Abstracts
Résumé
La question de la diversité culturelle et religieuse tient, au sein de l’espace public québécois, une place importante. En effet, nombreuses ont été les initiatives visant à penser la « gestion » de la diversité au Québec, à l’encadrer, voire parfois à la limiter. En 2013, Bernard Drainville, alors ministre responsable des Institutions démocratiques, présentait son projet de Charte des valeurs québécoises sous le titre de Parce que nos valeurs, on y croit. Cette volonté d’encadrer le port de signes religieux dans la sphère publique et politique au Québec était pensée dans un objectif de redéfinition du socle de l’identité québécoise. Nous nous intéressons ici aux réactions de six personnalités rattachées au mouvement souverainiste par rapport au projet de Charte des valeurs. Nous souhaitons ainsi interroger la possibilité de dissensions et de divergences dans la conceptualisation d’un modèle national québécois et dans la revendication d’une identité québécoise particulière.
Mots-clés :
- Charte des valeurs,
- laïcité,
- nation,
- identité,
- souverainisme
Abstract
The issue of cultural and religious diversity is important amongst Quebec’s public sphere. Indeed, there have been many initiatives conducted to reflect on the “management” of diversity in Quebec, in order to either supervise or limit it. In 2013, Bernard Drainville, minister for Democratic institutions, submitted his draft of the Charter of Quebec Values, naming it Because we believe in our values. The desire to frame the wearing of religious symbols in the public and political spheres in Quebec was apprehended with the objective of redefining the foundation of Québec’s identity. Our interest, here, lies in six personalities’ opinion, involved in the sovereignist movement, regarding this charter. We thus intend to investigate the possibility of there being disagreements and divergences amid the conception of a national model directed to define a particular québécois identity.
Keywords:
- Charter of values,
- secularism,
- national identity,
- sovereignist movement
Article body
Le 7 novembre 2013, Bernard Drainville, alors ministre responsable des Institutions démocratiques, déposait son projet de Charte des valeurs québécoises auprès de l’Assemblée nationale sous le nom de Projet de loi 60 : Charte affirmant les valeurs de laïcité et de neutralité religieuse de l’État ainsi que l’égalité entre les femmes et les hommes et encadrant les demandes d’accommodement (Québec, 2013a). Ce projet porté par le Parti québécois s’insérait dans un souci de gestion et d’encadrement, la question de la diversité culturelle et religieuse tenant une place centrale dans l’espace public québécois depuis le début des années 2000 (Bertho-Lavenir, 2008; Labelle, 2007). En souhaitant « affirmer les règles communes que nous voulons donner pour vivre la diversité dans l’harmonie » (Québec, 2013a, paragr. 2), le gouvernement semble se positionner pour répondre à un malaise relevé dans les travaux de la Commission de consultation sur les pratiques d’accommodement reliées aux différences culturelles. En effet, dans leur rapport, les commissaires Gérard Bouchard et Charles Taylor (2008) faisaient état d’une inquiétude de la part de certains « membres de la majorité ethnoculturelle [qui] craignent d’être submergés par des minorités elles-mêmes fragiles et inquiètes de leur avenir » (p. 18). La réception de cette proposition de redéfinition du « nous » collectif québécois a divisé l’opinion publique, comme en témoignent les discours populaires, médiatiques et politiques.
Une telle inquiétude – et la façon dont elle est abordée par les pouvoirs publics – présente à nos yeux un intérêt majeur, notamment lorsqu’elle est traitée dans le champ de la communication internationale et interculturelle. En effet, nous sommes, ici, face à un ensemble de « réflexions politiques, sociohistoriques et philosophiques [qui] tentent de définir des modèles de gestion autour des concepts d’unité nationale, de communauté nationale et de reconnaissance de la diversité » (Stoiciu, 2008, p. 35). Il nous importe alors de penser le vivre-ensemble dans une société québécoise marquée par l’immigration, la diversité culturelle et cultuelle. Réfléchir aux implications sociétales et culturelles d’un projet tel que celui de la loi 60 nous amène ainsi à observer les enjeux, les échanges et les représentations identitaires, tant du point de vue de la communauté d’accueil que de la communauté immigrante. Nous pensons que le texte du projet de loi ainsi que les discours qui l’entourent peuvent nous laisser voir et analyser les dynamiques culturelles à l’œuvre au Québec dans le cadre de ce que Stoiciu appelle l’« interculturel de l’immigration » (p. 37).
Dès lors, nous proposons, par une analyse rhétorique (Broustau, 2007; Toulmin, 1993), une réflexion sur quelques enjeux soulevés, au sein même du mouvement souverainiste québécois, par ce projet de loi 60 qui, bien que n’ayant pas été approuvé par l’Assemblée nationale, a eu un impact non négligeable dans l’espace public québécois, et ce, à partir de 2013. En effet, nous pouvons lire, dans ces propositions de législation, une certaine réflexion sur les modèles de « gestion » et de reconnaissance de la diversité, les questions relevées par ces initiatives venant cristalliser un ensemble de problématiques liées au vivre-ensemble et à l’identité au Québec. Ces politiques tendent à s’insérer dans un ou plusieurs modèles de conception de la nation – modèle ethnique (Balthazar, 2004; Karmis, 2003; Oakes et Warren, 2009), civique (Bariteau, 2000, 2012) ou pluraliste (Bouchard, 2012; Juteau et McAndrew, 1992; Labelle, 2007) – afin de proposer un certain modèle de société.
Problématique
Mise en contexte
Avant d’aller plus loin, notons rapidement deux choses. Tout d’abord, le Canada est un État fédéral et, en ce sens, le Québec est institutionnellement reconnu comme une province canadienne. Cette précision est nécessaire pour saisir les enjeux soulevés par l’accent mis sur le mouvement souverainiste. En effet, si le Canada fait partie du Commonwealth, l’influence historique française reste présente au Québec et demeure le lieu d’enjeux politiques importants, notamment par rapport à la question de la souveraineté nationale ainsi que de l’identité culturelle et linguistique. Bien que les mouvements séparatistes aient marqué le développement historique du Québec, c’est seulement depuis les années 1960, avec la Révolution tranquille et sous l’impulsion de René Lévesque, qu’a commencé à s’imposer l’idée d’une identité québécoise (Ferretti, 1999; Pelletier, 1993). Le mouvement souverainiste au Québec est historiquement représenté par le Parti québécois (PQ) sur la scène provinciale et par le Bloc québécois sur la scène fédérale. Un troisième parti, Québec solidaire (QS), fondé en 2005, se fait une place grandissante au sein de la mouvance souverainiste.
