Étant actuellement engagée à établir la première étape d’une cartographie transnationale du christianisme social au Québec en analysant la période s’échelonnant de 1967 à 1982 à partir des archives et d’histoires de vie d’actrices et d’acteurs du Réseau des politisés chrétiens, de L’Entraide missionnaire et de la revue Relations publiée par le Centre Justice et Foi depuis 1941, la mise en ligne par ce dernier de la plateforme Mémoire du christianisme social au Québec (mcsq.ca) a retenu mon attention. Devant le réel vide historiographique quant au rôle joué par les acteurs individuels et institutionnels du christianisme social, cette interface virtuelle représente un coffre à outils des plus stimulants pour qui s’intéresse à cette mouvance du christianisme québécois. Du point de vue de la recherche, il me semble que ce site pourrait stimuler et faciliter le travail de chercheurs en histoire religieuse et politique ainsi qu’en sociologie et que son intérêt est grand du point de vue pédagogique, notamment au premier cycle, compte tenu du caractère accessible des articles, mais aussi de leur qualité remarquable de vulgarisation scientifique. Le lancement du site Mémoire du christianisme social au Québec s’inscrit dans la volonté du Centre Justice et Foi (CJF) de mener, avec d’autres partenaires du christianisme social, une réflexion soutenue et exigeante sur l’avenir de ce dernier. Au cours des dernières années, le CJF s’est vu confier la mission de conserver et de mettre en valeur le patrimoine de quelques organisations de la mouvance chrétienne sociale au Québec, un courant de pensée et d’action visant à transformer la société à partir de principes chrétiens. C’est spécifiquement dans la foulée de la publication de l’encyclique Rerum Novarum (1891) par le pape Léon XIII, document inaugurant la doctrine sociale de l’Église catholique, que les catholiques sociaux se sont mobilisés selon diverses approches visant la transformation des sociétés occidentales marquées par l’avènement du capitalisme industriel. Dans le Québec de la première moitié du XXe siècle, les organisations de cette mouvance furent nombreuses et engagées dans diverses causes dont la défense des droits des travailleurs, l’amélioration des conditions sociosanitaires des populations laborieuses et des droits des femmes. Depuis 1960, le christianisme social québécois s’est radicalisé, sur le plan politique, suivant en cela la tendance générale de cette mouvance au sein de l’Église catholique romaine, en phase avec certains enseignements de Vatican II, puis du pape Paul VI (Populorum progressio). L’influence de l’Amérique latine et de la théologie de la libération a également largement contribué à ce processus de radicalisation au Québec. Ainsi, le CJF lançait, au début de décembre 2020, une interface virtuelle intitulée Mémoire du christianisme social au Québec (mcsq.ca) et réalisée de main de maître par Frédéric Barriault, historien de formation (maîtrise et scolarité de doctorat), chargé de projets au CJF, principal idéateur du site et rédacteur des articles qu’on y retrouve. Si l’objectif est de « […] documenter les traces historiques du christianisme social dans les mobilisations sociales des dernières décennies », nous pouvons affirmer haut et fort qu’il est atteint et même dépassé puisqu’il permet aussi d’ouvrir toutes sortes de pistes de recherche prometteuses pour qui s’intéresse un tant soit peu aux thématiques couvertes par le site, qui reste, devons-nous le mentionner, toujours en construction. Par exemple, dans la foulée de la sortie du film Les Fils de Manon Cousin sur l’engagement sociopolitique et communautaire des Frères de la Charité dans le quartier Pointe-Saint-Charles entre 1969 et 1973, notons l’ajout en août 2021 d’une fiche sur Ugo Benfante, Fils de la Charité et premier prêtre-ouvrier au Québec, sous l’onglet intitulé « Témoins ». …
Site Internet « Mémoire du christianisme social au Québec » : mcsq.ca[Record]
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Catherine Foisy
Département de sciences des religions, UQAM