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En analysant l’affaire Dora, cas de censure qui a secoué le milieu étudiant en 1960, je démontre dans cet article qu’à l’Université de Montréal, la lutte des étudiants pour la liberté d’expression était révélatrice de leur représentation des femmes et de leur validation – contrairement à ce que le récit émancipateur qu’ils tenaient pouvait laisser croire – des normes genrées et de la misogynie en vigueur dans ce milieu. Malgré les prétentions à l’universalité des leaders étudiants, censés représenter l’ensemble de la jeunesse pour en éclairer la marche, il s’agissait bien d’un « universel » masculin qui opérait à travers des discours et des pratiques qui valorisaient des outils (comme la politique étudiante) qui étaient largement inaccessibles aux étudiantes. Si le sexisme qui justifiait et renforçait ce confinement était toutefois contesté par certaines étudiantes, qui utilisaient le journal Quartier latin pour répondre à leurs confrères et exposer leurs préjugés, leurs répliques étaient généralement invalidées ou ridiculisées. Je cherche à comprendre le décalage entre un mouvement étudiant qui prônait l’émancipation des individus et une culture de campus sexiste qui s’imposait aux femmes sous diverses formes allant de la grivoiserie quotidienne et des moqueries sur les capacités intellectuelles à l’objectification sexuelle et aux menaces de féminicide.