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Introduction

Le 3 juillet 2008, la ville de Québec fête le 400e anniversaire de sa fondation. Cet événement unique est une occasion privilégiée pour revisiter les 400 ans de données démographiques qui témoignent du cheminement démographique de la ville à travers les quatre derniers siècles. L’objectif de cet article est de parcourir cet univers au travers de la lentille des recensements[2] qui ont jalonné les différentes époques de son histoire.

Avant d’entamer cette revue des statistiques, il faut également examiner de plus près ce qu’est la ville de Québec. Tout au long de ses 400 ans d’histoire, les limites géographiques de la ville de Québec ont subi de nombreuses transformations. Qu‘il s’agisse de l’Habitation[3] de 1608 ou de la ville issue des fusions municipales de 2002, Québec a continuellement vu son portrait géographique se remodeler au fil des siècles. Toutefois, chacun des recensements évoqués dans l’article se rapporte à une situation et à une géographie du moment. Autrement dit, les statistiques présentées dans cet article le sont selon une géographie courante et non constante[4]. D’autre part, il faut aussi mentionner que de nombreux recensements ont été complétés sans qu’aucun chiffre de population ne soit disponible pour la ville de Québec et que l’auteur ne s’est ainsi limité qu’aux données diffusées. Par contre, certaines données pertinentes concernant la province de Québec, le district de Québec, le comté de Québec, la paroisse de Québec vont être également soulignées malgré que toutes les limites géographiques de ces entités soient aussi changeantes dans le temps.

À titre d’exemple, pour illustrer le propos des concepts géographiques changeants, voici un bref historique du district de Québec. Celui-ci englobe la ville de Québec et sera mentionné à quelques reprises dans l’article. En effet, en l’absence de données disponibles pour la ville lors de certains recensements, on doit parfois se rabattre sur les seules données du district pour nous éclairer sur la situation du moment.

Dès le début du régime britannique, le terme « district » désigne une grande région qui porte le nom de la ville la plus importante s’y trouvant. La somme de tous les districts couvre alors l’ensemble du territoire. Le meilleur exemple pour illustrer la représentation ainsi que la composition des districts nous est donné lors du Recensement du Bas-Canada en 1827 dans le tableau 1[5]. On y retrouve les données de population pour chacun des districts (Québec, Montréal, Trois-Rivières et Gaspé) ainsi que des données pour les comtés composant ces districts. L’utilisation du terme district apparaît pour la première fois dans les données du Recensement de 1784[6]. Les districts remplacent ainsi les lieux désignés par le terme « gouvernements » pendant le régime français. Lors du Recensement de 1871, le mandat du recensement exigeant de témoigner de la représentativité électorale, modifie l’utilisation du concept de district lors de la diffusion des données de population, comme en témoigne la toute première carte des districts de la province de Québec[7]. Ce changement dans l’utilisation de cette entité géographique fait en sorte que le nombre de districts passe de 4 à 83 pour la province de Québec et la ville de Québec ne fait plus partie du district du même nom, mais est composée de trois districts numérotés 145, 146 et 147.

À propos des limites géographiques propres à la ville de Québec, le premier Recensement de 1665 a déjà un cadre géographique déterminé puisque l’arrivée de Jean Talon a été précédée par la création canonique de la paroisse de Notre-Dame-de-Québec en 1664 par Monseigneur de Laval[8]. Cela dit, les balises géographiques de la ville de Québec utilisées dans cet article seront celles présentées dans les différentes publications officielles des recensements.

Au sujet des chiffres de population de la ville de Québec, l’historique complet des débuts de l’évolution démographique de la ville depuis sa fondation ne sera rapporté dans un document officiel du gouvernement canadien qu’à partir du premier recensement de la Confédération canadienne, soit celui de 1871. Ces travaux ayant été faits en toute hâte, une révision des données a été présentée dans l’édition du Recensement de 1931. C’est donc à partir des informations de ces deux recensements, ainsi qu’avec l’aide des statistiques de l’ensemble des autres recensements, que l’on peut présenter ici l’évolution de la ville de Québec depuis sa fondation jusqu’à son 400e anniversaire d’existence.

Finalement, la présentation de cet article va s’articuler autour des trois chapitres suivants : « La ville de Québec sous le régime français », « la ville de Québec sous l’empire britannique » et finalement, « Québec, capitale de la province de Québec ».

La ville de Québec sous le régime français

La fondation de Québec

Le 13 avril 1608, Samuel de Champlain quitte la France vers la Nouvelle-France une troisième fois, à bord du Don de Dieu[9], avec comme mission cette fois d’établir un poste de traite permanent sur les terres du Canada explorées un peu moins d’un siècle plus tôt par Jacques Cartier [STC, 1984]. Il débarque à Québec le 3 juillet 1608. À titre de lieutenant de Sieur de Monts, avec un équipage de 28 hommes, il vient fonder ce qui deviendra le berceau de la francophonie en Amérique. Les conditions de vie très difficiles de l’époque font que seulement 8 des 28 membres de son équipage survivront au premier hiver. Heureusement, des ravitaillements arriveront au printemps de l’année suivante avec le retour de Gravé du Pont qui, pendant plusieurs années, fera la navette entre la France et Québec[10]. Ainsi débute l’existence de la ville de Québec qui, 400 ans plus tard, demeure la plus ancienne ville francophone de l’Amérique du Nord

Québec, métropole de la Nouvelle-France

En fait, avant les fondations de Trois-Rivières (1634) et de Montréal (1642), on peut facilement associer les chiffres de la Nouvelle-France à ceux de la ville de Québec. L’immigration, véritable moteur de la croissance de la ville de Québec à ses tout premiers débuts, est relativement peu importante (Henripin, 1954) jusqu’à la prise de Québec par les frères Kirke en 1629. Passé cette période, il faut attendre la venue de Jean Talon et du premier recensement pour situer plus précisément où en est rendue la population de la ville de Québec. En fait, à partir de la fin des années 1630, le développement de la Nouvelle-France ne sera plus seulement celui de la ville de Québec. Ainsi, il faudra attendre l’ère des recensements pour pouvoir à nouveau obtenir un décompte qui se rattache plus précisément à la ville de Québec.

