Cahiers québécois de démographie
Volume 45, Number 2, Fall 2016 Démographie et main-d’oeuvre Guest-edited by Yves Carrière and Jean Poirier
Table of contents (8 articles)
Introduction
Articles
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L’intégration économique des jeunes issus de l’immigration au Québec et au Canada
Brahim Boudarbat and Pouya Ebrahimi
pp. 121–144
AbstractFR:
Cette étude porte sur des jeunes de 15 à 29 ans que nous avons répartis en quatre groupes : les immigrants admis après l’âge de 10 ans (génération 1), ceux qui sont arrivés au pays à l’âge de 10 ans ou avant (génération 1.5), ceux qui sont nés au Canada d’au moins un parent immigrant (génération 2) et ceux qui sont nés au Canada de parents natifs de ce pays (génération 3 ou plus). Nos résultats montrent que les jeunes issus de l’immigration (générations 1, 1.5 et 2) sont en moyenne plus scolarisés que ceux de la génération 3 ou plus, tant au Québec que dans le reste du Canada. De plus, presque tous les jeunes des générations 1.5 et 2 au Québec connaissent le français, ce qui est synonyme d’une intégration linguistique des immigrants à long terme. Au chapitre de l’accès à l’emploi et des salaires, les jeunes de la génération 1 sont les plus défavorisés, et ils le sont davantage au Québec que dans le reste du Canada. Dans cette province, les jeunes des générations 1.5 et 2 affichent eux aussi des écarts sur le plan du taux de chômage et des salaires par rapport à ceux de la génération 3 ou plus, tandis que dans le reste du Canada, ces jeunes performent aussi bien — sinon mieux — que les jeunes de la génération 3 ou plus. Le Québec devra s’attacher à promouvoir l’emploi et les conditions de travail de tous ces jeunes, indépendamment de leur origine et de l’origine de leurs parents.
EN:
This paper studies the economic integration of young Canadians aged 15-29 years. This population is divided into four groups : (1) youth who immigrated to Canada after the age of 10 (generation 1) ; (2) young immigrants who were admitted to Canada at the age of 10 or before (generation 1.5) ; (3) Canadian-born children of at least one immigrant parent (generation 2), and (4) Canadians both of whose parents were born in Canada (generation 3 or more). Our results show that young people of immigrant origin (generation 1, 1.5 and 2) are more educated on average than young people from generation 3 or more. In addition, we find that most young people from generations 1.5 and 2 in Quebec know French, which points to the linguistic integration of immigrants in the long run. In terms of labour market results, young immigrants of generation 1 are the most disadvantaged in comparison to other generations, particularly in Quebec compared to the rest of Canada. Moreover, young people in Quebec from generations 1.5 and 2 also trail behind generation 3 or more in terms of access to employment and wages. In contrast, their labour market performance is similar, or even better, than generation 3 or more in the rest of Canada. Quebec should therefore further assist the young immigrant population in the province in their pursuit of an appropriate career and improved labour conditions whatever their origin.
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L’impact de la connaissance des langues officielles, du niveau de littératie et du pays d’origine sur le risque de surqualification au travail des immigrants canadiens
Alain Bélanger and Samuel Vézina
pp. 145–166
AbstractFR:
À l’instar du revenu ou du taux d’emploi, le taux de surqualification est un indicateur d’intégration des immigrants sur le marché du travail. Comparativement à la moyenne de l’OCDE, le taux de surqualification au Canada est élevé, mais l’écart entre les immigrants et les natifs est relativement faible.
L’objectif de cette recherche est de mesurer l’impact de la connaissance des langues officielles et des compétences en littératie sur le risque plus élevé pour les immigrants d’être surqualifié par rapport aux natifs. Les données canadiennes de l’enquête du Programme pour l’évaluation internationale des compétences des adultes (PEICA) de 2012 sont utilisées. Au total, l’échantillon retenu compte 13 624 cas et représente les 14,5 millions de Canadiens âgés de 25 à 64 ans détenant un diplôme d’études secondaires ou plus qui étaient en emploi au cours de la semaine précédant l’enquête.
Les résultats montrent que l’usage des langues officielles et le niveau de littératie ont un impact significatif sur la propension des travailleurs canadiens à être surqualifiés. Le fait de parler une langue non officielle à la maison et le fait d’avoir un faible niveau de littératie sont tous les deux associés à une augmentation de 70 % du risque d’être surqualifié. Bien qu’il existe une relation entre langue et littératie, ces deux types de compétences expliquent une part distincte du risque de surqualification des travailleurs canadiens.
EN:
In the same way as income and employment rates, the rate of over-qualification is an indicator of the integration of immigrants income into the labor market. In Canada the over-qualification rate is high in comparison to the OECD average ; however, the gap between immigrants and the native-born is relatively small.
