies en fonction de nouvelles situations. Les méthodes de citations dans le texte sont mieux acquises que la citation d’un graphique, par exemple. Les connaissances liées au droit d’auteur, à l’utilisation équitable, au libre accès et au domaine public sont moyennement maîtrisées. Les cas qui constituent une forme de plagiat et l’objectif de la citation des sources sont partiellement compris par les répondants. La distinction entre le libre accès et la notion de « libre de droits » n’est pas claire pour un répondant sur trois. Contrairement à d’autres fondements, les résultats des répondants à la maîtrise ne sont pas si différents de ceux des répondants au baccalauréat.
La recherche savante est une démarche d’investigation
Ce fondement traite de la formulation de la question de recherche et des stratégies permettant d’y répondre. Il est représenté par trois questions très ou plutôt mal réussies. À la question 1, moins de 5 % des répondants ont correctement répondu, et près de 75 % des répondants ont choisi une réponse erronée. Les répondants ne sont pas en mesure de formuler une question de recherche d’une portée appropriée. Ils utilisent certaines stratégies pour organiser l’information de façon à pouvoir en exploiter la richesse, mais ils pourraient développer des méthodes plus efficaces. Le même constat s’applique pour l’utilisation de diverses méthodes d’investigation adaptées aux besoins, aux circonstances et aux types de recherches à effectuer : les répondants connaissent certaines des stratégies, mais pas toutes.
La production de savoir résulte d’échanges
Ce fondement s’intéresse au comportement de l’usager de l’information en fonction du contexte social et informationnel. Le résultat montre que les répondants connaissent les principales spécificités de l’article scientifique, et qu’ils utilisent plusieurs bonnes stratégies pour trouver d’autres informations après avoir trouvé une source pertinente. Ils identifient les comportements attendus dans le cadre de la participation à un panel ainsi que l’utilité de prendre part à des échanges pour favoriser la production de savoirs. Il serait pertinent qu’ils apprennent à varier les sources d’information et à collaborer davantage à des échanges savants.
La recherche d’information est une exploration stratégique
Ce fondement s’intéresse au travail du vocabulaire en vue d’une recherche documentaire et des stratégies permettant de résoudre le besoin d’information. Il est documenté par trois questions. Les deux tiers des répondants ne sont pas en mesure d’identifier les concepts à utiliser pour développer une stratégie de recherche efficace. L’habileté visant à relier les besoins d’information et les stratégies de recherche aux outils adéquats de recherche est moyennement maîtrisée : les répondants identifient quelques outils adéquats, mais pas tous ceux qui sont attendus. Les stratégies de recherche et de raffinement des résultats sont encore une fois partiellement maîtrisées par les répondants : seul le tiers des répondants a identifié les deux réponses attendues, mais plus du trois quarts les ont sélectionnées en lien avec d’autres stratégies moins efficaces. L’élaboration d’une stratégie de recherche efficace est un exercice difficile qui demande un apprentissage et de la pratique dans le choix et la définition des concepts ou mots clés ainsi que la connaissance des outils à utiliser pour réaliser ces recherches. Les répondants doivent maîtriser ces éléments pour chercher efficacement de l’information.
Enfin, en réponse aux résultats du questionnaire, le GT-PDCI a identifié des pistes d’amélioration par fondement relatives à chacune des habiletés évaluées tout au long de l’enquête (voir tableau 2). Elles peuvent être utiles aux bibliothécaires-formateurs et aux enseignants pour définir les objectifs d’apprentissage des formations offertes aux étudiants.
Résultats par caractéristiques démographiques ou académiques
Certaines tendances peuvent être dégagées des résultats par sous-groupes populationnels, en regard de leurs caractéristiques démographiques ou académiques, soit le niveau d’études, la discipline académique, le statut légal et le groupe d’âge.
Les répondants développent leurs compétences informationnelles au cours de leur parcours d’études. Pour la majorité des questions (18 sur 22), une progression du taux de réussite au fil du niveau d’études apparaît. Par exemple, à la question 8, la proportion de répondants ayant toutes les bonnes réponses triple entre le début du baccalauréat et la fin de la maîtrise.
Aussi, le résultat montre que les étudiants au baccalauréat connaissent moins bien les types de documents, leurs caractéristiques et les contextes dans lesquels ils sont utiles, que leurs collègues plus avancés.
Des différences en fonction de la discipline d’études apparaissent. Les étudiants de Sciences humaines et droit obtiennent un taux de bonnes réponses au-dessus de la moyenne pour toutes les questions. À l’inverse, la performance des étudiants en Sciences de l’administration se retrouve plus souvent sous la moyenne, par exemple à la question 12 (figure 5).
Les étudiants étrangers et les résidents permanents obtiennent, dans l’ensemble, des scores inférieurs (de 5 à 10 %) à ceux des citoyens canadiens, par exemple à la question 3 (tableau 4).