Toutefois, depuis la fondation de Montréal, une première estimation de la population habitant la ville de Québec [BFS, 1936], nous est donnée en 1663 tout juste avant la venue de Jean Talon. Celle-ci fixerait à 800 le nombre d’habitants de Québec, ce qui semble assez élevé compte tenu des informations que les recensements de Jean Talon vont révéler deux années plus tard.

Les recensements de Jean Talon

Si la colonie connaît pendant le régime français 38 recensements, 15 d’entre eux seulement présentent des statistiques spécifiquement pour la ville de Québec. Les recensements de la ville de Québec débutent avec l’arrivée à Québec de son premier Intendant, Jean Talon, le 12 septembre 1665. Ce dernier s’attelle à cette tâche rapidement puisque lui-même va de porte en porte recueillir l’information, mais déjà le territoire à couvrir est vaste et il ne terminera ce premier recensement qu’en 1666.

Graphique 1

Population selon le sexe. Premier recensement de la Nouvelle-France, 1665-66

Population selon le sexe. Premier recensement de la Nouvelle-France, 1665-66
Source : Statistique Canada, Recensement de 1666, ESTAT, Tableau 1

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En fait, la ville de Québec, au même titre que l’ensemble de la Nouvelle-France du xviie siècle, bénéficie d’être une des premières villes à être recensées dans le sens moderne de ce terme. Ce premier recensement est effectué en même temps que s’organise la jeune colonie. Ce recensement est mené dans le but d’aider l’intendant dans son rôle de rapporter au Roi de France l’état de la situation qui prévaut en Nouvelle-France et aussi de lui fournir un outil favorisant sa capacité d’améliorer cette situation. Talon effectue son premier recensement selon le principe dit de jure (de droit), selon le lieu habituel de résidence des habitants et non là où ils se trouvent le jour du recensement (de facto). Il recueille ainsi des renseignements sur l’âge, le sexe, l’état matrimonial, les métiers et les professions.

Jean Talon, avec les premiers résultats de son premier recensement, décrit une Nouvelle-France où la ville de Québec et ses environs occupent encore le premier plan comme le confirme le graphique 1.

Une des premières constatations de l’intendant est sûrement le déséquilibre entre la population féminine et masculine. Parmi les 547 personnes recensées dans la ville de Québec, les hommes sont environ 50 % plus nombreux que les femmes, et ce, partout dans toute la Nouvelle-France. Cet état de fait devait amener Talon à une des premières demandes au Roi, soit celle de favoriser une immigration plus importante de femmes.

Cette réalité entre les effectifs de sexe féminin et masculin en cache une autre. À peine plus du tiers de la population de Québec en 1666 a moins de 15 ans et la répartition de ceux-ci n’est pas trop éloignée du 50-50. Cela permet de déduire que dans la population adulte l’écart entre les hommes et les femmes se rapproche donc davantage du ratio d’une femme pour trois hommes.

Sans pouvoir vérifier précisément pour la ville de Québec, la répartition par âge, sexe et état matrimonial de l’époque[11] permet de dresser un portrait encore plus critique sur le ratio hommes/femmes. Toutefois, on peut supposer que la situation qui prévaut dans l’ensemble de la colonie doit se refléter sensiblement dans les mêmes proportions pour les habitants de la ville de Québec. En regardant de plus près les résultats par état matrimonial, on se rend compte que les effectifs des célibataires, qui représentent 46,2 % de l’ensemble de la colonie, sont presque exclusivement des hommes puisqu’ils représentent plus de 90 % des colons célibataires. Il faut également remarquer que cette situation particulière est inhérente à la façon dont la colonie s’est peuplée au tout début. En effet, avant 1617, il n’y a pas de femmes à Québec.

Le second recensement de Jean Talon

Lors du second recensement de Jean Talon en 1667, soit un an plus tard, la Nouvelle-France voit ses effectifs de population augmenter, passant de 3 215 à 3 918 habitants. Par contre, la situation démographique de Québec ne reflète pas cette tendance puisque de 547 habitants qu’ils étaient en 1666, les effectifs ne se sont plus que de 444 en 1667. Par contre, les raisons de ce changement sont beaucoup moins évidentes. Cette évolution est-elle attribuable à la mortalité ou à la migration ou encore à la qualité des données de ces deux recensements? Même si on peut envisager que toutes ces options soient possibles[12], une partie de la réponse doit certainement être en partie liée à l’accroissement de la région de Québec[13] qui passe de 2 135 à 2 945 habitants.

Dans l’esprit de Jean Talon, ce constat n’est sûrement pas très favorable au bon développement de la colonie et encore moins à celui de Québec. Ce second recensement confirme à nouveau la légitimité de sa demande au Roi pour qu’il y ait davantage de femmes en partance de la France afin de favoriser le plus rapidement possible l’équilibre démographique au sein de la colonie. C’est ainsi que plus de 1 000 femmes, dont environ 800 Filles du Roy, viennent, entre 1663 et 1673 (Landry, 1992), s’installer en Nouvelle-France afin de favoriser le peuplement de la colonie.

Ce second recensement de Jean Talon est aussi l’occasion pour l’intendant de compléter une partie importante du recensement qu’il avait omise dans le premier, soit l’agriculture. La collecte de cette information cruciale permet de décrire comment la colonie arrive à se nourrir et aussi comment se développe son secteur économique primaire. Jean Talon joue encore une fois les précurseurs par son intérêt pour rapporter les activités agricoles de la colonie puisque, mis à part de rares exceptions, tous les recensements qui vont suivre auront toujours un volet portant sur l’agriculture qui prendra au cours du temps une importance grandissante.

