Thème 2 - Les défis théoriques et méthodologiques de la géographie

Réflexions théoriques sur l’organisation des niveaux géographiques [Record]

  • Steve Déry

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Pour régler un problème de développement, il faut agir à sa source. Cela n’a rien de particulièrement original en soi. Toutefois, en observant certains problèmes, comme celui des paysans vietnamiens plantant des caféiers, coincés par le yoyo des prix du marché mondial, il m’est rapidement apparu que la source, il fallait la chercher mieux, ou plutôt mieux se l’imaginer, mieux la situer, non pas à l’horizontal quelque part sur la carte du globe, mais plutôt à la verticale, c’est-à-dire en termes de niveaux géographiques. Or, à cet égard, les appels fusent de tous les horizons, scientifiques ou non : il y a un besoin urgent de mieux comprendre comment s’organisent les niveaux géographiques (De Koninck, 2003 ; Power, 2003 ; Glaser, 2004). Jusqu’à maintenant toutefois, ceux qui se sont attaqués théoriquement à cet objet d’étude en ont surtout examiné deux aspects. D’une part, on a exploré la manière d’appréhender plusieurs niveaux dans la même analyse, bref, comment passer, méthodologiquement, d’un niveau à l’autre. D’autre part, on a privilégié l’étude de la construction des niveaux géographiques. Il manque donc une proposition concernant l’organisation même des niveaux géographiques. Certes, il est assez facile de caractériser, de classer et de cataloguer les niveaux géographiques des systèmes emboîtés et hiérarchisés. Mais lorsqu’on considère deux systèmes indépendants, que doit-on observer pour les différencier au plan des niveaux géographiques ? Le nombre d’acteurs ? La quantité de liens qui les unissent ? Leur qualité ? L’étendue couverte par le système ? Les réflexions présentées ici s’inscrivent dans une démarche visant à répondre à ces questions, qui sont au coeur de nos recherches actuelles. Notre objectif général est de contribuer à mieux comprendre les rapporte entre les niveaux géographiques et donc, dans la même veine, de raffiner l’utilisation de cet outil pouvant nous aider à comprendre l’organisation de notre monde. Plus spécifiquement et surtout plus humblement, il vise à lancer quelques propositions théoriques pouvant éventuellement mener à la constitution d’une grille d’analyse géographique multiniveau. La réflexion sera menée en trois étapes. Dans un premier temps, nous récapitulerons les principaux travaux théoriques mobilisés pour encadrer l’analyse des niveaux géographiques ou des échelles d’analyse ; en deuxième lieu, nous formulerons quelques remarques en rapport avec la place de l’individu ou du groupe au sein des différents niveaux géographiques ; enfin, dans un troisième temps, l’analyse s’attardera à mieux comprendre comment s’effectue le passage d’un niveau à l’autre. En conclusion, un commentaire mettra en en relief quelques questions qui se posent à l’examen de ces propositions. Une revue de littérature exhaustive sur le sujet couvrirait littéralement plusieurs chapitres. Ce travail, nécessaire, est en cours, mais l’espace n’est pas disponible ici pour en rendre compte dans toute son extension. Quelques travaux clés sont examinés. Le dictionnaire Les mots de la géographie pose le problème en définissant l’échelle comme un « ensemble d’échelons permettant de changer progressivement de niveau », et en ajoutant que « géographes et géomètres emploient [ce terme dans] un sens spécifique, ce qui complique les choses » (Brunet et al., 1993 : 175). Sont confondus dans la pratique l’échelle-fraction, qui est le rapport entre une dimension dans la réalité et la représentation sur la carte ou sur le plan, et l’échelle-étendue, « indicateur de dimension de l’espace considéré, un classement dans les ordres de grandeur » (ibid.). Dans cette optique, il est tout à fait approprié de suivre ces indications et de n’utiliser le terme échelle que lorsqu’il est question de la relation entre la réalité et la carte et d’employer échelon ou niveau lorsqu’on parle des échelles d’observation …

Appendices