Par ailleurs, le résultat entre les différents groupes d’âge définis n’a pas présenté de tendance particulière.
Ainsi, l’analyse des résultats à l’enquête sur les CI des étudiants du réseau de l’UQ 2019, tant par fondements de compétences que par caractéristiques populationnelles, permet de dégager certains constats et d’identifier des pistes d’amélioration.
Discussion
Le tableau 2 présente les questions par fondement et le résultat par question. L’analyse des résultats permet certains constats pour chaque fondement de compétences informationnelles. D’une part, pour 16 des 22 questions, une majorité d’étudiants n’ont pu fournir la réponse attendue. Ces questions moins bien réussies sont identifiées par un astérisque dans le tableau 2. D’autre part, pour la grande majorité (13/15) des questions pour lesquelles plusieurs réponses étaient attendues, au moins une de celles-ci constitue le choix de réponse le plus fréquent. Ce résultat à l’enquête CI 2019 montre que les étudiants détiennent des bases en compétences informationnelles, mais ils auraient avantage à utiliser des stratégies plus efficaces. Aussi, ces résultats appuient l’hypothèse à l’origine de l’enquête : les étudiants du baccalauréat et de la maîtrise du réseau de l’Université du Québec n’ont pas le niveau de CI requis dans le parcours universitaire ou par le marché du travail.
Les résultats de l’enquête par fondements ont permis de cibler les notions mieux acquises par les étudiants et les thèmes et éléments de compétences informationnelles qui peuvent être mieux soutenus, entre autres, par la formation aux CI. Aussi, les pistes d’amélioration identifiées constituent des pistes de développement pour les pratiques de formation aux CI mises en oeuvre dans le réseau de l’Université du Québec et dans les autres universités. En effet, l’acquisition des compétences informationnelles au cours des études peut avoir un impact sur la poursuite des études aux cycles supérieurs ; les résultats académiques des étudiants (Blake, et al., 2017 ; Catalano et Phillips, 2016 ; Sanabria, 2013) ; la persévérance et la rétention des étudiants (Soria, Fransen et Nackerud, 2013) ; et le développement d’autres compétences essentielles au parcours académique telles que le développement de la pensée critique, la communication écrite (Karas, 2017) et les méthodes de travail (GT-PDCI, 2018). Le réseau de l’Université du Québec a tout à gagner à tirer avantage des pistes d’amélioration identifiées par cette enquête (tableau 2) pour bonifier l’offre de formation aux compétences informationnelles.
Plus encore, les résultats scindés par caractéristiques démographiques ou académiques identifient des cibles supplémentaires pour l’amélioration des pratiques de formations aux compétences informationnelles. Dans le cadre des premières analyses, trois cibles proéminentes ont été relevées, soit les étudiants au baccalauréat, les étudiants des programmes en sciences de l’administration ainsi que les étudiants étrangers et résidents permanents. Cependant, le bibliothécaire de tout établissement ou secteur disciplinaire pourrait tirer avantage d’une analyse plus fine de son secteur d’activité. À la lumière de ces résultats, le GT-PDCI estime que les instances des établissements de l’Université du Québec doivent reconnaître l’importance d’intégrer le développement des CI tout au long des programmes d’études et de soutenir les initiatives durables pour y parvenir en misant sur la collaboration continue entre les bibliothécaires-formateurs et les équipes-programmes pour définir les actions à mettre en place et atteindre les objectifs d’apprentissage ciblés.
Limites de l’enquête
En fin de parcours, le groupe de travail peut dresser un bilan positif du déroulement de cette enquête étalé sur trois ans, bien que le groupe ait rencontré quelques défis. Un premier enjeu a été de concevoir un questionnaire suffisamment simple et court pour obtenir un assez grand nombre de réponses, tout en documentant la compétence dans sa complexité. Les questions à choix de réponses sont réputées représenter plus difficilement une compétence et ses différents niveaux d’apprentissage (Allard et Gérin-Lajoie, 2011). L’observation des CI dans un contexte de résolution de problème aurait été une méthode optimale. Cependant, en raison des limites de ressources et de temps, ainsi que de l’étendue du territoire à couvrir, ce type d’étude n’était pas réalisable. Aussi, le questionnaire a ainsi été conçu pour observer les stratégies utilisées par les étudiants. Les données collectées permettent de reconnaître des comportements souvent observés chez les étudiants et de comprendre à quelles connaissances ou habilités ils ont recours pour répondre au problème informationnel. Cependant, il ne permet pas d’évaluer les compétences de l’étudiant (Therrien, 2017).
Une autre limite du questionnaire est l’usage de différents types de questions. La non-uniformité de la forme des réponses a présenté certains défis pour la description et l’analyse des résultats. L’usage de questions similaires, par exemple à un seul bon choix de réponse par question, facilite la description et l’analyse du résultat.