Finalement, au terme de son mandat en 1672, Jean Talon quitte Québec avec sûrement le sentiment d’avoir propulsé le développement économique et démographique de la Nouvelle-France et en particulier celui de la ville de Québec. De plus de 3 000 colons en Nouvelle-France qu’ils étaient à son arrivée, ils sont maintenant près de 6 000 à son départ de la colonie.

Le Recensement de 1681

Après le Recensement de 1667 de Talon, il faut attendre que Jacques Duchesneau[14], le remplaçant de Talon, fasse son 5e et dernier recensement en 1681 pour que l’on puisse avoir à nouveau des données nominatives pour les différents lieux recensés de la Nouvelle-France et plus particulièrement pour la ville de Québec.

Déjà quinze ans après le tout premier recensement de Talon, les effectifs de la colonie triplent, passant de 3 215 à 9 677. Cette croissance spectaculaire de la Nouvelle-France complexifie la comparaison des données avec celles du temps de Jean Talon. En effet, un autre phénomène s’est ajouté depuis, soit l’étalement démographique sur le territoire de la colonie. La ville de Québec profite de cet essor puisque, durant ces 15 années, le nombre de ses habitants est passé de 547 à 1 345, affichant un taux d’accroissement légèrement inférieur au reste de la colonie en faveur d’une augmentation démographique des lieux avoisinants.

La manifestation du travail de Jean Talon en 1681, dans la vie de tous les jours à Québec, est sûrement l’atténuation du déséquilibre démographique entre les hommes et les femmes. Du ratio de trois pour une qu’il était en 1666 dans la population de 15 ans et plus de la ville de Québec, on retrouve maintenant un ratio de moins de deux hommes par femme alors que le pourcentage d’hommes habitant la ville de Québec est tout juste au-dessus de la barre des 60 % (61,2 %). Un autre impact de la venue des Filles du Roy est relié à la proportion de la population de la ville de Québec des moins de 15 ans. Celle-ci était à peine au-dessus des 30 % en 1666, et a presque atteint les 40 % en 1681. Finalement, en corollaire, l’âge médian de la population de Québec qui devait se situer aux alentours des 22 ans et demi en 1667 se rapproche des 19 ans en 1681.

La pyramide qui suit illustre les transformations que la population de la ville de Québec connaît entre 1666 et 1681.

Graphique 2

Ville de Québec 1666 et 1681

Ville de Québec 1666 et 1681
Source : Statistique Canada, Estimations basées sur les Recensements de 1666 et 1667

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Les autres recensements du régime français

Après le Recensement de 1681, même si 29 recensements suivent pendant le régime français, aucun ne présentera autant d’information que les recensements de Talon et de Duchesneau. Soit les informations spécifiques pour la ville de Québec sont souvent diluées pour toute la colonie, soit encore, lorsque l’information est disponible, elle est davantage fragmentaire et moins détaillée que pour ces trois premiers recensements. Ainsi, pour toute la période restante de l’existence de la Nouvelle-France, la répartition par âge n’est disponible que pour de très grands groupes d’âge seulement, rendant assez téméraire la présentation de pyramides des âges pour cette période. Par contre, certaines variables peuvent encore être présentées pour la ville de Québec comme l’illustre le tableau 1 qui résume plusieurs informations combinées.

Tableau 1

Estimations[15] de la population selon le sexe et certains groupes d’âge, ville de Québec, Recensements de 1688 à 1706

Estimations15 de la population selon le sexe et certains groupes d’âge, ville de Québec, Recensements de 1688 à 1706
Source : Statistique Canada, Recensements de 1666 à 1706, ESTAT, Tableaux 1 et 2

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On remarquera d’ailleurs dans ce tableau que, dès 1692, l’écart entre le nombre d’hommes et de femmes à Québec s’est presque entièrement atténué depuis l’arrivée des Filles du Roy. Une seule génération aura donc suffi pour renverser cette tendance du début de la colonie[16].

Le tableau 1 s’arrête en 1706 car, jusqu’à la chute du régime français en 1759, tous les autres recensements qui ont suivi ne présentent aucune information vraiment spécifique pour la ville de Québec. Dans la presque totalité des cas, toutes les données sont agrégées pour la Nouvelle-France seulement. Une exception à cette règle, au Recensement de 1739, Québec et sa banlieue comptent 4 603 personnes, mais on n’a pas d’autre information plus précise sur la ville de Québec.

Du reste, l’information disponible pour l’état matrimonial est assez fréquente pour que l’on puisse brosser un tableau assez intéressant sur la situation matrimoniale des personnes âgées de 15 ans et plus qui a prévalu à Québec et plus généralement en Nouvelle-France durant le régime français.

Graphique 3

Population de 15 ans et plus, selon l’état matrimonial, ville de Québec, recensement de 1666 à 1706

Population de 15 ans et plus, selon l’état matrimonial, ville de Québec, recensement de 1666 à 1706
Source : Statistique Canada, Recensements de 1666 à 1706

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En effet, la proportion des personnes mariées n’a cessé de croître depuis le premier recensement de Talon en même temps que celle des célibataires diminuait. Cela est évidemment attribuable en tout premier lieu à l’arrivée des Filles du Roy, qui a permis à un grand nombre d’hommes de quitter leur statut de célibataire, et en second lieu, à l’arrivée par la suite des autres colons qui n’étaient plus nécessairement tous célibataires. De plus, les mesures instaurées par Talon pour accélérer la fréquence des mariages ne sont sûrement pas étrangères à l’évolution de ce phénomène.

