Abstracts
Résumé
L’hostilité envers les « délits d’opinion » est un lieu commun du discours juridique français en matière de liberté d’expression. Une analyse des écrits doctrinaux montre que les auteurs, s’ils se dispensent en général d’une définition explicite, entendent désigner de la sorte les restrictions de la liberté d’expression qui définissent les propos visés essentiellement par leur signification, et indépendamment de leurs possibles conséquences.
L’interdiction des délits d’opinion constitue-t-elle une exigence juridique ou simplement un argument de philosophie politique ? Les régimes de la liberté d’expression en vigueur en Allemagne et aux États-Unis, beaucoup plus élaborés que le système français, permettent d’éclairer toutes les subtilités d’une telle exigence. Les délits d’opinion sont interdits, selon des modalités différentes, en Allemagne et aux États-Unis, mais pas en France. Ainsi, l’incrimination du négationnisme, si elle constitue un « délit d’opinion » dont il est possible de débattre du bien-fondé politique, ne pose pas à cet égard un problème de constitutionnalité en droit français.
Abstract
French legal scholars share a hostility toward « crimes of opinion » (délits d’opinion). They rarely define this concept, but one can establish that it designates the restrictions of freedom of speech that forbid the expression of a specific meaning, regardless of the possible consequences that expression might provoke.
Is it legally forbidden to edict such crimes of opinion, or is this prohibition only a philosophical claim ? A study of the German, American and French legal systems leads to various answers. In Germany and in the United States, crimes of opinions are forbidden, though in different ways. In France, however, there is no constitutional norm prohibiting the legislator from edicting a crime of opinion, such as the criminalization of Holocaust denial.