De plus, le choix de réponses multiples à une question a contribué à augmenter le niveau de difficulté du questionnaire. Il y a des questions précisant le nombre de choix attendus alors que d’autres ne guident pas l’étudiant. Cette liberté quant aux nombres de bonnes réponses attendues accentue la difficulté de la question pour l’étudiant et accentue la complexité de l’analyse du résultat pour le groupe de travail. Cependant, l’usage de ce type de question a permis de mieux comprendre les stratégies mises en oeuvre par le répondant et le cheminement de sa pensée. Ce résultat est plus riche et permet l’observation en contexte du déploiement des compétences. Ce type de question permet entre autres le constat que les répondants mettent à contribution leurs CI, mais qu’ils auraient avantage à recourir à des stratégies plus précises et plus efficaces.
Enfin, le nombre de données et la quantité de recoupements possibles dans les données constituent une richesse qui n’a pu être exploitée à son plein potentiel jusqu’ici. Nombre d’autres analyses pourront contribuer à documenter le portrait des étudiants du réseau de l’Université du Québec.
Conclusion
L’objectif de cette enquête était de dresser un portrait des compétences informationnelles des étudiants au baccalauréat et à la maîtrise dans les établissements du réseau de l’Université du Québec. Un bon taux de réponse au questionnaire, de l’ordre de 20 % de la population, a permis plusieurs constats. D’abord, une majorité des répondants mettent à contribution certaines notions de compétences informationnelles, mais auraient avantage à recourir à des stratégies plus précises et plus efficaces. Ce constat général pourra soutenir les démarches des bibliothèques auprès des instances de leur établissement pour institutionnaliser l’intégration du développement des compétences informationnelles dans les programmes d’études. Par ailleurs, les 12 pistes d’amélioration en fonction des fondements du référentiel (ACRL, 2015) des CI, ainsi que l’identification de trois sous-groupes populationnels comme ayant des besoins accrus en termes de formation aux CI, pourront permettre aux bibliothécaires-formateurs de bonifier leur offre de formation. D’ailleurs, des travaux locaux par établissement ou secteur disciplinaire contribueraient à affiner les résultats de la présente enquête.
Appendices
Notes biographiques
Michel COURCELLES a obtenu son diplôme de maîtrise en sciences de l’information de l’Université de Montréal en 2004. Après avoir été indexeur chez Gale Group et bibliothécaire de référence à Bibliothèque et Archives nationales du Québec (BAnQ), il devient bibliothécaire-gestionnaire à l’INRS Centre Armand-Frappier Santé Biotechnologie en 2006. Il est impliqué dans le Groupe de travail de la promotion du développement des compétences informationnelles de l’Université du Québec (GT-PDCI) depuis 2006.
Dominique PAPIN est titulaire d’une maîtrise en sciences de l’information de l’École de bibliothéconomie et des sciences de l’information (EBSI) de l’Université de Montréal. Elle occupe le poste d’analyste en systèmes de documentation à l’Université du Québec depuis 2007. À ce titre, elle est impliquée dans les projets réseau des bibliothèques des établissements de l’Université du Québec. Elle s’intéresse particulièrement aux projets technologiques et aux nouveaux services en bibliothèques.
Catherine SÉGUIN a obtenu son diplôme à la maîtrise en sciences de l’information de l’École de bibliothéconomie et des sciences de l’information (EBSI) à l’Université de Montréal en 2004. Elle est bibliothécaire disciplinaire et formatrice à l’Université du Québec en Outaouais (UQO) depuis 2006. Elle s’intéresse particulièrement à la relation entre l’accès à l’information et l’équité des chances, et ce, par la formation des usagers aux compétences informationnelles.
Diplômé de la maîtrise en sciences de l’information en 2015, Félix LANGEVIN HARNOIS est bibliothécaire à l’École de technologie supérieure (ÉTS) de Montréal, où il coordonne les services de soutien à l’enseignement et à la recherche offerts par la bibliothèque. Il participe, entre autres, au développement et à l’offre de formations aux compétences informationnelles ainsi qu’au développement du Service d’aide à la rédaction d’articles (SARA) de l’ÉTS. Il s’implique dans le Groupe de travail de la promotion du développement des compétences informationnelles (GT-PDCI) depuis 2016.
Eve-Lyne RONDEAU est analyste en techniques d’enseignement pour le réseau de l’Université du Québec. De 2013 à 2019, elle a coordonné le Groupe de travail de la promotion du développement des compétences informationnelles (GT-PDCI) et participé au soutien, à l’orientation et au développement de stratégies pour favoriser le développement des compétences informationnelles dans les établissements du réseau.
Note
-
[1]
Le rapport complet est disponible en ligne à ptc.uquebec.ca/pdci/enquete-sur-les-competences-informationnelles-des-etudiants-du-reseau-de-luniversite-du-quebec-2019
Bibliographie
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