Comptes rendus bibliographiques

BEAUDET Gérard (2021) Banlieue, dites-vous ? La suburbanisation dans la région métropolitaine de Montréal. Presses de l’Université Laval, 490 p. (ISBN 978-2-7637-5433-8)[Record]

  • Claude Marois

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  • Claude Marois
    Université de Montréal

Sujet sensible s’il en est, la banlieue est couramment caricaturée et accablée de tous les maux. On la décrit souvent comme socialement homogène, un territoire-dortoir où rien ne se passe. Pourtant ? Voilà qu’un ouvrage sur la banlieue, publié par Gérard Beaudet, remet en question ces images reçues et aborde le thème dans toute sa complexité. L’auteur nous invite à mieux comprendre l’évolution de la banlieue dans le contexte nord-américain et ses particularités dans la région métropolitaine de Montréal. Cet ouvrage de plus de 475 pages est organisé autour de 7 chapitres. En introduction, Beaudet rappelle les transformations de la banlieue de l’après-guerre modelée par une périurbanisation et alimentée par une croissance démographique et migratoire. Cette attractivité des aires métropolitaines appelle une remise en question des rapports aux territoires non métropolitains à cause de facteurs tels que la délocalisation relative des activités économiques et des emplois au profit des espaces suburbains, de l’autonomie grandissante des banlieues et de leur poids démographique et politique grandissant à l’échelle métropolitaine. Tout cela nous oblige à revoir la notion de centralité. Le premier chapitre retrace l’évolution de la banlieue américaine, caractérisée par un quartier résidentiel de maisons unifamiliales érigées au coeur de parcelles d’assez grandes dimensions (p. 21). À cette forme urbaine reproduite à grande échelle sur tout le territoire américain se greffent d’autres fonctions, notamment le commerce, les services, l’industrie et les infrastructures essentielles qui l’accompagnent. Dans sa phase post-suburbia, la banlieue américaine s’est carrément transformée non seulement physiquement, mais aussi socialement et économiquement. Certaines banlieues ont acquis une telle indépendance par rapport à la ville-centre qu’elles sont devenues des edge-cities décrites par Gareau. Au chapitre II, l’auteur décrit succinctement le contexte de l’émergence de la banlieue d’après-guerre dans la région métropolitaine de Montréal, ainsi que le rôle pionnier du chemin de fer et du tramway dans le processus de suburbanisation. Il explique que le développement du réseau de transport en dehors de la ville a permis à de nombreux ménages modestes de s’établir près des noyaux villageois en construisant leur propre maison. En effet, il souligne l’importance de l’autoconstruction tout autour de la région montréalaise, alimentée par une forte croissance démographique et une pénurie de logements. Le chapitre suivant relate l’époque pionnière de l’urbanisme québécois et les difficultés rencontrées dans une période de « laissez-faire ». À cette époque, la banlieue métropolitaine est produite en ordre dispersé, sans planification, où plusieurs municipalités se contentent d’accommoder les propriétaires fonciers et les promoteurs immobiliers (p. 109). On planifie alors en faisant du zonage ponctuel (spot zoning) laissant place à un développement anarchique. Avec la crise du pétrole, c’est la fin des Trente Glorieuses. Les conditions économiques obligent plusieurs villes et municipalités à revoir leurs pratiques de gestion territoriale et à explorer d’autres modèles de développement, comme le Smart Growth, les Transit Oriented Development (TOD) et le nouvel urbanisme (New Urbanism). Au Québec, s’ajoute l’adoption de nouvelles lois importantes qui obligeront les municipalités et les régions à se conformer à de nouvelles règles en matière d’aménagement. Ces pièces législatives sont, d’une part, la Loi sur l’aménagement et l’urbanisme, adoptée en 1980, et la naissance des municipalités régionales de comtés (MRC) et la Loi sur la protection des terres agricoles du Québec, de 1978. Dans le chapitre IV, Beaudet évoque les spécificités des banlieues montréalaises de l’après-guerre, soulignant que les banlieues québécoises ne sont pas un copier-coller des banlieues étatsuniennes. Au Québec, la banlieue serait le produit de petits entrepreneurs avec de nombreux petits chantiers (p. 142). L’auteur rappelle qu’après la guerre, de nouveaux acteurs importants apparaissent dans le marché du …