Aussi, parmi tous ces recensements, il est important de mentionner que pour la première fois, des autochtones sont recensés en 1695, sous le vocable de l’époque, à titre de « sauvages ». On en décompte 853 au total dans la colonie sans trop savoir où exactement ils habitent. Il faudra attendre 1851 avant qu’ils soient à nouveau recensés et qu’on ait un peu plus d’information sur leur lieu de résidence.

À propos du Recensement de 1706, on remarquera la baisse des effectifs de la population de Québec entre 1698 et 1706. Une des raisons de cette baisse, hormis la fragilité des statistiques de l’époque, est sûrement la conséquence de la grande épidémie de variole de 1702-1703[17]. Cet événement a dû également jouer un rôle dans la croissance de la périphérie de Québec. On peut présumer qu’une partie de la population a fui les lieux de crise. D’ailleurs, le nombre de lieux géographiques n’a cessé de croître dans la colonie, passant d’une dizaine de lieux lors du premier recensement de Talon à près d’une centaine[18] lors du changement de régime en 1763.

Il faut également mentionner quelques exceptions[19] à la règle citée plus haut relativement à 1706 comme étant la dernière année de recensement « utilisable » aux fins de statistiques disponibles pour la ville de Québec. Aux Recensements de 1739 et de 1744, on apprend que Québec et sa banlieue comptent respectivement 4 603 et 5 039 habitants[20], mais on n’a aucune autre information.

De plus, au Recensement de 1754, on a une estimation de 8 001 habitants pour la ville de Québec. Comme d’autre part, pour 1755, on a également une estimation de 39 873 habitants pour le district de Québec [BFS, 1936]. Puisque la ville de Québec, à cette époque, peut représenter environ près de 20 % de la population totale du district, cela nous donne une indication qu’à la fin du régime français, la ville de Québec a bien franchi le cap des 8 000 habitants. Ceci représenterait donc son apogée démographique pour cette période. En fait, la période allant de 1740 à 1760 est celle qui a connu le plus grand nombre d’immigrants (Boleda, 1984) durant tout le régime français puisque durant ces vingt ans, près de 7 000 personnes ont débarqué à Québec. Ces estimations pour la ville de Québec sont également corroborées par le fait que la Nouvelle-France, au Recensement de 1754, affichait un compte de population pour toute la colonie de 55 009 habitants, alors qu’une autre estimation pour la fin des années 1760 donne un ordre de grandeur qui se rapprocherait des 75 000 individus [BFS, 1936]. Comme à cette époque la ville de Québec pouvait également représenter près de 15 % de l’ensemble des effectifs de la Nouvelle-France, la ville de Québec avoisinait même le cap des 9 000 habitants en cette fin de période coloniale française.

Finalement, le graphique 4 illustre la croissance démographique de la ville de Québec depuis sa création et pendant toute la période sous le régime français.

Graphique 4

Population de la ville de Québec durant le régime français de 1608 à 1759

Population de la ville de Québec durant le régime français de 1608 à 1759
Source : Statistique Canada, ESTAT

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La ville de Québec sous l’empire britannique

La chute de la ville de Québec

Le passage de la Nouvelle-France à l’empire britannique ralentit la tenue des recensements au Canada. Seulement trois recensements sont effectués durant la seconde moitié du xviiie siècle, soit en 1765, 1784 et 1790. En fait, la tradition censitaire amorcée un siècle plus tôt par Jean Talon se transforme pour devenir davantage une tradition d’enquêtes [STC, 2002]. Celles-ci ciblent des lieux géographiques ou des thèmes très spécifiques. Elles sont aussi exécutées très aléatoirement dans le temps[21]. En fait, sous cette nouvelle administration, le rôle d’intendant est aboli et ses fonctions sont désormais attribuées au gouverneur. La ville de Québec perd aussi son titre de métropole. En effet, avant la fin de ce siècle, la ville de Québec sera moins populeuse que celle de Montréal qui deviendra ainsi la nouvelle métropole avec une population de 18 000 habitants en 1790. Par contre, Québec avec ses 14 000 habitants restera la capitale administrative de la province et aussi la deuxième ville la plus populeuse. Ainsi, le Recensement de 1754 aura été le dernier à fournir des informations sur les villes de Québec et de Montréal jusqu’à la prise de Québec par les Britanniques. Il faudra donc attendre le Recensement de 1825 pour à nouveau disposer de données spécifiques et fiables pour ces deux villes.

Le Recensement de 1765

Le recensement de 1765 trace une première balise démographique et géographique de ce qu’est devenue la Nouvelle-France au lendemain de la prise de pouvoir britannique, car il nous informe sur la démographie des 113 lieux dont la colonie est maintenant constituée. Toutefois, il ne nous donne que très peu d’information sur la ville de Québec. Tout ce qu’il nous offre, c’est un nombre total d’habitants estimé[22]. On ne retrouve aucune répartition, ni pour l’âge, ni pour le sexe, ni non plus pour aucune autre variable démographique.

On apprend donc qu’en 1765, la ville de Québec compte 8 967 habitants. En fait, cela représente une stagnation, en supposant valable l’hypothèse que les effectifs de la ville de Québec aient bien atteint les 9 000 habitants avant la prise de pouvoir par les Britanniques. D’ailleurs, un recensement du district de Québec en 1761 nous informe que ce dernier ne comptait plus que 30 258 personnes[23] [BFS, 1936], ce qui correspond à une baisse de près de 10 000 personnes si on compare ces résultats à ceux de 1754 (7 ans plus tôt). C’est la preuve qu’il y a eu une baisse importante de la population de la ville de Québec, et de son district, imputable fort probablement aux tragiques événements[24] reliés au changement de régime de 1759.