The aim of this research is to measure the impact of knowledge of official languages and of literacy skills on the risk of over-qualification for immigrants in comparison with the native-born. Canadian data from the 2012 Programme for the International Assessment of Adult Competencies (PIAAC) were used. In total, the sample included 13,624 cases and represents the 14.5 million Canadians aged 25 to 64 who hold a secondary education diploma or more and who were in employment during the week preceding the survey.
The results show that the use of official languages and the level of literacy have a significant impact on the propensity of Canadian workers to be over-qualified. Not speaking an official language at home and having a low level of literacy are both associated with an increase of 70 % in the risk of being over-qualified. Although there is a relationship between language and literacy, these two types of skill explain distinct parts of the risk of over-qualification among Canadian workers.
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Vieillissement de la génération X au Québec : vers un report de la retraite ?
Charles Fleury and Pierre-Olivier Paré
pp. 167–191
AbstractFR:
Cet article examine le bien-fondé des arguments voulant que les nouvelles générations québécoises travaillent moins que les générations précédentes et qu’elles soient plus enclines à prolonger leur vie professionnelle. Il s’appuie sur l’exploitation des données historiques de diverses enquêtes quantitatives réalisées depuis la fin des années 1970. Prenant le cas de la génération X pour témoin, il analyse, dans un premier temps, dans quelle mesure les membres de cette génération cumulent moins d’années d’activité professionnelle que les membres des générations précédentes au même âge et s’interroge sur les raisons de ce phénomène. Il se questionne ensuite sur la place qu’occupe le travail dans la vie quotidienne des membres de la génération X et discute des difficultés de conciliation travail-famille tout au long de la vie. Il s’interroge enfin sur les conséquences que les différents changements observés auront sur les aspirations des membres de la génération X à l’égard du travail et de la retraite.
EN:
This article examines the evidence to support the argument that recent generations in Quebec are working less than their predecessors and that they are more inclined to prolong their professional lives. It relies on the analysis of historical data from a number of quantitative studies carried out since the end of the 1970s. Taking the case of generation X as an example, it analyses first to what extent the members of this generation are accumulating fewer years of professional activity than members of preceding generations at the same age, and enquires into the reasons for this phenomenon. It then reflects on the place of work in the daily lives of members of generation X and discusses the difficulties of achieving a work-life balance over the course of a lifetime. Finally, it poses the question as to the consequences of the various changes observed for the aspirations of members of generation X in terms of employment and retirement.
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Qualification de l’emploi, surqualification et rémunération horaire : les mères québécoises sont-elles avantagées par rapport aux mères ontariennes ?
Luc Cloutier-Villeneuve
pp. 193–216
AbstractFR:
Dans cet article, l’auteur trace un portrait évolutif et comparatif de la situation des mères québécoises et ontariennes sur le marché du travail à partir d’indicateurs liés à la qualification des emplois, la surqualification et la rémunération. Il ressort de l’analyse que les mères au Québec apparaissent avoir une situation plus favorable que celles de l’Ontario en étant moins présentes dans l’emploi moins qualifié et en étant aussi moins touchées par le phénomène de la surqualification. De plus, les mères québécoises se retrouvent moins fréquemment à occuper des emplois faiblement rémunérés et sont souvent en meilleure posture que leurs homologues de l’Ontario lorsque la comparaison est faite avec les pères. Toutefois, l’enjeu de l’accès aux emplois les mieux rémunérés et celui lié au temps de travail demeurent présents dans les deux groupes comparés par rapport aux pères.
EN:
This article provides an outline in comparative and evolutionary terms of the labor market situation of mothers in Quebec and Ontario, based on indicators related to employment qualifications, over-qualification and levels of remuneration. The analysis shows that mothers in Quebec appear to be in a more favourable situation than those in Ontario, being less represented in low skilled employment and also less affected by the phenomenon of over-qualification. In addition, mothers in Quebec are less likely to have low-paid jobs, and are usually better placed than their counterparts in Ontario when compared with fathers. However the issue of access to better-paid jobs and of hours of work remain pertinent in these two groups when compared with fathers.
Articles hors-thème
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Facteurs associés au recours à l’avortement à Lomé (Togo) : analyse d’une séquence d’étapes menant à l’avortement
Afiwa N’Bouke, Anne-Emmanuèle Calvès and Solène Lardoux
pp. 217–246
AbstractFR:
Cette étude examine les facteurs associés au recours à l’avortement à Lomé, la capitale et principale ville du Togo, en modélisant l’avortement comme une séquence d’étapes débutant par l’exposition au risque de grossesse jusqu’au recours à l’avortement, en passant par l’absence de pratique contraceptive et le fait qu’une grossesse qui survient soit déclarée comme étant « non désirée ». L’Enquête sur la planification familiale et l’avortement provoqué (EPAP) réalisée en 2002 auprès de 4 755 femmes âgées de 15-49 ans à Lomé fournit des caractéristiques au moment des grossesses et sert de base aux analyses. Les résultats révèlent que la religion, le statut matrimonial, l’âge, le niveau d’instruction et la parité sont associés aux quatre étapes de la séquence. Ainsi, plusieurs grossesses non désirées surviennent aux âges jeunes. Toutefois, c’est principalement le caractère « hors union » de la grossesse qui fait qu’elle est considérée comme étant « non désirée » et qu’elle est interrompue. Bien qu’étant moins à risque de grossesse, les femmes qui ont au moins deux enfants en vie sont plus susceptibles que les nullipares d’utiliser une contraception, moderne ou non, de déclarer une grossesse comme non désirée et d’avorter. À la lumière de ces résultats, une campagne de prévention efficace auprès des groupes à risque d’avorter devra également prendre en compte leur risque aux étapes antérieures à l’avortement.
