Abstracts
Résumé
Au Japon, l’anthropologie et l’archéologie sont profondément liées dans le contexte de l’après Deuxième Guerre mondiale qui voit naître l’idée d’une humanité autochtone à l’époque paléolithique. Nous proposons une analyse de la production des effets de sens anthropologiques à partir de l’exposition permanente du musée archéologique d’Iwajuku, fondé à Midori en 1992. L’institution muséale se situe sur le site de la fouille qui a permis de prouver, en 1949, l’existence d’un collectif supposé japonais venant d’un temps ancestral après qu’un archéologue amateur, Tadahiro Aizawa, eut découvert une pointe de lance en obsidienne taillée. Cet artéfact est devenu la référence du musée, bien qu’il ne soit entré dans les collections qu’en 2020. À partir d’une visite, complémentée par des documents annexes (vidéos promotionnelles, catalogues), nous montrons comment différentes strates anciennes et récentes de médiations institutionnelles ont produit quatre stratégies génératrices de représentations anthropologiques. En adoptant un modèle défendu par Jean Davallon, nous différencions un espace synthétique et un espace labyrinthique dans l’exposition, ce qui nous permet de décrire deux parcours possibles. Le premier consiste en une narration scientifique ; le second fait advenir un monde utopique par le visiteur. Enfin, nous décrivons deux figures attachantes liées à l’exposition : un archéologue amateur faisant une découverte majeure et une mascotte de mammouth dont le rôle est la promotion de la municipalité.
Appendices
Bibliographie
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