Ensuite, il nous faut nous arrêter brièvement sur la question de l’immigration au Québec, puisqu’elle est centrale au sujet à l’étude. Tout d’abord, notons que le Québec partage avec le Canada les responsabilités en matière d’immigration (Québec, 2018). En ce sens, le ministère de l’Immigration, de la Diversité et de l’Inclusion joue un rôle central dans la sélection des personnes souhaitant s’installer au Québec. Depuis les années 1970, l’immigration en direction du Québec s’est largement diversifiée. Ainsi, avec la création du ministère de l’Immigration en 1968, la politique migratoire au Québec est passée d’une priorisation de l’immigration européenne à des fins économiques à une diversification des populations immigrantes choisies sur la base de leur qualification professionnelle. Ce changement a pour effet d’accélérer « la diversité ethnique et [de faire] apparaître la nécessité de “gérer” le pluralisme croissant » (Piché, 2005a, p. 25). Cette situation a mené les gouvernements successifs à penser un modèle d’intégration de la diversité cultuelle et culturelle au Québec. Cette volonté des pouvoirs publics a cependant été confrontée à plusieurs évènements dont la surexposition médiatique a entraîné bon nombre de débats concernant la liberté de culte au Québec. Ainsi, entre autres, en 2006, la Cour suprême du Canada invalidait une décision de justice de la Cour d’appel du Québec, qui empêchait un jeune sikh de porter son kirpan à l’école. La même année, le YMCA du Parc (Montréal) se retrouvait dans la controverse pour avoir posé des fenêtres givrées afin d’accommoder la communauté juive orthodoxe fréquentant la salle de sport (Bouchard et Taylor, 2008). Ces nombreux cas fortement médiatisés (39 sur la période allant de mars 2006 à juin 2007; Bouchard et Taylor, 2008) ont donné lieu à ce qui est communément appelé la « crise des accommodements raisonnables », ayant débouché sur la mise en place d’une Commission de consultation sur les pratiques d’accommodements reliées aux différences culturelles, dont la publication du rapport dit « Bouchard-Taylor » fut la conclusion.
Pertinence sociale et communicationnelle
Réaliser une analyse de discours nécessite avant toute chose de s’interroger sur la place que nous accordons à la communication dans la sphère sociale. À propos du mouvement souverainiste, d’abord, nous avons observé des prises de parole et de position diverses, nous laissant nous pencher sur de possibles dissensions au sein de ce courant. Une telle possibilité laissait alors une porte ouverte. Sur quels éléments du projet souverainiste les différents acteurs dont nous souhaitions interroger le discours étaient-ils en désaccord? Plus particulièrement, nous nous sommes attardée à la question de l’imaginaire national québécois, aux différentes manières de (re)présenter la nation au sein du mouvement souverainiste. Pour ce faire, nous sommes partie du principe que le projet de loi 60 du gouvernement péquiste visait à proposer un modèle de vivre-ensemble, une redéfinition du socle de l’identité québécoise. Notre réflexion vise alors, et c’est sur ce point central que repose sa pertinence sociale et scientifique, à interroger cette prétention. Notre projet en est un d’analyse critique de la proposition du PQ, dans le but de penser la construction d’une vie commune au Québec, au sens où nous cherchons à comprendre « comment les relations observables dans le champ de la communication interculturelle sont contraintes et/ou permises par les institutions, les idéologies et les contextes historiques[1] » (Halualani, Mendoza et Drzewiecka, 2009, p. 18).
Cette pertinence sociale rejoint l’idée que nous nous faisons de la communication, et plus particulièrement de la communication interculturelle. Notre approche communicationnelle est celle de la communication comme moyen de construction d’un monde commun permettant la mise en place d’une base sociale commune, d’une perspective partagée de la réalité, comme un processus symbolique à travers lequel la réalité est produite, maintenue et transformée (Carey, 1988). En effet, dans le cas qui nous intéresse ici, nous croyons que la mise en avant d’un ensemble d’idées, de représentations de ce qu’est la nation québécoise à travers les médias, a permis d’une part à la population de prendre connaissance du projet de Charte des valeurs, et donc de se constituer un socle commun de connaissances, et, d’autre part, a permis l’échange, la construction d’un sens, d’un débat posé sur ces fondations.
D’un point de vue interculturel, les discussions engagées à la suite de la proposition de Charte des valeurs par le PQ tendent à rejoindre les grands enjeux du domaine de la communication interculturelle identifiés et soulignés par Hsab et Stoiciu (2011), à savoir celui référant aux thématiques de « l’immigration, l’intégration, la construction nationale et toutes les questions liées à la gestion du pluralisme », celui se rapportant « à la rencontre avec l’autre, aux “problèmes” de communication entre porteurs de cultures différentes » et, enfin, l’enjeu relatif à « la question des appartenances identitaires et des espaces politiques » (p. 12). Nous souhaitons effectivement interroger ici les différentes mises en récit de modèles nationaux au Québec, ce qui vient modeler le champ politique, mais également mettre en question les méthodes d’intégration et d’inclusion des communautés culturelles.
Penser les imaginaires nationaux
Perspectives historiques
Penser les imaginaires nationaux au Québec nécessite de s’arrêter brièvement sur l’histoire de la province. En effet, qu’il s’agisse du projet des Patriotes voyant naître l’idée du sentiment national québécois (Balthazar, 2004), du nationalisme canadien-français influencé notamment par Henri Bourassa et Lionel Groulx (Dion, 2005) ou du tournant majeur des années 1960 qui, avec la Révolution tranquille, fait évoluer le nationalisme canadien-français vers un projet nationaliste québécois (Ferretti, 1999; Pelletier, 1993), les différentes figures de l’imaginaire national au Québec sont fortement liées à son passé historique. Cependant, si ses racines sont anciennes, il serait faux d’affirmer que l’imaginaire national québécois soit resté figé depuis la Révolution tranquille. En effet, à la politique axée sur la question linguistique (Monière, 1977) s’ajoute, à partir des années 1970, la nécessité de réfléchir à la diversité ethnique et culturelle (Piché, 2005b) du fait d’un contexte davantage mondialisé et d’une augmentation des flux migratoires à destination du Québec et du Canada. Dès lors, les gouvernements successifs vont formuler énoncés et politiques visant à établir le cadre législatif et civique en matière d’immigration et d’intégration (Direction des communications du MICCI, 1990).
Ces projets politiques conduiront à deux évènements centraux. D’abord, la définition de ce qu’est la citoyenneté québécoise en 1998 comme s’enracinant « dans le sentiment d’appartenance partagé par des individus qui ont à la fois des droits et libertés et des responsabilités à l’égard de la société dont ils font partie » et reconnaissant « les différences tout en se fondant sur l’adhésion aux valeurs communes » (Karmis, Lamoureux et Gervais, 2014, p. 33). Ensuite, la mise en place de la Commission Bouchard-Taylor en février 2007, entraînée par la « crise des accommodements raisonnables » et dont la mission a été de faire un bilan de différentes pratiques d’accommodements ayant cours au Québec afin de mettre à plat le sentiment d’injustice pouvant être vécu par certains Québécois d’origine canadienne-française (Robin, 2011). Cette commission et les 22 forums la composant ont constitué le lieu des débats durant lesquels « le populisme va s’en donner à cœur joie […] mettant à jour un “nous” canadien-français en face de tous les autres, occultant largement le “nous” québécois inclusif qui s’était auparavant développé dans le discours social » (Robin, 2011, p. 105). L’objet de craintes est ici celui d’une perte de liberté pour la société québécoise d’origine canadienne-française par l’octroi de libertés et d’exceptions à certaines communautés culturelles (Bouchard et Taylor, 2008; Myles et Shields, 2008).