EN:
Based on original data from a 2002 survey on family planning and induced abortion, conducted among 4755 women aged 15-49 in Lomé, the Togolese main and capital city, this study approaches abortion as a sequence of stages beginning with exposure to a pregnancy, going through a lack of contraceptive use and a declaration of a pregnancy as “unwanted” by the woman, and ending with abortion. Results show that women’s religion, marital status and age, educational attainment and parity have significant associations with all four stages. Thus, while several unwanted pregnancies occur at younger ages, it is mainly the “out of wedlock” character of the pregnancy that leads it to be considered as unwanted and to be interrupted. Even if they are less at risk of a pregnancy, women who have at least two children are more likely to use modern contraception, to declare a pregnancy as unwanted and to end it through abortion, compared to childless women. In light of these results, effective programmatic intervention for groups at risk of abortion should also take into account their risk at the earlier steps.
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Opinions de la population québécoise à l’égard de la séparation parentale
Marie-Christine Saint-Jacques, Elisabeth Godbout and Hans Ivers
pp. 247–267
AbstractFR:
Face aux profonds changements sociodémographiques qu’a connus la famille, comment les Québécoises et les Québécois perçoivent-ils la séparation des parents et ses conséquences sur l’adaptation des enfants ? Afin de répondre à ces questions, un sondage a été réalisé auprès d’un échantillon représentatif de la population québécoise (n = 1 202). Les résultats montrent que si la famille « traditionnelle » demeure valorisée et la séparation déplorée par la majorité, la séparation apparaît comme une solution acceptable à une vie de couple malheureuse. Des analyses de regroupement mettent au jour cinq profils d’opinions distincts dont deux sont particulièrement en opposition, soit les modernistes et les traditionalistes. L’interprétation de ces profils montre que si certains Québécois considèrent qu’une séparation est une solution préférable à une union malheureuse, ce constat ne fait pas l’unanimité. Les différences sociodémographiques relevées en comparant ces regroupements fournissent certaines pistes explicatives de la diversité des postures.
EN:
In the face of the profound social and demographic changes affecting the family, how do women and men in Quebec perceive the separation of parents and its consequences for the adaptation of children ? To answer this question an opinion poll was carried out on a representative sample of the population of Quebec (n = 1,202). The results show that while the “traditional” family remains valorised and separation is deplored by the majority, separation is also seen as an acceptable solution for an unhappy couple. Cluster analysis show five distinct opinion profiles, of which two in particular are opposed — the modernist and the traditionalist. Interpretation of these profiles shows that while some in Quebec consider separation preferable to an unhappy life together, this is not a universally held view. Socio-demographic differences identified in comparing these clusters provide a number of possible avenues to explain the diversity of stances.
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Comment mieux identifier les mères adolescentes dans le recensement français ? Améliorations de la méthode du « décompte des enfants au foyer »
John Tomkinson and Didier Breton
pp. 269–293
AbstractFR:
Pour mener des études de fécondité différentielle selon le profil sociodémographique, notamment au sein de population de petite taille, la méthode du « décompte des enfants au foyer » (DEF) est un outil précieux. Pourtant la qualité de cette méthode souffre de quelques limites dont celle de sous-estimer la fécondité aux jeunes âges, notamment durant l’adolescence. Nous proposons dans cette contribution des améliorations de la méthode pour pallier cette limite.
Nos propositions permettent de réduire de 50 % à 34 % la sous-estimation du nombre d’enfants nés d’une mère âgée de 18 ans ou moins. L’Enquête famille et logements (EFL), enquête couplée au recensement de la France en 2011, confirme le bien-fondé de notre approche et la valide dans 93 % des cas.
EN:
In order to study differential fertility by sociodemographic profile, notably for small populations, the Own Children method is an invaluable tool. However the quality of this method suffers from certain limitations, of which one is the underestimation of fertility at young ages, especially adolescent fertility. in this article we propose several improvements to the method to overcome this limitation.
Our proposals enable us to reduce the underestimation of the number of children born to a mother aged 18 or under from 50 % to 34 %. The survey Famille et Logements, coupled with the French census of 2011 confirms that our approach is well-founded and validates our adjustments in 93 % of cases.