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Nous célébrions en 2008 le 400e anniversaire de la fondation de la ville de Québec par un Français parti d’Honfleur du nom de Samuel de Champlain. Le 3 juillet 1608, il établit, dans un endroit dont le nom signifie en langue algonquine « là où le fleuve se rétrécit », un établissement permanent nommé l’Habitation[1]. Le moment est donc bien choisi pour rappeler l’influence importante qu’a eue la civilisation française en Amérique du Nord et plus particulièrement sur le droit québécois.

Pendant ses 150 premières années, cette société francophone en terre d’Amérique, qui provient à l’époque du plus important pays européen en termes de population et d’économie, s’étendra dans un immense arc de cercle couvrant presque la moitié du continent, d’abord en l’Acadie, ensuite dans la vallée du Saint-Laurent, puis au pays des Illinois, dans la vallée du Mississippi et, finalement, en Grande-Louisiane jusqu’à La Nouvelle-Orléans et aux portes du golfe du Mexique. Si nous traitons ici de l’héritage juridique et judiciaire que nous a laissé la France, ce sera également sans oublier l’influence britannique qui a contribué à nous donner un système de justice hybride, à la fois bilingue et bijuridique. Ce double héritage, unique parmi les pays développés, doit être entretenu et faire l’objet de notre fierté.

1 Un pays aux visages multiples

L’essence même du Canada est dans la pluralité. Le Canada est fédéral, soit composé d’un gouvernement central, de dix gouvernements provinciaux et de trois gouvernements territoriaux.

Le Canada est bilingue, soit composé d’un gouvernement fédéral bilingue et de tribunaux fédéraux bilingues, la Cour suprême du Canada et la Cour fédérale. De plus, il comporte deux gouvernements provinciaux bilingues, soit le Nouveau-Brunswick et le Manitoba, et une province francophone, le Québec, où l’usage de l’anglais est autorisé devant les tribunaux et à l’Assemblée nationale. Finalement, plusieurs provinces anglophones, dont l’Ontario, offrent des services en français dans certaines régions.

Le Canada est bijuridique, en ce que le droit privé du Québec est codifié et inspiré du Code civil français, alors que le droit privé des autres provinces et territoires est le droit coutumier d’origine britannique, la common law. De plus, l’article 133 de la Loi constitutionnelle de 1867[2] exige que les lois soient adoptées, imprimées et publiées dans les deux langues officielles et l’article 18 de la Charte canadienne des droits et libertés[3] prévoit que les deux versions ont « également force de loi[4] ». La politique de rédaction des lois fédérales reflète ces exigences, puisqu’elle prévoit depuis 1978 leur corédaction dans chaque langue, plutôt que leur traduction.

Une nouvelle Politique sur le bijuridisme législatif datant de 1995 allait dans le même sens et affirmait :

[I]l est impératif que les quatre auditoires canadiens (les francophones civilistes, les francophones de common law, les anglophones civilistes et les anglophones de common law) à qui sont destinés les lois et les règlements fédéraux puissent, d’une part, lire ces textes dans la langue officielle de leur choix et, d’autre part, y retrouver une terminologie et une formulation qui soient respectueuses des concepts, notions et institutions propres au régime juridique (droit civil ou common law) en application dans leur province ou territoire[5].

Les exigences constitutionnelles en matière d’adoption bilingue ont récemment nécessité un effort considérable de traduction. En effet, 259 textes législatifs adoptés entre le 1er juillet 1867 et le 15 septembre 1988 ont été traduits et réédictés par l’effet de la Loi sur la réédiction de textes législatifs[6] parce qu’ils n’avaient pas tous été édictés et publiés dans les deux langues[7].

Le Canada est également un pays au profond héritage autochtone. Formant 3,8 p. 100 de la population canadienne, plus d’un million de membres des Premières Nations, d’Inuits et de Métis sont répartis dans plus de 650 communautés, certaines isolées et d’autres adjacentes aux grands centres urbains[8]. Cette part de la population, jeune et à forte croissance, représente également une source de notre droit.