Comment alors, dans ce contexte, penser la nation québécoise? Si les revendications proposées par les différents mouvements abordés précédemment tendent à s’organiser autour de valeurs communes telles que la langue, d’autres éléments semblent davantage poser problème, à l’exemple de la religion et des demandes d’accommodements pouvant en découler. Il nous semble dès lors nécessaire de faire un retour conceptuel sur l’idée de nation et de nationalisme(s) afin de mettre les choses en perspective. En effet, et pour reprendre le point de vue interculturel qui nous anime, rappelons que « c’est dans leur rapport à la communauté nationale, désignée comme majorité, nation, société d’accueil ou État que ces ethnies, minorités, etc. sont perçues » (Stoiciu, 2011, p. 59). De manière schématique, il nous est alors possible de mettre de l’avant trois grandes conceptualisations de la nation que sont le modèle ethnique, le modèle civique et le modèle pluraliste, qui permettent à la fois de définir cette « communauté nationale » et, par conséquent, de représenter et de percevoir les personnes issues de la diversité culturelle et cultuelle.
Les différentes conceptualisations de la nation et des nationalismes
Le nationalisme ethnique, dans la lignée notamment de l’ouvrage central d’Ernest Gellner, Nations and nationalism (1983), repose sur les piliers fondateurs que sont la culture et la langue, lesquels sont, en quelque sorte, essentialisés afin de devenir des moyens pour les individus de vivre sereinement au sein d’une communauté d’appartenance. Il devient alors nécessaire, pour l’individu, d’intérioriser ces marqueurs et de repousser celles et ceux qui ne les partagent pas. La mobilité d’une personne vers une nation semble difficile, voire impossible, puisqu’elle se sentira toujours aliénée et sera soumise à la majorité, les caractéristiques de la nation se rattachant à une communauté de descendance. Au Québec, cette idée se retrouve par exemple à la suite de la défaite des Patriotes dans le nationalisme canadien-français qui se base sur « la présomption plus ou moins avouée d’une communauté de descendance qui est le critère d’appartenance déterminant » (Karmis, 2003, p. 105). Ainsi, l’identité canadienne-française, par opposition à l’identité canadienne-anglaise, se développe sur les bases d’un tel modèle de la nation centré autour de « valeurs traditionnelles catholiques et rurales » (Oakes et Warren, 2013, p. 30) dans une optique de survivance. À cette conception organique de la nation s’oppose un modèle que l’on qualifiera de « civique ».
Ce second modèle se lit au Québec à partir du tournant provoqué par la Révolution tranquille et repose sur quatre éléments : un territoire historique, une communauté d’institutions politiques et de lois, le principe de l’égalité des droits politiques et civils pour tous les citoyens et, finalement, la socialisation à une culture civique commune venant assurer une adhésion rationnelle aux institutions, aux pratiques et aux principes qui constituent l’identité nationale (Karmis, 2003). Se rattachant d’une certaine façon à la conception habermassienne de la démocratie participative, cette vision civique de la nation telle qu’elle est notamment avancée par Claude Bariteau (2000) se veut politique, construite autour d’une culture politique et publique commune et dont le statut de la langue française est davantage instrumental, c’est-à-dire un outil de communication plus qu’un point de convergence culturelle. Dans cette approche, cinq règles sont à respecter : la loi doit être neutre; l’intégration citoyenne doit se faire selon une culture politique commune et être distinguée de la question de l’intégration de groupes à leur culture « d’origine »; le rejet des fondamentalismes doit être inscrit dans la Constitution; l’intégration des personnes immigrantes doit se faire en fonction de la culture politique plutôt qu’au regard d’acteurs culturels majoritaires au sein de la société d’accueil; et, enfin, cette culture politique doit être « respectueuse des différences caractérisant les communautés qui composent la nation » (Bariteau, 2012, p. 146).
Cette vision civique du modèle national vise à prioriser les libertés individuelles aux dépens des libertés collectives de façon à éviter une « surenchère en faveur de droits collectifs reconnus » (Bariteau, 2012, p. 155). Ainsi, l’Énoncé de politique en matière d’immigration et d’intégration de 1990 représentait, notamment pour Gérard Bouchard, la mise en avant de la dimension civique. Il soulevait dès lors quelques manquements, notamment dans la non-prise en compte de questions culturelles et identitaires le rapprochant ainsi du multiculturalisme canadien et dans la volonté sous-jacente de cet énoncé de « faire l’impasse sur le rapport majorités-minorités, alors que ce rapport était et demeure au centre des préoccupations québécoises » (Bouchard, 2012, p. 49). Ce rapport fait entre autres écho aux influences de la France, de la Grande-Bretagne, des États-Unis ou du Canada anglais (Bouchard, 2000) dans le développement du Québec, mais aussi au fait que les Québécois, sorte d’exception culturelle, sont majoritaires « chez eux », mais minoritaires à l’échelle canadienne (McAndrew, 2010).
Les critiques formulées à l’encontre du modèle ethnique et du modèle civique ont poussé à la mise en place d’un troisième type de nationalisme, l’approche pluraliste, qui vise à réconcilier ces deux premiers modèles, mais également à affirmer son ouverture à la diversité. En effet, au Québec, plusieurs chercheuses et chercheurs ont proposé un décloisonnement des modèles civiques et ethniques dans le but de privilégier un modèle inclusif de la diversité. L’idée proposée, notamment par Danielle Juteau, suppose trois conditions. D’abord, il faut penser la collectivité comme étant avant tout politique et non plus définie par l’identité du groupe ethnique dominant. Ensuite, il est nécessaire d’aborder la différence entre les individus constituant la société comme le fruit de son développement. Enfin, l’identité nationale ne doit pas être considérée « ni comme un héritage du passé ni comme un choix collectif qui fait tabula rasa, mais comme un dialogue à l’intérieur duquel le passé et le présent s’interrogent et s’illuminent mutuellement » (Juteau, 2000, p. 209). L’interculturalisme qu’ont présenté Bouchard et Taylor s’insère également dans cette approche pluraliste de la nation, entre autres par sa volonté de promouvoir l’intégration des personnes issues de l’immigration et des membres de communautés culturelles souvent laissées à la marge des communautés politiques dominantes (Gagnon, 2000). Le projet formulé par l’interculturalisme et repris par les chercheuses et chercheurs vise alors à favoriser la diversité, à lutter contre les discriminations et le racisme, à promouvoir la francophonie, mais également à prôner une société fondée sur le respect mutuel (Rocher et al., 2007). Il tente donc de se formuler comme une réponse aux limites du nationalisme ethnique et à la difficile application du nationalisme civique.
