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C’est à un ouvrage traditionnel (à la couverture orange si caractéristique) dans le paysage des droits canadien et québécois des sociétés que nous consacrons la présente recension : La société par actions au Québec. Les aspects juridiques de Me Paul Martel. Les étudiants en droit qui se sont intéressés un tant soit peu aux sociétés par actions et les spécialistes de cette discipline (qu’ils soient enseignants ou praticiens) sont peu nombreux à ne l’avoir jamais feuilleté, voire, pire, à en ignorer l’existence… même si le titre a été changé en 2011 lors de sa 40e édition à la suite de l’entrée en vigueur au Québec de la Loi sur les sociétés par actions[1]. Force est de constater que cet ouvrage est un vade-mecum depuis sa première édition en 1971, dont Me Paul Martel offre en 2014 une mise à jour qui sera assurément précieuse pour ses différents utilisateurs, notamment les praticiens.
Alors que la rupture avec les temps anciens du droit québécois des sociétés a été consommée en 2011, cet ouvrage retrace depuis 2013 la réglementation, les décisions judiciaires et les bonnes pratiques portant sur les sociétés par actions. La présentation des mises à jour auxquelles se livre Me Paul Martel dépassant largement l’exercice d’une recension, nous nous contenterons ici de mettre en exergue des points saillants. À ce titre, quelles sont les nouveautés que nous pouvons relever ? En premier lieu, la gouvernance d’entreprise est incontestablement un thème fondamental du droit des sociétés qui ne cesse de connaître des évolutions au Canada et partout dans le monde. Me Paul Martel présente dans son ouvrage plusieurs éléments nouveaux en rapport avec la gouvernance parmi lesquels l’élection des administrateurs et la portée du vote des actionnaires en matière de rémunération des administrateurs et de la direction. Concernant l’élection des administrateurs, le terrain gagné par le vote majoritaire à la Bourse de Toronto (p. 21-14 et suiv.) et la consécration du vote annuel des administrateurs (p. 21-23) et de la publication du résultat de tels votes (p. 21-18) dans le guide des sociétés inscrites à la cotation de la Bourse de Toronto, ainsi que l’incertitude de la validité d’une date limite pour les actionnaires qui voudraient soumettre des candidatures à un poste d’administrateur (p. 21-16 et suiv.) sont autant de signes d’une démocratie actionnariale en marche[2]. Par ailleurs, le vote consultatif des actionnaires sur la rémunération des administrateurs et de la direction (say on pay) est également abordé pour souligner son avancée (p. 25-45 et suiv.)[3], l’ouvrage mettant plus globalement en lumière les réflexions entourant l’assemblée générale et le droit de vote[4]. En deuxième lieu, en rapport avec la gouvernance d’entreprise, la responsabilité des administrateurs de sociétés (qu’elle soit sur le fondement du droit des sociétés, du droit civil, du droit fiscal ou encore du droit de l’environnement[5]) fait l’objet d’une grande attention de Me Paul Martel. Nombre d’illustrations jurisprudentielles de la dernière version de l’ouvrage portent sur le recours oblique et le recours en oppression qui s’avèrent si importants. À s’en tenir à une actualité récente qui a donné lieu à d’abondants commentaires[6], la Loi sur la qualité de l’environnement[7] a été modifiée en 2011 pour hausser la responsabilité pénale des administrateurs[8]. En vertu de l’article 115.40, et comme le relève Me Paul Martel, le fardeau de la preuve a été renversé par rapport à la loi antérieure, et c’est dorénavant à l’administrateur de se défendre en prouvant sa diligence raisonnable (p. 24-72 et suiv.)[9]. En troisième et dernier lieu, ce sont bien d’autres thématiques qui sont abordées dans ce qui fait leur actualité : l’administrateur de facto, la règle de l’appréciation commerciale, le voile corporatif, les fusions et les acquisitions, les mesures défensives contre une offre publique d’achat (OPA)…
En dépit de la quantité impressionnante d’informations qu’il contient (illustrée par un nombre de pages qui ne cesse de croître au fil du temps[10]) et des outils pertinents proposés (nous pensons ici aux tableaux comparatifs des différentes lois aux pages 3-34 et suiv.), il n’en demeure pas moins, à nos yeux, que ce livre est porteur, dans sa forme actuelle, de ses propres limites. Ainsi, la (trop ?) grande diversité des thèmes abordés, la mise en parallèle fréquente des solutions fédérales et provinciales, la litanie des références jurisprudentielles, la longueur de certaines notes de bas de page (dont certaines occupent parfois la quasi-entièreté d’une page) sont autant d’éléments susceptibles de rebuter ou de perdre le lecteur, notamment lorsque le public cible est constitué d’étudiants.
Appendices
Notes
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[1]
Loi sur les sociétés par actions, R.L.R.Q., c. S-31.1.