En effet, ces nations adoptent leurs propres règlements en vertu de la Loi sur les Indiens, qui habilite les conseils de bande à le faire en diverses matières[9], ou en vertu de conseils coutumiers. Les Autochtones sont également titulaires de droits ancestraux et issus de traités protégés par notre constitution[10]. Les premiers résultent de la preuve de l’occupation ancestrale d’un certain territoire ou de la pratique ancestrale de certaines activités, et la Cour suprême a spécifiquement reconnu que la preuve de récits oraux était admissible sur le même pied d’égalité que les autres types de preuve, comme preuve de l’histoire et de l’organisation de ces sociétés[11]. Les seconds, qu’ils découlent de traités conclus au xixe siècle ou à notre époque, sont également sources de droit en tant qu’ils reflètent des « promesses solennelles » entre la Couronne et ces nations[12]. Au Québec, les meilleurs exemples de cette relation comme source de droit sont certainement les régimes environnementaux distincts qui s’appliquent à près de 70 p. 100 de la superficie de la province en vertu du chapitre 22 de la Convention de la Baie James et du Nord québécois et du chapitre 14 la Convention du Nord-Est québécois[13].

Finalement, le Canada est un pays d’immigration. Nous sommes tous des immigrants, venus en Amérique à différentes dates : les Autochtones d’abord (il y a 10 000 ans), les Français (il y a 400 ans), les Anglais (il y a 250 ans), et ensuite des immigrants de tous les pays du monde depuis plus de 100 ans. Les démographes prédisent que, pour combler les pénuries de main-d’oeuvre à venir, nous devrons accueillir au Canada 350 000 nouveaux citoyens par année au cours des prochaines décennies. Il en résulte une société très diversifiée sur le plan ethnique, religieux, linguistique et culturel, où les différentes communautés s’intègrent de façon généralement harmonieuse en vertu des valeurs fondamentales contenues dans la Charte canadienne des droits et libertés[14].

L’apprentissage d’une telle diversité n’est pas chose facile. Le rapport Bouchard-Taylor insiste sur l’éducation des employés de l’État comme levier pour prévenir au cas par cas les violations de libertés fondamentales protégées par nos chartes. Sa recommandation B3 se lit comme suit :

En conformité avec l’objectif de déjudiciarisation du traitement des demandes d’accommodement, que l’État favorise la responsabilisation des acteurs ou intervenants des milieux institutionnels en s’assurant qu’ils ont reçu une formation adéquate. Par exemple, modifier le programme de formation des futurs enseignants pour y ajouter un apprentissage des questions interculturelles, et organiser des sessions spécialisées à l’intention du personnel en exercice[15].

Même si le rapport Bouchard-Taylor a été préparé sur fond de controverse, les Québécois sont prêts à ce que les tribunaux reconnaissent cette diversité. Ainsi, 60 p. 100 d’entre eux pensent que les juges devraient tenir compte des particularités des communautés culturelles dans leur jugement. Cette proportion monte à 72 p. 100 si on considère seulement les réponses des immigrants provenant de pays non occidentaux[16]. L’immigration touche directement la magistrature, et c’est pourquoi le professeur Noreau recommande que les juges considèrent leur travail comme mécanisme de socialisation et d’intégration sociale, et déploient des efforts pour favoriser l’adhésion des justiciables à leurs décisions[17].

Si aujourd’hui nous avons un Canada fédéral, bilingue, bijuridique, multiculturel et comportant un important héritage autochtone, c’est le résultat de notre double passé colonial, mais aussi de notre histoire comme pays indépendant depuis 1867.

2 Le Régime français : un passage bref mais marquant

Le personnage de Samuel de Champlain imprègne les débuts de la colonisation française. Le mystère entoure son personnage : certains le disent fils naturel d’Henri IV et douzième de ses bâtards royaux, comme on les appelait à l’époque. Le navigateur était probablement aussi un protestant converti au catholicisme, à la même époque que son présumé père naturel. Son implication dans les premiers efforts d’établissement est marquée.

