Abstracts
Résumé
En dernier lieu, Michel Bock aborde un sujet encore peu étudié : la conception que se sont faite les nationalistes québécois des minorités francophones au lendemain des États généraux du Canada français jusqu’au second référendum sur la souveraineté du Québec (1970-1995). Les historiens présentent souvent la Révolution tranquille comme le moment au cours duquel l’ancienne conception « diasporique » de la « nation canadienne-française » se serait définitivement éteinte, renvoyant le Québec et les minorités francophones dos à dos. Pour vérifier cette assertion, il examine la place que ces minorités occupent dans la revue mensuelle L’Action nationale, l’un des principaux porte-étendard du mouvement nationaliste québécois. L’analyse de la représentation des Franco-Ontariens, des Acadiens et des autres composantes de l’Amérique française dans la conscience historique des nationalistes québécois donne des résultats parfois étonnants et montre que ces communautés ont continué, pendant toute la période à l’étude, de représenter un enjeu symbolique de première importance pour eux. Si les uns concevaient le Québec comme le foyer d’une nation transfrontalière chargé de responsabilités plus ou moins lourdes envers la « diaspora », les autres en viendraient, quoique beaucoup plus tardivement, à le concevoir comme une collectivité « neuve » ayant rompu avec la conscience historique du Canada français et « exculturé » les communautés francophones situées à l’extérieur de ses frontières. Ainsi, la représentation que l’on se faisait des groupes francophones minoritaires, tantôt « consubstantiels » au Québec, tantôt « étrangers », oscillait entre différents pôles traduisant l’existence d’un vif débat sur le type d’action politique et d’intégration nationale qu’il lui fallait privilégier.