FR:
Les orientations de la politique de secteur (1960) puis de la politique de santé mentale (1990), deux réformes institutionnelles majeures engagées par les pouvoirs publics français, ont introduit de profondes transformations en psychiatrie, contribuant à étendre son périmètre d’action et à renouveler la conception des soins. Ces évolutions restent toutefois assez peu étudiées, particulièrement concernant les adolescents dont la prise en compte a été plus tardive en psychiatrie infanto-juvénile. Cet article se propose d’examiner les changements introduits en pédopsychiatrie de secteur par les expériences et les expérimentations engagées ces dernières années auprès des adolescents « en souffrance », distants de la prévention et des soins, peu demandeurs d’aide ou de soutien, confrontés à des difficultés aux frontières de plusieurs domaines d’action (éducatif, social, pédopsychiatrie…) mettant à mal la stricte partition des rôles entre professionnels et institutions. À partir d’approches sociologiques empiriques de suivis des démarches mises en place dans différents intersecteurs de la région Ile-de-France, l’analyse de ces changements sur plusieurs plans, celui des acteurs (postures et dispositions professionnelles, qualifications et compétences, redistribution des rôles entre acteurs de la santé mentale), celui des manières de travailler (référentiels d’action, etc.) et celui des valeurs associées (autonomie, responsabilisation, empowerment), permet de reconstituer la part prise par cette nouvelle appréhension du rétablissement permettant une prise en compte dynamique des adolescents en « souffrance ».
EN:
The community psychiatry policy (1960) as well as the mental health policy (1990), two major institutional reforms lead by French public authorities, have introduced profound transformations within the field of psychiatry, contributing to the extension of its scope of action and to the renewal of the conception of care. However, these evolutions have remained marginally studied, particularly in regard of teenagers whose infantojuvenile psychiatric care has been delayed. This paper examines the changes introduced within the sector child psychiatry through the recent experiences and experimentations undertaken toward theses “suffering” teenagers. As they are outside the reach of prevention measures and of care, few of them ask for help or support. They are also confronted with difficulties at the margin of many domains of action (education, social, child psychiatry, etc.) which blurs the strict division of roles between professionals and institutions. Starting from empirical sociological approaches of monitoring initiatives introduced in different “intersecteurs” of the Ile-de-France region, the analysis of transformations on multiple levels, those of the actors (professional stances and dispositions, qualifications and skills, redistribution of roles between each actors within the mental health domain), those of working methods (frames of action, etc.) and of associated values (autonomy and empowerment) allow the reconstitution of the part played by this new conception of recovery which gives place to a dynamic account of these “suffering” teenagers.