Jean-François de La Rocque, sieur de Roberval, converti au protestantisme, tenta en 1542 de poursuivre l’établissement commencé par Jacques Cartier à Cap-Rouge, près de Québec, avec 200 hommes. Après moins d’un an et une tentative d’exploration vers Hochelaga, actuel site de Montréal, l’établissement est abandonné[18].

En 1600, Pierre Chauvin de Tonnetuit tente de fonder un établissement permanent à Tadoussac. Ce nom signifie en langue innue « les mamelles », et est inspiré de la forme des collines avoisinantes. L’établissement n’est pas un succès avant l’intervention de Champlain en 1603, année où il signe un traité avec les Naskapis et les Innus[19]. Peu après, il assiste Pierre Du Gua de Monts, protestant de la région de La Rochelle, dans la fondation de Port-Royal dans l’actuelle Nouvelle-Écosse en 1605. La colonie sera détruite en 1613 par le pirate anglais Samuel Argall et le site d’une colonie écossaise en 1629, dirigée par sir William Alexander. Le traité de Saint-Germain-en-Laye rend le territoire aux Français en 1632, mais il repassera aux Anglais en 1654. La population de Port-Royal, premier établissement colonial durable, avoisinait alors les 200 âmes[20].

Trois ans après la fondation de Port-Royal, Henri IV, après sa conversion au catholicisme, charge Champlain de fonder l’Habitation en 1608 sur le site du village iroquois de Stadacona. Le nom actuel de la ville, Québec, signifie « rétrécissement de la rivière » en langue algonquine. La ville est capturée en 1629 et également rendue aux Français par le traité de Saint-Germain-en-Laye, avant d’être conquise en 1759. Elle compte alors 8 000 habitants[21].

Contrairement à l’Angleterre qui adoptera une politique coloniale de peuplement fondée sur l’agriculture, la France crée des routes commerciales parsemées de forteresses et de garnisons entre ces villes, reposant sur des alliances sans cesse renouvelées avec les nations autochtones. Les Français nouent des alliances avec plus de 30 Premières Nations, depuis les Micmacs sur la côte Atlantique jusqu’aux Atacapas, près de l’actuelle Nouvelle-Orléans. Mentionnons par exemple la Grande Paix de Montréal, signée en 1701 et venant clore près d’un siècle de conflit entre, d’une part, Français, Hurons et Innus, et, de l’autre, Mohawks et Anglais. Au total, 30 nations autochtones envoient quelque 1 300 délégués rencontrer le gouverneur Louis-Hector de Callière de Montréal pour consolider la paix et s’engagent à rester neutres en cas de conflit entre l’Angleterre et la France[22]. Plusieurs historiens ont démontré que les politiques coloniales de ces deux empires devaient, un jour ou l’autre, entrer en conflit. C’est ce qui se produisit, le 13 septembre 1759, par la défaite, lors de la bataille des plaines d’Abraham, subie par le marquis de Montcalm et la Conquête de la Nouvelle-France. Ironiquement, le jeune général anglais, James Wolfe, n’aura jamais eu conscience de sa victoire, étant également mort au combat, et des profondes transformations qu’elle allait emporter pour notre continent.

Le démantèlement de cet empire français d’Amérique peut être divisé en trois périodes, qui reflètent les guerres qui sévissaient en Europe. D’abord, la période de 1603 à 1713, qui sera conclue par le Traité d’Utrecht[23]. Ensuite, la période de 1713 à 1763, qui sera conclue par le Traité de Paris[24]. Et, dernière étape, la vente de la Grande-Louisiane aux États-Unis par Napoléon en 1803[25]. Comme on le verra, de la période coloniale française subsistent de nombreux legs, dont la Coutume de Paris et d’Orléans ainsi que les institutions de justice de l’époque.

3 Le Régime britannique

L’article 41 de l’Acte de capitulation de Montréal de 1760 indique dans ses articles que les Acadiens et les Canadiens de l’époque, ou « Francois », font les demandes suivantes :

Les Francois, Canadiens et Acadiens qui resteront dans la colonie, de quelqu’état et condition qu’ils soient, ne seront ni ne pourront être forcés à prendre les armes contre sa Majesté très Chrétienne [c’est ainsi qu’on appelle alors le roi de France] ni ses Alliés, directement ni indirectement, dans quelqu’occasion que ce soit ; le gouvernement Britannique ne pourra exiger d’eux qu’une exacte neutralité[26].

