Abstracts
Résumé
Le Sommet de la Terre de Rio en 1992 a été l’occasion pour les États de poser les fondements des exigences du développement durable. Les modes d’exploitation des ressources naturelles et génétiques devaient désormais être revisités sous la consigne de la précaution, laquelle s’exprime en termes de contrainte environnementale. Malheureusement, cette contrainte, pilier des politiques du développement durable, n’a cessé de s’effriter depuis, malgré les modestes succès remportés par le multilatéralisme dans le contexte du Programme mondial de la biodiversité. Dans ce dernier, le secteur de la biosécurité est celui qui devait renforcer la contrainte en matière environnementale. Cependant, la procédure d’autorisation préalable en connaissance de cause, principal levier de la prévention du risque biotechnologique dans la mise en oeuvre du Protocole de Cartagena sur la biosécurité, peine à induire un effet contraignant dans le commerce international des organismes génétiquement modifiés (OGM). C’est le droit applicable de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) qui étouffe la portée internationale des quelques tentatives de consolidation des exigences contraignantes en matière de précaution. En effet, les succès enregistrés par l’Union européenne (UE), notamment à cause de son opinion publique favorable à la grande contrainte en matière de précaution, n’ont en réalité qu’une portée régionale. L’Organe de résolution des différends (ORD) de l’OMC a tourné en dérision les meilleurs arguments de l’UE en faveur d’une interprétation du principe de précaution synonyme du moratoire et d’une interdiction d’importer, notamment dans les affaires dites des viandes de boeuf aux hormones de croissance et des OGM. Toutefois, même si, sur la scène internationale, les tendances de l’interprétation du principe de précaution sont plutôt favorables à la libéralisation du commerce, il n’en demeure pas moins que l’UE recèle le potentiel de dynamiser la contrainte environnementale dans le contexte des exigences du développement durable. L’activité judiciaire et réglementaire au sein de l’UE semble fortement appuyer un tel constat. Celle-ci pourrait donc influer sur l’harmonisation espérée des méthodes d’évaluation, de gestion et de suivi des risques biotechnologiques au niveau international. D’ici là, il sera certainement possible de continuer à observer, sur la scène internationale, les tendances d’un principe de précaution aux allures commerciales, loin du moratoire mais en quête perpétuelle de contrainte dans ses interactions avec les règles du libéralisme.
Abstract
The 1992 Rio Earth Summit provided an opportunity for the international community to lay the foundations for the requirements of sustainable development. Former non-sustainable ways of exploiting natural and genetic resources now had to be revisited using the precautionary principle. Precaution was expressed in terms of environmental constraints, but this key component in sustainable development policies has since, unfortunately, been eroded despite a small number of victories gained through multilateralism under the world biodiversity program. Within the biodiversity program, the bio-safety sector was expected to lead to constraints in the environmental field. However, the Advance Informed Agreement (AIA), the main procedure used to combat bio-technological risks following the implementation of the Cartagena Protocol, has not been successful in introducing constraints in the international trade of GMOs. The law applicable to the World Trade Organization (WTO) has prevented any international attempt to consolidate precautionary constraints. For instance, EU achievements in implementing the precautionary principle in bio-safety have only had a regional effect, and mostly because public opinion backs strong constraints. The WTO Disputes Settlement Body (DSB) has defeated the EU’s strongest arguments for constraints, in the form of a moratorium and prohibition on imports, in particular in the so-called “hormone” and “GMO” cases. However, even though, at the international level, the precautionary principle tends to be interpreted in a way that supports free trade, the EU still has the potential to initiate a move towards stronger environmental constraints as a component in the requirements of sustainable development. Judicial and regulatory actions within the EU appear to support this observation, and the EU could have a strong influence over the expected harmonization of mechanisms to assess, manage and monitor biotechnology risks worldwide. In the meantime, we will also observe the international emergence of a commercially-based precautionary principle, a long way from a moratorium but continually seeking constraints in its interactions with free trade.