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Félix Bouvier et Charles-Philippe Courtois (dir.), L’histoire nationale du Québec. Entre bon-ententisme et nationalisme, de 1832 à nos jours, Québec, Septentrion, 2021, 386 p.[Record]

  • Dominique Laperle

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  • Dominique Laperle
    Docteur en histoire (UQAM), Pensionnat du Saint-Nom-de-Marie

Le didacticien Félix Bouvier et l’historien Charles-Philippe Courtois proposent une incursion historique, historiographique et militante de l’enseignement de l’histoire au Québec. L’ouvrage se divise en trois parties et compte douze chapitres. Outre l’introduction et la conclusion, les deux directeurs sont responsables de cinq des douze chapitres, ce qui donne à la fois un ton et une structure homogène à leur opus. Cinq collaborateurs complètent les autres textes. Outre une préface anecdotique de Denis Vaugeois, on retrouve, dans chacun des chapitres, une bibliographie des ouvrages cités. Compte tenu de l’ampleur du sujet et du mélange des approches chronologiques et thématiques, on aurait aimé l’ajout d’un index des noms propres et des sujets. Bouvier et Courtois désirent approfondir les « différentes écoles de pensée “nationale” influençant l’enseignement-apprentissage de l’histoire » (p. 21) par le biais d’une étude exhaustive des manuels scolaires, des programmes et de différents documents gouvernementaux. D’emblée, le sous-titre de l’ouvrage et les explications des deux directeurs posent comme prémisse que l’histoire enseignée au Québec est passée à travers le prisme de deux postures chez les intellectuels, les historiens et les auteurs de manuels : d’un côté, celle du « bon-ententisme », qui cherche par tous les moyens à faire primer l’unité canadienne, à aplanir les différends avec la majorité anglophone et à éluder les points de frictions sur certains événements sensibles. Cela se fait volontairement au détriment de l’identité et de l’expérience historique vécue par la communauté francophone. De l’autre, la « nationaliste », qui valorise « la culture canadienne-française, ou plus tard québécoise, la défense et le progrès de l’épanouissement et de l’autonomie de cette nation » (p. 23). Selon Félix Bouvier et Charles-Philippe Courtois, on retrace la première posture dans le manuel de Joseph-François Perreault (1832) et la seconde dans l’Histoire du Canada de François-Xavier Garneau (1845). Chacune des deux attitudes trouvera ses fins et aboutissements au sein des universités Laval et de Montréal. L’École de Québec, qualifiée de « bon-ententiste » ou de « loyaliste », s’élèvera contre celle dite de Montréal, considérée comme nationaliste. Par la voix de la production historienne des membres des deux Écoles, mais aussi à travers les traces de leurs influences dans les manuels scolaires, la confrontation se poursuivra pendant plus de deux siècles. La première partie, « L’histoire nationale à l’école et les deux grandes sensibilités historiques avant la Révolution tranquille », offre à travers ses trois chapitres un survol chronologique (1830-1966) d’une large palette de manuels publiés et des principaux aspects enseignés. Le cadre méthodologique et théorique, expliqué par Alex Bureau, surprend par l’absence de références aux nombreuses thèses en histoire et en didactique sur le sujet dans sa bibliographie, tout comme par le peu d’informations sur la sélection des ouvrages et la méthode d’analyse. Ensuite, Courtois fait ressortir la prédominance du « bon-ententisme » dans la seconde moitié du XIXe siècle. Il expose bien la lente, mais constante réappropriation de l’histoire sous son angle nationaliste. À ce chapitre, l’influence de son principal héraut, Lionel Groulx, commence à se faire sentir, mais on notera, au passage, que cet auteur et d’autres n’abordent pas toujours les faits marquants dans une approche unilatéralement nationaliste. Par exemple, pour les rébellions de 1837 et de 1838, même si la cause peut apparaître juste, l’insurrection, quant à elle, est vertement condamnée (p. 100). Enfin, Courtois termine en comparant les positions et les influences de Lionel Groulx et de ses disciples avec celles du trio Maheu-Roy-Chapais de Québec. Dans les manuels publiés après la Deuxième Guerre mondiale, le groulxisme gagne en importance …

Appendices