La réponse des généraux de l’époque, qui sera clarifiée avec l’Acte de Québec de 1774, est ambiguë et se lit comme suit : « Ils deviennent sujets du roi[27]. » L’article 42 des demandes de la capitulation de Montréal de 1760 est au même effet :

Les Francois et Canadiens continueront d’être gouvernés suivant la coutume de Paris, et les loix et usages établis pour ce pays ; et ils ne pourront être assujettis à d’autres impôts qu’à ceux qui étoient établis sous la domination Françoise.

Les Canadiens reçoivent cependant la même réponse : « Ils deviennent sujets du roi[28]. »

Après une période de flottement d’une quinzaine d’années, l’Acte de Québec de 1774, ou Acte qui règle plus solidement le Gouvernement de la Province de Québec dans l’Amérique Septentrionale, sanctionne le compromis intervenu avec les « Francois » et les Acadiens. L’Acte de Québec maintiendra le droit civil français pour la propriété et les droits civils, expression d’ailleurs que l’on retrouvera beaucoup plus tard dans la Loi constitutionnelle de 1867. Il garantira aussi la liberté de religion et retirera l’impossibilité pour les catholiques d’accéder à la fonction publique alors contenue dans le serment du Test[29].

La suite de l’histoire est connue, mais il importe de souligner l’importance de ces quinze années, à l’issue desquelles l’héritage juridique français devait être préservé pour l’avenir.

4 L’évolution des héritages juridiques dans une nouvelle puissance

L’Acte de Québec est un moment charnière pour la survivance du droit civil au Québec. Par ailleurs, la présence de la common law y est confirmée en droit public et en droit criminel. L’acte accusatoire remplace la procédure inquisitoire tant et si bien que nos règles de preuve et de procédure sont encore aujourd’hui en substance d’inspiration britannique. D’ailleurs, le texte même de l’Acte de Québec mentionne que les « Francois » et les Acadiens ont apprécié la douceur du droit criminel anglais, chose qui est peut-être vraie par comparaison avec le supplice de la roue qui était alors pratiqué. On y lit :

Et comme la clarté et la douceur des lois criminelles d’Angleterre, dont il résulte des bénéfices et avantages que les habitants ont sensiblement ressenti par une expérience de plus de neuf années, pendant lesquelles elles ont été uniformément administrées, il est, à ces causes, aussi Établi par la susdite autorité, Qu’elles continueront à être administrées, et qu’elles seront observées comme lois dans la dite province de Québec[30].

De plus, les tribunaux créés après la Conquête adoptent le modèle britannique où l’oralité joue un rôle prépondérant face à la procédure écrite, contrairement à la situation qui prévaut en Europe continentale aujourd’hui encore.

Au cours du xixe siècle, l’application de la Coutume de Paris et d’Orléans au Québec devint de plus en plus problématique puisqu’elle n’avait plus cours en France depuis l’adoption du Code civil des Français en 1804, appelé plus tard « Code Napoléon ». En effet, une coutume statique est de bien piètre utilité. Pour pallier ce problème, le Canada s’inspire alors à nouveau de la France et codifie son droit civil. À la veille de la création de la Puissance du Canada en 1866, l’Assemblée législative du Bas-Canada adopte le Code civil du Bas Canada. On peut ajouter qu’ici l’élève dépasse peut-être le maître, puisqu’en 1994 le gouvernement du Québec révisa entièrement son code pour adopter le Code civil du Québec[31], chose qui n’a pas encore été faite dans l’Hexagone.

L’apport français à notre droit civil nous a permis de construire un code complet, qui contient des principes exprimés en termes généraux et accessibles. Ces derniers peuvent alors être appliqués aux diverses situations factuelles par les tribunaux tout en assurant la sécurité et la stabilité judiciaire des rapports sociaux. La concision du Code civil français vaut la peine d’être citée ici en prenant l’article 1382 comme exemple :

Tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé, à le réparer.