Le Recensement de 1784

Le Recensement de 1784 offre encore moins d’information que celui de 1765. Cette fois les données sont seulement celles des districts de Montréal, Québec et Trois-Rivières. Par contre, pour ces trois mêmes régions, on retrouve une distribution des effectifs de population selon le sexe, certains grands groupes d’âge ainsi qu’un certain éclairage sur les conditions de vie de l’époque. Curieusement, ce dernier décompte nous apprend également, pour la première fois, qu’en 1784 il y avait 88 esclaves vivant dans la grande région de Québec. D’ailleurs le tableau 2 illustre bien certaines des conditions de vie plus particulières de cette époque dans le district de Québec.

Tableau 2

Population selon certaines caractéristiques, district de Québec. Recensement de 1784

Population selon certaines caractéristiques, district de Québec. Recensement de 1784
Source : Statistique Canada, Recensement de 1784

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Ce volet particulier de la vie des habitants du Bas-Canada n’a jamais été décrit dans les recensements de la Nouvelle-France. Pourtant, il semble que l’esclavage remonte aussi loin qu’à l’époque de Champlain qui aurait eu des esclaves parmi ses différents équipages[25].

Si on évalue la population de la ville de Québec à environ 25 % de la population du district de Québec, cela nous donne une estimation d’environ 11 000 personnes[26]. Cette évaluation concorde avec les données des deux recensements encadrant celui de 1784.

Le Recensement de 1790

En 1790, toute la colonie a été recensée, permettant ainsi d’avoir des données nominales pour chacun des lieux du pays, sauf pour Québec et Montréal. Tout comme au Recensement de 1765, seuls des totaux pour ces deux villes ont été estimés et une note à cet effet[27] confirme comment ceux-ci ont été établis. À partir de ces derniers, on a à nouveau tenté de générer l’information manquante en supposant que la répartition était équivalente tant à Montréal qu’à Québec. Cela dit, nous sommes bien conscients qu’il pouvait exister certaines différences entre les deux villes et, par conséquent, cela ne confère forcément à des données, déjà très fragiles, qu’un simple ordre de grandeur probable de la situation démographique de l’époque.

Le Recensement de 1790 demeure le dernier recensement du xviiie siècle de la colonie. Par la suite, de nombreuses enquêtes ont fourni des estimations agrégées pour la ville de Québec et ses environs. Ces estimations n’ont évidemment pas la même valeur que celles, plus spécifiques à la ville de Québec, provenant des recensements. Par contre, elles peuvent être utilisées afin d’évaluer un certain niveau d’effectifs. Ainsi, pour les années 1792, 1795, 1798 et 1805, on connaît les effectifs de la population selon que ceux-ci sont catholiques ou protestants mais cela demeure a priori des données incomplètes.

Le graphique 5 illustre ce qu’a été l’évolution de population de la ville de Québec au xviiie siècle. On y voit clairement que la croissance de la ville a bien repris malgré le changement de régime.

Graphique 5

Population de la ville de Québec de 1700 à 1800

Population de la ville de Québec de 1700 à 1800
Source : Statistique Canada, Recensements et estimations de 1706 à 1790

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Québec, capitale du Bas-Canada

À la suite du décret signé par le roi d’Angleterre, George III (10 juin 1791, Acte constitutionnel du Canada), le Haut et le Bas-Canada sont créés et Québec devient la capitale de ce Bas-Canada. Toutefois il faudra attendre le premier recensement du Bas-Canada en 1825 pour savoir quel seuil démographique a été atteint par la population de la ville de Québec.

Le Recensement de 1825 est le premier depuis 1754 à offrir de l’information en termes d’effectifs pour la ville de Québec ainsi que des données par très grand groupe d’âge et par état matrimonial, ce qui n’était pas le cas depuis longtemps. Ainsi, il nous informe que la ville de Québec a dépassé le cap des 20 000 habitants avec un décompte de 22 101 personnes recensées.

Suivront ensuite en rafale plusieurs recensements de la population du Bas-Canada, ceux de 1827, 1829, 1831, 1842 et 1844. De ces recensements, on apprend que la population de la ville de Québec passe ainsi successivement d’environ 24 000 en 1827 à environ 25 000 en 1831, et finalement à environ 34 000 habitants en 1844, la donnée n’étant pas disponible pour 1829 et 1842. Toutefois, il faut souligner ici que la majorité des données pour cette période sont des estimations[28] pour la ville de Québec. Du reste, chacun de ces recensements nous prépare un peu à la transition qui va s’effectuer avant la fin du présent siècle.

Au Recensement de 1827, c’est la première fois que l’on recense les industries, Talon ayant amorcé d’une certaine façon cette tendance en identifiant plutôt les professions. Ainsi, parmi les 14 différents types d’industries recensées, la plus importante en termes d’établissements est celle des moulins à scie. Ces moulins se retrouvent en plus grand nombre à Québec (288) qu’à Montréal (200). Montréal devance toutefois largement Québec pour ce qui est du nombre total d’établissements industriels, soit 899 contre 479.

Malheureusement, les données du Recensement de 1829 n’apparaissent pas dans la version du Recensement de 1871. Toutefois, il est mentionné dans le Recensement de 1931 que 467 906 personnes ont été recensées dans tout le Bas-Canada. C’est la même situation pour le Recensement de 1842, mais en plus il n’y a aucune information s’y rapportant dans le rapport de 1931, mis à part la mention qu’il est incomplet.

En 1831, c’est la première fois que l’on recense la population selon les religions. À l’occasion de certains recensements de la Nouvelle-France, ce sont plutôt les églises qui étaient recensées.

Tableau 3

Population par culte, district de Québec, Recensement de 1831

Population par culte, district de Québec, Recensement de 1831
Source : Statistique Canada, Recensement de 1831

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D’ailleurs, en 1831 les Catholiques représentent environ 75 % de la population du Bas-Canada et cette situation se reflète dans les districts de Québec et de Montréal. Toutefois les Anglicans sont relativement plus nombreux dans la région de Québec (15,4 %) que dans celle de Montréal (13,5 %), alors que c’est l’inverse pour la population s’identifiant à l’Église d’Écosse (respectivement 6,0 % contre 8,3 %).