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[2]
Lisa M. Fairfax, Shareholder Democracy. A Primer on Shareholder Activism and Participation, Durham, Carolina Academic Press, 2011 ; Lisa M. Fairfax, « Shareholder Democracy on Trial : International Perspective on the Effectiveness of Increased Shareholder Power », (2008) 3 Virginia Law & Business Review 1 ; Donald. J. Smythe, « Shareholder Democracy and the Economic Purpose of the Corporation », (2006) 63 Wash. & Lee L. Rev. 1407 ; Usha Rodrigues, « The Seductive Comparison of Shareholder and Civic Democracy », (2006) 63 Wash. & Lee L. Rev. 1389 ; Colleen A. Dunlavy, « From Citizens to Plutocrats : Nineteenth-century Shareholder Voting Rights and Theories of the Corporation », dans Kenneth Lipartito et David B. Sicilia (dir.), Constructing Corporate America : History, Politics, Culture, New York, Oxford University Press, 2004, p. 66 ; Yves Guyon, « La société anonyme, une démocratie parfaite ! », dans Propos impertinents de droit des affaires : mélanges en l’honneur de Christian Gavalda, Paris, Dalloz, 2001, p. 133. Plus ancien, voir : Camille Jauffret-Spinosi, « Les assemblées générales d’actionnaires dans les sociétés anonymes, réalité ou fiction ? (Étude comparative) », dans Études offertes à René Rodière, Paris, Dalloz, 1981, p. 125.
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[3]
Les choix normatifs du say on pay se révèlent très variables suivant les pays. Catégorie de sociétés, type de vote, éléments de rémunération visés, fréquence du vote, support de l’information, catégories de dirigeants et conséquences d’un vote négatif sont autant de sujets qui font l’objet d’une approche différente. Pour une présentation comparée des dispositifs, voir : Randall S. Thomas et Christoph Van der Elst, « The International Scope of Say on Pay », European Corporate Governance Institute, Law Working Paper no 227, 2013 ; Marisa Anne Pagnattaro et Stephanie Greene, « “Say on Pay” : The Movement to Reform Executive Compensation in the United States and European Union », (2011) 31 Northwestern Journal of International Law & Business 593 ; Jeremy Ryan Delman, « Structuring Say-on-Pay : A Comparative Look at Global Variations in Shareholder Voting on Executive Compensation », (2010) Columbia Business Law Review 583. Pour une critique globale, voir Julien Le Maux et Ivan Tchotourian, « Approche critique du Say on pay. Premières leçons d’une analyse substantielle sur les orientations contemporaines du droit des sociétés », (2013) 27 Revue internationale de droit économique 557.
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[4]
Autorités canadiennes en valeurs mobilières, « Examen de l’infrastructure du vote par procuration », Document de consultation 54-401, 15 août 2013 ; Autorités canadiennes en valeurs mobilières, « Projet de Règlement 62-105 sur les régimes de droits des porteurs. Projet d’Instruction générale relative au Règlement 62-105 sur les régimes de droits des porteurs. Projets de modifications corrélatives », Avis de consultation, 14 mars 2013 ; Autorités canadiennes en valeurs mobilières, « Perspectives de réglementation des agences de conseil en vote », Document de consultation 25-401, 21 juin 2012 ; RBC Dexia, « A Case for Change. Shareholder Voting Symposium Summary Report », 2011, [En ligne], [www.cscs.org/Resources/Documents/summit/Resources/ RBC%20Dexia%20Shareholder_voting_report%20FINAL.pdf] (22 juin 2014) ; Carol Hansell et autres, « The Quality of the Shareholder Vote in Canada », Davies Ward Phillips & Vineberg LLP, 2010.
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[5]
Pour plus de détails, voir Stéphane Rousseau, « La responsabilité civile et pénale des administrateurs : tableau synoptique », Chaire en gouvernance et droit des affaires, [En ligne], [papyrus.bib.umontreal.ca/xmlui/bitstream/handle/1866/6320/ Tableau.pdf;jsessionid=BD5A1F1253953CA7EF287A8F6798FC75 ?sequence=1] (18 juin 2014).
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[6]
Yvan Allaire, « Une loi qui fait fuir les administrateurs », Les Affaires, 10 janvier 2013, [En ligne], [www.lesaffaires.com/blogues/yvan-allaire/allaire---une-loi-qui-fait-fuir-les-administrateurs/553025] (18 juin 2014).
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[7]
Loi sur la qualité de l’environnement, R.L.R.Q., c. Q-2.
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[8]
Sur cette question, voir notamment : Jean-Christophe Biron, La responsabilité pénale des administrateurs et des dirigeants d’entreprise : l’infraction de pollution, essai de maîtrise, Québec, Faculté des études supérieures, Université Laval, 2010 ; Paule Halley et Ariane Gagnon-Rocque, « La sanction en droit pénal canadien de l’environnement : la loi et son application », (2009) 50 C. de D. 919 ; et pour un ouvrage incontournable sur la question : Paule Halley, Le droit pénal de l’environnement : l’interdiction de polluer, Cowansville, Éditions Yvon Blais, 2001.
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[9]
Christine Duchaine et Nicole Dubé, « Sanctions pénales, administratives ou ordonnances : en environnement, la diligence a bien meilleur goût ! », dans Service de la formation continue, Barreau du Québec, vol. 370, Développements récents en droit de l’environnement, Cowansville, Éditions Yvon Blais, 2013, p. 187.
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[10]
L’ouvrage compte 2 246 pages à l’heure actuelle.