L’interculturalisme comme résistance
L’interculturalisme dont nous venons de parler ne s’insère pas uniquement au sein d’un modèle de conceptualisation de la nation que l’on pourrait qualifier de « pluraliste ». Il est aussi un projet de société pour le Québec, projet passant notamment par la lutte contre le multiculturalisme canadien prôné par l’ancien premier ministre Pierre Elliott Trudeau. Cette doctrine canadienne est perçue par plusieurs comme une volonté de promouvoir et de consolider une identité canadienne aux dépens d’une identité québécoise, au sens où « [l]a reconnaissance de la pluriethnicité au sein de la société canadienne a conduit le gouvernement fédéral à adopter une perspective qui s’inspire du relativisme culturel : toutes les cultures sont également importantes et devraient avoir le même poids » (Labelle et al., 1995, p. 217), ce qui vient réduire le rôle du peuple québécois au rang de simple « communauté culturelle », lui refusant alors son statut de fondateur du Canada.
En amenant un nouveau modèle d’intégration, l’interculturalisme vise donc à proposer des orientations en matière de diversité culturelle et d’inclusion à un niveau provincial, qui viendraient notamment reconnaître les acquis de la société québécoise tout en faisant la promotion de l’inclusion des communautés culturelles et des personnes issues de l’immigration afin de former une société unie.
Si la question du multiculturalisme n’était pas mentionnée directement par le texte de la Charte des valeurs, elle a tout de même fait irruption dans le débat, par exemple sous la plume de Jean-François Lisée, alors ministre des Relations internationales et de la région de Montréal sous le gouvernement Marois, pour qui ce projet de loi représentait une rupture nette avec le multiculturalisme gouvernemental canadien (Lisée, 2014). La Charte des valeurs visait ainsi à mettre de l’avant les valeurs considérées comme québécoises, à savoir l’égalité de tous face à l’État, l’égalité femme-homme, la neutralité religieuse de l’État ainsi que le respect du patrimoine culturel et historique (Québec, 2013a). Pour ce faire, cinq propositions, présentées ci-après, ont été émises par le ministre Drainville (Québec, 2013b). C’est à partir de ces recommandations, puis du texte de loi 60 soumis à l’Assemblée nationale que nous avons organisé notre analyse. Notre étude, à travers un regard critique, vise à identifier, à analyser et à situer les réactions de six membres du mouvement souverainiste au Québec vis-à-vis de cette tentative de formulation d’un « Nous » québécois par le gouvernement Marois en 2013, par rapport aux grands modèles de définition de la nation présentés plus tôt.
Méthodologie
Afin de mener cette étude, nous avons fait le choix de suivre une stratégie de recherche mixte (Denzin et Lincoln, 2005; Pluye, 2009). Dans un premier temps, une analyse quantitative suivant la méthode Morin-Chartier (Leray, 2008) a été mobilisée afin de dresser un portrait général de la situation, portrait qui a par la suite été précisé grâce à une analyse rhétorique argumentative (Toulmin, 1993) des propos des personnalités retenues pour constituer notre corpus. Celui-ci est constitué de 113 articles de presse issus des trois grands quotidiens francophones au Québec : Le Devoir, La Presse et Le Journal de Montréal, publiés dans la période allant du 11 septembre 2013, date de dévoilement du projet, au 7 avril 2014, date des élections générales ayant eu lieu au Québec. Le critère de sélection des articles tenait dans la citation, sous forme de discours direct ou rapporté, explicite de l’opinion de six personnalités. Ceci se justifie par le fait que nous ne souhaitions pas analyser la perception médiatique de la Charte des valeurs, mais bien la réception de celle-ci par six personnalités du mouvement souverainiste. Il était également nécessaire de tenir compte du nombre de prises de parole de chacune des personnes afin d’assurer une certaine substantialité à notre analyse.
À partir d’une observation de la présence médiatique de personnalités souverainistes rattachées à l’un des trois partis souverainistes (PQ, Bloc québécois, Québec solidaire), nous avons retenu les personnes suivantes : Lucien Bouchard, ancien chef du Parti québécois et ancien Premier ministre (PM); Françoise David, co-porte-parole de Québec solidaire; Gilles Duceppe, député du Bloc québécois; Bernard Landry, ancien chef du PQ et ancien PM; Maria Mourani, députée du Bloc québécois puis indépendante; et Jacques Parizeau, ancien chef du PQ et ancien PM[2]. La sélection de ces personnes s’est faite de façon à pouvoir analyser le raisonnement et l’argumentation de ces acteurs qui s’insèrent au sein du mouvement souverainiste qui n’est pas univoque. Notons ici que si le PQ, parti souverainiste, est à l’origine de la Charte des valeurs, tous les souverainistes ne sont pas nécessairement en accord – ni en opposition, d’ailleurs, à l’exemple de Gilles Duceppe – avec le projet, à l’exemple de Bouchard, Landry et Parizeau, anciens chefs du PQ. Dès lors, si le mouvement souverainiste québécois partage un objectif commun, il nous apparaît pertinent d’interroger les éventuelles divergences dans la façon d’affirmer l’identité québécoise.
D’un point de vue méthodologique, notre étude s’est faite en deux temps. D’abord, nous avons mobilisé la méthode Morin-Chartier, qui nous a permis de coder notre corpus en fonction d’unités d’information représentant des « unités de sens » (Leray, 2008, p. 15). Ainsi, dans les 113 articles sélectionnés, nous avons pu extraire 487 unités d’information. La grille d’analyse mise en place est basée sur un ensemble de sujets qui « permettent d’identifier les grands thèmes ou les idées que contient le corpus en tenant compte de l’objet de la recherche et de la problématique développée » (p. 26). À partir de notre cadre théorique et d’une première lecture de nos unités d’information, six thématiques ont émergé : la « gestion de la diversité », comme recouvrant le caractère administratif et institutionnel des politiques prévues par la Charte des valeurs; la « reconnaissance du pluralisme », recoupant les interventions reconnaissant l’altérité au sein de la société québécoise; l’« identité » dans la mise en avant de certains marqueurs d’une identité québécoise; la « religion » et le traitement qui en est fait par les personnalités de notre corpus; les « droits civiques » pouvant être, ou non, affectés par le projet de Charte; et, enfin, les interventions concernant de manière directe l’idée de « débat » durant la période de notre étude. Cette étape nous a également laissée entrevoir, à travers une évaluation rapide des unités d’information, le caractère positif, négatif ou neutre (Leray, 2008) des prises de parole afin d’obtenir une vision d’ensemble de la réception du projet.
