Le livre de Raphaëlle Moine, Les genres du cinéma, a été publié en 2002, aux éditions Nathan, dans une collection fameuse dirigée par Michel Marie — aujourd’hui reprise par Armand Colin — qui s’adresse à un public d’étudiants, d’enseignants et de chercheurs qui souhaitent pouvoir, en 200 pages, faire le tour d’une grande question relative aux études cinématographiques. C’est dire que la perspective de l’auteur doit concilier les exigences de rigueur et de précision de la recherche universitaire et celles, plus didactiques, d’un type d’ouvrage où dominent la clarté et la lisibilité. C’est une gageure que Raphaëlle Moine soutient remarquablement. Outre une introduction et une conclusion resserrées, l’ouvrage comporte six chapitres équilibrés et logiquement distribués, qui permettent au lecteur de prendre progressivement conscience des problématiques inhérentes à la question des genres. Une bibliographie indicative raisonnée, française et anglo-saxonne (environ 160 ouvrages et articles y sont cités), permet de faire le point sur les questions théoriques liées à la problématique du genre au cinéma en général, comme à celle des genres cinématographiques en particulier. L’index des films cités, fort commode, propose plus de 350 entrées et concerne environ, pour moitié, la filmographie étasunienne, la filmographie française et européenne représentant l’essentiel de la seconde moitié, à laquelle il faut ajouter quelques films asiatiques. Un index des genres, comportant une centaine de catégories, permet en outre d’obtenir des définitions immédiates et des exemples précis. Dans le premier chapitre, intitulé « Dans la jungle des genres », tout en démontrant que l’identification générique d’un film est une opération intellectuelle plus complexe et plus intéressante qu’il n’y paraît de prime abord, l’auteure passe en revue les différentes classifications pour en montrer la grande diversité, tant sur le plan des contenus qu’en ce qui concerne l’usage qui est fait de cette nomenclature. Elle montre que ces classements procèdent d’un « jeu d’étiquetage » où peuvent se lire différents rapports au cinéma, et que les typologies mêlent toutes sortes de critères d’appréciation qu’elle s’emploie à préciser et à redéfinir. La question du mélange des genres et celle de leur subordination à l’histoire, deux points trop souvent occultés par les taxinomies traditionnelles et que Raphaëlle Moine étudie plus loin dans son ouvrage, referment ce chapitre qui aura permis au lecteur de commencer à saisir les principaux enjeux de la question. Le deuxième chapitre, « À la recherche des règles du genre », présente un panorama fort complet des différentes théories structurales et textuelles qui, depuis les travaux des formalistes russes, ont su proposer un appareil conceptuel permettant de penser les genres du cinéma. L’approche formelle est abordée en premier lieu et les théories qui la constituent sont clairement exemplifiées, qu’il s’agisse de celles de Pietrovski ou de Tom Gunning, qui s’intéressent tous deux aux genres théoriques, notion que l’analyse des travaux de Tzvetan Todorov, abordés ensuite, permet de discerner. Les approches sémiologique et intertextuelle (Genette, Metz, Vernet) constituent le deuxième champ d’investigation de ce chapitre, tandis que les théories structurales (Lévi-Strauss, Carroll, Kitses) sont présentées en troisième lieu. Dans ce chapitre, et dans tous ceux qui vont suivre, on peut apprécier la grande honnêteté intellectuelle des analyses, ainsi que l’objectivité des synthèses dans lesquelles les forces autant que les faiblesses des travaux de chaque théoricien sont relevées. Les travaux de Rick Altman, qui ouvrent sur une perspective sémantico-syntaxique permettant le plus souvent de dépasser les limites dans lesquelles sont enfermés ceux précédemment analysés, sont quant à eux abordés dans les dernières pages du chapitre. Pendant logique du précédent, le troisième chapitre, « À quoi servent les genres ? », s’intéresse aux différentes propositions de définitions fonctionnelles des …
Raphaëlle Moine, Les genres du cinéma, Paris, Nathan, 2002, 192 p.[Record]
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Alain Kleinberger
Université Paris X