Abstracts
Résumé
Depuis plusieurs années, la République Démocratique du Congo est le théâtre de grèves menées par les médecins du pays. Les revendications des grévistes en question sont essentiellement financières et statutaires, et visent à faire pression sur le gouvernement. Dans ce pays, comme c’est le cas presque partout dans le monde, les grèves médicales sont autorisées. Tout travailleur a le droit de dénoncer par la grève des conditions de travail jugées inacceptables. Mais les médecins sont-ils des travailleurs comme les autres? N’ont-ils pas des obligations morales particulières liées aux spécificités de leur profession? Pour éclairer ces questions, les auteurs de cet article proposent trois repères moraux essentiels généralisables à des situations de grèves médicales ailleurs dans le monde. Le premier porte sur la reconnaissance du droit de grève pour les médecins, y compris pour des motifs strictement financiers. On ne peut demander à des professionnels de santé d’exercer leur métier dans des conditions de travail inhumaines ou sans un salaire permettant de faire vivre leur famille. Le deuxième repère estime que l’on ne peut pas accepter que ce droit de grève s’exerce en sacrifiant les patients les plus fragiles et en niant ainsi l’essence même de la profession médicale. Un troisième repère vient complexifier la réflexion en rappelant que l’extrême délabrement du système de santé congolais rend impossible l’organisation d’un service minimum de qualité en cas de grève. Pour sortir de ces difficultés, nous proposons une alliance thérapeutique nationale entre les médecins et les citoyens pour replacer les patients au centre des préoccupations du système de santé.
Mots-clés :
- grève,
- médecins,
- éthique,
- droits humains,
- République Démocratique du Congo,
- alliance therapeutique
Abstract
For several years, the Democratic Republic of Congo has been the scene of strikes by the country’s doctors. The strikers’ demands are essentially financial and statutory and are intended to put pressure on the government. In this country, as is the case almost everywhere in the world, medical strikes are allowed. Every worker has the right to denounce by strike working conditions that are considered unacceptable. But are doctors just like any other workers? Do they not have particular moral obligations linked to the specificities of their profession? To shed light on these questions, the authors of this article propose three essential moral benchmarks that can be generalized to medical strike situations elsewhere in the world. The first concerns the recognition of the right to strike for doctors, including for strictly financial reasons. Health professionals cannot be asked to work in inhuman working conditions or without a salary to support their families. The second benchmark argues that it is unacceptable for this right to strike to be exercised if it sacrifices the most vulnerable patients and thus denies the very essence of the medical profession. A third benchmark complicates the reflection by reminding us that the extreme dilapidation of the Congolese health system makes it impossible to organise a minimum quality service in the event of a strike. To overcome these difficulties, we propose a national therapeutic alliance between doctors and citizens to put patients back at the centre of the health system’s concerns.
Keywords:
- strike,
- doctors,
- ethics,
- human rights,
- Democratic Republic of Congo,
- therapeutic alliance