Ensuite, une fois ce tour d’horizon réalisé et cet aperçu général de la situation établi, nous avons procédé à une analyse qualitative de l’argumentation, au sens où « il y a argumentation quand une prise de position, un point de vue, une façon de percevoir le monde s’exprime sur le fond de positions et de visions antagonistes ou tout simplement divergentes, en tentant de prévaloir ou de se faire admettre » (Amossy, 2010, p. 32). Aux fins de notre analyse, nous avons privilégié la mobilisation du modèle de l’argumentation en contexte développé par Stephen Toulmin (1993). À partir des unités d’information identifiées lors de notre première étape d’analyse, nous avons appliqué ce modèle afin de regarder la construction du discours, d’évaluer les arguments proposés par les personnes choisies, la manière dont les unités d’information ont été mentionnées, puis d’observer les possibles nuances apportées à ces arguments. Cette analyse s’organise donc sur « l’agencement de données (D) invoquées pour soutenir une conclusion (C) » (Toulmin, 1003, p. 66-67). Le chemin de D à C est constitué de plusieurs éléments : les éléments primaires, constitués des données, d’une proposition correspondant à la position de l’énonciateur et à ce qui suivrait un « donc » et d’une garantie qui vient appuyer la proposition (« puisque »). À cela s’ajoutent les éléments secondaires que sont la caution qui appuie les garanties (« parce que »), la réfutation (« alors que » ou « même s’il est vrai que ») et le qualifiant (« peut-être ») (Broustau, 2007). Dès lors, cette déconstruction des arguments nous a permis d’évaluer à la fois le positionnement des personnalités, mais également les procédés discursifs mobilisés afin de justifier leur position.
Résultats
Le projet de Charte des valeurs en détail
Un état des lieux de la diversité au Québec
Le projet initial s’inscrit dans « ce contexte de diversité croissante et dans le prolongement du mouvement progressif de séparation des religions et de l’État issu de la Révolution tranquille » (Québec, 2013b, p. 5). Orienté autour des grands piliers que sont la laïcité des institutions, l’égalité entre les femmes et les hommes et la primauté du français, le projet de Charte des valeurs vise à répondre à la question du pluralisme religieux « dans un État moderne, soucieux de l’égalité de toutes et tous afin de tisser ensemble, par-delà les différences religieuses, morales ou culturelles de toute personne, un lien civique fort » (p. 5). Dès lors, ce projet s’annonce comme fondateur ou refondateur d’un socle identitaire commun, comme document intégrateur sur fond institutionnel et politique. La Charte proposée par le PQ semble faire apparaître les prémisses d’une inscription dans un modèle national civique, inscrivant alors le fait que « [c]e sont ces conditions qui renforcent la cohésion d’une nation » (p. 5). La proposition émise vise à combler certaines lacunes légales permettant le bon vivre-ensemble au Québec et, par-là même, à instaurer une culture politique commune permettant l’adhésion des résidentes et résidents du Québec à un projet national partagé par le plus grand nombre, inscrit dans un principe d’égalité des droits politiques et civils pour toutes les citoyennes et tous les citoyens (Karmis, 2003). Il est possible de voir dans la réaffirmation de la séparation de l’Église et de l’État (Québec, 2013b) une réponse à la diversité et à la pluralité de la société québécoise pour laquelle le gouvernement péquiste entend permettre le développement d’un espace commun dénué du religieux dans lequel chaque personne pourrait se reconnaître comme citoyenne ou citoyen.
Les cinq orientations : des pistes pour gérer la diversité
La première orientation vise à « [i]nscrire, dans la Charte québécoise des droits et libertés de la personne, les valeurs de la société québécoise dont la neutralité de l’État et le caractère laïque des institutions publiques, et y baliser les demandes d’accommodements religieux » (Québec, 2013b, p. 12). Par là, le PQ entend donner un caractère juridique au terme laïcité dans le but d’offrir un équilibre entre les droits individuels et les droits collectifs des individus et de renforcer la cohésion sociale, tout en insistant sur la nécessité de garder à l’esprit les « éléments emblématiques et toponymiques du patrimoine culturel du Québec, qui témoignent de son parcours historique » (p. 13). La deuxième orientation a pour but d’« [é]tablir dans la loi un devoir de réserve et de neutralité en matière religieuse de la part des membres du personnel de l’État dans l’exercice de leurs fonctions » (p. 14). Cette précision vise à élargir le devoir de réserve, déjà existant en matière d’opinion politique, en intégrant une dimension cultuelle. En ce sens, les membres du personnel d’État sont tenus à l’exercice de leur fonction « indépendamment de leurs opinions et croyances en matière religieuse » (p. 14). La troisième orientation vise à interdire le port de signes religieux dits « ostentatoires » par les personnes exerçant au sein de la fonction publique (p. 15), éléments définis comme un ensemble de « signes très apparents tels un couvre-chef, un vêtement, une parure ou un accessoire ayant un caractère démonstratif important, porté de façon facilement visible et qui véhicule une signification d’appartenance religieuse » (p. 16). Sont visées un grand nombre de catégories de fonctionnaires, allant des personnes employées au sein d’un ministère ou d’un organisme gouvernemental aux membres du corps policier et du service correctionnel, en passant par les membres du réseau public de santé et des services sociaux ou encore le personnel de milieu de garde subventionné (p. 15). La quatrième orientation du projet de Charte des valeurs entend « [p]révoir dans la loi que les services de l’État doivent être donnés et reçus à visage découvert » (p. 17). Enfin, la cinquième orientation vise à « [b]aliser les demandes d’accommodements religieux et [à] prévoir une obligation pour les ministères, organismes et établissements de se doter de politiques de mise en œuvre » (p. 18).
Présentation des résultats
Ces orientations ont provoqué un certain nombre de discussions au sein de l’espace public au Québec, mais également, pour le cas qui nous intéresse ici, au sein du mouvement souverainiste. Ce sont les résultats de notre analyse en deux temps que nous allons maintenant présenter.
Analyse quantitative
Dans un premier temps, en suivant la méthode Morin-Chartier, notre analyse générale des six sujets présentés précédemment nous a permis de dresser un état des lieux global de la question (Tableau 1). En analysant les 487 unités d’information tirées des 113 articles constituant notre corpus, nous avons pu observer une réception plutôt négative du projet de Charte des valeurs par les six personnalités du mouvement souverainiste retenues.
L’analyse quantitative des perceptions des différentes propositions émises par le projet de Charte des valeurs nous a permis de mettre de l’avant le fait que certaines idées, comme la législation sur le port de signes religieux, la possibilité d’exemption, la question du crucifix à l’Assemblée nationale ou encore le fait que le projet péquiste puisse cibler certaines populations spécifiques, ont été reçues de façon négative par les membres de notre corpus. Cependant, cela nous a également laissée voir que d’autres propositions répondaient à des vides juridiques ou à des attentes sociales et sociétales, tels que la nécessité de baliser les accommodements religieux, le besoin de donner et de recevoir des services à visage découvert ou même encore la simple nécessité d’engager le débat sur la place de la religion au sein de la société québécoise.
Analyse qualitative des arguments
Bien que les données chiffrées obtenues à l’issue de cette première étape nous renseignent sur la réception du projet de Charte des valeurs, et plus tard du projet de loi 60, il est nécessaire d’affiner l’analyse afin de pouvoir mettre celles-ci en rapport avec les différents modèles de conceptualisation de la nation présentés précédemment. En ce sens, nous avons procédé à une seconde étape d’analyse, qui consiste à nous pencher sur l’argumentation de nos six personnalités : Lucien Bouchard, Françoise David, Gilles Duceppe, Bernard Landry, Maria Mourani et Jacques Parizeau.