Au Recensement de 1844, de nombreuses variables démographiques, outre la religion et l’industrie, apparaissent pour la première fois. Ainsi les variables lieu de naissance, éducation, santé, occupation, etc. font partie de ces nouveautés. À titre d’exemple, le tableau 4 illustre bien les origines de la population vivant à Québec en 1844.

Tableau 4

Population selon le lieu de naissance, comté de Québec, Recensement de 1844

Population selon le lieu de naissance, comté de Québec, Recensement de 1844
Source : Statistique Canada, Recensement de 1844

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Ainsi, il nous apprend que la ville de Québec connaît une importante vague d’immigration[29] puisque entre 25 % et 30 % de sa population est née à l’extérieur du pays, et ce, principalement en Irlande. Cette forte présence irlandaise s’explique par le fait qu’au xixe siècle, surtout après 1815, la démographie croissante et la détérioration de l’économie en Irlande contraignent de plus en plus de gens à quitter leur pays et que ce mouvement migratoire culmine à la suite de la terrible famine qui y sévit à la fin des années 1840. Étant donné que la population du Bas-Canada est à 75 % canadienne-française et que cette proportion tombe à 60,5 % pour le district de Québec et à 52,2 % pour celui de Montréal, la venue d’immigrants anglophones (presque exclusivement du Royaume-Uni et des États-Unis) laisse facilement présager que dans ces deux villes, les francophones représenteraient à l’époque moins de la moitié de la population.

Les recensements décennaux

En 1847, convaincu de l’importance des recensements, James Bruce, comte d’Elgin et gouverneur du Canada-Uni, va permettre la création du bureau d’enregistrement et de la statistique. Ainsi, en vertu de la Loi du recensement des Provinces unies, un recensement devra être effectué dans les mois de février et de mars 1848 et être répété dans ces mêmes mois en 1850. Puis, le 30 août 1851, la sanction royale est accordée à une loi qui assure qu’un recensement soit effectué périodiquement, d’abord en 1851, puis en 1861 et tous les dix ans par la suite. On peut ainsi dire que le recensement décennal date de 1851.

Ces changements importants relatifs à la tenue des recensements vont évidemment permettre de mieux suivre l’évolution démographique de la ville de Québec, mais vont aussi permettre d’obtenir en principe des statistiques plus fiables que celles offertes durant les 100 ans qui ont précédé. Par contre, les résultats du Recensement de 1851 ont éventuellement souffert de la méfiance et de l’hostilité de la part de certains des répondants qui craignaient les représailles que certaines de leurs réponses pouvaient générer, et ce, plus particulièrement à l’égard de leurs impôts à payer [STC, 1993].

Les Recensements de 1851 et de 1861

Les Recensements de 1851 et de 1861 sont les deux premiers et aussi les deux derniers recensements décennaux du Bas-Canada. Ils ont été exécutés dans la foulée des changements amorcés dans les recensements précédents, si bien que le nombre de tableaux disponibles sont beaucoup plus considérables que tous ce que les précédents recensements ont pu offrir. Ainsi, par exemple, la distribution des effectifs de population de la ville de Québec par groupe d’âge de dix ans sera à nouveau disponible, ce qui n’avait jamais été le cas depuis Talon et Duchesneau. De plus, d’autres informations seront accessibles spécifiquement pour la ville de Québec, ce qui va rompre définitivement avec ces nombreuses années précédentes où l’information était manquante.

Le nombre important de sujets traités par ces deux recensements fait en sorte qu’il serait trop long ici d’examiner dans le détail l’ensemble des informations que cela a généré. Du reste, en guise de comparaison avec le Recensement de 1844, le tableau 5 illustre à nouveau comment se répartit la population de la ville de Québec selon le lieu de naissance. On notera cette fois-ci que les données sont disponibles spécifiquement pour la ville de Québec.

Tableau 5

Population selon le lieu de naissance. Ville de Québec, Recensements de 1851 et 1861

Population selon le lieu de naissance. Ville de Québec, Recensements de 1851 et 1861
Source : Statistique Canada, Recensements de 1851 et 1861

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Au tableau 5, on peut également constater que la proportion des Canadiens d’origine francophone a augmenté par rapport à la situation qui prévalait en 1844 (au tableau 4) et comme corollaire, on remarquera qu’à l’opposé, la proportion des immigrants à Québec a diminué. En effet, de près de 30 % qu’elle était en 1844, cette proportion s’est stabilisée autour de 20 % en 1851 et en 1861. Du reste, la part des immigrants ne cesse d’augmenter dans les milieux urbains du Bas-Canada et aussi leurs lieux d’origine sont de plus en plus variés.

Un dernier détail intéressant au sujet du tableau sur les lieux de naissance de la population au Recensement de 1851 [MDA, 1878], mais qui n’a pas été entièrement reproduit ici, est le fait qu’on y présente des statistiques tant pour les « sauvages » que pour les « noirs ». On y apprend donc qu’en 1851, il n’y a plus de « noirs » dans la région de Québec et il n’en reste que 18 dans tout le Bas-Canada. De plus, parmi les 4 358 « sauvages » recensés dans le Bas-Canada de 1851, il n’y en a que 218 qui se trouvent dans la région de Québec sans toutefois avoir été recensés sur le territoire de la ville. Malgré que nous n’ayons pas retrouvé d’écrits précis sur ces 218 personnes, on peut supposer qu’il s’agisse des habitants de ce qui s’appellera plus tard le village Huron. Par contre, Il faudra attendre le Recensement de 1921 pour voir apparaître des statistiques au chapitre des « Réserves indiennes » incluses dans le comté de Québec auxquelles on fera référence dès le Recensement de 1986 comme étant celles de Wendake.