Au Québec, les articles 1053 C.c.B.C. et 1457 C.c.Q. en sont l’héritage. N’oublions pas l’élégance du premier :

Toute personne capable de discerner le bien du mal est responsable du dommage causé par sa faute, soit par son fait, soit par imprudence, négligence ou inhabileté.

Notons que la culture du droit civil est également à l’origine de la codification de notre droit criminel en 1955 et que nos deux chartes des droits et libertés ont emprunté ce style juridique reposant sur l’expression de principes généraux.

Notre droit civil n’est pas que d’inspiration française. Il fait des emprunts importants à la common law, tels que la liberté de tester et la fiducie. Ajoutons à cela des emprunts au droit américain en matière d’injonction, un bilinguisme pragmatique et fonctionnel au choix de chaque partie, un poids plus grand du stare decisis qu’en droit français, mais moins grand qu’en common law classique, une grande liberté pour les juges de créer de nouvelles solutions en vertu de leurs pouvoirs inhérents et du poids moins lourd de la doctrine, et nous avons un système de justice souple et efficace, à la mode québécoise.

À l’antipode du principe général de la responsabilité extracontractuelle vieux de plus d’un siècle contenu à l’article 1457 du Code civil du Québec, nos collègues de common law sont encore à définir les différents « torts ». Le droit québécois commande aujourd’hui :

Toute personne a le devoir de respecter les règles de conduite qui, suivant les circonstances, les usages ou la loi, s’imposent à elle, de manière à ne pas causer de préjudice à autrui.

À l’inverse, il aura fallu la malencontreuse présence d’un escargot dans une bouteille de ginger beer pour commencer à définir un principe général de proximité qui sous-tend la responsabilité civile en common law dans Donoghue (or McAlister) v. Stevenson. Lord Atkin avait alors fameusement traité la question comme suit en 1932 :

The rule that you are to love your neighbour becomes in law, you must not injure your neighbour ; and the lawyer’s question, Who is my neighbour ? receives a restricted reply. You must take reasonable care to avoid acts or omissions which you can reasonably foresee would be likely to injure your neighbour. Who, then, in law is my neighbour ? The answer seems to be − persons who are so closely and directly affected by my act that I ought reasonably to have them in contemplation as being so affected when I am directing my mind to the acts or omissions which are called in question[32].

Conclusion

Cette évolution historique a accouché d’un droit canadien se déclinant aujourd’hui en quatre versions, en plus des diverses traditions juridiques autochtones : le droit civil québécois en français, le droit civil québécois en anglais, la common law canadienne et le droit commun du Nouveau-Brunswick. En effet, l’Université de Moncton a permis de développer ce dernier en français, le tout conférant au régime canadien une multiplicité unique au monde.

À nos ancêtres français, nous devons le maintien de la langue et de la culture françaises en Amérique. Nous devons également le développement d’une culture juridique comportant, notamment, un style de rédaction législative axé sur des principes et des critères généraux, une méthode de raisonnement déductive en posant un principe d’abord et en l’appliquant ensuite aux faits de l’espèce à décider, enfin, un code civil formant un tout cohérent, complet, organisé et logique.

À nos ancêtres britanniques, nous devons l’influence de la tradition de la common law, comportant notamment un style de rédaction législative détaillé, incluant souvent des définitions précises, une méthode de raisonnement inductif, qui permet l’examen de l’ensemble des précédents en vue de dégager des règles applicables dans un cas d’espèce, et des tribunaux ayant des pouvoirs inhérents qui leur permettent de créer des solutions nouvelles pour répondre aux besoins changeants de la société.

À l’heure du développement des institutions internationales et de la globalisation des marchés, ce système juridique unique et hybride nous confère des avantages compétitifs considérables que trop souvent nous n’utilisons pas à leur plein potentiel. D’autres tribunaux aux prises avec des problèmes semblables voudront peut-être s’en inspirer, que ce soit en Belgique, en Suisse, au Brésil ou en Inde. Il est de notre responsabilité de faire connaître les particularités et avantages d’un tel système et d’en faire la promotion ici comme en dehors de nos frontières.