Quatre de ces six personnes ayant elles-mêmes publié au moins un texte d’opinion se rapportant au projet de Charte des valeurs, nous avons privilégié une étude desdits textes. Ainsi, Jacques Parizeau a publié le 2 octobre 2013, sur son blogue du Journal de Montréal, une lettre ouverte intitulée « Assouplissements nécessaires » (Parizeau, 2013). Le 3 novembre 2013, Bernard Landry publiait dans Le Devoir une lettre ouverte intitulée « L’éducation implique diverses formes d’autorité » (Landry, 2013) et Maria Mourani s’exprimait d’abord dans La Presse avec sa lettre ouverte « Un référendum sur la Charte? » (Mourani, 2013a), en date du 2 octobre 2013, puis le 19 décembre dans Le Devoir, avec une seconde lettre ouverte : « Je ne suis plus indépendantiste » (Mourani, 2013b). Enfin, Gilles Duceppe publiait, le 10 janvier 2014, un billet sur son blogue du Journal de Montréal intitulé « Débats sur la Charte : C’est parti ! » (Duceppe, 2014a), le 9 mars 2014, « Les fausses affaires de Philippe Couillard » (Duceppe, 2014b) et, enfin, le 15 mars 2014, « Avant de donner des leçons, Philippe Couillard devrait apporter des explications » (Duceppe, 2014c). Pour Lucien Bouchard, nous avons analysé une longue entrevue donnée le 4 octobre 2013 à Yves Boisvert, journaliste à La Presse, intitulée « Pauline Marois peut faire un triomphe » (Boisvert et Bouchard, 2013). Enfin, pour Françoise David, nous avons colligé les citations directes rapportées à travers notre corpus[3].
Interprétation des résultats
Nous proposons une interprétation des éléments centraux étant ressortis de ces discours en suivant trois grands points que sont la nécessité du débat entourant la question de la diversité au sein de la société québécoise, la réglementation des signes religieux et le respect des droits civiques qui en découlent ainsi que la conception de l’identité nationale québécoise. Nous souhaitons aborder la situation de coprésence inhérente à la communication interculturelle (Hsab et Stoiciu, 2011) et, plus particulièrement ici, l’interaction entre une société d’accueil et des individus porteurs de cultures différentes par le biais d’un projet politique particulier, celui de la Charte des valeurs. Une telle entreprise vise à mettre de l’avant le fait que l’inclusion d’une population particulière au sein d’une société donnée peut être influencée par les débats qui entourent la question nationale. En ce sens, les représentations qui sont véhiculées dans le projet politique et les points d’accord ou d’opposition qui sont soulevés par les personnes composant notre corpus ont une influence sur la formulation d’un projet de société, sur la construction d’un monde social partagé. Dès lors, et cela a déjà été traité notamment dans le cadre des débats entourant la « crise » des accommodements raisonnables (Chahid, 2011; Potvin, 2011), le projet de Charte des valeurs et les discussions qui ont suivi vont avoir des effets sur la perception et sur la représentation de certaines catégories de population, et plus particulièrement sur celles des personnes dont la différence culturelle et cultuelle réelle ou supposée est visible.
Un débat nécessaire
À la suite de la « crise » des accommodements raisonnables et des travaux de la Commission Bouchard-Taylor, le débat sur la place de la religion au sein de la société québécoise reste toujours et encore d’actualité. Effectivement, malgré les recommandations formulées dans le rapport Fonder l’avenir, le temps de la conciliation (Bouchard et Taylor, 2008), le gouvernement libéral de l’époque n’avait pas souhaité légiférer sur la question. Le projet de Charte des valeurs entend donc rouvrir le débat sur la diversité religieuse, mais également proposer un cadre légal et des balises claires pour l’encadrement des différents accommodements.
Si pour les six personnes retenues ici le débat apparaît nécessaire, puisqu’il permet de réfléchir à la diversité et à l’insertion des personnes issues des communautés culturelles, la perception qu’elles s’en font reste mitigée. En effet, Bernard Landry y verra, par exemple, un débat « profond et démocratique, l’un des grands de notre histoire contemporaine, et presque toujours sans dérapages […] [pour lequel] toutes ces discussions devraient nous amener au plus haut niveau de confiance rassembleuse » (Landry, 2013, s. p.). D’autres, comme Lucien Bouchard ou Françoise David, s’inquiéteront du climat parfois malsain imposé par ce débat. Dès lors, bien que cette discussion reste nécessaire, il est important d’agir avec prudence et avec une certaine neutralité politique afin d’éviter une dégradation des discussions, aussi bien au sein de l’espace public québécois (Parizeau, 2013) que du mouvement souverainiste (Mourani, 2013b), que lors des échanges en commission parlementaire (Duceppe, 2014a).
L’élément central cristallisant les positions des intervenantes et intervenants dans ce débat reste la volonté du PQ d’interdire le port de signes religieux par les employés de la fonction publique. Au-delà de la simple nécessité de donner et de recevoir ces services à visage découvert, point sur lequel toutes et tous semblent s’accorder, une interdiction uniforme et généralisée de cette marque de croyance semble être rejetée unanimement. Les personnes retenues aux fins de notre analyse s’enlignent plutôt avec les recommandations du rapport Bouchard-Taylor, affirmant qu’une majorité de Québécoises et de Québécois s’accordent sur le fait qu’une telle interdiction « s’appliquant à tous les employés de l’État, quelle que soit la nature de leur poste, est abusive, mais tiennent à ce que [les personnes détenant un pouvoir de coercition] […] s’imposent une forme de devoir de réserve quant à l’expression de leurs convictions religieuses » (Bouchard et Taylor, 2008, p. 151). Il faudrait alors privilégié une certaine neutralité de la part des juges, des policiers, des magistrats notamment, liste à laquelle seul Bernard Landry (2013) proposera un ajout, celui des personnes enseignantes qui détiennent, selon lui, une autorité « intellectuelle, morale, voire disciplinaire et arbitrale, pour les notes d’examen par exemple » (s. p.).
Ce « front commun » qui se dessine autour de la neutralité des institutions et non de la neutralité des individus est renforcé par le rejet d’une première incohérence, celle de la conservation du crucifix au salon bleu de l’Assemblée nationale. Bien que le document d’orientation Parce que nos valeurs, on y croit vise à encadrer la laïcité de l’État, il y est tout de même émis que l’affirmation d’un tel principe « ne devrait pas avoir pour effet de supprimer tout référent historique qui a une connotation religieuse et patrimoniale » (Québec, 2013b, p. 13). Ce crucifix, installé en 1936 par Maurice Duplessis, revêt effectivement un caractère historique. Celui d’une époque où l’État et la religion étaient fortement liés. Le souvenir de cette période, caractérisée a posteriori de « grande noirceur », a fortement teinté l’imaginaire collectif québécois et pousse à réfléchir au statut de ce symbole religieux affiché dans l’enceinte parlementaire. Vise-t-il à garder la trace de ce moment historique particulier ou plutôt à réaffirmer l’importance de la religion dans le développement de l’État québécois? Quoi qu’il en soit, l’argumentation des protagonistes de notre étude converge vers cette idée d’un retrait.