Québec, capitale de la province de Québec

« Les rébellions de 1837 ainsi que les revendications de la population qui souhaitait un gouvernement élu représentatif de la taille de la population, menèrent à la proclamation de la Loi constitutionnelle de 1867. Les articles 8 et 51 de ce document précisaient que le recensement devait fournir des chiffres de population qui serviraient à établir le nombre des représentants de chaque province à la Chambre des communes. Ces chiffres devaient aussi servir de base aux ajustements des limites des circonscriptions électorales. Par conséquent, pour que les députés puissent représenter la population selon des régions spécifiques, il fallait dénombrer la population selon des lieux géographiques précis. La Loi constitutionnelle de 1867 a eu pour principal effet d’influencer la décision d’uniformiser la méthode de jure, de rendre essentielle la tenue d’un recensement à tous les dix ans, en fonction d’une base géographique précise, à une date fixe. En somme, on décida de poursuivre la tradition établie 200 ans plus tôt par l’intendant Talon » [STC-E, a].

On a ainsi effectué, en 1871, le premier recensement du Canada en vertu de la Loi constitutionnelle de 1867. Joseph-Charles Taché a joué un rôle déterminant quant à la tenue des recensements durant toute cette période, allant du début de la confédération jusqu’à la nomination du premier Statisticien fédéral et à la création du Bureau du recensement. Pendant près d’un demi-siècle, le recensement et la statistique ont relevé du ministère de l’Agriculture et Taché en a été un sous-ministre durant le début de cette période. Grâce à sa détermination pour l’obtention de véritables statistiques canadiennes, on lui doit d’avoir dirigé la revue de toutes les statistiques du Canada depuis ses origines et celles des premiers recensements consignées dans les divers volumes du Recensement de 1871.

Les Recensements de 1871, 1881 et 1891

Les trois derniers recensements du xixe siècle sont ceux de 1871, 1881 et 1891. Du reste, le Recensement de 1871 demeure une balise déterminante pour examiner le portrait de la population de la ville de Québec à ce tournant de l’histoire. En effet, le Bas-Canada disparaissant avec la confédération de 1871, la ville de Québec redevient à nouveau la capitale de la province de Québec, et le restera jusqu’à son 400e anniversaire. Cela dit, le Recensement de 1871 a porté essentiellement sur le même éventail de questions que celui des Recensements de 1851 et 1861. Les Recensements de 1881 et 1891 qui ont suivi étaient également calqués sur celui de 1871, mais quelques améliorations y ont également été apportées afin de s’ajuster aux exigences et aux contraintes de leurs époques respectives.

Par ailleurs, comme l’avait bien vu Taché, la confédération était dans l’histoire un événement d’une telle importance que le Recensement de 1871 a été l’occasion de faire le bilan de toutes les activités censitaires précédant cette date. C’est donc principalement dans les volumes III et IV du recensement de 1871 que l’on retrouvera les statistiques historiques de tous les recensements qui ont précédé 1867.

Pour en revenir au Recensement de 1871, l’utilisation plus stricte du cadre géographique est un des changements majeurs concernant la diffusion des statistiques démographiques pour la ville de Québec, et est directement lié au grand chambardement généré par la confédération. Ainsi, à partir de 1871, les données seront diffusées pour des unités géographiques autres que des lieux associés à des villes ou des régions. Ce découpage géographique plus détaillé permettra ainsi de mieux analyser les caractéristiques démographiques de l’étalement urbain (Gagné, 2005). On constatera que la croissance des effectifs de la ville de Québec va sans cesse en diminuant jusqu’en 1891. En effet, la fin du xixe siècle marque un ralentissement important de la croissance démographique de Québec (Marcoux, 2003; Marcoux et al., 2003) puisque depuis 1961 le taux moyen annuel de croissance passe successivement de 1,9 % (de 1851 à 1861) à 1,6 % en 1871 et à 0,4 % en 1881 pour finalement atteindre le seuil de 0,1 % en 1891.

Un fait intéressant doit être souligné dans le cas du Recensement de 1881. Pour la première fois de son histoire, les données par âge pour la ville de Québec sont diffusées, ce qui nous permet d’apprécier sa toute première pyramide complète par année d’âge.

Graphique 6

Pyramide des âges, ville de Québec, 1881

Pyramide des âges, ville de Québec, 1881
Source : Statistique Canada, Recensement de 1881

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Pour conclure avec le xixe siècle, le graphique qui suit illustre l’évolution de la population de la ville de Québec durant cette période.

Graphique 7

Population de la ville de Québec de 1801 à 1901

Population de la ville de Québec de 1801 à 1901
Source : Statistique Canada, Recensements de 1825 à 1901

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Le xxe siècle

La tendance amorcée à la fin du xixe siècle s’est prolongée au siècle suivant, si bien qu’au même rythme, tous les dix ans, de précieuses informations démographiques portant sur la ville de Québec sont disponibles. De plus, à la suite du développement rapide de la population dans l‘Ouest, les recensements décennaux sont devenus quinquennaux à partir de 1956. Ainsi, à partir de cette date, on a pu suivre l’évolution de la population de la ville de Québec tous les cinq ans.

Il serait un peu fastidieux de présenter ici tous les résultats des 15 recensements qui ont couvert l’ensemble des différentes facettes de l’évolution démographique de la ville de Québec. Par conséquent, seules les principales étapes de cette évolution et les jalons significatifs seront rapportés ici.

