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Accessibilité et participation sociale. Vers une mise en oeuvre de la Convention relative aux droits des personnes handicapées, Manon Masse, Geneviève Piérart, Francine Julien-Gauthier et Danièle Wolf (dir.), Éditions ies, 2020, 288 pages[Record]

  • Stéphane Trudel

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  • Stéphane Trudel, PhD.
    Professeur en travail social, Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue (UQAT)

L’acceptabilité sociale des personnes dites handicapées soulève encore son lot de défis. Non seulement, il importe encore aujourd’hui de bien définir tout le champ conceptuel qui entoure les conditions de ces personnes vulnérables, mais il importe aussi de lever le voile sur leur désir de faire partie intégrante de la société et de ne plus être mises à la marge ou, comme cela est trop souvent le cas, considérées à partir des filtres de la pitié, du service public ou des mesures d’accommodements. Un changement de discours est impératif et, en ce sens, la Convention relative aux droits des personnes handicapées (CDPH), adoptée en 2006 par l’ONU, vise à mettre en lumière cette tension perpétuelle qui existe entre la reconnaissance des droits formels des individus et leur accès à des conditions justes pouvant leur assurer une rencontre réelle de leurs droits effectifs. À cet effet, l’ouvrage Accessibilité et participation sociale. Vers une mise en oeuvre de la Convention relative aux droits des personnes handicapées (2020), qui revient sur des communications présentées lors du XIVe Congrès de l’Association internationale de recherche scientifique en faveur des personnes ayant un handicap mental (AIRHM), tenu en septembre 2017 à la Haute école de travail social de Genève, parvient à proposer un regard renouvelé sur les différentes représentations du handicap et sur l’évolution de celles-ci. Le livre mobilise d’ailleurs différentes perspectives analytiques des enjeux sociaux. Nous pouvons y noter, entre autres, une certaine critique du structuralisme, mais aussi différentes propositions fonctionnalistes et interactionnistes, qui viennent s’ajouter aux perspectives écologiques et environnementales, comprises comme spatiales, qui sont en filigrane tout au long des différents chapitres. De manière plus descriptive, les quatre grands champs contenus dans l’ouvrage nous permettent à la fois d’avoir accès à des cadres conceptuels partagés (première partie), de nous intéresser à l’autodétermination comme processus d’émancipation (deuxième partie), de mettre en évidence les obstacles à franchir pour faciliter l’accès à une éducation inclusive (troisième partie), mais aussi, à partir des thèmes qui nous ont semblés être les plus essentiels, de rappeler tout le chemin qu’il nous reste à parcourir, à titre de société, afin de générer un réel basculement d’une reconnaissance formelle des droits à leur rencontre effective (quatrième partie). Le volet critique de cette tension entre droits formels et droits effectifs est d’ailleurs occasionnellement soutenu par les oeuvres d’Amartya Sen (2010) et Martha Nussbaum (2011, 2012), à partir de leur concept de capabilités. Cette perspective s’applique d’ailleurs très bien au contexte des personnes en situation de handicap, puisque certains chapitres de l’ouvrage, tels que « L’écart entre les lois et les pratiques : le problème du statut des personnes »—rédigé à partir de la méthode FALC (« facile à lire et à comprendre »)—, et « Une démarche participative pour des jeunes ayant une trisomie 21 au Togo »—qui s’intéresse à la recherche participative et à la codétermination des savoirs—, témoignent d’un important souci d’ajuster le langage afin de permettre la rencontre de l’Autre, dans le souci d’assurer une communication adaptée et inclusive, qui puisse donner vie à une reconnaissance réelle des préoccupations des personnes concernées. Un autre élément fort intéressant est la présence de chapitres accordés aux enfants présentant un trouble du spectre de l’autisme, dont un qui s’intéresse particulièrement au discours des professionnels de l’éducation, sur la façon dont les parents du Québec cherchent à défendre les droits de leurs enfants. La récupération d’une proposition de Lilley (2015), à l’effet que ce sont plutôt les écoles qui souffrent d’un Trouble d’inclusion de l’autisme (TIA), est mobilisée d’une façon particulièrement habile qui illustre fort bien l’un des enjeux centraux de notre rapport …