Laïcité, droits civiques et société en crise
Ces éléments soulevés s’ancrent fortement dans l’importance de prise en compte de la question de l’égalité des droits entre les personnes issues de l’immigration et les individus dits d’« origine canadienne-française ». Nous retrouvons alors ici une thématique souvent reprise en communication internationale et interculturelle, à savoir l’identité culturelle comme enjeu politique. L’idée mise de l’avant par le projet de Charte des valeurs se veut rassembleuse pour la société québécoise dans un contexte de diversité culturelle. Cependant, là où son dévoilement mettait de l’avant une volonté de délimitation civique de l’identité et de la nation, les orientations prévues se retrouvent confrontées à cette complexité d’articulation des différentes demandes populaires. Une telle difficulté avait déjà été soulevée en 2008 par le rapport de la Commission Bouchard-Taylor qui avançait :
La « vague » des accommodements a manifestement heurté plusieurs cordes sensibles des Québécois canadiens-français de telle sorte que les demandes d’ajustement religieux ont fait craindre pour l’héritage le plus précieux de la Révolution tranquille […]. Il en a résulté un mouvement de braquage identitaire, qui s’est exprimé par un rejet des pratiques d’harmonisation. […] Les membres de la majorité ethnoculturelle craignent d’être submergés par des minorités elles-mêmes fragiles et inquiètes de leur avenir (Bouchard et Taylor, 2008, p. 18).
D’un autre côté, pour Françoise David, il est nécessaire de souligner qu’une différence doit être faite « entre la neutralité religieuse des institutions et celle des individus. Nous [à Québec Solidaire] croyons qu’une personne peut agir avec loyauté et professionnalisme, tout en arborant un signe religieux » (Lavallée, 2013, s. p.), par opposition à l’idée avancée dans le projet de Charte selon laquelle le « port de signes ostentatoires revêt en soi un aspect de prosélytisme passif qui apparaît incompatible avec la neutralité de l’État » (Québec, 2013b, p. 16). Cette prise de position s’insère dans la reconnaissance de la rationalité – et de la diversité – des individus propre au modèle civique de conceptualisation de la nation. En ce sens, la religion ou les croyances des individus ne définissent pas leur aptitude à effectuer les tâches qui leur sont imparties. Ainsi, le port de signes religieux par les individus n’implique ni un traitement différencié des individus, ni un rejet de l’État québécois et de ses valeurs, ni une forme de prosélytisme. Françoise David, dans son intervention, rejette une certaine conception essentialisante de la religion sous-entendue, selon elle, par le projet de Charte des valeurs. En effet, elle regrette la corrélation entre le port de signes religieux dits « ostentatoires » et la qualité du service effectué par les personnes employées dans la fonction publique. Si la volonté du projet de Bernard Drainville en est une de resserrage du lien civique par l’intermédiaire de l’interdiction de certains signes religieux, l’individu est alors rattaché, de manière quasi naturelle, à ce signe d’appartenance, rendant alors son activité orientée idéologiquement et personnellement.
Dès lors que ces idées sont amalgamées, il semble compliqué pour les personnes issues de minorités culturelles et religieuses d’être, d’une part, considérées comme des individus rationnels et, d’autre part, de ne pas être rattachées contre leur gré à une image négative de leur religion. Ce point spécifique sera d’ailleurs soulevé par Parizeau (2013), évoquant que cette instrumentalisation de la peur de l’islamisme permettrait au gouvernement péquiste de trouver des appuis :
Et cela peut se comprendre. À peu près le seul contact que la plupart des Québécois ont avec le monde islamique, c’est cette image de violence, répétée à l’infini […]; c’est l’image aussi de la subordination de la femme à l’homme et de la violence qu’on lui inflige lorsqu’elle cherche à s’en dégager. Le réflexe est évident : pas de ça chez nous ! (s. p.)
Penser l’identité nationale québécoise
Face à ces enjeux centraux, comment est-il alors possible de repenser et de redéfinir les contours de l’identité nationale au Québec et, par extension, d’offrir un cadre au sein duquel les personnes issues de la diversité pourraient s’insérer? Le projet du ministre Drainville en était un de création d’une certaine cohésion orientée autour de valeurs de neutralité de l’État, permettant la revendication de valeurs d’égalité entre les individus constituant la société – entre les femmes et les hommes, entre les différentes religions pratiquées au Québec. Parmi les six personnalités mobilisées aux fins de notre étude, l’identité québécoise se définit par son ouverture, sa neutralité et sa tolérance (Boisvert et Bouchard, 2013; Parizeau, 2013). Elle fonctionne sur la base des valeurs sociales que sont la solidarité sociale, la répartition des richesses, la mise en avant du rôle des femmes (Landry, 2013), mais également la lutte contre l’exclusion (Mourani, 2013b). Finalement, son développement s’est ancré dans la protection de la langue française (Duceppe, 2014b) et dans un ensemble de revendications souverainistes (David, dans Lavallée, 2013).
En ce sens, les débats, parfois virulents, ayant lieu au sein de l’espace public et de la sphère politique québécoise ont incité les six personnalités retenues ici à pousser le gouvernement péquiste vers un compromis pour proposer une sortie à la crise divisant la société. Une modification du nom du projet aurait pu être un bon départ. En effet, pour Bouchard, Landry et Parizeau, orienter cette Charte vers la laïcité et non plus sur les « valeurs » aurait permis de rassembler les Québécois autour de grands enjeux, autour d’un caractère plus inclusif. Françoise David va dans le même sens en regrettant la polarisation autour de la question identitaire qui se fait sur le dos de personnes en situation déjà précaire. Elle proposera ainsi, avec Québec solidaire, le projet de loi 398, Charte de la laïcité de l’État québécois, visant d’une part à montrer qu’un compromis est envisageable en axant sur la laïcité et, d’autre part, à réaffirmer que la laïcité touche l’État québécois et ses institutions sans restreindre les individus qui le composent (David, 2013).
Dans le même ordre d’idées, Maria Mourani (2013b) réaffirmera la nécessité de repenser ce projet de Charte en termes civiques, argumentant
[qu’i]l n’y a qu’une catégorie de Québécois : ceux qui ont fait du Québec leur maison. L’identité québécoise se construit par la participation des citoyens à la société, et ce, via l’éducation, la vie démocratique, associative et communautaire, les médias, le commerce, la politique et surtout par l’accès à l’emploi. Nous sommes tous Québécoises et Québécois sans exception. (s. p.)
Cette orientation, présente dans le discours de Maria Mourani, poussera cette dernière à privilégier un modèle d’intégration multiculturaliste comme seul défenseur d’une identité québécoise basée sur un modèle national civique, regrettant le virage ethnique du projet national soutenu par le PQ à travers sa Charte.