Ainsi, on peut dégager deux périodes distinctes quant à l’évolution de la ville de Québec dans ce troisième siècle de son existence. Premièrement, de 68 840 habitants en 1901, la population de Québec passe à 171 979 habitants en 1961 sur une trajectoire de croissance presque continue qui n’a commencé à ralentir qu’après 1931. En fait, tant pour 1921, comme on l’a vu plus haut, que pour 1931, la ville de Québec connaît une forte expansion tant géographique que démographique. Plus concrètement, ces taux annuels de croissance sont passés successivement, à partir de 1901, de 0,9 % à 1,3 %, puis à 1,9 %, et finalement à 3,1 % pour 1931. Cette croissance va légèrement retomber en 1941 à 1,4 % pour ensuite se stabiliser à près de 1 % jusqu’en 1961. En second lieu, malgré une hausse en 1971 et 1976, le niveau des effectifs de la ville de Québec baisse de façon presque constante depuis 1966 jusqu’en 1981, pour finalement stagner jusqu’en 2001. Notons que les exceptions de 1971 et 1976 sont grandement attribuables au fait que la ville de Québec, à l’époque de ces recensements, avait annexé le territoire de certaines municipalités aujourd’hui disparues (Drouin, 1990).

Le graphique 8 illustre ces deux tendances observées de la croissance démographique de la ville de Québec au xxe siècle.

Graphique 8

Population de la ville de Québec de 1901 à 2001

Population de la ville de Québec de 1901 à 2001
Source : Statistique Canada, Recensements de 1871 à 1911

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Un dernier regard sur la ville de Québec du xxe siècle portera sur une variable déjà analysée plus tôt, ce qui permettra de faire un dernier pont avec sa situation démographique historique. Ce regard portera donc à nouveau sur le lieu de naissance des habitants de la ville de Québec.

Tableau 6

Population totale selon le lieu de naissance, ville de Québec, Recensements de 1961 à 2001

Population totale selon le lieu de naissance, ville de Québec, Recensements de 1961 à 2001
Source : Statistique Canada, Recensements de 1961 à 2001

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Dans le tableau 6, on remarquera que les personnes habitant la ville de Québec en 1961 et qui sont nées à l’étranger ne représentent plus que 2,1 % alors qu’un siècle plus tôt, soit en 1861, ils représentaient plus de 20 %. Effectivement, si on compare les données du tableau 6 et celles du tableau 5, on réalise que l’immigration n’a plus le même impact et qu’un siècle a suffi pour en atténuer le rôle. Du reste, on peut également constater que l’identité des immigrants change progressivement en cette fin de xxe siècle. Les personnes nées au Royaume-Uni ainsi qu’aux États-Unis sont en constant déclin, alors que les personnes nées dans d’autres pays sont en constante hausse depuis 1961. Cependant, il faut à nouveau être prudent dans l’interprétation de ces statistiques. D’une part, la ville de Québec représente encore une plaque tournante pour les immigrants, ils y arrivent mais n’y restent pas forcément. D’autre part, ceux qui sont arrivés il y a plus longtemps peuvent aussi simplement décéder et ainsi donner la fausse impression qu’ils sont remplacés par de nouveaux arrivants.

Le xxie siècle

Le xxie siècle débute à l’image du siècle précédent lorsqu’on examine les résultats du recensement de 2001. En effet, la population dénombrée de la ville de Québec au 15 mai 2001 se situe à 169 016, soit à nouveau une faible augmentation depuis le précédent Recensement de 1996 mais, surtout, un niveau encore en deçà des 171 979 individus recensés en 1961. Cela confirme donc que le phénomène de stagnation des effectifs de population la ville de Québec décrit plus haut, se prolonge en ce début de xxie siècle.

Les fusions municipales de 2002 et le Recensement de 2006

Un changement majeur affecte la ville de Québec le 1er janvier 2002 [STC-E, e], alors que 12 municipalités voisines fusionnent avec ce qui devient la nouvelle ville de Québec. L’impact démographique de cette fusion a propulsé les effectifs de la ville à 507 991 habitants, une augmentation de 200 % par rapport aux données du Recensement de 2001, les faisant passer au-dessus de la barre du demi-million. Puis, un autre changement important survient quatre ans plus tard, le 1er janvier 2006[30], alors que deux anciennes municipalités fusionnées en 2002, L’Ancienne-Lorette et St-Augustin-de-Desmaures, « défusionnent » de la nouvelle ville de Québec. Cette « défusion » a évidemment comme impact démographique de réduire les effectifs de la population. Ainsi, la ville de Québec voit sa population passer en dessous de la barre du demi-million pour se fixer à 436 330 personnes [STC-E, e].

Ainsi, le 16 mai 2006, près de deux ans avant le 400e anniversaire de la ville de Québec, on constate en fait qu’elle a bien continué de croître durant ces cinquante dernières années, mais bien dans son nouvel environnement géographique. Le Recensement de 2006, le premier recensement qui a suivi le processus de fusion des 14 municipalités en 2002, confirme que la ville de Québec a fait un bond démographique fulgurant, passant de 169 076 personnes recensées en 2001 à 491 142 en 2006.

La pyramide du graphique 9 présente l’impact sur la structure par âge et sexe de la population de la ville de Québec qu’auront eu les fusions municipales dans le passage des effectifs du Recensement de 2001 à celui de 2006.

Graphique 9

Pyramide des âges, ville de Québec, 2001 et 2006

Pyramide des âges, ville de Québec, 2001 et 2006
Source : Statistique Canada, Recensements de 2001 et de 2006

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Québec au tournant de son 400e anniversaire

Enfin, le 3 juillet 2008, la ville de Québec a 400 ans bien sonnés. Ce jour-là, à combien s’élève son nombre d’habitants? Selon les estimations de population par municipalité publiées par l’Institut de la Statistique du Québec, il était de 502 119 habitants en 2007[31]. On peut donc affirmer que Québec a plus d’un demi-million d’habitants lors de son anniversaire. C’est un bel hommage à Samuel de Champlain et à son équipage, venus pour fonder la ville de Québec dans de si rudes conditions.