De leur côté, Françoise David et messieurs Parizeau, Bouchard et Landry soutiennent le développement d’un modèle national pluraliste, et plus particulièrement d’un modèle interculturel exposé dans le rapport de la Commission Bouchard-Taylor, puis dans l’ouvrage L’interculturalisme de Gérard Bouchard (2012). Leur argumentation tend effectivement à souligner la nécessité de réaffirmer les valeurs fondamentales communes structurant la société québécoise et auxquelles toutes et tous devraient se conformer. Ces quatre personnalités du mouvement souverainiste refusent également l’exclusion de certaines catégories de personnes sur la base de leur appartenance culturelle ou religieuse et rejettent alors le caractère essentialisant de l’appartenance à une confession particulière et les implications professionnelles sous-entendues dans le projet de Charte des valeurs. Les droits individuels, et notamment le droit fondamental de religion, sont alors préférés à une interdiction non nuancée du port de signes religieux dits « ostentatoires » qui, selon ces personnes, devrait s’appliquer à l’État et aux institutions, et non aux individus qui y sont employés.
À ce socle civique s’ajoute l’accent mis sur la prise en compte d’une histoire commune, de symboles et de mythes partagés. Ces revendications s’articulent entre autres autour de la Charte de la langue française, ou loi 101, qui comme son nom l’indique, vise à protéger et à promouvoir l’emploi du français au Québec. Cette revendication s’articule avec le long processus historique que fut la Révolution tranquille et la place donnée à son architecte principal, René Lévesque, qui revêt un poids symbolique déterminant dans l’imaginaire souverainiste.
La question de la langue française est d’ailleurs ce qui va différencier partiellement le discours de Gilles Duceppe de celui des personnes mentionnées précédemment. Bien que la majeure partie de son discours semble s’insérer dans un projet national interculturel, puisque reconnaissant la diversité culturelle, la nécessité de baliser les accommodements religieux et le besoin d’arriver à un compromis à propos du projet de Charte des valeurs pour permettre le bon vivre-ensemble au sein de la société, le statut qu’il accorde à la langue française et aux marqueurs de l’identité québécoise est plus catégorique. Duceppe propose que la religion, au même titre que la langue française, soit encadrée légalement. Pour lui, la loi 101 a permis de légitimer l’usage du français au Québec en lui offrant un statut légal qui appuie le poids symbolique dont il bénéficiait d’ores et déjà. La langue française, pour Duceppe, est alors comme un moyen de revendication et de réaffirmation identitaire, comme un moyen de revendiquer une identité propre et de se différencier du reste du Canada.
Conclusion
En conclusion, le projet de Charte des valeurs québécoises proposé par le ministre Drainville en septembre 2013 visait principalement à réaffirmer les contours de l’identité nationale québécoise, à travers la mise en place de balises claires entourant les demandes d’accommodements raisonnables et la promotion de l’égalité entre les femmes et les hommes, de la laïcité de l’État et de l’interdiction du port de signes religieux dits « ostentatoires » par les personnes employées de la fonction publique. Si le projet souhaitait répondre à un manque souligné notamment par les travaux et le rapport de la Commission Bouchard-Taylor (2008), le projet péquiste, plutôt que de renforcer la cohésion sociale, a entraîné une certaine rupture au sein de l’espace public et de la scène politique au Québec.
L’étude présentée ici visait à interroger l’existence d’une éventuelle dissension au sein du mouvement souverainiste au Québec dans la réception et la perception d’un tel projet, mais également de réfléchir aux éléments sur lesquels pouvait se baser cette rupture. Si le projet souverainiste est traversé par un ensemble de forces et de courants, il reste que l’objectif des différents partis le constituant s’oriente minimalement vers la reconnaissance de la souveraineté de l’État québécois et, ultimement, vers l’indépendance du Québec vis-à-vis du reste du Canada. C’est cette idée d’un but commun qui nous a menée à nous questionner sur le discours de six personnalités issues du mouvement souverainiste au Québec, à savoir Lucien Bouchard, Françoise David, Gilles Duceppe, Bernard Landry, Maria Mourani et Jacques Parizeau. Bien que leurs points de vue concernant les contours de l’identité nationale québécoise ne soient pas exactement les mêmes, plusieurs idées leur sont communes, comme la reconnaissance de la diversité, la laïcité de l’État et la nécessité de baliser les demandes d’accommodements religieux dans une volonté d’égalité d’un point de vue civique entre les personnes d’origine canadienne-française et les individus issus de la diversité culturelle. Dès lors, s’il existe un besoin pour ces personnalités rattachées au mouvement souverainiste de débattre de la question de la place et de la prise en compte de la diversité culturelle et religieuse au sein de la société québécoise, ce besoin mérite d’être soutenu par un projet plus nuancé que ce qui a été proposé par le ministre Drainville.
Notre réflexion vise à articuler la communication interculturelle aux politiques publiques. Pour ce faire, nous avons tenté de mettre en évidence le fait que les textes de loi et les propositions d’encadrement de la société peuvent avoir des effets à la fois sur la population d’accueil et sur les personnes issues de la diversité culturelle et cultuelle. Les discours politiques et médiatiques sont porteurs d’un certain nombre de représentations qui ont pour conséquence de structurer le champ social et de construire les limites de la citoyenneté et du peuple (Hall, 1997; Halualani et al., 2009). Dès lors, les choix faits par les États et les institutions ont un rôle sur l’inclusion et l’insertion des individus et sur leurs interactions au sein du monde social. Dans le cas des débats ayant entouré le projet de Charte des valeurs, l’analyse du traitement de la position de six souverainistes dans les médias permet de rendre visible son influence sociale, notamment à travers un certain rejet de la figure de l’Autre qui peut s’apparenter à celui ayant lieu durant la « crise » des accommodements raisonnables (Chahid, 2011; Potvin, 2011). La recherche présentée amorce donc une réflexion à poursuivre sur les liens entre culture, politique et constitution des marges, au sens où « toute volonté de définir la culture [dans un cadre de communication internationale et interculturelle] ne peut oublier les questions politiques telles que : quels intérêts sont servis par une telle définition? Quelles définitions sont laissées de côté ou ne sont pas imaginées[4]? » (Collier et al., 2001, p. 229.)
Appendices
Notes
-
[1]
Traduction libre de : « According to Mary Jane Collier (2002), a critical turn requires that scholars “understand […] how intercultural communication relations are constrained and enabled by institutions, ideologies, and histories” ».
-
[2]
Les personnalités sont présentées par ordre alphabétique. Les rôles indiqués ici sont ceux des six personnalités en 2013 lors des débats portant sur la Charte.
-
[3]
Notons ici que nous avons conscience des différences méthodologiques entre le discours direct et le discours rapporté. Il nous apparaissait cependant central d’inclure le discours de Françoise David et, par là même, la position de Québec solidaire par rapport à ce débat. Effectivement, QS exprime un point de vue spécifique dans le débat souverainiste et constitue une force politique montante. En ce sens, notre analyse s’est limitée aux citations directes de la co-porte-parole. Nous avons donc conscience que les citations directes choisies par les journalistes peuvent présenter un point de vue partiel. Notons par ailleurs que nous avons consulté, lorsque cela était possible, les transcriptions des points de presse de Françoise David à l’Assemblée nationale afin de recouper les informations présentes dans les articles composant notre corpus.
-
[4]
Traduction libre de : « Any act of defining culture should not forget political questions such as the following. Whose interest is served by this definition? What definitions are left out or unimagined? »
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